Les clips de la semaine #248 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la première partie de notre 248ème sélection.

Mélissende – Petite voix

Nous avons tous en nous une petite voix. Elle peut nous orienter, nous motiver, nous donner de la force. Elle peut aussi nous faire douter, nous pétrifier, nous faire sombrer. C’est de cette petite voix-là dont Mélissende nous parle cette semaine, tout en délicatesse.

Mélissende confiait il y a quelques jours sur ses réseaux sociaux avoir longtemps souffert de cette petite voix qui la « rabaissait sans cesse […] l’a rendue malade et extrêmement malheureuse pendant de longues années ». Cette petite voix, Mélissende a fini par la vaincre. Un message vrai, touchant et beau qui parlera au plus grand nombre tant le sujet est universel. Il en faut du courage pour dévoiler ses failles, et Mélissende le fait de la plus belle des manières en véhiculant un message d’espoir.

Le titre, très doux, est magnifié par la sobriété et l’élégance des arrangements d’Albin de la Simone et Jean Sylvain le Gouic. Le piano et la batterie structurent subtilement le morceau, ponctués notamment de guitare et de cuivre. On retrouve cette élégante sobriété dans le clip réalisé par Manou Milon. En plan serré, un côté du visage de Mélissende est inondé de lumière, l’autre est plongé dans l’obscurité. Une belle manière d’illustrer la dualité de nos petites voix intérieures.

Mélissende sera en concert à Paris à La Maroquinerie le 17 février dans le cadre de la demi-finale des Inrock Super Club.

Black Country, New Road – Besties

Black Country, New Road frappe encore un grand coup avec Besties, le premier single/teaser de leur prochain album Forever Howlong.

Réalisé par Rianne White, ce clip est porté par une production ambitieuse : une équipe technique d’envergure, un casting complet composé des membres du groupe et de plusieurs figurant·es, une mise en scène pyrotechnique, et même une troupe de chien·nes comédien·nes !

Le film s’ouvre sur un clavecin fou nous invitant et nous intriguant dans des décors minimalistes posant un cadre mêlant mélancolie et, pourtant, bien-être. Puis, boom : feux d’artifice.

Trois personnages se révèlent progressivement, appelés à devenir les héroïnes du clip. Chacune d’elles, à un moment, prend conscience de son propre environnement et suit un besoin de fuir et de planter tout le monde. « I wanna be anywhere other than this ».

Le refrain débute, comme leur cavale. Les héroïnes progressent dans leurs quêtes respectives, à travers différents cadres tantôt chaleureux tantôt givrant. Cette bourgade enneigée donne envie d’y être ! « …he shouldn’t treat you that way… »

Plus tard, le second refrain découvre la scène des toutous : Iels sont vraiment tops mais je n’ai rien d’autre à dire à ce sujet…

Après cela, un pont instrumental amène les trois héroïnes à leurs rivages respectifs, leurs petites plages salvatrices. Mais sur les trois scènes parallèles, la fête touche déjà à sa fin… On ne sait pas trop, à ce moment, si les héroïnes ont atteint leur Éden ou si elles nagent dans la frustration, pourchassant une chimère.

Depuis un mois, BC,NR jouait avec notre curiosité à travers des publications énigmatiques sur InstagramYouTube, et autres. Le résultat en valait clairement l’attente. Ça va être une corvée de re-patienter jusqu’au 4 avril, maintenant ! (date de sortie de Forever Howlong sur le label Ninja Tune)

Ce film dégage une poésie visuelle à laquelle les Londonien·nes nous avaient déjà habitués via leur musique. Les images, simples mais efficaces, mettent en lumière la sincérité des liens qui unissent ces artistes, nous invitant à partager un moment d’intimité avec eux.

Après le départ d’Isaac Wood en 2022, BC,NR, en bon phénix, a su renaître de ses cendres. Ici, Georgia Ellery prend le micro (qui circule auprès de tous les membres du groupe, dorénavant) pour nous offrir une performance vocale douce et aérienne.

Musicalement, Besties conserve la théâtralité et la complexité instrumentale qui font la signature de Black Country, New Road, tout en y ajoutant une touche de légèreté bienvenue. L’ensemble dégage une fraîcheur qui fait du bien aux oreilles.

En somme, Besties est un morceau qui donne envie de prendre son téléphone et d’appeler son meilleur·e ami·e pour lui dire combien iel compte, ou au moins pour lui emprunter sa perceuse à percussion, une fois de plus.

Chose la plus précieuse, ce petit bijou musical nous rappelle que l’amitié est la plus grande des aventures.

Clairo – Terrapin

C’est un beau cadeau qu’offre Clairo à ses fans, près de sept mois après la sortie de son album Charm : le morceau Terrapin est désormais doté d’un clip, réalisé par la talentueuse Ayo Edebiri.

