La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la première partie de notre 235ème sélection.
RORI – Jalousie
RORI dévoile cette semaine son deuxième single de l’année. Après Loser, la voilà donc de retour avec Jalousie, qu’elle eu le plaisir de présenter ce vendredi lors d’un show explosif au MaMa Music & Convention.
Il faut dire que la musique de la jeune belge a ce petit truc en plus, comme un petit bouton qui permet de faire exploser le stock de TNT et nous exploser la tête. C’est une nouvelle fois le cas avec Jalousie, un morceau qui se joue comme une lente montée avant d’exploser furieusement dans sa seconde partie.
RORI nous offre ainsi un vrai petit tube pop-rock à l’énergie contaminante mais qui se teinte d’une certaine noirceur dans ses propos. En effet Jalousie traite d’un sujet que l’on ressent tous de plus en plus : cette jalousie qui nous envahit lorsqu’on regarde parfois la vie un peu trop parfaite des autres sur les réseaux sociaux. Entre incompréhension et colère RORI se questionne en parallèle autant sur un monde qui semble de plus en plus fake mais aussi sur les conséquences sur nos psychés face à quelque chose que l’on aimerait tous vivre.
La vidéo de Edward ODB prolonge cette idée, transformant RORI en une sorte de stalkeuse obsessionnelle qui observe celle qu’elle voudrait être. Continuant à insuffler des références japonaises dans son univers. Après Akira et Battle Royale, c’est ainsi du côté du Perfect Blue de Satoshi Kon que l’on pourra retrouver l’influence du clip, que ce soit dans certaines teintes bleues, le générique de fin où cette histoire de fan obsessionnelle et dangereuse.
La rencontre entre les deux personnages finit par être explosive et sanglante. On vous laisse découvrir cela par vous même.
De notre côté, on a eu l’immense plaisir de discuter avec RORI lors du MaMa et on a hâte de vous partager ça !
Creepy Nuts – オトノケ(Otonoke)
Après avoir œuvré sur plusieurs autres animés, le duo Creepy Nuts est de retour avec l’opening du phénomène Dandadan.
Et autant dire que le morceau nous pousse à chaque épisode à ne pas zapper l’ouverture. Otonoke est un petit tube en puissance, entre ses couplets hip-hop et son refrain chanté, ses sonorités entêtantes et sa petite guitare qui sonne doux à nos oreilles. Vous l’aurez compris, on est aussi addict à la série Netflix qu’à sa musique.
Pour surfer sur la vague du succès, R-Shitei & DJ Matsunaga ont décidé d’offrir une vidéo à leur titre, réalisée par Masaki Watanabe. Et c’est un carton plein puisqu’en à peine 2 jours, la vidéo culmine déjà à presque 3 millions de vue.
Il faut dire que la vidéo d’Otonoke prolonge avec soin l’ambiance du morceau mais aussi de l’animé. Quelques clins d’œils et aux esprits et aux extra-terrestres et une esthétique affirmée et parfois étrange nous entraine ainsi dans les méandres du morceau de Creepy Nuts. Entre effets visuels stroboscopiques et délires 3D aussi surprenants que cohérents, le duo frappe fort.
ADA ODA – SOTTO LA CONCHIGLIA
Youpi revoilà Ada Oda !
Soyons honnête, nous n’avons toujours pas appris l’italien mais cela ne nous empêche pas de porter en nous un véritable amour pour le quintette belge. Il faut dire qu’ils ont une facilité toute particulière pour nous faire ressentir toutes les émotions de leur musique, notamment grâce au chant de Victoria Barracato.
C’est une nouvelle fois le cas avec Sotto La Conchiglia, premier single d’un second album attendu pour le début d’année 2025. Des guitares au tempo improbables, une batterie qui nous fait secouer la tête et le chant de Victoria entre spoken word et chant rempli d’ironie. On se croirait plongé dans une musique qui déforme doucement la réalité, une sorte de miroir dramatique et drôle qui nous fout un sourire et une énergie absolument dingue à mesure des écoutes répétées.
