Soyons honnête, quand on lance un média sur la musique, il y a des artistes qu’on rêve secrètement d’interviewer. En haut de cette liste, il y avait Adam Green, héros musical qu’on pensait réservé aux gros médias. Pourtant, la légende raconte qu’après avoir lu la lettre qu’on lui avait écrite, Adam Green avait envie de nous rencontrer. On est donc allé le voir dans sa loge avant sa dernière date parisienne pour parler de son dernier album, Engine Of Paradise, mais aussi de la vie, de la technologie et de sa proximité avec une certaine scène française.
Version Anglaise plus bas / English version below
La Face B : La première question que je pose toujours c’est comment ça va aujourd’hui ?
Adam Green : Bien, bien. Je suis en plein milieu d’une tournée, je me suis réveillé ce matin à Gand, en Belgique. Demain, je serai à Amsterdam. C’est un peu comme un petit best of de l’Europe tu vois, Londres, Manchester, Glasgow… En suite on va à Berlin, Munich, Zurich, Vienne… C’est une façon rapide de voir l’Europe. Je suis un peu fatigué par la tournée. J’ai encore beaucoup de choses à faire, alors je dois reprendre le contrôle.
LFB : Tu viens de sortir une BD et un album : peux-tu me parler de la création de ces deux œuvres ?
AG : Je les vois comme connectées. Je vois la bande dessinée comme étant un peu le compagnon de l’album. Et d’une autre manière, j’ai pensé l’album comme une bande son de la BD. J’ai écrit le script de la BD en même temps que les paroles de l’album, donc si tu regardes bien les répliques dans la BD, tu retrouveras des paroles de l’album. Normalement, pour l’écriture, je vais aller marcher et écrire tout ce qu’il y a dans ma tête. Ou alors je vais écrire des longs textes interminables pendant quelques heures. Je ne sais jamais vraiment si je vais mettre ça dans une chanson ou autre chose… Pour moi, les choses sont liées à la période à laquelle je les écrit. C’est une opportunité pour moi d’écrire sur un mythe, comme Guerre et Paix, et y mettre ma propre introspection. J’ai ma propre personnalité et je vais l’incorporer avec le mythe. C’est comme quelque chose que j’ai envie de faire sortir de moi, et j’utilise le mythe comme un guide pour raconter une histoire. Dans ce cas précis, j’ai écrit le scénario avec ma femme, Jasmine. Elle est informaticienne chez Google, et on parle beaucoup de technologie et d’œuvres d’art. Du coup, nos conversations sont un peu un mélange entre la technologie et des idéaux géopolitiques. Le scénario ressort en fait de nos conversations à la maison. À partir du moment où on a décidé de l’intrigue, j’ai commencé à écrire le script. Et quand j’ai écrit le script, j’ai parcouru tous mes petits trucs, pris des textes par ci par là et ai décidé quel personnage allait le dire. Je pense que tous mes personnages sont un peu moi : comme une horloge de ma personnalité où chaque personnage serait une pièce. Et quand je vois telle réplique, je peux voir de quelle partie de ma personnalité ça vient.
LFB : Quand tu composes un album, il s’agit de ton imaginaire : est-ce que tu t’ouvres pleinement ou est-ce que tu dévoiles simplement des clés ouvrant sur ton for intérieur ?
AG : Quand je fais de la musique, c’est un peu différent. La musique est plus naturelle pour moi. C’est vraiment dans ma nature, parce que j’ai toujours écrit des chansons depuis très jeune. Même avec les Moldy Peaches, beaucoup de morceaux dans l’album avaient été écrits quand j’avais 14 ans. Je ne me souviens pas de ma vie avant d’avoir écrit des chansons. Les chansons pour moi sont liés aux émotions. Certains mots sont liés à des sentiments. Ça n’a pas besoin d’avoir une vraie narration, c’est juste une association d’émotions. Comme une carte émotionnelle qui raconte à quel endroit j’étais, quelle émotion je ressentais… J’aime le fait de ne pas avoir à tout expliquer, même à moi-même. Il y a deux jours, on était en voiture avec mon tour manager et il voulait écouter Sixes & Sevens, un album que j’ai écrit il y a presque 10 ans et que je n’avais pas réécouté depuis. J’ai écouté tout l’album et je me suis dit wow, Sixes & Sevens évoquaient beaucoup de petites perversions de mon âme. On peut voir que ça me tourmente pendant tout l’album. Et c’est drôle parce que j’ai jamais pensé à ce que c’était, mais maintenant que j’ai du recul, je vois. Les paroles retranscrive l’état dans lequel j’étais. En utilisant cette méthode, où je comprends pas totalement ce que je fais, je crée une situation où je peux avoir une meilleure compréhension, parce qu’il n’y a pas vraiment de filtres.
