Anaysa, vibrante et Désacœurdée

Découvrir la musique d’Anaysa, c’est découvrir un cœur en rage, un cœur qui pleure, un cœur en nage. Avec indéniablement quelque chose de viscéral dans l’écriture, la jeune auteure-compositrice et interprète nous livre avec ce second EP des rimes riches de ces expériences qui font grandir ou anéantissent. On y trouvera plus précisément des maux chantés avec une profonde sincérité, des lettres d’amour expédiées d’une voix franche. Le cri du cœur d’un cœur qui crie, désacœurdé.

Déjà dans son premier EP, Vivant, sorti au tout début de cette année, Anaysa nous racontait ces autres qu’elle fréquente et qui rythment son existence. Ami.e.s, amours, ses muses comme elle aime les appeler. Elle esquissait alors des portraits, quelques silhouettes dont les ombres projetées sur son propre reflet s’organisent en théâtre d’ombres délicat. L’artiste continue ici de se dévoiler doucement au fil des pistes, doucement mais franchement, sans fard. Dans Désacœurdé, Anaysa nous raconte des amours et des ruptures, avec en filigrane la myriade de sentiments qui traversent un esprit brisé.

Le disque se lance sur la Pop minimaliste, imparable et vibrante de Camille. Une chanson d’amour effervescente dans laquelle l’auteure dresse le tendre portrait de celle qui fait vibrer son cœur. On entre d’ores et déjà dans un univers fort et assumé, mit en exergue d’ailleurs par le clip qui accompagne ce titre. Arrive ensuite Sa guerre à elle. Un aurevoir qui sonne déjà comme un adieu. Quelques frissons apparaissent au doux son de cette guitare bouleversante, très vite rejointe par la voix tout aussi bouleversante d’Anaysa. L’artiste nous livre une chanson de séparation déchirante qui résonne comme le négatif du morceau précèdent et amorce le troisième titre de l’EP. Ainsi, Rupture nous traîne dans les méandres d’une rupture amoureuse sur une instru dépouillée et crépusculaire. Les mots frappent, de la colère se cache derrière la tristesse amère.

Jusqu’à ce que l’amour s’éteigne oscille ensuite entre l’espoir et la désillusion. Un titre aux contours néo-Soul qui redonne un peu de baume au cœur. Édimbourg marque une certaine résignation dans le développement de l’EP. C’est une ballade chancelante, délicate et poétique. Enfin, Mon Automne, ode à la saison des ciels immenses et des feuilles mortes, de cette odeur réconfortante après la pluie, prend la forme d’un poème bouleversant. Anaysa libère sa voix sur un sublime arpège. On ne peut s’empêcher de penser que derrière ce titre se cache l’acceptation, l’avant-dernière étape du deuil.

Reste alors la dernière étape de ce deuil amoureux, la reconstruction. Les plus optimistes pourraient alors se permettre de croire qu’en relançant l’album, et il y a de fortes chances que vous le fassiez, le titre d’ouverture Camille prenne cette place. L’esquisse d’un nouvel amour, avec ces papillons qui reprennent vie dans le ventre. Comme le dit si joliment Anaysa, « Tout fini par une rupture, tout commence par une rupture ». On peut se permettre de l’espérer…

On écoute cet EP comme on lit un poème. Les pistes se succèdent avec une belle cohérence, se complètent et forment un tout hautement émouvant. L’artiste écrit pour se libérer mais aussi pour se (re)trouver. On ressent pourtant dans cet EP un désir d’universalité, une main tendue à tout les cœurs brisés, abîmés, désaccordés. Il peut être une main tendue, partager ses peines pour mieux les surmonter.

Bien qu’elle ne cache pas ses influences, Anaysa a ce quelque chose qui fait que c’est bien Elle qu’on écoute, et personne d’autre. Sur le fond comme sur la forme. Le parti-pris des instrus minimalistes laisse une place de choix à cette voix singulière, grave à bien des égards. L’artiste s’autorise tout, avec sa voix tantôt frissonnante, tantôt audacieuse, elle livre des harmonies toutes en douceur, des passages plus rythmés entre Slam et Rap, des effets presque synthétiques parfois…

Avec deux EPs en trois mois, il est clair que la jeune artiste a des choses à dire. Du reste, il est indéniable qu’elle exprime tout ça avec son cœur et ses tripes. Peu à peu elle dessine les contours d’un univers à elle, celui d’Anaysa, un univers poétique, fougueux et inspirant. Il nous tarde donc de pouvoir en découvrir plus sur cette univers et d’entendre où tout cela a pu la mener. Tout commence par une rupture.

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