Vanille : « Je voulais faire de la bossa nova à la française »

Se faire un prénom, et non un nom : telle est la quête de Vanille. L’artiste raconte comment elle a sculpté son identité musicale loin des évidences, une voix singulière qu’elle s’apprête à faire vibrer sur scène, son unique espace de vérité.

La Face B : Pour ceux qui ne te connaissent pas, comment te présenterais-tu ?

Vanille : Je suis chanteuse, autrice-compositrice, et je fais de la pop solaire en français. J’ai commencé la musique assez tard, après des études et un boulot dans l’événementiel. J’ai appris en autodidacte et aujourd’hui, je vis de ma musique. C’est ma plus grande fierté.

La Face B : Tu t’es beaucoup entourée pour ton nouvel album, notamment sur la composition. Comment s’est passée la création ?

Vanille : Oui, c’est la première fois que je m’ouvre autant. Sur ce troisième album, j’ai travaillé avec plusieurs co-compositeurs : Vincha pour deux textes (Que l’amour et L’homme idéal), Niv, une artiste italienne produite par Bob Sinclar, et Alex Desinapsons, qui a réalisé tout l’album. J’ai aussi invité Flavia Coelho sur un duo, et Montmartre a remixé le morceau Regarde. J’ai vraiment commencé à créer une sorte de famille artistique autour de ce projet.

La Face B : L’album “Regarde”, qui sort le 13 juin, est très solaire. Tu peux nous en dire plus ?

Vanille : C’est une pop française métissée avec des touches électro. Je viens d’un univers acoustique, Alex d’un univers plus électronique : on a fusionné nos deux mondes. On y retrouve des percussions, des guitares latines, des rythmes brésiliens, parfois des références au blues africain. Ce métissage, c’est mon fil rouge depuis le premier album, que j’ai enregistré au Brésil.

La Face B : Tu as repris récemment Ce n’est que de l’eau, un classique de Jobim, Barouh, Distel… Pourquoi ce morceau ?

Vanille : Je l’adore, mais il a toujours été repris de manière très classique. Avec Alex, on a voulu en faire une version pop électro. À la base, je voulais qu’il lâche un peu prise sur mes morceaux, qu’il ose plus. Alors je lui ai proposé de bosser une reprise en toute liberté. Je lui ai juste envoyé une guitare-voix, et il l’a transformée à sa manière. C’est devenu la pierre angulaire de l’album. Après ça, on a tout recommencé avec cette nouvelle direction.

La Face B : Parlons du duo avec Flavia Coelho. Comment la rencontre s’est faite ?

Vanille : Je rêvais de faire un feat avec une Brésilienne, et Alex, qui avait déjà bossé avec Flavia, m’a proposé de lui envoyer un morceau. On a enregistré Balance, on a laissé un espace pour elle et elle a dit oui tout de suite. Humainement, ça a super bien matché. Et sur scène, elle est solaire, impressionnante, elle bouge hyper bien. C’était un vrai kiff.

La Face B : On sent dans ta musique un lien fort à la nature. C’est important pour toi ?

Vanille :
Oui, j’ai vécu trois ans en pleine nature près de la Dordogne. Ça m’a recentrée, même si j’ai fini par revenir à Paris pour le travail et une vie plus sociale. Ce lien à la nature est toujours présent, et il se ressent dans mes chansons.

La Face B : Et la Corse, ça compte aussi dans ton histoire ?

Vanille : Oui, ma grand-mère, que j’adorais, était 100 % corse. J’ai passé toutes mes grandes vacances à Pinot jusqu’à mes 20 ans. Je me sens chez moi là-bas. Il y a une influence méditerranéenne dans ma musique : ce mélange de douceur et de tempête, de mélancolie et de lumière. C’est très inspirant.

La Face B : Ton premier album a été enregistré au Brésil. Ça a changé ta façon de voir la musique ?

Vanille : Complètement. J’ai découvert la richesse harmonique de la musique brésilienne, cette capacité à mêler gravité et légèreté. Une musique sur laquelle tu peux pleurer et danser en même temps. C’est ça que je voulais capter : faire de la bossa nova à la française. J’ai bossé avec des musiciens brésiliens incroyables. À l’époque, je ne parlais même pas portugais, on communiquait par la musique. C’était une révélation.

La Face B : Et tes influences ?

Vanille : La bossa, la chanson française (Hardy, Barbara, Brel), et Françoise Sagan côté littérature. J’adore lire, autant les classiques que des auteurs comme Gaël Faye. J’aime aussi Feu! Chatterton pour la poésie de leurs textes.