LFB : Oui, tu gardes de la spontanéité.
AG : Oui et tu peux vraiment comprendre le ressenti, presque comme s’il y avait des gargouilles qui se balançaient dans le morceau, et tu peux voir à quoi elles ressemblent – et elles sont dégoutantes. Mais c’était le reflet de ce que j’avais à l’intérieur.
LFB : Aladdin était la bande son d’un film et Engine of Paradise agit comme la bande son d’une BD. Désormais, est-ce que tu penses pouvoir composer de la musique sans projet annexe ?
AG : Oui, je pense que je peux et que je le referais. Mais maintenant, j’ai l’impression d’être dans ce truc où je suis intéressé par le fait de créer une oeuvre d’art complète. Je m’intéresse beaucoup aux artistes qui créent des mondes, des univers.. Chaque sens – l’odorat, le goût, le toucher, l’ouïe – forme une nouvelle dimension. Et en tant qu’artiste, je me demande qui je suis dans chacune de ses dimensions. J’aime le fait d’essayer de créer un monde. J’aime cette idée et pour moi, les films sont l’opportunité de créer ses oeuvres d’arts complètes. Donc je suis devenu un peu obsédé par l’idée de créer quelque chose qui soit plus que de la musique. J’écris un poème depuis un an et demi, sur le futur qui régresserait en époque moyen-âgeuse, et c’est assez drôle de le faire en poème. Je pense que je finirais par composer une musique pour aller avec. Les parfums ça m’intéressent aussi, ça serait un truc rigolo à explorer.
LFB : Le fait d’être impliqué dans chaque étape de ton art, en vieillissant, est-ce que tu deviens pas un peu control freak (accro au contrôle) ?
AG : Je peux être comme ça parfois, mais par exemple pour le livre, je travaillais avec Pioneer Books qui l’a publié, et mon ami Joey m’a appelé après que je lui ai envoyé la couverture et il m’a dit «s’il te plaît, laisse plutôt Daniel dessiner la couverture». Et j’étais là «vraiment ?» et il m’a dit «oui, il va faire un meilleur job». Donc je me suis effacé et effectivement il a fait un super boulot. Je pense que je peux être un peu comme ça mais cela dit, je ne suis pas un perfectionniste. Pour moi, le point essentiel c’est la genèse de l’idée originale. Je n’aime pas quand les gens me disent «tu devrais écrire un livre pour enfant». Je déteste qu’on me suggère une idée, pour moi l’idée doit être mienne. Ça doit venir de mon for intérieur, de mon espace, mon jardin d’où viennent mes idées. Quand j’ai l’inspiration, je peux aller demander l’avis des gens et j’y suis ouvert, mais je dois être à l’origine du commencement.
LFB : Dans Engine of Paradise, il y a, à mon sens, deux types de chansons : certaines où tu es comme acteur, et d’autres où tu es observateur. Comment as tu fait le choix d’être soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’histoire ?
AG : C’est drôle parce que j’adore lire des critiques musicales, ou des critiques sociétales. D’un côté, tu es dans le personnage et de l’autre tu le critiques. C’est comme être schizophrène. Quand je suis dans un état de création artistique pure, je ne reconnais pas le critique. Et en même temps, il faut qu’il y ait quelqu’un qui me réveille le matin, qui me fait checker mes mails. Une sorte de mains aux commandes à l’intérieur de la machine, et pas juste moi qui me plonge dans mes centres d’intérêts. J’ai une famille, ça me remet les pieds sur terre. Quand j’explore la nature sauvage, je vais m’arrêter pour vérifier que je n’ai pas besoin d’aller racheter du lait. C’est un peu comme un reflet : pour la main à l’extérieur de la machine, il y a une main à l’intérieur de moi qui commande.
LFB : À propos d’Engine Of Paradise, penses-tu que la technologie est censée nous rendre heureux, ou est-ce qu’elle nous détruit ?
