Les clips de la semaine #252 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, on vous invite à découvrir la première partie de la 252ème sélection des clips de la semaine.

Nous Etions Une Armée – jour & nuit

Pas même un an que le premier EP Depuis toujours, j’ai l’impression que ma vie est en train de commencer. tant attendu est sorti que le duo de Rémi Le Taillandier et Léo Nivot s’affaire déjà autour de nouveautés. 

Jour & nuit que l’on connaissait déjà en live est désormais posée en studio. C’est Léo Nivot qui se met en scène dans un clip en noir et blanc bien graineux avec bons nombres d’images d’explosions. Un contexte fort, saisissant comme toujours avec Nous Etions Une Armée. Il est possible que ce clip vous fasse penser à un tableau. Si on ne voit pas tout de suite le visage du garçon, c’est en toute fin que vous n’aurez plus qu’une idée en tête, le tableau de Gustave Courbet, vous l’avez au bout de la langue, oui : Le Désespéré qui se laisserait dévorer progressivement par le doute, l’angoisse, l’incertitude, le stress.

Sur le plan musical Jour & nuit  joue sur les contrastes et les garçons se sont laissés tenter par l’idée de le traduire dans un clip qui allie aussi bien des sensations fortes émotionnelles que visuelles. On n’en redemandera jamais assez.

Audran Cattin – Vers mon soleil blanc

Audran Cattin vient de sortir son premier album Soleil blanc. Celui qu’on connaissait surtout comme acteur, nommé aux Molières 2024 dans la catégorie révélation masculine pour son interprétation de Charlie Dalton dans Le cercle des poètes disparus, est un artiste complet. A l’aube de la trentaine, il se lance un nouveau défi de taille avec un premier album entièrement auto-produit. 

Les soleils blancs, ce sont pour Audran Cattin « ces êtres qui nous font du bien, nous apaisent. Ces êtres que l’on aime. » Vers mon soleil blanc ouvre l’album en nous racontant le voyage éprouvant de l’artiste dans ses sentiments contrariés, en quête d’amour et de paix. 

Le morceau marie plusieurs sonorités, entre blues et hip hop. Dès les premières notes, on plonge dans la mélancolie d’une guitare électrique dont on sent presque les larmes perler doucement. L’intro instrumentale est lente, longue. Elle plante le décor patiemment, pour mieux le bousculer dans la seconde partie du morceau, chantée elle, où Antran Cattin livre sa vérité nue, brute. 

Une structure en deux actes qu’on retrouve dans le clip qu’il a co-réalisé avec Benjamin Choiselat-Meyohas. On y voit Audran Cattin dans une maison ancienne, dont les habitants semblent partis à jamais à part lui. Une atmosphère lourde, sombre, lugubre dont Audran Cattin réussit à s’extraire en trouvant la force émancipatrice de quitter cette maison qui signifiait tant pour lui.

Gloria – Echo

Avis aux amateurs·trices de rock vintage années 60, Gloria est un groupe pépite qui nous vient de Lyon qui a plus d’un rétro dans son sac (blague facile à l’évaluation moyenne) ! Avec un troisième album dans leur besace qui sortira le 4 avril via Howlin Banana et Wita, Gloria nous redessine les sillons du passé tout en explorant la modernité du présent.

Entre mysticisme et pop décalée, entre rock garage et esprits libérateurs et libérés, Wendy Martinez, Amy Winterbotham et Marie-Louise Bourgeois, sous la direction du guitariste-producteur Kid Victrola, nous partagent leur galaxie planante et fleurie.

Ainsi, Écho est le second extrait de ce futur album intitulé III. Ce titre fait référence à Écho, nymphe grecque à la voix d’or condamnée à la répétition par Héra car elle avait aidé Zeus à tromper la jalousie de sa femme, s’attirant les foudres de cette dernière. Elle pouvait seulement répéter les derniers mots qu’elle avait entendu, ce qui lui a valu de mourir de chagrin puisqu’elle n’a jamais pu avouer ses sentiments à son bien-aimé Narcisse.

Le clip d’Écho reflète le quotidien de n’importe quel groupe de musique. Ce quotidien est ponctué de répétitions intenses, ce qui rend le clin d’œil à la nymphe antique très malin. C’est une rengaine absolue et nécessaire qui rythme le processus créatif des artistes. Voilà une bien belle idée de retranscrire cela en musique et à travers ce clip !

Via l’image et le son, Gloria transmet un éclat solaire. Les chapitres définis participent à construire l’histoire d’un groupe et apparentent ce clip à une sorte de mini documentaire.