Dans un film aussi doux que délirant, Clairo prête sa voix au légendaire « Weird Al » Yankovic, musicien et humoriste qui doit notamment sa renommée à de nombreuses parodies musicales. Ce dernier évolue dans un décor pastel, presque onirique, accompagné de deux danseuses aux robes scintillantes. Il emprunte la voix de l’artiste, brille par ses expressions faciales déjantées et semble désespérer le groupe par ses excentricités. Ce décalage, ajouté à une esthétique romantique et vintage, confère au clip une sorte de poésie absurde et réconfortante.

C’est une collaboration inattendue mais qui fonctionne à merveille, et donne plus de légèreté encore à ce morceau planant sur le lâcher-prise et la liberté. Clairo, elle, n’apparaît qu’au second plan, perdue dans ses pensées puis amusée par l’énergumène qui prend sa place. « Weird Al » Yankovic représente peut-être l’inconscient de l’artiste, qui dit tout haut ce qu’elle pense tout bas et l’aide à trouver la paix intérieure.

Après avoir mis en scène des catcheurs dans le clip de Juna, l’artiste continue de surprendre et donne de nouvelles vies à son dernier album. Au passage, elle nous fait rêver et sourire, et il faut dire qu’on en avait bien besoin !

thaïs – Taxi

La talentueuse auteure-compositrice-interprète montréalaise thaïs continue de tracer sa voie avec Taxi, le quatrième extrait de son prochain album Personne, attendu pour le 4 avril 2025. Ce morceau électro-pop allie contemplation et vitalité, offrant une échappatoire aux tourments et dissipant la mélancolie.

Dans son clip, thaïs nous embarque dans la symbolique du taxi, à la fois de fuite et de recueillement. Au retour d’une soirée, elle est submergée par les souvenirs d’une relation passée, ravivés par les lumières de la ville et les mélodies familières. Les paroles poignantes capturent cette introspection :

« En revenant de soirée / Devant moi / La ville illuminée / M’éblouissait / Et dans le taxi je pleurais »

Le vidéoclip, réalisé par Alexis Boudrias, illustre cette narration en montrant thaïs se produisant dans un espace indéfini, puis se rendant à une fête où elle ne se sent pas à sa place. Elle tente de partir, mais revient toujours à cet endroit où elle performe et se sent en harmonie.

Les deux années de création de cet album ont été prolifiques pour thaïs, qui a assuré les premières parties d’artistes tels que KYO, M, Ariane Moffatt, Dumas et Suzane. Avec Personne, elle propose une « musique extravertie pour introverti·e·s », des compositions énergiques invitant à l’affirmation de soi, tout en nous ouvrant davantage les portes de son univers personnel.

Antoine Corriveau – Suzo

Antoine Corriveau revient sur le devant de la scène musicale avec Suzo, le premier extrait de son cinquième album à paraître, Oiseau de Nuit, prévu pour le 25 avril 2025 sous l’étiquette Secret City Records.

Dans Suzo, Corriveau nous entraîne dans une introspection profonde, imaginant une rencontre avec un avocat fictif, Maître Vittorio Suzo, à qui il confie ses tourments dans l’espoir de trouver rédemption et protection. Cette narration marque le point de départ d’une exploration identitaire qui traverse l’ensemble de l’album.

Le vidéoclip, réalisé par Samuel Terry-Pitre et Jérémy Gagnon, accompagne parfaitement cette quête introspective (ou criminelle?), offrant une dimension visuelle saisissante et décalée, à la profondeur lyrique de la chanson. Les personnages du clips se suivent et se succèdent, comme des suspects dans un interrogatoire, ou les témoins de son crime inavoué.

Avec Suzo, Antoine Corriveau propose une œuvre à la fois intime et universelle, où la recherche de soi et la rédemption occupent une place centrale, le tout soutenu par une production musicale audacieuse et innovante.

GLORIA – ELEUSIS

Grosse actualité du côté de chez Howlin Banana Records ces derniers temps. Le label indé le plus cool de la scène rock hexagonale multiplie les annonces et nous invite à célébrer cette semaine le retour de Gloria.

Quatre ans après Sabbat Matters, le quatuor lyonnais revient donc et annonce l’arrivée de III, leur nouvel album, pour le mois d’avril prochain et en profite pour nous offrir un premier single portant le doux nom d’Eleusis.

Ainsi, les mystères d’Eleusis se transforme complètement en trip musical, épopée sonore où les voix se mélangent et où les nappes de mellotrons, de saz et une batterie parfaite nous invite à une sorte de transe mystique où l’on croise la vie, la mort, Déméter et Perséphone.

