Tomasi et La Face B, c’est une belle histoire d’amour. On ne s’en cache pas et on l’affirme même haut et fort. Logique donc qu’on aille le retrouver au moment de la sortie de son nouveau projet : Adulescent Fluorescent. On a longuement discuté de son évolution, de son rapport à l’autre dans la vie et la musique et de rock communiste.
La Face B : Salut Greg ! Comment ça va ? Est-ce que tu es prêt à faire le pitre en interview ?
Tomasi : Ah, je ne l’attendais pas (rires). Ça va super bien. Je suis très excité de sortir ce disque, qui sort mercredi. Je suis hyper heureux. Ça fait quand même longtemps que je travaille dessus et c’est un vrai soulagement de pouvoir le sortir. J’ai vraiment hâte.
LFB : La dernière interview qu’on a faite, c’était il y a quatre ans, pour Somnambule. Dans une industrie où tout va beaucoup trop vite, tu as quand même pris le temps.
Tomasi : Ouais. J’ai eu la chance qu’il y ait eu un truc en plein milieu pendant deux ans, qui a fait… J’ai la flemme de parler du Covid en plus. C’est vrai qu’à la sortie de Somnambule, c’était en 2019. Le but, c’était d’enchaîner assez vite. J’ai commencé à bosser sur un disque. Je ne savais pas trop quelle forme ça allait prendre. En tout cas, j’avais travaillé des morceaux. Je commence à travailler avec Alexis Delong justement, qui a réalisé l’album. Ça a été assez bénéfique finalement de prendre tout ce temps. Du coup, je suis obligé de parler du Covid (rires).
En fait, l’idée, c’était d’embrayer. J’avais prévu une tournée qui devait accompagner Somnambule. On s’est retrouvés comme tout le monde, un peu désarmés je dirais. Ça a été l’occasion de prendre le temps de réfléchir à ce que je voulais faire vraiment, peut-être moins imiter des choses et plus essayer de représenter ce que je suis vraiment, me rapprocher de la chanson. De me trouver vraiment. Du coup, c’est un disque qu’on a fait trois fois. Il y a trois versions qui existent de chaque chanson pratiquement. Et encore, il y a dû y avoir 35 morceaux qui ont été faits pour ces huit titres qui sortent. Du coup, c’est vraiment un vrai bonheur d’arriver à la fin de ce processus de création.
LFB : Ce qu’il y a de marrant, c’est qu’avec Martin (Luminet) et Marc (Fils Cara), d’une manière complètement différente, j’ai l’impression que ce sont des sorties et des albums qui ont été vraiment modifiées par les évènements de vos vies.
Tomasi : Ouais, complètement. Je pense de manière très différente. Martin, c’est plus dans un truc où il y a eu des évènements vraiment dans sa vie personnelle qui ont fait que… Marc, il y a plus un truc où c’est un chemin de vie qui se dessinait et qui était déjà un peu là. Moi, je pense que je le vois plus comme un apprentissage d’une certaine manière. Ça a été un truc où j’ai toujours eu l’impression d’avoir des lacunes, de ne jamais être trop content et là, j’ai rincé Alexis jusqu’à ce qu’on soit vraiment fier du truc.
Ça a été aussi réfléchir à ce qui me faisait kiffer en fait. Je crois que j’ai commencé la musique dans un moment où j’écoutais énormément les Artic Monkeys, les Kooks, les BB Brunes. Il y avait vraiment cette idée aussi… Je vais reprendre une phrase qu’Alexis m’a dit : « le rap, c’est une musique mélancolique et capitaliste et le rock est une musique plutôt communiste et très festive ». Il y avait vraiment cette idée d’aller essayer de faire un disque un peu plus joyeux aussi, dans les thèmes, sans aller dans la blague comme j’ai pu le faire auparavant.
LFB : Je trouve que c’est aussi un disque où tu te caches beaucoup moins. Tu as énormément mis la pudeur de côté. Tu es moins sur un personnage finalement.
Tomasi : Ouais, c’est vrai que ça se rapproche beaucoup plus de Greg. Je ne sais pas en fait. Ce sont des questions qui n’ont plus trop de sens. Quand on commence, on prend un pseudonyme un peu comme ça. En plus, j’étais vraiment dans un personnage et machin. Mais en fait, à la fin, c’est moi qui l’habite. C’est vrai que je me suis beaucoup plus rapproché de moi.