AG : Oui, jusqu’à un certain degré. Quand j’ai eu un iPhone, le premier truc que j’ai fait c’est de faire un film avec. J’aime l’idée de la technologie, des oeuvres d’arts et de faire des choses. À partir du moment où on enregistre mes albums avec des outils professionnels, je commence à les utiliser pour un peu tout. Mais je pense que c’est différent : quelqu’un de mon âge peut avoir ce point de vue sur la technologie. Pour moi, ça serait bien que je poste moins de trucs sur Instagram. Je ne devrais pas regarder Twitter tous les jours. Pour moi ça va, mais apparemment, on m’a dit que pour des gens plus jeunes, ce n’est pas vraiment un choix. Si tu es un gamin, tu dois avoir un certain nombre d’abonnés sur Instagram pour avoir le job que tu aimerais avoir. C’est une situation différente car j’ai une histoire du monde. Je connais ma communauté et je sais que je n’ai pas besoin d’Instagram comme un enfant de douze ans. J’aime l’idée d’avoir du temps libre, d’aller faire des balades, aller au musée et traîner avec des gens sans regarder son téléphone. Mais c’est un truc de vieilles personnes. C’est comme ça que je m’amuse.
LFB : C’est drôle car pour moi, Engine of Paradise tourne autour de ça. J’utilise beaucoup les réseaux sociaux et pourtant je ne me suis jamais senti aussi seul.
AG : Pour moi la solution, ou n’importe quelle suggestion de solution pour ce genre de choses, ça serait d’approfondir encore plus les relations humaines autour de soi. C’est comme si tu pouvais voir la solitude créée par les réseaux sociaux et que ça te donnait envie d’aller la guérir chez les autres. Comme si, au milieu d’un ouragan de réseaux sociaux qui emporte tout le monde, tu voulais rattraper les gens, car ils sont vrais. En même temps, c’est triste cette fusion qui se produit entre les gens et les intelligences artificielles. C’est un processus lent, plus lent d’ailleurs que ce que les gens pensent. On s’est en quelque sorte laissés encercler à la discrétion des intelligences artificielles qui nous poussent vers un chemin annexe. Tout ce qu’on commande, voit, écoute et fait fait partie d’un réseau d’algorithmes arrangés, basés sur des opportunités que le réseau t’attribuent.
LFB : Est-ce que le fait d’avoir enregistré ton album de manière analogique est une réponse à la société ?
AG : Moi je voulais que l’album sonne comme un câlin. Je voulais faire un album qui a le son d’un whisky qui mature dans un baril depuis 20 ans. Mon album a été enregistré sur du matériel qui a une soixantaine d’années.
LFB : J’ai la sensation qu’avant, tu étais un ado qui voulait agir comme un adulte, et désormais, tu es un adulte qui voudrait agir comme un ado.
AG : C’est vrai, peut-être, ça a du sens. Peut être qu’une sorte de changement s’est produit. J’ai été signé très tôt par Rough Trade, je sortais en Angleterre, faisait des concerts… Pour mes premiers, les gens se demandaient où étaient mes parents. Maintenant, je suis moi-même parent et tout ce que je veux c’est du temps pour libre pour dessiner avec des crayons.
LFB : Tu as un lien assez fort avec des groupes comme Coming Soon, ou Ryder The Eagle : comment les as tu rencontrés et quel est ton ressenti concernant la scène française en ce moment ?
AG : Je crois que j’ai rencontré tout le monde via Kimya qui s’est mariée avec Angeli et qui vivaient dans la ville de Annecy. Et par conséquences, j’ai rencontré Coming Soon qui viennent de Annecy, puis Ryder The Eagle. Je connaissais des gens de Paris, quand je jouais là-bas dans les années 2000. Maintenant, Leo joue dans les Pirouettes, ils jouaient des chansons même avant nous en concert, ce qui est dingue car ils viennent juste de faire l’Olympia. Et aussi Herman Dune évidemment. Quand on est venus pour la première fois à Paris avec Moldy Peaches, nos concerts étaient organisés par Benoit. Plus tu vieillis, plus l’histoire est longue. Maintenant quand je vais voir un médecin, ils sont toujours plus jeunes que moi. On dirait des gamins, pour moi. Mais la scène française est cool. Il y a des gens brillants individuellement. Ils voyagent, viennent à New-York ou en Californie, mais il n’y a jamais eu cette sensation que Paris était un haut-lieu pour eux. Ça n’a jamais été comme ça. Il y a toujours eu une contradiction entre les gens qui chantent en français et ceux en anglais. Par exemple, les Pirouettes font un beau parcours en chantant en français. J’aime les chansons de Jacques Brel ou Françoise Hardy, Edith Piaf. C’est bien que ça soit en français. Mais je comprends pourquoi les gens ne le font pas. Depuis que j’ai vieilli, il y a un nouveau langage qui a émergé, l’anglais d’Europe continentale. C’est ni de l’anglais british, ni de l’américain, c’est propre à eux. C’est pas vraiment défini mais quand tu viens d’Angleterre ou d’Amérique, tu peux voir cette nuance.