Pour ne rien gâcher, Ada Oda ramène du soleil dans notre triste vie d’automne avec le clip réalisé par son batteur, Alex de Bueger. Format carré et photographie très 80’s, la vidéo nous entraine dans une sorte de carte postale de voyage entre ami.e.s où rien ne semble se dérouler comme prévu.
Sous le soleil et dans des lieux qui s’amusent des clichés que l’on peut avoir sur l’Italie, glace, mer et spritz bien mis en avant, on retrouve Ada Oda presque au bord de l’explosion, chacun portant sur son visage une sorte de masque sensé cacher les rancœurs et la colère qu’ils portent tous en eux.
C’est drôle, superbement référencé et réalisé. Un petit apéritif qui nous rend forcément impatient pour l’arrivée de leur nouvel album et surtout, de pouvoir les retrouver à nouveau sur scène. Une première date est d’ailleurs annoncé pour le 12 avril prochain à Petit Bain.
CocoRosie – Least I have you
Le duo formé par les sœurs Casady célèbre en 2024 ses 20 ans d’existence. Mais ce n’est pas tout, elles viennent tout juste de signer chez Joyful Noise Recordings.
L’occasion d’explorer un nouveau terrain de jeu. Exit les jouets lo-fi, CocoRosie signe ici un son très urbain qui célèbre la sororité : Least I Have You. De prime abord, un peu naïvement quand on entend le refrain – “if no one in the world understands, at least I have you” – mais qui révèle toute la profonde nature de la relation qui les unit.
Dans un clip en noir et blanc, Sierra et Bianca Casady nous partagent des tranches de vie en studio. Peut-être moins arty mais sincère, témoin d’une nouvelle ère pour la fratrie. Une proximité presque inédite qui se traduit par des moments heureux, propices à la déconnade, créatifs. Le morceau laisse présager un vent de fraîcheur.
Mélissende – Rien ne se passe
Mélissende vient de sortir Rien ne se passe, son nouveau morceau assorti d’un très beau clip réalisé par Manou Milon. Le ciel est bleu, le soleil inonde et la brise souffle doucement dans les cheveux de Mélissende, qui nous offre un moment délicatement suspendu dans la douceur de l’été (indien).
Mélissende poursuit son chemin. Depuis notre dernière rencontre fin 2023 au cours de laquelle elle nous parlait d’amitié avec ses BFF Julia Jean-Baptiste et Yasmine Baïou, Mélissende est retournée en studio et enchaîne les dates solos ou les premières parties d’artistes de renom, tels que Poppy Fusée et en ce moment Barbara Pravi. Une belle accélération dans la carrière musicale de la folkeuse à la voix d’ange.
Celles et ceux qui ont vu Mélissende sur scène dernièrement l’ont probablement déjà entendu. Dans Rien ne se passe, il est question de ces moments un peu magiques où l’on s’extrait de l’agitation du quotidien, où on réussit à arrêter les aiguilles du temps pour se mettre dans sa bulle, réconfortante. On observe, on rêvasse, on s’abandonne, serein. Une sérénité qu’on ressent dans le clip façon Lo-Fi de Manou Milon, qui a choisi avec Mélissende de se laisser porter par l’ambiance et la beauté des lieux. Une invitation au voyage de Naples à Paris, en passant par Procida ou encore Binic.
Mélissende sera en concert en novembre à Bordeaux, Toulouse et Clermont-Ferrand. Allez-y !
billie, Ami Imaginaire
Grandir, c’est quoi, au fond ? C’est franchir une frontière floue où l’innocence s’efface et laisse place à une version de soi plus consciente, mais plus rugueuse aussi. Ami Imaginaire, le premier single de billie, explore cette bascule, ce moment où les rêves d’enfance se heurtent à la réalité. Si billie déclame sa poésie en français, c’est dans les sous-sols moites et grunges de Londres que le morceau puise son inspiration, là où les mélodies shoegaze s’entrelacent à des guitares post-punk stridentes.