Au bout du compte, Écho est un morceau joyeux, complice et intimiste. Il est un hymne au métier que le groupe parsème de couleurs pastel empreintes d’une douce nostalgie. Vivement le 4 avril pour s’embarquer dans une troisième aventure vers le passé, le futur et l’au-delà.

Sun Gazol – Thalassophobia

Bon nombre de clips que nous recensons mettent souvent en scène les artistes ou sont des petits bouts de films scénarisés, la formation tourangelle de Sun Gazol a parié sur l’animation assurée par Jérémie Walch et Margotto pour le single Thalassophobia extrait de l’album Aisling à venir pour la fin du mois. 

Dans une ambiance visuelle onirico-aquatique, Sun Gazol nous embarque dans un univers sonore très aérien. Sans pour autant être planant, il invite à la légèreté tout en frôlant les élans progressifs avec la guitare électrique finale. La voix de son chanteur oscillant entre une position haute et plus éloignée, la rythmique qui se joue à deux vitesses Thalassophobia se joue de son auditeur tout en l’invitant à plonger la tête la première. Comme l’illustration de ce passage de flottement jusqu’à l’arrivée dans l’eau. Toutes les questions qui nous traversent jusqu’à ne plus s’en poser et être en plein dedans.  

Alek et Les Japonaises – Tranquille

Comment décrire la direction artistique d’Alek et les japonaises ? On pourrait commencer, peut-être, par parler de son site internet, joyeuse parodie de Windows 98 (ou bien est-ce Millenium édition ?). On pourrait aussi commencer par le nom du groupe : Alek et les japonaises, où le s du pluriel masque la réalité : les japonaises ne sont qu’une, et le groupe un duo. On pourrait, enfin, commencer par le dernier clip du groupe, Tranquille. Une plage, le ciel bleu, et de dos, une magnifique chemise à l’effigie des glaces cornetto. C’est l’été, on dirait. Puis un point d’interrogation dans le clip réalisé par Marco Zagaglia : la caméra recule, et du visage semble émerger un point rouge. Is it a bird ? Is it a plane ? Ni l’un, ni l’autre, c’est un présentoir à glaces. Du genre, comme vous n’en avez pas vu depuis cinq décennies. La silhouette d’Alek se met en marche. C’est une musique qui ne ressemble à aucune autre, comme une rencontre entre Mario Kart et Bertrand Burgalat ; c’est un texte qui ne ressemble à aucun autre (« Tu vois au loin/Tu vois au loin le point qui brille/Là bas/Tu crois, tu crois que ce point qui brille/Tu crois qu’il nous parle/Tu crois qu’il dit quoi ?/Je ne sais pas/tranquille, tranquille »). Absurde désopilant, peut-être pas si absurde que ça dans le fond. C’est la plage, et on est bien. Du reste, on peut épiloguer pendant des lignes sur Alek et les japonaises, mais le mieux, c’est quand même de les voir pour le croire.

Médine – QI. RAP

Alerte classique. Comme à chacune de ses sorties, le daron du Rap français, du Havre et toujours pas avare en grosses baffes bien senties comme le prouve cet énorme QI. RAP qui le met en scène dans les provinces Nord Américaines du Québec. Au passage, ce morceau lui permet de porter plus l’annonce de la sortie de son nouvel album STENTOR, act I déjà disponible en précommande et qui nous parviendra au mois de Mai. D’ici là, la prod est aussi lourde que le texte, et que dire de la DA du clip ?

Un grain sublime pour porter une vague très vintage qui convient très bien aux samples de soul utilisés dans l’instru. Pourtant, impossible d’en douter, on se trouve bien en 2025 avec une prod ultra propre et qui donne envie d’aller en manif, renverser le capitalisme et faire enfin respecter la devise Liberté, Egalité, Fraternité histoire qu’elle serve à autre chose que décorer les mairies. En tout cas, visuellement c’est superbe, musicalement c’est superbe, textuellement c’est superbe donc c’est assez simple à résumer. On vous laisse en profiter.

Terrain Vague – L’Aventure

Cette semaine l’aventure démarre pour Terrain Vague ! Le duo a dévoilé son nouvel EP, Carré Magique, chez Lisbon Lux Records.

Et de la magie, la musique de Terrain Vague en a à revendre avec sept titres fabuleux qui nous entraine dans une pop qui nous fait clairement voyager et dévoile un univers à la fois rêveur et parfaitement produit, rendant chaque morceau aussi doux pour l’oreille que remplit de surprise.

L’Aventure en est la preuve initiale puisque c’est lui qui démarre ce mini-album. Une batterie parfaite, des nappes de synthés entêtantes et une guitare qui surgit ici et là viennent accompagner la voix de Marion dans cette escapade onirique où l’on suit une sorte d’épopée pour un personnage mystérieux (peut être même une voiture) qui ouvre tous les chemins des possibles tant que l’imagination permet de les suivre.

