2021 – Les coups de coeur de La Face B – Acte III

Si 2021 aura été une année presque aussi étrange que la précédente, elle aura vu malgré tout le retour à une certaine normalité. Surtout, elle aura été une année musicale très riche et foisonnante. La rédaction de La Face B a donc sélectionné ses albums favoris de l’année. Aujourd’hui, on vous parle des albums de Hey Djan, Arma Jackson, Parcels et Tedax Max.

Hey Djan – Hey Djan (Camille S)

“Bonne année” en arménien se dit “Shnorhavor Nor Tari”. Et c’est ce que l’on prédit au groupe Hey Djan. Impulsé par Adrien Soleiman, Hey Djan est composé d’Anaïs Aghayan, Djivan Abkarian, Adrian Edeline, Maxime Daoud, Arnaud Biscay. Ce sextet reprend des classiques de la musique arménienne, également connus et repris dans d’autres pays de la région, comme l’Iran. Pourtant, la cartographie musicale du groupe semble s’éloigner de la chanson traditionnelle, on retrouve des airs d’Orient comme d’Occident par la funk, le rock ou encore la pop.

Si leur premier titre sorti, Siretsi Yars Daran, évoque la douleur et la peine, le ton change avec leur Ep éponyme, sorti fin 2021. Hey Djan est un premier projet rempli de vie, d’amour et de gaieté. Zokanch, évoque avec légèreté une belle-mère un peu trop envahissante. Le rythme est à la fois dansant, collectif. Rien de plus logique lorsque l’on sait que cette chanson est souvent reprise lors de mariages. D’amour, il est beaucoup question. Avec le titre, Djeyrani Bes aussi connu sous le nom Noritz Karoun Yegav, le groupe évoque l’attente. Comme un printemps que l’on attend et qui jamais ne vient, une femme attend inlassablement que son amant la remarque. La chanson était à l’origine portée par un homme. Le fait de féminiser ce titre contraste. Il revient à redonner toute la force, le courage et la sensibilité, la fragilité, liés à cette interminable attente. Le rythme est d’ailleurs sous tension comme pour en intensifier sa gravité et son désespoir.

Mais la musique n’en reste pas pour le moins dansante et entraînante. On se laisse envoûter par les sons de duduk. Un véritable voyage vers la capitale Erevan, qui se concrétise avec le titre Yerevani Siroon Aghchig. Cette fois-ci il n’y a plus d’attente, ni de hasard, un couple se rencontre et se reconnaît au premier regard. Les paroles sont claires, et d’après une traduction approximative nous disent : “Belle Erévanaise, sourcils arqués, je sais avec certitude que tu es né juste pour moi…” Une fois encore, le rythme est sous tension. Cette fois-ci aucune gravité, les guitares aussi rapide qu’un cheval de course nous rappellent à un cœur battant, d’émotion et d’amour. Un esprit rock, presque punk, qui fait sens lorsque l’on sait que deux des membres sont en parallèle dans deux groupes de ce genre musical. Il y a la fin, comme une douceur, un instant orientalisant, qui nous fait chavirer le cœur. 

Arma Jackson – Idéal (Thibaut)

Cette année encore, le rap suisse a frappé fort avec plusieurs nouveaux projets de la part des têtes d’affiches Slimka, Di-Meh… Mais n’oublions le premier long-format d’Arma Jackson, Idéal.

Cet album prend le relai de l’EP Capsules, sorti en 2019, avec un son toujours plus ensoleillé et dansant. La voix lancinante du rappeur lausannois se prête à des prods trap, house, afro… A l’orée de sa carrière, Arma Jackson semble déjà avoir déployé un éventail musical très large.

Entre amour, paresse et rêves, Arma parvient à nous faire danser sur des textes très personnels, ce qui le rend d’autant plus attachant. Au détour de ce petit road-trip, on croise Di-Meh sur le morceau Strass et Tayc sur Distance, des rappeurs à la voix très reconnaissable qui se fondent magnifiquement bien dans le décor estival de l’album.

Idéal est un album de 2021 à ne pas louper, une bouffée d’air frais sous un soleil brûlant pour tous ceux qui détestent l’hiver mais adorent le blues.

Parcels – Day/Night (Martin)

Au sein de mon année 2021 s’inscrit une évidence. Autant, il m’a été difficile de choisir mon titre français de l’année, autant mon album de l’année n’a pas donné lieu à débat. Parcels, ses 5 Australiens et son groove que l’on pensait être une espèce disparue, ont accouché d’un deuxième album en forme de chef-d’œuvre.

Conceptuel autant qu’ambitieux et explorateur, difficile de trouver quoique ce soit à lui reprocher. Dans sa philosophie, il fait écho aux albums majeurs des grands groupes des années 60 et 70. Quelque chose d’un Dark side of the moon, d’un Who’s next ou d’un White Album… Et pourtant, on a le sentiment que ce double disque est encore loin d’être un aboutissement. La comète Parcels a sans doute trouvé son rythme de croisière mais elle est sans aucun doute encore loin de sa destination.

C’est que l’impression de facilité qui se dégage de ces garçons est telle qu’on les imagine pouvoir se tailler une place à part et véritablement marquer cette époque de leur empreinte. En faisant cette proposition cette année, ils ont montré leur capacité à aller toujours plus loin et à explorer des sentier plus introspectifs et ça leur va vraiment bien. Alors pour ce nouvel album, merci Parcels. Le rayon de soleil de cette année, assurément.

Tedax Max – Forme Olympique : Middle Season (Pierre)

2021 aura été le terrain de jeu de plusieurs rappeurs qui ont su saisir les bons formats pour développer et affiner leurs formules. Souvent à raison quand l’on voit la hausse d’auditeurs que cela leur à apporter. Un modèle d’expansion basé principalement sur la qualité contenue dans leurs propositions. Si plusieurs artistes ont adopté cette formule cette année, c’est bien Tedax Max et son second projet Forme Olympique : Middle Season qui n’ont pas quitté mes oreilles depuis sa sortie à la mi-juin de cette année.

La raison est simple, on a aussi le pont parfait entre un héritage rap qui puise dans l’essence même du mouvement, tout en s’adaptant aux codes actuels. Le tout est porté par une technique implacable et des références aiguisées appuyant un univers encore en construction. La dalle des débuts se fait sentir et rajoute encore un peu plus de charme à un projet qui déborde de charisme.Le lyonnais aura fait de 2021 un terrain d’entraînement avec trois projets de haute volée (Forme Olympique : Final Season venant de voir le jour, ndlr) annonçant une année 2022 sous les meilleurs auspices pour le rappeur.