Réalisé à quatre mains par billie, Zacharie Berdugo, Romàn Goldet et Solal Brussel, le clip respire l’adolescence et l’esthétique rock des années 90. Un grand jardin plongé dans la nuit, éclairé par un spot en forme de bouche, devient le cadre d’un concert improvisé, en parfaite contre-soirée. Tantôt lancinante, tantôt allongée sur un tapis persan comme dans une chambre d’ado, billie chante avec ses amis ses rêves d’enfance évanouis, naviguant dans les méandres du passage à l’âge adulte. L’image, désaturée et granuleuse comme dans une vieille VHS, est également capturée par une caméra infrarouge, conférant au clip une texture nostalgique et l’ambiance d’une vraie/fausse soirée pyjama underground.
Avec Ami Imaginaire, l’ami d’enfance s’est envolé, mais « mille milliards de jours s’éclairent », marquant la fin d’un cycle et, sans aucun doute, le début d’une aventure musicale trépidante pour billie!
Gurriers – Dipping Out
Après la sortie de leur premier album Come and See, les Dublinois de Gurriers continuent la promo de leur excellent premier essai. Ils sont là pour tout dégommer avec une violence sans retenue, comme leurs cousins IDLES, Gilla Band et Ditz.
Dipping Out résume bien leur état d’esprit, même s’il n’est pas le morceau le plus torride de l’album. Mais il fait déjà mal. Le rythme est soutenu sous les riffs incendiaires des guitares. Pourtant, l’ensemble reste harmonieux malgré cette excitation furieuse.
Cette folie est retranscrite dans ce clip où à tour de rôle, chaque membre malmène leur photographe en ne respectant aucune règle de conduite. Ces sales gosses ! On appréciera les diverses blagues, ce retournement de situation attendu, mais toujours aussi plaisant quand chaque protagoniste inverse son rôle. En plus de vouloir tout casser sur scène, les Irlandais souhaitent donc casser les pieds à tout le monde sur leur passage.
070 Shake – Winter Baby / New Jersey Blues
Le bruit du clap résonnant au début de ce visuel réalisé par 070 Shake elle-même sonne le retour de l’artiste après deux ans sans n’avoir rien sorti en solo. C’est également le temps qu’elle avait mis entre ses albums Modus Vivendi et You Can’t Kill Me. Elle semble avoir trouvé son rythme de croisière et ce double single sonnerait probablement un rythme de sortie plus soutenu. Pour cette reprise en douceur, elle pointe de nouvelles influences en faisant un retour en arrière, vers l’âge d’or du rock américain des années 60. Ce qui se ressent également au travers du visuel. Ce dernier prend place dans un bar d’époque où l’artiste mâchouille une allumette tout en écoutant le juke-box dévoiler la mélodie crachotant de Winter Baby. C’est devant les enceintes que se trouve l’objet des convoitises de la chanteuse. Dans une robe rose bonbon se trémousse Lily-Rose Depp.
Klô Pelgag – Le goût des mangues
Klô Pelgag dévoile un nouvel univers poétique avec son vidéoclip Le goût des mangues, sorti quelques jours avant la parution de son album Abracadabra le 11 octobre 2024. Réalisé par son fidèle collaborateur Laurence « BAZ » Morais, le clip plonge les spectateurs dans une ambiance surréaliste et intime, tout en mettant en scène la chanteuse aux côtés de sa fille. Le réalisateur a cherché à traduire visuellement la poésie de Klô en capturant une innocence enfantine et une connexion profonde avec la nature, éléments récurrents dans l’œuvre de l’artiste. La chanson évoque de façon énigmatique l’idée que « la saison est une arme dont on doit savoir se méfier« , ajoutant une touche d’introspection à cette œuvre visuelle et sonore.
Abracadabra, sorti ce 11 octobre, promet de poursuivre cette exploration unique de l’univers de Klô Pelgag, entre mélancolie douce et envolées musicales riches en émotion
Tyler, The Creator – ST. CHROMA
Tyler, The Creator fera son grand retour le 28 octobre avec la sortie de son 8ᵉ album studio, CHROMAKOPIA. Fidèle à sa marque de fabrique, l’artiste joue une nouvelle fois avec l’effet de surprise et les annonces choc, deux éléments désormais indissociables de son approche artistique. Le premier extrait de ce nouvel opus, ST. CHROMA, est arrivé avec fracas ce mercredi 16 octobre, accompagné d’une mise en scène parfaitement maîtrisée.
