Après plusieurs concerts remarqués, le groupe Ladaniva sort son premier album éponyme, empreint de libertés musicales et sociétales.
Quelques jours avant leur concert à la Cigale, La Face B a échangé avec Ladaniva. Une rencontre avec Jaklin Baghdasaryan, membre fondatrice. Elle évoque la sortie du premier album. Qui conservent des influences balkanes, caucasiennes et orientales, avec un parti pris féministe plus marqué. Un retour attendu pour un groupe venant de terminer une tournée internationale – entre l’Amérique du Nord et l’Arménie – avec une équipe renouvelée.

La Face B : Quels sont tes ressentis avec la sortie de ce premier album ?
Jaklin Baghdasaryan : C’est un peu frustrant d’avoir joué l’album avant sa sortie. Sur scène, les morceaux évoluent, mais c’est trop tard pour faire des réarrangements. Je suis exigeante par rapport cet album. Pas forcément parce que c’est le premier. Je le serais aussi pour le deuxième ou le quatrième.
LFB : Pourtant, quand on écoute Ladaniva, on a l’impression que vous êtes très libres !
J.B. : Oui, on est un peu à l’arrache ! dit-elle en rigolant. Dès qu’on fait quelque chose de trop travailler, ça ne nous ressemble pas. On avait fait faire des costumes qu’on voit dans le clip de Shakar. Par Oie Studio, qui a travaillé avec Deluxe. On ne les porte pas car je ne me sens pas à l’aise. Je me sens bien en mettant une robe pas repassée… Louis, c’est pire ! en souriant. On a surtout des exigences musicales. Je suis très exigeante par rapport à ma voix, mon interprétation.
L’inspirations vient de partout, elle est incontrôlable.
LFB : Dans le morceau Jako (étant le surnom de Jaklin), tu chantes : « je suis une fille libre ». Pourquoi ce choix ?
J. B. : Petite, ma famille me disait que j’étais un garçon. J’étais libre et je n’hésitais pas à me salir. En plus, comme je suis Arménienne, il faut se tenir d’une certaine façon. Ne pas parler en même temps que les garçons, croisez les jambes… Toutes ses restrictions ont fait grandir un désaccord de plus en plus grand. Il s’exprime dans cette chanson. Sans colère, je chante : « Maintenant je vais danser, prendre ma place et vous allez regarder ! » Je m’adresse surtout aux filles qui subissent aussi des remarques. Pas forcément arméniennes, mais comme je chante en arménien, elles s’identifient plus.
Il y a aussi Manoushak qui parle des filles emprisonnées dans leur mariage. Les gens désespérés qui ne peuvent pas exprimer leur douleur. « Manoushak » en arménien c’est une fleur violette. Au début, j’avais l’image de cette fleur bloquée dans les roches. La chanson parle de la pression de la famille ou des hommes manipulateurs.
Narek dit que le siècle des garçons est terminé ! L’idée c’était de faire une histoire marante. « Narek » est un prénom masculin arménien. Le morceau fait le portrait d’un enfant roi, gâté par ses parents. Qui vont lui trouver une bonne épouse, qui va lui faire ses repas. Il y a deux lectures. Le texte écrit parle de la chute d’un roi, il faut interpréter le message derrière.
A l’origine le morceau s’appelait Médiéval, car le thème ressemble à une musique du Moyen-Âge. C’est le premier morceau que j’ai écrit pour Ladaniva et encore… C’était pas pour Ladaniva, mais un groupe avec Louis et Romain notre saxophoniste. Le groupe s’appelle Aguacate et il existe encore !
LFB : La liberté se trouve aussi dans les genres de votre musique. Est-ce le résultat de rencontres ou de voyages ?
J. B. : Je vais parler pour Louis. Il a découvert la musique en Amérique latine ou en Afrique. Moi, j’ai mes influences de la musique arménienne, du rabbiz (pop du Caucase). Ou de la pop russe, que je regardais à la télévision en Biélorussie. On s’est nourri de la maloya (musique traditionnelle réunionnaise) à la Réunion. On a envie de mélange, de liberté ! Aussi, des vidéos ou des rencontres peuvent être super inspirantes. L’inspiration vient de partout, elle est incontrôlable. Même l’album a été enregistré à l’étranger. On est parti à Gand en Belgique.

LFB : La scène semble très importante pour Ladaniva. Vous considérez vous comme un groupe de scène ?
J. B. : Personnellement, c’est ce que je préfère. Je ne contrôle rien et je donne tout ce que j’ai. C’est sincère. Je ne suis jamais satisfaite de ce que j’enregistre. J’ai envie de rendre parfait le résultat. Même si Louis préfère le studio. Il y trouve plus de liberté. Car il travaille le son et joue de plusieurs instruments en même temps.
LFB : Comment te sens-tu à l’approche du concert à la Cigale ?
J. B. : Pour l’instant ça va… on prévoit quelques surprises ! Comme jouer en live des morceaux inédits. On a un peu la pression car les gens nous disent que c’est incroyable de faire cette salle.