Faire un album, c’est déjà tout un projet. Mais ce dont on parle moins, c’est de la montagne que représente la réalisation d’un deuxième album. Faut-il persévérer dans ce qui a fonctionné, au risque de ne pas se renouveler, ou opérer une révolution complète, cette fois avec la possibilité de perdre les personnes qui avaient adhéré à la première proposition ? A l’instar de funambules, les artistes sont autant d’équilibristes que nous regardons voltiger. Alors, qu’en est-il de Listen to the Whale, deuxième opus de Kriill ? Plongeons-y pour le découvrir !

Si vous êtes des afficionados de The Voice, vous connaissez sans doute Kriill depuis plus longtemps que nous. Ils avaient en effet participé à l’émission en 2018 avant de commencer à partager leurs premières compositions. De l’eau a donc déjà coulé sous les ponts depuis leurs débuts et les trois garçons nous partagent en ce début d’année Listen to the whale, leur deuxième disque. Dix titres, dont certains ont tapé dans l’oreille de plus grosses production (notamment every word you say qu’on peut entendre dans une production Netflix) et qui continuent de cultiver la poésie du trio.
Et on a eu le temps de se languir puisque le premier extrait de cet album est sorti… En mai dernier ! Pour faire monter l’attente progressivement, Kriill nous a distillé ses compositions au compte-goutte. On a donc eu le temps de les décortiquer une par une avant d’enfin prendre du recul pour les apprécier dans leur ensemble (indéniablement la meilleure façon de le faire).
Les morceaux ont un goût doux-amer, comme autant de bonbons faciles à engloutir les uns après les autres mais dont la saveur révèle plus de complexité que ce que l’on aurait pu imaginer en première impression. Le groupe aborde des thèmes aussi universels que complexes, le fait de trouver sa place, les relations toxiques, la destruction de notre planète… Autant de raisons de se reconnaître dans des paroles qui deviennent vite très parlantes. On notera notamment biouti, dont le clip est sublime, avec une direction artistique impeccable et un twist qui donne une autre dimension au morceau (c’est presque une marque de fabrique désormais pour Kriill). Le morceau évoque l’adoration maladive et toutes les excuses qui sont trouvées à la destruction, il est d’une majesté qui rappelle l’intensité qui amène à se brûler les ailes comme Icare en son temps.
L’avancée dans l’album se fait au rythme d’un enchaînement entre balades, morceaux plus rock et contemplation. Chaque morceau donne l’impression d’avoir été sculpté et travaillé à la manière d’un bijou sur lequel des centaines d’heure auraient été passées par des mains expertes. Cet aspect donne l’envie de s’arrêter sur chaque titre pour comprendre ce que ses auteurs ont voulu nous dire. Cinéphile est une parenthèse en Français qui donne du relief à un ensemble composé en Anglais pour le reste, sans pour autant ressembler à une incohérence malvenue. Les choeurs permettent de faire le pont avec le reste des paroles, et d’enchaîner avec replay qui nous est resté en tête tout au long de la préparation de cette chronique.
Un album très beau donc, très facile à écouter d’une oreille distraite mais qui mérite qu’on s’attarde sur sa subtilité. Dans tous les cas, qui se dévore comme une baleine affamée.