Que racontent ces images ? On y découvre une marche militaire, orchestrée avec une précision implacable, mais qui semble se diriger inexorablement vers un point où l’ordre établi se désintègre. Trois actes se dessinent dans cette vidéo, peut-être les étapes d’un parcours initiatique : apprendre les règles, appliquer les règles, puis, briser les règles. Nous voyons d’abord très brièvement un Tyler titubant, encore en plein apprentissage, suivi d’une version plus affirmée de lui-même, désormais capable de diriger après avoir parfaitement intégré les leçons. Enfin, cet être transformé enferme tout ce savoir méthodiquement acquis, pour mieux le détruire. Ce nouvel opus semble annoncer l’avènement d’une nouvelle ère pour le musicien.
Cependant, à l’écoute du morceau, il est difficile de percevoir un véritable tournant musical. Les harmonies et les choix de composition restent dans la lignée de ce que l’artiste nous a déjà proposé par le passé. Loin d’être décevante, cette constance dans son style musical est même, évidemment, une réjouissance. Chaque note, chaque son provoque des frissons auditifs tant cette musicalité atteint une maîtrise jouissive. Pourtant, il semble y avoir un décalage entre ce que nous avons pu dire ci-dessus sur la potentielle nouvelle ère et le contenu sonore dévoilé. Cela dit, le rappeur californien en a révélé si peu pour l’instant qu’il serait hâtif de tirer des conclusions définitives. Si CHROMAKOPIA annonce bel et bien un nouveau chapitre dans sa carrière, cela ne signifie pas forcément que le changement sera d’abord perceptible dans sa musique. Encore un peu de patience avant que nous ne dévorions ce prochain disque ; d’autres surprises arriveront certainement entre-temps.
PAMELA – FOCUSED
Nous nous adressons à tous les passionnés de synthétiseurs et de matériel de studio. Veuillez, s’il vous plaît, éviter de trop baver durant le visionnage de FOCUSED, le premier single de la toute fraîche carrière du duo PAMELA.
Dans un monde où les distractions sont omniprésentes, il devient de plus en plus difficile de rester concentré. La première leçon transmise par les deux musiciens est de rester assidu à ce que l’on souhaite accomplir. Ce monde regorge de merveilles et de curiosités, qu’elles soient organiques ou numériques. Il est donc essentiel d’apprendre à imposer, de différentes manières, de grandes parenthèses à tout ce qui nous éloigne de nos objectifs.
Cependant, PAMELA ne se présente pas ici comme un coach en développement personnel pour dicter notre conduite. Le jeune groupe propose, avec amusement et grâce à un très bon travail, un morceau dansant et captivant. C’est un excellent choix pour saisir notre attention. Ils parviennent à nous garder pleinement engagés sur ce titre et sur les images qui l’accompagnent.
Ce groupe représente, très honnêtement, une belle promesse pour l’avenir. Nous espérons que ce premier titre marquera les débuts d’une connexion enrichissante et d’une exploration musicale approfondie, tant pour eux que pour nous. Nous y resterons attentifs.
Léopold Riou – BRUT
La DA toujours impeccable de Léopold Riou revient nous titiller rétine, oreilles et papilles. Sur fond de rock ultra sautillant post Y2K, le brestois prodige du groupe Matmatah nous offre un morceau de bravoure (et à graille).
Conquis direct par la mélopée ultra entêtante et rythmée, on était quand même pas prêts pour le pré-refrain qui donne le la avant d’envoyer la sauce. Les riffs saccadés et la ligne de basse disent les obsessions auditives de celui qui ne désavoue pas les idôles rock de sa jeunesse… Et nous contaminent d’enthousiasme, tandis qu’en face cam’, la vidéo de 2’26 fait défiler les paroles.
Un hymne à la danse et à l’obstination, à scander nonchalamment en dégustant (à tout hasard) une omelette. S’il nous livre la recette intégrale, on en demandait pas tant, mais c’est (faussement) simple… et redoutablement efficace. Vivement le dessert.