Metro Boomin présente “A Futuristic Summa”, une délicieuse madeleine de Proust. 

Il arrive un jour dans la carrière d’un artiste où, le mieux qu’il puisse faire, c’est de revenir à ses origines. A Tribe Called Quest avec leur dernier album, “Magic” de Nas ou encore D’Angelo avec “Black Messiah”. Ce retour est souvent nécessaire : redevenir ce jeune artiste en quête d’identité musicale et d’influence. Un exercice souvent périlleux que Metro Boomin, producteur phare de la nouvelle génération d’Atlanta, a su magnifier. Aujourd’hui, revenons 15 ans en arrière où le kitsch côtoyait les Strip-Club et parlons de “A Futuristic Summa” de Metro Boomin.

Cover de la mixtape "A Futuristic Summa" de Metro Boomin

Une recette qui s’essoufflait 

Ce fameux retour aux sources était plus qu’important pour un artiste de l’envergure de Metro Boomin. Présent partout depuis plus de 13 ans, Metro Boomin a façonné à sa manière la façon dont on compose et construit la Trap d’Atlanta. Ses travaux avec Future, Young Thug, Migos, 21 Savage, pour ne citer que ces titans de cette époque, ont fait de Metro une machine à produire.

Mais qui dit surproduction, dit surchauffe.

Depuis 2018, Metro s’essaye à un son plus spectaculaire et cinématographique. Est-ce bon pour autant ? Pas forcément. Un “Not All Heroes Wear Capes” intéressant mais déjà formalisé présageait de la suite de sa discographie. Déjà, “Savage Mode 2”, suite du grand album sorti en 2016, sentait un mélange bâtard d’époque, une chimère d’influences digérées avec de gros sabots. Le drame arrive pour certains à “Heroes And Villains”, décevant par de bonnes idées gâchées par des choix artistiques douteux.

Choix de casting bancal ou immersion réduite en poussière, l’intérêt revient avec les albums en collaboration avec Future sortis en 2024, imparfait certes, mais faisant à nouveau appel à des procédés de productions qui manquaient dans sa musique. Et après un retrait médiatique de quelques mois, Metro commence le Rollout de son album. Le premier single est avec Roscoe Dash et les featuring présentés “originaux” et “inédits”. Là où beaucoup doutaient, Metro a su transformer l’essai. 

Bienvenu dans l’Atlanta des années 2010 

A Futuristic Summa” est une incantation nécromancienne visant à ressusciter les acteurs et les codes d’une époque disparue. Ce que l’on appelle communément “Futuristic Trap” est une école qui représente le son des Strip-Club d’Atlanta au côté kitsch et futuriste nanardesque. Les codes sonores et visuels étaient absurdes, mais c’est ce côté loufoque qui créait quelque chose d’unique. Encré à l’époque des mixtapes, on vivait à un moment où internet était inondé par des artistes qui cherchaient à rendre le plus hommage au pole dancing.

Dans ce contexte et au vu des codes d’une époque très “vieillissante”, le pari était plus que risqué. Faire un album où tout le principe est de rappeler des rappeurs d’une certaine époque : un son “ringard” était la seule chose qui pouvait stimuler l’imaginaire de Metro Boomin. Autre défi qui s’en découle, c’est que l’époque à laquelle Metro rend hommage n’est pas connue de tous. Évidemment, quand Griselda arrive avec Havoc, DJ Muggs et RZA comme influence, l’accessibilité est plus simple. Quand, ici, les références sont Waka Flocka Flame, Young Dro ou J Money, c’est tout de suite plus dur. 

« A Futuristic Summa » devait sauver Metro Boomin de son ennui.

Metro Boomin dans le clip de "Slidin" avec Roscoe Dash

Le divertissement comme seul repère

Disons le tout de suite, peu de projet rap en 2025 ont su être aussi addictif que cette mixtape. Le miracle se produit en deux temps : remettre un sous-genre aussi spécial sur le devant de la scène et le tout sur un double album. C’est du prodige.

Ce qui va rendre la mixtape extrêmement plaisante est sa construction. On est ici sur un mélange d’époque, où la nouvelle génération comme Lil Baby côtoie des tauliers comme Roscoe Dash. Le mélange fonctionne parfaitement bien et les rappeurs mainstream, habitués à la facilité sont ici mis en difficulté. Le BPM est plus élevé, et savoir suivre l’atmosphère de la production sans paraître corny est un exercice extrêmement compliqué. Les sons sont courts donc on ne ressent aucune redondance mais surtout, on y va à fond. Ce qu’on pouvait reprocher à Metro Boomin il y a quelques années était son manque de radicalité et de renouvellement : il n’osait pas, ne voulait pas froisser son public. Mais ici, c’est tout l’inverse.

Metro Boomin propose une lecture sincère et touchante d’une musique qui l’a accompagné dans sa jeunesse sans s’essayer au son racoleur actuel. Le son “Futuristic Trap” n’est en rien dénaturé et la production trouve une symbiose entre modernité et nostalgie, mais la plus grande force de ce projet est son statut de “vitrine de présentation”. Par sa justesse dans l’hommage, dans son exécution, le projet est une vraie porte d’entrée à une scène assez niche aujourd’hui : Metro a donné un cadre où des Waka Flocka, des Roscoe Dash, des Travis Porter ou des Young Dro peuvent se donner au maximum. Des rappeurs aussi bons, 15 ans après leur grande époque, c’est un véritable plaisir. Un véritable plaisir qui va se traduire par un intérêt non négligeable d’une jeune génération. On ressent toujours cette énergie, ces hooks féminins, cette production si caractérisée qui a fait le charme de cette époque.  

« A Futuristic Summa » C’est frais, cohérent et honnête, soit tout ce qu’on pouvait s’attendre de la musique de Metro Boomin

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