Navigant sur la rivière du temps, Gloria s’amuse de références bien ancrées et d’une imagerie très 60’s pour dépoussiérer un genre musical qu’il affectionne afin d’en donner à nouveau une interprétation moderne et ancrée dans son époque. Un hommage brûlant qui prête à la danse et à la rêverie.

Pour l’accompagner, le groupe nous offre une vidéo entièrement dessinée et animée par leurs petites mains. Là encore, les influences 60’s et 70’s sont bien présentes ainsi qu’une colorimétrie qui fait autant penser à la mythologie grecque qu’au Moyen Âge.

On suit donc le voyage de notre héroïne qui prend la route et se transforme au fur et à mesure de son aventure. Entre une rencontre avec son ombre, une présence toujours aussi importante du soleil et la découverte son double masculin, on suit la quête intérieure et la grande transformation de ce personnage dans un cycle qui se termine et en appelle forcément d’autre.

La suite, on la vivra probablement au mois d’avril, avec la publication du nouvel album de Gloria.

Bagarre – Lunettes noires

Ça nous a frappé comme un coup de tonnerre, un coup au cœur auquel on ne s’attendait pas : il y a deux semaines, Bagarre annonçait la fin d’une aventure belle de 11 ans avec la parution d’un ultime EP, Nous étions cinq (clin d’œil a leur tout premier EP et à un morceau toujours aussi impactant en 2025).

Sans vouloir jouer la sensiblerie excessive, on peut clairement dire qu’il y a peu de chance que La Face B aie un jour exister sans la présence de Bagarre. C’est donc avec une vraie émotion qu’on voit ce chapitre de notre existence se fermer.

Mais en attendant, la fête continue et le groupe a bien l’intention de s’offrir un enterrement digne de son nom avec une tournée finale et quelques titres à nous partager à nouveau. C’est le cas de Lunettes noires paru cette semaine.

Et dans ce morceau, on retrouve tout ce qui a toujours guider l’identité de Bagarre : une passion pour le club, un besoin d’émotions collectives et une espèce de naïveté bienvenue qui permet de combattre un monde parfois trop dur pour ceux qui l’habitent. Lunettes noires, c’est une nouvelle déclaration d’amour aux weirdos, à ceux qui cachent leurs larmes derrières leurs lunettes, qui se brûlent par les deux bouts dans la fête et dans la nuit.

La production percutante et joyeuse ne masque jamais la puissance du texte, ce besoin d’effacer ses doutes et ses inquiétudes dans les bras des autres. Une lettre ouverte à une normalité multiple et à l’acceptation.

Pour cette ultime vidéo, c’est au camarade Juan Jonqueres d’Oriola que Bagarre a confié la réalisation de son tout dernier clip. Il est cinq heures, paris s’éveille et Cyril continue de danser. On le suit dans cette confrontation étrange entre un monde froid et brutal et sa tignasse rose qui vient trancher dans ce réel bétonné. Là encore tout se joue, ce besoin d’être soi, de danser partout, tout le temps et d’exprimer ce qu’on a à l’intérieur de soi.

Une rencontre avec un robot plus tard, on bascule dans autre fête, un karaoké où l’on retrouve les autres membres de Bagarre pour une ultime célébration.

Et c’est ça qui nous attend, une dernière grande fête, un grand feu pour retrouver une dernière fois Bagarre avec notamment un rendez-vous déjà pris au Trianon le 04 avril prochain.

Milena – Comme chaque hiver

Nostalgie. La chanteuse d’origine arménienne Milena partage en cette fin de semaine Comme chaque hiver, un clip qui illustre un morceau dédié à sa grand-mère Nelli. L’artiste y décrit les traits détaillés de son aïeule, avec tant de finesse qu’il est possible de l’imaginer, ou bien d’entre apercevoir la sienne. Milena parvient à témoigner de sentiments universels et en même temps profondément intimes et personnels : ce que l’on ressent pour notre famille. Ce qui nous lie. Elle construit d’ailleurs Comme chaque hiver à plusieurs. Rencontrés à la résidence d’Astaffort (lancée par Francis CabrelCzesare et Allan Védé ont participé à la composition de ce petit écrin de douceur. Les paroles de morceau à la guitare évoquent l’héritage :  « j’ai emprunté ton tailleur vert, orange, ce même tissu qui nous mélange  ». C’est en Arménie, que Milena puise ses racines. Le clip réalisé par Mariam Gevorgyan répond à ses promesses en étant tourné sur les toits d’Erevan. Comme si la jeune chanteuse avait besoin de hauteur pour pouvoir contempler son passé.

marcel – task force diane

Les belges marcel révèlent leur premier single task force diane dans un petit bijou de clip animé signé Simon & Vincent Lynen (FrankieL.I.A.R.Ensemble) de l’album ô fornaiz, à venir le 21 mars prochain chez Luik et Géographie / Modulor Records.