LFB : Oui. Ne serait-ce qu’en retirant le peignoir, dans tes textes aussi, le fait de parler plus frontalement de ton accident, de faire des trucs qui font écho à ton existence à toi. Il y a quand même beaucoup de choses qui font qu’on est loin de Somnambule ou de Du sperme sous le peignoir, qui étaient clairement des trucs de provoc’. Du coup, on passe d’adolescent à adulescent.
Tomasi : C’était un peu ça. Du coup, la référence à la chanson d’Artic Monkeys. C’était faire un petit hommage à tout ça et aussi, essayer de dire un peu au revoir à cette énergie très adolescente que je pouvais avoir, pour essayer justement de devenir un adulte. Je crois que pour moi, ça veut justement dire se regarder en face et essayer d’être droit dans ses bottes. Je pense que quand tu te construis adolescent, il y a un peu un truc où tu essaies des choses, des personnalités. Tu as un truc où tu tâtonnes. Je crois que je suis arrivé à un moment de ma vie où je commence à beaucoup plus m’assumer en tant qu’homme, en tant que personne. Je sais beaucoup plus où sont mes limites, là où j’ai envie d’arriver, quel est mon potentiel aussi et se concentrer là-dessus.
LFB : Ce qu’il y a de cool, là où finalement ça ressemble plus à Greg que les autres projets, j’ai l’impression que c’est clairement un album de groupe plus qu’un album d’une individualité en fait.
Tomasi : Ça, c’était un truc très important pour moi. C’est venu assez naturellement en fait. A la base, on faisait le disque vraiment avec Alexis. On a beaucoup travaillé chez lui et beaucoup ici. Il y a eu ce moment, qui a été vraiment charnière dans la création, c’était milieu 2020 où il y a eu cette idée « venez on se casse, on prend tout le matériel qu’on peut trouver, on le fout dans une voiture mais jusqu’à ce qu’on ne puisse pratiquement plus rien fermer ». On est partis là-bas, j’ai proposé à tout ceux qui voulaient venir de passer.
Il y a eu ce truc où du coup, Hugo (Pillard) avait sa pièce tout au fond de la maison avec sa batterie, où il enregistrait de la batterie sur les prod’ qu’on faisait. Il y a vraiment eu un truc d’environnement de travail qui était assez chouette et surtout sincère parce que c’était que des gens très, très proches. Du coup, Ian (Caulfield) est venu. C’est là où on a fait le morceau Branleur. Leo Felix est passé aussi, il avait une ou deux guitares je crois, ou des trucs. Pi Ja Ma était là aussi et a posé un rap qui n’a malheureusement pas fini dans ce disque, qui était vraiment très, très drôle. Il a été pendant longtemps mais j’ai dû l’enlever.
LFB : Au-delà de ça, il y a Ian, Yoa, Hugo qui apparaît. Il y a Fils Cara aussi. Tu as vraiment cette idée que toi tu portes dans la vie aussi, de force collective.
Tomasi : C’est la chance d’être ami avec des gens dont j’admire le travail. Fils Cara, c’était un tournant dans ma vie. C’est un artiste que j’ai découvert et on s’est rencontrés deux-trois semaines après. On est devenus copains assez vite et je me suis dit que ma vie avait un peu changé. Avant, j’écoutais des groupes où je me demandais à quoi ils ressemblaient et tout. C’était un symbole assez fort. Ian pareil, c’était quelqu’un dont j’avais entendu parler. Je connaissais ses singles en anglais, j’aimais bien. C’est Hugo qui me l’a présenté. Yoa, il y avait un truc peut être plus évident mais à l’époque ça ne l’était pas.
Parce que Yoa, quand on avait ce morceau qui est sur le disque, je crois que c’est un de ses premiers vrais morceaux. Peut-être qu’on avait déjà fait un ou deux morceaux. D’ailleurs, ce n’est pas Yoa qui a écrit le refrain, c’est moi. A la base, c’était ma voix mais c’était nul (rires). Du coup, elle a juste chanté comme ça et ça a crée un truc qui prend une ampleur que je trouve assez fou. Ca a mis une autre dimension au titre. Il y a tous ces amis dont je suis fan… et il y a Hugo. (rires) Mais non, Hugo, c’est une évidence. On avait ce groupe avant et en plus, il a même deux feats sur le disque.
