Après deux EP très réussis sortis en 2022 et 2023, la jeune artiste française Léa Sen nous dévoile son premier album, LEVELS. Un opus tout en métaphores, philosophie et confidences où l’artiste se livre sur les différentes épreuves auxquelles elle a dû se confronter dans sa vie. Matérialisées en 10 niveaux, ces difficultés pourront être reconnues et ressenties par le plus grand nombre.

Un déménagement et des épreuves
C’est en 2019 que Léa Sen, compositrice, productrice et chanteuse parisienne, décide sur un coup de tête de partir vivre à Londres. Elle n’a alors aucun contact, aucun pied-à-terre et des compétences en anglais limitées. Pourtant, en seulement quelques années, elle s’est tissé un réseau de solides collaborations (Joy Orbison, Sampha, Don Toliver…). A force de travail acharné et de beaucoup de talent, Léa Sen est devenue une étoile montante de la scène londonienne. Elle rejoint alors en 2021 le label Partisan Records. Celle qui ne parlait presque pas un mot d’anglais il y a quelque temps, écrit à présent tous ses textes dans la langue de Shakespeare. Et nous allons le découvrir ensemble, il y en a des trésors !
Léa Sen nous présente donc son tout premier long format, intitulé LEVELS. Avant de plonger au cœur des 10 chansons composant l’album, faisons un rapide tour d’horizon de l’univers que nous propose la chanteuse franco-anglaise. Tout d’abord, l’album se décompose en 10 titres oui, mais surtout en 10 niveaux. Nous sommes transportés au sein d’un hôtel vide, isolé et imaginaire. Chaque étage, et donc chaque chanson, représente une étape de notre vie, d’évolution émotionnelle. Il s’agit d’une quête de sens, de découverte et d’expériences de vie, rassemblées en dix épisodes, gravissant les étages au fil de l’album. Nous sommes, tout au long de nos existences, constamment en train d’expérimenter. Léa Sen, avec LEVELS, nous aide à avoir un peu moins peur de vieillir, et nous invite à lâcher prise et vivre pleinement chaque stade de notre vie.
Se perdre dans ses rêves
L’ouverture de LEVELS se nomme Home Alone et pose parfaitement le cadre de tout l’album. Une balade introspective, majoritairement menée par la voix profonde de Léa, et accompagnée d’une guitare folk légère. On remarque également divers sons et voix incrustés dans le mix, apportant une texture sonore riche au morceau. La chanteuse nous invite dans ses moments de rêverie, comme bloqué dans ses pensées : Home Alone / chasing clues / Home Alone / In the end / Is is safe to fly again?.
Le second niveau, Aliens, apporte une rythmique nouvelle, beaucoup plus électronique. Les notes de guitares folk se mêlent aux nappes planantes et aux percussions saccadées. Dans un monde hostile et où l’on peut s’égarer, la chanteuse rend hommage à ses frères et à leur confiance en elle. But I don’t get what they see in me / The belief of brothers I feel.
Nous arrivons déjà au troisième étage de l’hôtel imaginaire, avec un morceau intitulé Edge Of The Map. Un titre plus groovy, également plus lent et aux sonorités électroniques surprenantes, ajoutant une originalité saisissante. Edge Of The Map parle de sa décision de déménager à Londres, de tout quitter pour aller vers l’inconnu. I can feel my heart leave / Time for me to move, move, move. La voix de Léa Sen se fait plus grave et suave sur ce titre, dévoilant l’étendue de sa palette vocale.
Mettre des mots sur ses émotions
Des sonorités encore différentes sont travaillées par l’artiste sur le titre Watersmoke. Elle reprend sa fidèle guitare, mais la voix semble au début lointaine, emplie d’échos. Une histoire d’amour nous est dévoilée ici, où l’artiste semble avoir tout donné pour une personne sans en obtenir assez en retour : Baby, I’ve lived a lie for you / Baby, water smoke is so lonely.
La moitié du voyage est là, personnifiée dans le magnifique Ghostwriter, l’une des pièces maîtresse de LEVELS. Les percussions se font plus prononcées, lentes et mélangées à de savoureuses notes à la guitare et des touches plus électroniques. Le morceau nous happe totalement, évoluant dans les inquiétudes et doutes de l’artiste. What if I’m making up truths / to keep you close?. Elle nous fait part ici de ses difficultés à mettre des mots sur ses pensées et émotions, et son envie d’avoir un ghostwriter pour l’aider à s’exprimer.
La chanson suivante, Video Games, nous interroge sur nos souvenirs. D’enfance principalement, qui peuvent parfois tourner dans nos têtes à l’infini, pouvant nous amener à confondre réalité et rêve. La composition se fait plus légère et claire sur ce titre. Comme instrument principal, la douce voix de Léa Sen, rapidement rejointe par quelques notes électroniques vaporeuses.
Aux doux accents jazzy, Lazy Days nous invite à rêver de moments doux et calmes accompagnés d’une personne familière avec laquelle nous pouvons partager des moments simples, jouer ou simplement ne rien faire. A sa manière, Léa nous dépeint une romance souhaitée, où le mental lâche enfin prise pour une libération totale : Trouble on my mind is no longer / Watch series and play some games.
Détenir les clés de sa propre vie
Apprendre à apprécier sa propre compagnie, à être seul dans se sentir isolé, est une épreuve pour beaucoup d’entre nous. Cela semble avoir été le cas pour la chanteuse londonienne. Le chapitre 8, How, est une douce introspection à la recherche de sa paix intérieure. Cherchant sa maison, sa place, elle se demande si elle n’est pas finalement, à l’intérieur d’elle même. What if I tried to be alone, be alone for now / Well I don’t know how.
Le prochain niveau nous arrête sur la chanson More Than Happy. Léa Sen semble faire en douceur le deuil d’une relation passée, lui permettant de mieux s’accepter et de se libérer. I was a song / You could never sing along to / Now you can be / More than happy. Nous retrouvons un guitare-voix mélodieux et délicat, nous permettant de nous focaliser sur les paroles et de s’en imprégner.
Finalement, le dernier étage. Telle la maîtresse des lieux, Léa Sen détient les clés de l’hôtel qu’elle a construit dans Lobby Boy. Un titre percutant, rythmé, aux accents R&B. Le titre est l’un des plus réussis de l’album, donnant envie d’appuyer sur la touche replay dès les dernières notes.
La conclusion à apporter à cet album LEVELS est qu’il reste une infinité de niveaux à monter, d’étage à gravir, d’expérience à acquérir. Elle se montre prête, armée de ses 10 premiers niveaux de vie, à affronter la suite de l’aventure. Lobby Boy / Tell me is it the end? / I’ve climbed all the levels / Can I try again?
A la manière d’un jeu vidéo, la vie semble être faite de quête et de défis mais où l’on finit toujours par trouver son chemin. Léa Sen, avec son premier album LEVELS, nous accompagne et nous rassure, à l’image d’une grande sœur. Nous ne sommes pas seuls dans ce grand hôtel de la vie. Chacun d’entre nous sur Terre expérimente, échoue, se relève, souffre parfois. Au final, c’est peut être ça, ce qui nous rend humains.
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Crédit photo : Claryn Chong