LFB : Comment réagis-tu aux émotions des gens insufflées par ta musique ?
AG : C’est drôle parce que, honnêtement, je me lève chaque matin en pensant que personne connaît ma musique. Hier on était à Gand, et je disais à Jackie Cohen (ma première partie) que j’étais super content que les gens viennent me voir à Gand, parce que cet endroit me paraissait un peu isolé. Et elle me disait «tu es juste dans le déni sur le fait que les gens connaissent ta musique». Et je le suis vraiment, je ne sais pas pourquoi mais dans ma tête, personne n’écoute ce que je fais. Et des fois tu as des surprises, comme ce soir où le concert est complet, donc ça veut dire que les gens écoutent. Mais parfois j’ai l’impression de faire de la sous-culture.
LFB : Penses-tu que l’amour peut sauver une âme ?
AG : Je l’espère. J’ai même l’espoir que l’art puisse faire une différence aussi. Je suppose qu’il existe certaines formes d’œuvres d’art qui diffuseraient des sortilèges magiques capables de changer et transformer les gens. Un reflet que les personnes pourraient voir. La vie n’est pas un miroir avec une seule face. C’est la gentillesse envers les autres qui pourra sauver le monde. Ça nécessite que les gens fassent des introspections et qu’ils découvrent leurs points communs avec les autres. Je suis optimiste de cette manière.
English Version :
La Face B : So the question I always ask first, and the most important one is : how are you today ?
Adam Green : Good, good. I’m right in the middle of a tour, I woke up this morning in Gent, Belgium. Tomorrow I’m gonna be in Amsterdam. So it’s kind of like a little bit of the greatest of Europe you know, London, Manchester, Glasgow… And then we’re going to Berlin, Munich, Zurich, Vienna… It’s like a fast way to see Europe. I’m a little bit tired from the tour. I have a lot more to go so I have to take control.
LFB : You just released a comic book and an album : what can you tell me about the creation of both pieces ?
AG : I kind of saw them being connected, like I saw the comic book was kind a of a companion to the album. And in a way, I was thinking of the album as a soundtrack to the comic book. I wrote the script to the comic at the same time I was writing the lyrics of the album so if you look at the comic book, and the lines, you’ll see repeated lines from the music.
Usually the way I write is like I’d go for a walk, and I’ll write down whatever is on my head. Or I would type for few hours a never ending scroll of text. I don’t usually know if I’m going to put it on a song or anything… To me, things are more marked by the time period I wrote them in. It’s more of a chance for me to take a myth, like the War and Peace story, and I take my own introspection. I have my own self and I put it in negociating with that myth and I want to put myself through the myth. It’s more something I want to push out of me and I use the myth like a guide to sort of tell a story. In this case, I wrote the storyline with my wife Jasmine. She’s a technologist who works for Google, and we talked a lot about everything from technology and things that have to do with artwork. So our conversations mix things about technology and ideas of geopolitics. This storyline kind of stand out of our conversations at home. Once we decided what the plot was, I got down to writing the script. And when I write the script, I kind of go through all of my little things, cut out little lines and decided which character is going to say it. But I think all the characters are me : like a clockwork of my personnality and each character is a piece of it. And when I see this line or another, I can see which part of my personnality.
LFB : When you do an album, it’s all about your imaginary : do you fully open the door or do you give keys to people about your inner self ?
AG : When I do music, it’s a little bit different. Music for me is more natural. It’s very in my nature, cause I’ve always written songs since I’ve been pretty young. Even with The Moldy Peaches, a lot of the stuff in that record is stuff that I wrote when I was 14 years old. I don’t really remember my life before I was writing songs. Songs for me are more about feelings. Some words are attached to a feeling. It doesn’t have to make a narrative sense to me, it’s more about the association of the feeling. Like an emotional map that tells a story where I was at, what the feeling was… I like the fact that I don’t actually have to explain it in a way, even to myself. I was driving two days ago with my tour manager, and he wanted to listen to Sixes & Sevens, an album I wrote almost ten years ago and I hadn’t really heard a lot of that songs since then. I listen to the whole thing and I thought to myself like wow, Sixes & Sevens was speaking to all the little corruptions I had in my soul. You can see that they are tourmenting me throughout the all record. It’s funny cause I never think about what it is, but now that I’m far away from it, I can see. The lyrics tell the story of where I was at in a specific way. By using this method, of not understanding what I am doing, I’m actually creating a situation where we can better understand it because it’s like a little bit less filtered or something.