LFB : Hugo, c’est un peu ta conscience dans l’album j’ai l’impression.
Tomasi : Hugo, c’est un peu mon Orelsan.
LFB : Il y a le morceau où il te tire sur la gueule et il a le truc à la fin d’Adulescent Fluorescent où il dit « ta chanson est finie, arrête de nous casser les couilles ».
Tomasi : C’était l’idée aussi d’ouvrir un peu. A la base, le disque était vraiment un espace d’objet qui a été construit. Il y avait un peu tout qui se suivait. Il y avait beaucoup d’interludes. J’en avais mis un peu de toutes les sortes et tout. Au final, je trouvais ça assez rigolo que ça commence doucement et qu’il y en ait de plus en plus à la fin. Il y a aussi Nicolas Garrier, qui fait mes clips, qui lâche une phrase à la con juste avant Best Of. Il y avait vraiment beaucoup, beaucoup de ça et il y avait quelque chose de moins inclusif dans le fait de mettre beaucoup de petits clins d’œil de mes potes, que les gens ne pouvaient pas connaître. Ça a donc été un gros tri aussi de se recentrer sur les chansons.
LFB : Oui, il faut faire le tri, parce qu’il y a aussi beaucoup de clins d’œil à ta vie dans les textes, que les gens ne connaissent pas forcément. Du coup, tes potes et ta famille peuvent s’y retrouver mais pas les gens. Mais en même temps, c’est fait de telle manière, avec de l’humour, que ça passe. Ça donne un côté un peu fictionnel pour les gens qui ne te connaissent pas, qui aura peut-être un peu plus d’impact pour ton entourage.
Tomasi : C’est sûr. Je pense qu’on vit tous des trucs un peu similaires aussi. Évidemment, on a chacun nos vies et tout mais on peut se retrouver dans des choses très spécifiques finalement. L’idée, c’était aussi ça. De parler de choses spécifiques pour que ça puisse toucher.
LFB : Tout le monde n’a pas fini dans un port…
Tomasi : Non c’est vrai mais il y a plein de gens qui ont eu un accident de voiture. Justement, c’était marrant de parler de ça et de le prendre sous le trait de l’humour. C’est un des derniers morceaux qu’on a fait pour le disque. Je crois que c’est un de mes préférés. C’était un soir avec Hugo, on était là tous les deux et ça faisait longtemps qu’on n’avait pas fait vraiment de la musique ensemble, partis de rien, qu’on a pas taffé chacun dans notre coin. Comme pour Comme un ado. Les voix datent de 2017, on ne les jamais réenregistrées. C’était une chanson qui était prête déjà après la sortie de Somnambule. Voilà. Pour revenir à Mieux qu’avant, c’était aussi retrouver de l’immédiateté dans la création.
LFB : Ce qu’il y a de drôle, c’est que Greg prend le pas sur Tomasi, le personnage mais l’EP représente totalement le personnage de Tomasi dans le film. Une personne un peu magnétique qui ramène les autres à lui et qui créé du collectif.
Tomasi : Ouais. Je pense que quand je parlais du fait de s’assumer un peu plus en tant qu’adulte, c’est aussi connaître ses forces. Il y a un peu cette idée où je me suis rendu compte à un moment que j’aimais bien rassembler les gens, faire des soirées, des trucs. Aller créer des collaborations. Que ce soit une vraie passion, le fait d’être aussi dans la musique, il y a aussi un truc où ça peut vite devenir du business. Tu vois des gens qui viennent pour réseauter. Je déteste ce mot que je trouve très laid. Il y a un peu un truc comme ça où finalement, à la base je fais de la musique parce que je suis un peu un branleur et que j’adore ça. J’écoute énormément de musique, ça me passionne vraiment.
C’était aussi péter un coup, redescendre et se rappeler pourquoi on fait ça à la base. Je crois que c’est vraiment pour cette espèce de frisson qu’on pouvait avoir avec Hugo quand on était au lycée. On fait une prod’ et on a l’impression qu’on va devenir des stars et qu’on va changer le monde. Et au bout de deux jours, on sait que c’est faux. Mais il y a un truc enivrant là-dedans que j’ai toujours envie d’avoir comme sensation.
