Chez La Face B, on adore les EP. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EP sortis récemment. Aujourd’hui, on s’intéresse aux projets de Gen, Huntrill et Cherry Pie.
Gen – ECHO ECHO
Une fois plongé dans la soupe Gen, difficile d’en sortir sans l’impression d’avoir nagé dans un bouillon d’étrangeté. Son écriture, toujours aussi intuitive qu’abracadabrante, réussit un petit miracle. Avec son nouveau cinq titres ECHO ECHO, il creuse encore là où sa musique cogne le plus fort : les relations. Celles qui dépassent tout, avec parfois l’ombre de Dieu qui plane, et d’autres plus intimes, sculptées au couteau, comme dans Papa lune.
Gen a enclenché plusieurs vitesses depuis Gennifer, un projet qui ouvrait les volets sur un monde aussi chaotique que consolant. Dans ECHO ECHO, on se demande quelle mouche l’a piqué pour trouver certaines lignes et structures de couplets, tout comme pour ses productions qui pèsent sans jamais créer de contraste abrupt entre elles et sa voix.
La musique de Gen a une composition chimique singulière, mais une chose est sûre, elle est assez raffinée pour intriguer. Il relate tout autant les péripéties d’un monde vacillant que des réflexions plus abstraites. Au final, Gen s’impose comme un artiste qui teinte les esprits autant que son époque, de ceux qui ajoutent toujours une nuance de couleur là où il n’y en avait pas. ECHO ECHO ricoche dans la tête, encore et encore.
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Huntrill – LE BRUIT DE LA MACHINE A BILLETS
À ce stade, on peut se demander quand Huntrill parviendra à épuiser l’ensemble du champ lexical de l’argent. Probablement jamais, et quelque part, on commence à espérer qu’il ne s’arrête jamais. Avec LE BRUIT DE LA MACHINE À BILLETS, il revient exactement là où on l’avait quitté, au cœur de la trap, dans cette zone où il maîtrise chaque détail comme s’il avait lui-même réglé la cadence de cette machine.
Contrairement à ses précédents projets, Huntrill s’autorise ici une palette de flows plus variée. L’introduction, empreinte d’une certaine mélancolie, ouvre d’ailleurs un espace d’interprétation plus large et nuance son personnage. Car, derrière son attitude revendicatrice et revancharde, demeure un artiste aux multiples niveaux de lecture, où l’humour occupe systématiquement une place centrale au milieu d’un rap social, mais égocentré.
Et puis surgit la référence à Gucci Mane, passage presque obligé pour tout artiste qui maîtrise ce pan du rap. Cette fois, il convoque le Gucci de 2010. ANTICAPITALISTE, avec sa prod en boucle qui évoque l’élégance poussiéreuse de The Alchemist, vient sceller l’atmosphère du projet : celle d’un artiste qui proclame « n’avoir aucune insécurité ».
Tout semble couler de source dans cette course matérialiste. Il était temps qu’il dévoile ce projet, tant il s’impose déjà comme un sérieux candidat à figurer dans notre top de l’année. Paiement accepté.
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Cherry Pie – TITAN
Le froid glacial de ces derniers jours nous permet d’apprécier encore plus certaines propositions musicales. En ce moment, c’est le projet commun entre Cherry Pie et le producteur BBP qui nous enveloppe dans un véritable cocon. TITAN apparaît comme l’aboutissement naturel d’un début d’ascension pour Cherry Pie, qui affine depuis maintenant un an une signature artistique de plus en plus reconnaissable.
Son écriture se développe, on a l’habitude de l’entendre parler de thèmes sombres, mais ici sa plume redouble d’effort et se montre visuelle. La proposition est à la fois très familière au niveau de la construction des titres, avec des refrains la plupart du temps chantés, mais aussi singulière. Sa voix est un vrai terrain de jeu, on la retrouve autant dans les graves que dans les aigus, irritée comme sensible, donnant parfois l’impression qu’il est en featuring avec quelqu’un d’autre, comme au début du titre L’ÉTRANGER.
TITAN cristallise, lui aussi, toute une époque. C’est un miroir tendu vers une génération marquée par le « avant/après » du rap français post-2015, coincée quelque part entre la noirceur de SCH et la poésie brute de PNL. Dans ce décor, Cherry Pie et BBP réinterprètent ces codes et réussissent à créer une alchimie qui prend à chaque morceau.
BBP, pourtant habitué à produire pour des poids lourds, trouve en Cherry Pie une complémentarité idéale. Les deux aliens semblent sortir du même vaisseau, parfaitement accordés sur la même orbite.
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