Les gens qui connaissent la vie de bureau pourront se reconnaitre dans les traits de la protagoniste, frôlant le burn out. Des dessins grossièrement caricaturaux pour un morceau bien punk sauvage jouant sur le mood complètement intranquille.

Par les temps moroses, un peu de tintamarre n’est jamais de trop. Pour le plaisir des yeux, on met en plein écran et on pousse le curseur du volume un cran au-dessus.

Heavy Lungs – Yes Chef !

Mais que voit-on à l’horizon ? Ne serait-ce pas le prochain album d’Heavy Lungs ? Le groupe anglais de Bristol a récemment annoncé sa sortie pour le 18 avril prochain via FatCat Records. Nommé Caviar, ce second met présage déjà de se régaler avec en guise de bouchée, Yes Chef !, nouveau clip et nouveau single du quatuor.

Un oignon, qui occupe l’espace central de l’image et les membres du groupe dispatchés tout autour, chacun arborant une couleur flashy, voilà qui nous amène direct dans une esthétique à la fois des publicités japonaises ou coréennes les plus kitsch et des vieux jeux vidéos les plus cheap.

Heavy Lungs nous montre la recette de Yes Chef ! et c’est bien évidemment dans une cuisine que ça se passe ! Tout est en accéléré, le groupe cuisine encore et encore si bien que le temps s’apparente à une boucle. Ce morceau est en réalité un hommage à la rencontre entre Danny Nedelko (voix) et James Minchall (basse) qui se sont rencontrés derrière les fourneaux à l’époque.
Comme le clip, la construction du morceau est corrélé à la vitesse. Tout est puissant et brut chez Heavy Lungs mais on n’oublie jamais de se marrer ! Le groupe vient d’annoncer une tournée UK/Europe qui passera en France par Paris à L’Internationale (qu’on soutient fort fort en ce moment particulièrement) le 17 avril, par Bordeaux à l’Iboat le 26 mai et enfin par Marseille au Molotov le 27 mai.

Low Roar – House in the Woods

A l’occasion de la sortie de son nouvel album, Low Roar nous présente le clip du morceau éponyme : House in the Woods. Moment d’émotion puisqu’il se trouve que Ryan Karazija, de son nom à la ville, n’est plus parmi nous depuis 2022. Il s’agit donc d’un titre et d’un album qui paraissent à titre posthume et qui sonnent comme un dernier très bel hommage à ce que fut le chanteur. C’est donc un au revoir qu’il faut comprendre ici, et quel ode magnifique. Composé de scènes en pleine nature, de plans fixes baignés de lumière comme seules les forêts en hiver savent en donner. On y suit la progression d’une pièce de tissus portée par les vents, symbole de la présence toujours prégnante de Ryan en ce monde. C’est beau, c’est touchant, c’est poétique, ça fait monter les larmes. On imagine l’émotion des membres qui accompagnaient le chanteur, lors de la production de ces images et leurs pensées pour leur ami. Le morceau accompagne magnifiquement ces scènes, évoquant cette maison dans les bois, sorte de refuge pendant que le temps passe et que le spectre de la mort se fait plus présent. Des mots terriblement clairvoyants et qui sont probablement le plus bel adieu qu’un.e artiste puisse offrir pour une dernière sortie de scène. Merci pour tout Ryan.

Treaks – Tiny Brain

Lecteurs·lectrices, retenez bien le nom de ce groupe car on n’a pas fini d’en entendre parler d’autant qu”iels viennent de nous lâcher une pure bombe avec Tiny Brain, leur nouveau single.

C’est la petite pépite de ce début 2025, on n’en finit pas de l’écouter en boucle. Tiny Brain sur toutes les lèvres, full support à ce groupe nantais ! Tu connais tes basiques sur le consentement ? Ne t’inquiète pas, Clothilde te les rappelle, te les explique, te les hurle et te les martèle car il faudrait bien que ça rentre dans ces petites têtes !

Dans un râle viscéral, la puissance de Treaks émerge telle un tsunami brut et dévastateur. Ce morceau est lourd, intense et plus que nécessaire même en 2025, encore plus maintenant avec ce monde qui tourne de moins en moins rond.

Dans ce clip signé Quentin LatéralClothilde fixe l’écran comme si elle regardait dans les yeux de ces “tiny brains”. Ce regard est puissant, sincère et plein de rage.

Treaks s’est créé une empreinte sonore charismatique et brute. Les compositions sont terriblement efficaces. C’est une formation qui va marquer 2025, c’est certain ! 

À suivre, à partager, à écouter ! Cette année sera leur année !