LFB : Finalement, tout que raconte l’EP, c’est ça, c’est l’histoire d’une personne qui devient adulte un peu malgré elle.
Tomasi : Ouais. C’est un peu ça. Je crois qu’on passe tous par là, pas le choix.
LFB : Est-ce que tu as peur de cette idée d’adulte et de ce cliché un peu qu’on lui donne.
Tomasi : Il y a quelque chose d’hyper rassurant dans le fait d’être adolescent. Tu as une espèce de conscience d’être éternellement jeune. Je crois que c’est vraiment ce constat. C’est pas du tout ce que j’ai voulu raconter mais c’est forcément sous-jacent parce que c’est ce que je vis. Je suis dans l’âge où je fais des soirées et le lendemain, c’est dur de refaire une soirée. Alors que j’avais toujours cette volonté de vivre à 1 000 à l’heure et de faire un milliard de choses, d’être partout à la fois et en fait, il y a un moment où tu peux moins le faire et ce n’est pas grave, il y a d’autres choses. Et au contraire, c’est peut-être souvent mieux.
LFB : Même si c’est en filigrane et que ça apparaît, c’est aussi un EP d’une personne qui a conscience de sa propre mort et qui l’a vue à un certain moment. Tu as peut-être agi en conséquence de ça.
Tomasi : Tu parles par rapport à l’accident ?
LFB : Oui, on en parle beaucoup en fait.
Tomasi : Alors c’est hyper rigolo mais c’est un truc qui m’a tétanisé après. Ce n’était pas l’accident mais c’était vraiment le fait que ça ne m’ait rien fait. Ça a été un truc qui m’a vraiment beaucoup plus bloqué que tout le reste. Il y a vraiment cette image de « tu frôles la mort, ça change ta vie, tu vas voir les choses autrement, ça peut s’arrêter en une seconde ». Vraiment, ça ne s’est tellement pas passé comme ça. Je ne l’ai tellement pas vécu comme ça. J’ai eu un truc où juste, je me suis réveillé le lendemain, j’étais exactement le même. C’est peut-être le fait de ne pas avoir été responsable, ce n’est pas moi qui conduisais. Mais vraiment, ça n’a absolument rien changé là-dedans.
Il y a une chanson qui devait être sur le disque à la base, qui s’appelait C’est fini. J’essayais de raconter cet accident et tout mais c’est vrai qu’il y avait vraiment zéro émotion. Ça ne m’avait vraiment rien fait. Ça a été le truc, ça a fini sur le disque sur une note très marrante. C’est une blague du coup. Je trouve ça beaucoup plus marrant de le faire comme ça, pour dédramatiser les drames.
LFB : On en parlait aussi tout à l’heure, je trouve qu’au niveau du son et de la manière dont tu l’as construit, c’est un album où tu as beaucoup fait évoluer ton son. Je trouve qu’il est beaucoup plus organique, plus brut que ce que tu avais pu faire sur Somnambule ou sur ce que tu avais fait avant.
Tomasi : Je pense que l’arrivée d’Alexis dans ma vie a vraiment changé la donne, parce que c’est un génie. Il y a eu ce truc où très facilement, mais aussi très bloquant parfois, je faisais mes prod’, j’étais en confiance là-dedans et quand on a commencé à travailler ensemble, je ne savais plus rien faire. Il allait tellement plus vite que moi. Il faisait tellement, il avait tellement des meilleures idées et tout ça. Ça a été un gros truc aussi de retrouver ma place là-dedans. Je pense que la plus grande qualité qu’il puisse avoir, c’est sa patience parce que vraiment, on a fait trois fois ce disque.
Au début, il y avait un truc électro, un peu comme ce que je faisais avant. Ça a été vraiment un chemin qui a été beaucoup plus humain que musical. Il a vraiment réussi à venir tirer des choses chez moi. Il ne l’a pas vraiment voulu en plus, je ne pense pas. Mais il est vraiment venu chercher des choses en moi que je ne savais pas qu’on pouvait faire en fait. Je ne savais pas que je pouvais faire ça. Je ne savais pas que c’était possible d’aller mélanger un truc qui me ressemblait avec du rock, avec d’autres choses.