Pour l’accompagner, Léo Bivas nous livre une superbe vidéo en stop-motion où l’on suit des versions animées de Terrain Vague dans un road trip merveilleux où l’on passe de l’espace à la montagne en faisant un petit détour par la plage et les déserts en noir et blanc du cinéma où le piano remplace le ciel.

On se glisse avec eux et on laisse le vent glisser dans nos cheveux et nous entrainer dans le sillage de cette voiture qui vibre à travers notre carré magique.

TVOD – Uniform

Direction Brooklyn pour retrouver TVOD qui dévoilera son nouvel album chez Mothland le 9 mai prochain.

Et si vous doutiez encore que le monde s’écroule et qu’on va droit dans le mur, on vous conseille d’écouter Uniform, meilleure piqure de rappel punk de la semaine.

Avec ce nouveau morceau TVOD fait état de tout ce qui peut nous obséder en ce moment : perte de sens, anxiété générale, sensation de se transformer en robot pour pouvoir survivre à ce qui nous entoure. Mais sous la houlette des américains, cela se transforme en petit tube où le fuzz est roi et où l’écriture répétitive associée au chant neurasthénique de Tyler Wright renforce la sensation de dystopie presque palpable tout en la rendant étrangement divertissante.

Parce qu’au fond le meilleur moyen de contrer ses angoisses et sans aucun doute de danser dessus.

Parce qu’on est jamais mieux servi que par soi même, le groupe réalise lui même un clip aussi étrange que son morceau, où TVOD est une sorte d’objet, un groupe à vendre qu’on achète par curiosité et qui finit, au delà du divertissement de départ, par devenir assez encombrant. Une image assez noire de la façon dont on consomme de la musique mais finalement assez réaliste au vu de la façon dont on s’emballe parfois sur un groupe avant de l’abandonner la semaine suivante.

Une chose est sûre, notre attente est grande pour l’album de TVOD et pour leur passage prévu à La Maroquinerie le 02 juin prochain.

Roberta Lips – En Plein Cœur

La power pop parisienne a de beaux jours devant elle, et l’arrivée de Roberta Lips jusqu’à nos oreilles le prouve bien. Nouvelle pépite du Cèpe Records, le quatuor féminin débarque avec un premier single qui décoiffe : En Plein Cœur.

Le pied sur l’accélérateur, le morceau est le remède parfait pour contrer une histoire d’amour qui se termine. Rageur et incisif, le morceau nous frappe « en plein cœur » bien aidé par des superbes chœurs et une énergie qui ne s’arrête jamais. Un petit shot de pop de moins de 2 minutes 30 qui fait un bien fou.

Cette énergie, on la retrouve aussi dans la vidéo réalisée par Isabel Cortés et Roberta Lips. Sororité et fête foraine au programme de ce clip coloré, qui étend les influences 70’s de la musique sur pellicule. On suit donc ce gang de filles jamais mieux accompagnées que par elles mêmes pour une fête joyeuse entre vengeance et expiation.

La prochaine étape ? Un premier EP attendu le 29 mars et puis sans doute beaucoup de concerts, leur terrain de jeu favori.

Tshegue – Plus de place nulle part

Comme dirait nos ami.e.s québécois.e.s : pas le temps de niaiser. Alors que leur EP résonne encore dans nos oreilles, et en attendant leur concert à La Gaité Lyrique après une Maroquinerie complète, Tshegue est déjà de retour avec un nouveau single : plus de place nulle part.

Car oui, où trouver sa place dans un monde du toujours plus où l’ambition se fait de plus en plus démesurée et où la course à l’argent ressemble de plus en plus à un nouveau chapitre de Mad Max ? De manière frontale avec une ironie mordante et un sens du rythme qui nous met à terre, Tshegue démonte en règle notre époque et cherche un lieu où développer autre chose, un monde plus sain où ce que l’on est importe plus que ce que l’on fait où l’état de notre compte en banque.

Un morceau intense, toujours porté par une production musicale aux petits oignons et l’interprétation sans failles de Faty Sy Savanet pour un titre qu’on a vite envie de reprendre et d’hurler histoire de se protéger du monde qui nous entoure.

Pas d’esbroufe, pas de grands plans pour capter l’énergie du morceau, Baptiste Penetticobra préfère une simplicité bienvenue. Un fond noir, un cockpit et une chorégraphie qui secoue alors que la caméra zoome lentement pour rejoindre le petit chaos qui se déroule sous nos yeux, avant que l’on passe subtilement du noir au blanc et que la folie ambiante laisse place à un calme plat et à un tableau humain rassurant, nous rappelant que c’est ensemble que l’on fera avancer les choses.