Le 31 mars dernier, la jeune rappeuse Brö a dévoilé son premier album nommé Grande. (Vous comprendrez donc le jeu de mots dans le titre…)
Entourée de ses musiciens, Brö révèle un côté aventureux et amoureux de la musique, en explorant toutes les sonorités imaginables. On vous en dit un peu plus dans cet article.
A 27 ans, Brö, de son prénom Elisa, n’a rien à envier aux dinosaures de la musique et sait écrire et composer avec son temps. La rappeuse impose son style en brouillant les pistes quant à son surnom qui lui vient des années lycée. Une identité ambiguë qu’elle cultive toujours dans sa musique, partagée entre rap incisif et mélodies accrocheuses que l’on rapproche de la pop. Un objectif ? Ne pas se laisser brider par les étiquettes que l’on peut coller sur chacun.e.
Un premier album remarqué
Son premier album se fait remarquer, avant même sa sortie. Forte d’une notoriété grandissante sur la scène rap française et francophone, Brö n’a pas manqué le coche et dévoile ce premier projet de grande ampleur pile au bon moment. Une tournée estivale s’annonce déjà en France et à l’international, puisque la rappeuse donnera deux concerts lors des FrancoFolies de Montréal en juin prochain. Le timing parfait, donc, pour une sortie d’album.
Une histoire à part entière chantée par Brö
“J’ai voulu tout faire”, A l’unité est le premier morceau de Grande et dévoile déjà les grands thèmes de l’album. Brö part d’un constat général sur sa vie avant de faire part du quotidien qui s’agite dans ses pensées. “Je suis grande, enfin. J’ai le temps pour tout mais je n’ai vraiment le temps pour rien.” A l’unité, c’est en fait l’expression imagée de l’ambivalence permanente dans les pensées d’une jeune femme évoluant dans les années 2020, entre prise de conscience de l’avenir et perte d’une innocence peut-être prématurée.
Impossible de passer à côté de T’étais pas là, morceau de l’album réalisé en featuring avec Ichon et dont on vous en parlait dans les clips de la semaine #174. Les deux artistes ont dévoilé la semaine dernière le clip de ce featuring à la croisée de leurs univers aussi uniques que complémentaires, comme le sont leurs voix dans ce morceau. T’étais pas là, c’est un peu une version poétique et romancée de l’expression “avec des si, on referait le monde” et c’est franchement bien écrit et interprété.
Nadège, c’est l’histoire d’un triangle amoureux qui commence dans le doute pour Brö et qui termine dans la peur que ce doute ne s’installe dans l’esprit de l’autre protagoniste, ce jeune pianiste de 20 ans qui aurait pu passer une nuit intense aux côtés de la rappeuse. Nadège s’immisce dans cette histoire et trouble les esprits des deux jeunes amants. Les tourments d’une triade floue et à la fois excitantes sont dépeints par Brö dans une grande délicatesse qui inspire même de la tendresse envers chaque protagoniste. Un morceau qui s’installe dans notre imaginaire comme le chapitre empli de péripéties de notre livre préféré.
Comme d’habitude, on ne va pas vous décrire chaque morceau de l’album car il faut bien un peu de découverte quand vous ouvrirez votre Spotify, c’est-à-dire juste après avoir lu cet article. L’album cache bien d’autres pépites, comme Bijou qui est une véritable ôde à la bienveillance, la chanson doudou par excellence. On n’oublie pas non plus de savourer les inspirations bien plus R’n’B des morceaux comme Qui me ressemble, en featuring avec Ehla. Le come-back du R’n’B fait du bien aux oreilles et à l’âme en ce printemps encore hésitant.
S’il y a un morceau qui se détache de cet album, il semblerait que ce soit Moderne féministe, qui défraie la chronique depuis sa sortie en décembre 2022. “J’ai cherché un sexe, on m’a dit pour plusieurs raisons tu sais le tien est le second”. Comment mieux résumer les idées implantées dans les esprits de chacun.e depuis notre plus jeune âge ? Comment renverser la tendance et apprendre à exprimer qui l’on est au fond de notre âme ? Brö montre encore une fois qu’elle est imprégnée par les réalités de notre époque et sait se servir de bien des causes pour faire vivre sa musique. Le texte de Moderne féministe est aussi incisif que réflexif et sous ce rap se glisse une mélodie simple où guitare et voix ne font presque qu’un.
Brö n’a peur de rien, ose tout. Des textes à la musicalité, la rappeuse s’affranchit définitivement de tous les codes imposés par le monde de la musique et, surtout, par le monde tout court. Ses textes sont aussi engagés qu’empreints de sensibilité et d’innocence, une douceur dont on profite dans ce monde de brutes. Les codes de la musique ? Brö n’en a que faire, faisons ce qui nous plaît, aussi longtemps que cela nous plaît ! Une recette qui fonctionne très bien pour l’artiste, comme pour Grande.
A noter que Brö sera de passage le 3 juin sur la scène des Paradis Artificiels de Lille, à ne pas manquer !