LFB : Quand Phalanges est sorti par exemple, pour moi, c’était évident de te voir faire ce genre de choses mais comme tu dis, il y a un chemin qui est parcouru. Ça me rappelle un truc que Tim Dup m’avait dit : « Greg, il va falloir qu’il réalise un jour que ce n’est pas un rappeur mais que c’est un chanteur ».
Tomasi : Ça va hyper bien avec ce que je disais tout à l’heure, d’arrêter de jouer des rôles et d’essayer aussi d’être ce qu’on peut, plutôt que ce qu’on veut. C’est peut-être un peu déprimant dit comme ça mais il y a vraiment de ça. C’est surtout que c’est dur d’avoir conscience de soi-même je trouve. C’est dur d’avoir conscience de ce qe tu produis artistiquement et d’avoir vraiment un recul qui te permet de te voir à la troisième personne et de savoir comment les gens vont le prendre, comment…
Parce que forcément, en mettant les mains dedans, tu vois des choses que les autres ne voient pas. J’ai souvent, dans ma personnalité, une grande capacité à me concentrer sur des détails et croire que c’est un détail qui va faire tout le truc et que tout le monde va le voir. Peut-être que c’est une manière d’occulter aussi le grand projet.
LFB : J’ai l’impression que cet album, c’est vraiment un truc transitoire. Le fait d’avoir ramené tes potes, d’être sur des genres différents par moment, qui te permet de t’ouvrir vers quelque chose qui sera peut-être encore différent mais qui serait complètement toi pour le coup.
Tomasi : C’est vraiment ça et du coup, j’ai bien avancé sur la suite. C’est vraiment le constat que je fais là, au moment de sortir ce disque, il y a quelque chose qui ne va pas dans tous les morceaux que j’ai pu travailler, il manque mes potes pour l’instant.
LFB : Tu parlais des versions et tout. Il y a un morceau qui m’a marqué, c’est Best of parce que je l’ai connu sur tout un tas de versions. Une version beaucoup plus joyeuse notamment. Et là, le morceau qui est censé être drôle, a un côté hyper mélancolique qui est assez impressionnant je trouve.
Tomasi : C’était un moment assez génial aussi. C’était du coup le dernier jour de cette résidence qu’on a fait dans le Perche. On n’avait pas trop le temps de faire des trucs. On avait essayé de bosser Best of mais à chaque fois, ça parait dans un truc qui n’avait pas vraiment de personnalités. J’avais cette habitude de la jouer sur scène et qu’elle soit très énergique. Alexis m’a dit : « tu sais quoi ? il nous reste quatre heures et après on doit ranger, tu vas le faire en guitare/voix ». Je lui ai dit que je n’avais pas une telle version. Il m’a dit « on s’en bat les couilles, tu fais quatre accords, tu poses ta voix dessus et on va créer un truc à partir de ça ».
Ça a été un beau moment parce que du coup, ça s’est vraiment fini sur cette note et je crois que c’était déjà une première pierre de dire « ok, peut-être qu’il faut beaucoup plus de guitares dans ce disque » parce que ça me va mieux et que c’est beaucoup plus mon ADN en fait. Ça a été un truc vraiment simple, juste j’ai dit mon texte, j’ai viré un couplet et d’un coup, ça a pris un autre sens en fait, quelque chose d’assez désespéré, assez ridicule mais beau quand même, qui me touche en tout cas.
LFB : La prod’ ramène tout le côté un peu ridicule du texte.
Tomasi : C’est pathétique. C’est ça le mot que je cherchais.
LFB : C’est un peu les derniers oripeaux du personnage avec ce texte.
Tomasi : Peut-être ouais. C’est ça. C’est marrant parce qu’il est très second degré finalement ce texte mais il y a quelque chose de sincère dedans.
LFB : Il est second degré mais dans la façon dont il est mis sur l’album, tu as l’impression qu’il est premier degré.
Tomasi : Ouais, c’est ça. Et en même temps, vivement mon Best of (rires). Il y a quelque chose de très sincère là-dedans parce que c’est chiant la course à la gloire.
LFB : J’ai une question sur tes clips : d’où est venue l’idée de maltraiter cette pauvre guitare ?
