Chez La Face B, on adore les EP. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EP sortis récemment. Aujourd’hui, on s’intéresse aux EP d’Urde, Meech20x50 et So La Lune.
Urde – toujours demain vol. 1

Quand on écoute Urde, on a l’impression de tomber dans des fables satiriques à la Jean de La Fontaine : entre la cour du Roi-Soleil et Matignon, il y a toujours matière à critiquer. Avec la sortie de toujours demain vol.1, le rappeur s’inscrit dans une filiation critique qui provoque aussi bien rires que pics émotionnels.
Urde accentue chaque trait, au point que son aigritude revendiquée devient une signature. Elle incarne un certain esprit français, acide et parfois désabusé, mais profondément attaché à l’art de la critique. Dans un espace numérique imprégné de réactions instantanées, sa voix se distingue par un cri du cœur quasi saturé, capable de prendre du recul sur les problématiques contemporaines, qu’il s’agisse de notre consommation ou de la qualité des productions actuelles.
Le clip de iéééééééé illustre bien cette démarche, en se mettant en scène comme chasseur de gibier ou de Jean-Michel Blanquer, Urde associe la métaphore visuelle à la critique politique.
Mais Urde ne se limite pas à la provocation. Entre deux séquences de ragebait, il glisse des images marquantes qui dépassent l’anecdote pour toucher à une réflexion plus large. Cette tension entre ironie corrosive et sagesse grinçante fait la singularité de son écriture. Avec toujours demain vol. 1, Urde s’affirme ainsi comme une voix critique du rap français, à contre-courant du storytelling dominant. Son œuvre articule satire sociale, ironie mordante et imaginaire curieux.
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Meech20x50 – N2MU

Il y a presque un an surgissait le premier clip de Meech20x50, SUICIDE DOORS. Avant cette sortie, aucune trace de potentiel projet ou même de simples démos accessibles, le mystère était total. Et pourtant, dès ce premier jet, la qualité, tant auditive que visuelle, méritait d’être saluée. Depuis, Meech20x50 a enchaîné une poignée de singles, un passage remarqué chez Rinse FM en collaboration avec le label Jeune à Jamais, et désormais, le début de la saison estivale était marqué par N2MU (Nice 2 Meech U), un projet qui vient enrichir le disque dur officiel de l’artiste et confirme sa volonté d’installer une identité sonore bien à lui.
On y retrouve ses obsessions comme Chrome Hearts, les voitures, une solitude assumée, mais aussi des instrumentales aérées, presque spatiales, sur lesquelles Meech20x50 se permet des expérimentations intéressantes avec son timbre de voix. Le tout est enveloppé par une cover épurée qui reflète cette esthétique minimaliste et directe.
L’un des instants marquants du projet demeure la collaboration avec Coyote Jo Bastard, rappeur dont la singularité réside dans sa capacité à édifier des passerelles entre la scène française et les États-Unis. Cette rencontre illustre avec clarté l’ambition de Meech20x50 : se situer à la croisée des styles tout en préservant une identité artistique distincte.
Avec N2MU, Meech20x50 trace déjà une ligne de fuite claire. Une musique berçante, tournée vers l’expérimentation et suffisamment accrocheuse pour marquer les esprits.
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So La Lune – LEAKA

La première rencontre avec So La Lune rappelle celle qu’ont pu provoquer PNL : entre incompréhension pour certains et fascination totale pour d’autres. Son univers fonctionne comme un champ gravitationnel où l’on entre avant d’être happé. Suivre So La Lune, c’est accepter de monter dans un train lancé à toute vitesse, sans véritable possibilité de retour en arrière.
Sous une pochette pixellisée, LEAKA surgit par surprise, célébrant le disque d’or de Fissure de Vie. Mais plutôt qu’un simple bonus, ce nouvel EP confirme une esthétique sombre et hantée. So La Lune poursuit l’exploration de cette “fissure”, ce trouble existentiel qu’il chante et rappe avec une voix glaciale, comme un marqueur d’identité sonore.
Le projet s’inscrit à contre-temps, là où l’été incarne une certaine effervescence, So La Lune choisit l’hibernation. Sur Zeleph, il se compare d’ailleurs à l’antagoniste de Fairy Tail. Cette imagerie témoigne de la profondeur de son univers, une magie noire qui mélange introspection et mélancolie.
Musicalement, So La Lune reste fidèle à sa démarche d’explorateur, chaque piste s’apparente à une halte différente. L’artiste continue de kicker avec énergie tout en déployant une écriture où la fragilité et la dureté coexistent.
Le moment fort de l’EP réside dans Lili et Koda, dont la production superpose des couches de piano à la frontière entre orchestral et cloud rap. Avec LEAKA, So La Lune confirme l’ampleur de son magnétisme. Discret sur scène, il offre pourtant dans sa musique tout ce qu’il a de plus personnel.
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