La Face B : Tu pourrais te laisser tenter par un feat dans le rap ?

Vanille : Pourquoi pas. Ce que j’aime dans le rap, c’est l’amour des mots, le flow, les jeux de sonorités. Et les feats, c’est l’occasion de surprendre. J’y ai pensé plusieurs fois, sans savoir encore avec qui.

La Face B : Ton morceau Suivre le Soleil a cartonné avec plus de 35 millions de streams. Comment tu vis ça ?

Vanille : C’est fou. Il est sorti il y a 5 ans, a bien tourné au début, puis n’a cessé de grimper, jusqu’à exploser l’été dernier. Même des stars américaines se sont filmées dessus ! Pour moi, c’est une reconnaissance énorme, d’autant plus que c’est une chanson 100 % en français. Et au-delà de l’égo, c’est aussi ce qui me permet de continuer, financièrement et artistiquement.

La Face B : L’amour, les racines, l’identité : ces thèmes reviennent beaucoup chez toi. Ils sont liés ?

Vanille : Oui, tout est lié à l’amour. Et à la psychologie. Comment on aime, c’est souvent lié à nos racines, à notre histoire. Dans mon deuxième album, j’ai parlé d’amour fraternel, de place dans la fratrie. Ce sont des dynamiques qui m’inspirent beaucoup.

La Face B : Et depuis que tu es maman, ton rapport à la musique a changé ?

Vanille : Énormément. J’ai moins de temps pour moi, mais je suis plus efficace. Et surtout, j’ai découvert un puits d’inspiration immense avec l’amour maternel. C’est une source nouvelle, très puissante.

La Face B : Tu es aussi la fille de Julien Clerc. J’imagine que ça a eu un impact sur ton parcours. Comment on trouve sa place avec un tel héritage?

Vanille : Je ne voulais pas m’appeler Vanille Clerc, ça n’avait pas trop de sens pour moi. Juste Vanille, c’était mieux comme nom de scène. C’est peut-être aussi pour ça que j’ai commencé tard. J’ai pris une guitare vers 21 ans, j’ai commencé à écrire à 22-23. Je pense que c’était là en moi, mais je me retenais un peu.
Il y a eu une vraie transmission : j’ai grandi dans la chanson française, j’ai vu plein de concerts, croisé plein d’artistes… C’était super.

Mais l’envers, c’est que c’est peut-être un peu plus dur de trouver sa place. Tu te dis que la place musicale est déjà prise dans la famille. Il faut trouver ton ADN, proposer ton truc à toi. Je pense que ça m’a un peu pesée, mais dès le premier album, avec Suivre le Soleil qui a été bien accueilli, j’ai pu dépasser ça. Et tu vois, j’ai mis du temps à trouver ma voix. Je chantais trop doucement au début, puis j’ai appris à timbrer, à trouver mon style.

La Face B : Tu as aussi perdu Jean-Philippe Allard, ton manager, il y a un an.

Vanille : Oui… Il m’a accompagnée de 2018 à 2024. On a tout traversé ensemble. C’était une grande figure de la musique, passionné, humain, avec aussi une vraie vision business. C’est rare des personnes comme lui.

Il me rassurait, me donnait confiance. C’était la première oreille de mes chansons. C’était plus qu’un partenaire pro. Je disais souvent que c’était mon ange gardien. Presque une figure paternelle, mais on avait une relation simple, saine. Il connaissait les grandes lignes de ma vie, on était proches. Quand il est parti, j’ai senti un gros vide. En même temps, ça m’a obligée à me faire confiance.

Aujourd’hui, je suis avec sa collaboratrice, une femme de mon âge. Au début, on a dû trouver nos marques — elle aussi, elle a perdu son mentor. Maintenant, on forme une bonne équipe. Elle ne remplace pas Jean-Philippe, mais elle m’apporte autre chose. Elle a du temps, on peut beaucoup échanger, réfléchir ensemble. Elle est très investie, et ça compte énormément.

La Face B : Tu joueras à la Boule Noire le 19 novembre. C’est quoi ton rapport à la scène ?

Vanille : La scène, c’est génial. C’est le seul endroit où tu as un vrai retour humain. Sur Spotify, tu vois les streams, mais tu n’as pas le ressenti des gens. Là, tu le vis. Et comme cet album est plus dansant que les précédents, je pense qu’il va bien fonctionner en live.

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