Tomasi : Je crois qu’on va arriver au seizième clip qu’on fait avec Nicolas Garrier. Ce qui est quand même pas mal. Surtout que je crois que j’ai sorti treize morceaux (rires). On a fait beaucoup, beaucoup de choses ensemble. On est très, très fan du Saturday Night Live. Je crois que l’idée est venue comme ça. J’avais vu une vidéo dans le SNL de Phoebe Bridgers je crois, qui essaie de péter une guitare et qui n’y arrivait pas. J’ai trouvé ça trop marrant. Surtout que c’est un truc vraiment live et c’est vrai que c’est hyper dur de casser une guitare.
A la base, c’était juste pour le clip de Phalanges, on s’est dit, vas y à la fin je pète la guitare. Mais sauf qu’on n’a pas trop tilté si on allait y arriver ou pas. On a dit qu’au pire, c’était trop drôle. On n’a pas réussi du tout. Mais vraiment, pas du tout. La scène est ridicule. Je suis là à taper, il y a quinze personnes autour de moi et vraiment, c’est hyper pathétique. Du coup, j’avais fait ça et je montre le clip à ma petite sœur de sept ans et elle me dit « mais c’est trop bien ça, tu devrais le faire dans chaque clip ». Et je me suis dit que c’était une super idée.
Du coup, c’est vraiment cette idée qu’on continue et au fur et à mesure, elle prend de plus en plus chère et on n’arrive pas à la casser. Jusqu’à ce que dans le dernier, on a réussi à éclater le manche, en roulant dessus quand même. Mais vraiment, la vidéo est tellement drôle. Parce qu’en plus, je recule et je me prends le truc. C’était vraiment très marrant. Du coup, là, pour le prochain clip, on prépare un sacré truc.
LFB : La fin de la guitare.
Tomasi : La fin de la guitare ouais.
LFB : C’est quoi tes plans et tes envies avec cet EP ? Tu as quand même beaucoup de projets à côté, tu tournes beaucoup avec Yoa, tu bosses sur d’autres albums, sur d’autres projets.
Tomasi : Je crois que je fais quatre disques cette année. Ce qui est beaucoup. Vraiment, vraiment beaucoup. Mais en fait, ça me nourrit toujours et c’est hyper agréable justement de bosser sur plein de trucs. C’est un album aussi qui a failli ne pas voir le jour parce que la confiance en soi, ça fluctue. Et le fait justement de me retrouver à bosser avec Yoa depuis le début, qui est quelque chose qui est très fluide, que ça fonctionne, que ça me donne un métier d’une certaine manière, une raison de me lever, de visiter la France aussi, parce que c’est un peu ce qu’on fait.
C’est un truc où je me suis demandé si ça valait vraiment le coup d’aller défendre mon disque. J’ai vraiment eu cette réflexion. Ce qui est très drôle, c’est que je suis très bien entouré parce que systématiquement, quand je parlais de Yoa, j’ai toujours eu une petite phrase : « T’oublies pas Tomasi ». C’est très juste et je crois que je l’ai fait un peu, parce que c’est la vie et que c’est dur. Mais justement, ça a été une prise de conscience de me dire que j’avais trop envie de refaire des concerts. C’est cool de faire un morceau sur tous les concerts de Yoa mais ce n’est quand même pas la même chose d’aller faire vraiment son concert à soi. Là, c’est le but pour la suite, c’est surtout de finir tous les disques que j’ai commencés et après, aller vraiment défendre ce disque sur scène. Dès l’automne.
LFB : Est-ce que tu as des choses que tu as beaucoup aimé récemment ?
Tomasi : Normalement, je dis toujours un truc de mes potes mais là, qu’est-ce que j’ai bien aimé ? L’album de Fils Cara, l’album d’Hugo, l’EP de Ian qui arrive. Si en vrai. Attends, je vais regarder. Il y a des choses que j’ai détestées aussi. J’ai vu Hérédité hier, j’ai trouvé ça abominable. C’est un film d’horreur. J’ai bien aimé la mixtape de Willow STX. J’aime bien NOUS ETIONS UNE ARMEE et quand même, le dernier album de Zed Yun Pavarotti parce que vraiment, je n’écoute que ça.