LFB : Yes, you keep spontanity.
AG : Yes, in a way you can really understand the feeling almost like if there was gargoyles dangling out of the songs, and you can see what they look like and they look kind of disgusting. But I think they were truly the reflection of what was going on inside.
LFB : Aladdin was a soundtrack for a movie, and Engine of Paradise is like the soundtrack of a comic book. Now, do you think you can create music without parallel project ?
AG : Yes, I think I could and I will again. But right now, I feel like I’m in the middle of this thing, I have this sort of interest in this idea of total artwork. I got interested in this idea of artists that sort of spend time making worlds, universes… Each sense, smell, taste, hearing, touch in a way, seem like different dimensions. And I wonder as an artist : who am I in each of these dimensions ? I like trying to make up a world. I like that ideas and movies for me felt like an opportunity to do this sort of total artwork. So I just got obsessed with the idea of something that is more than music. I have been writing a poem for a year and half, about the future regressing Middle Age time again, and it was just fun to do it as a poem. In a way, I might make some music that goes along with it. I’m also interested in fragances, so that would be a fun way to explore.
LFB : Being involved in all part of your art, as you get older, did you become sort of control freak ?
AG : I can be like that, but sometimes, for exemple on the book, I was working with Pioneer Books that published the book, and my friend Joey called me when I sent him a cover image and he said «please let Daniel design the cover». And I was like «really ?» and he said «yes, he’s really going to do a better job». I just laid back and he did a great job. I think I can be a little bit like that sometimes but I’m also not that much of a perfectionnist. And I think for me, the big sticking point is the genesis of the original idea. I don’t like when people say «you should write a children book» I hate when people say that I should do an idea. I don’t like when people have suggestions like that, and for me the general idea should be mine. It has to come from the inside of me, my own little area, my garden and it’s where my ideas come from. I feel like if I have that inspiration and then I get going and ask people, I’m open to what people says, but it has to start with something I want to do first.
LFB : In Engine of Paradise, there is two kinds of songs to me : you’re playing both the actor and the observer. How did you choose to be rather inside or outside of the story ?
AG : I think it’s funny because I like reading music criticism and society criticism. In one hand you’re inside of the character and the other side you are criticising. It’s almost like being schizophrenic. When I’m in the pure romantic art state, I definetly wouldn’t acknowledge the critic person. At the same time, there needs to be somebody that gets me up in the morning and checks my email. So there has to be some hands inside the machine and it can’t be just me, diving into area of my own interest. I also have a family, earthbound. I think when I go explore the wilderness, then I stop and go check if I need to buy some more milk. Maybe it’s just the reflexion of that same hand oustide of the machine, there’s like a hand inside of yourself that governs.
LFB : About Engine Of Paradise, do you think that’s technology is supposed to make us happy or that it destroys us ?
AG : Yeah, I mean to some degree. When I got an iPhone that took video, the first thing I did was to make a movie on it. I like the idea of technology, and artwork and doing things. As soon as we can record my albums on protools and stuff, I end up using that for anything. But I think it’s different : somebody who’s like my age can have this prospective of technology. For me, what would be good is to not post a lot of stuff on Instagram. I don’t really think I should look at Twitter everyday. For me, that’s fine, but apparently, younger people told me that for them it’s not really a choice. If you’re a kid, then you need to have a certain amount of instagram followers to get the kind of job you want to get in your life or something. It’s a different situation for me because I have history on the world. I think that I know the people in my community and I don’t need Instaram the way that you need it if you’re twelve. I like the idea of having free time, walks and going to the museum, hanging out with people and not looking at phones. But that’s just an old person thing to say. That’s my version of fun.
LFB : It’s funny because for me, Engine of Paradise is all about this. I use social networks a lot and yet I never felt so alone.
AG : For me the solution, or whatever proposal of solution for this type of thing is, is just dig deeper into the human relationships around you. It’s almost like you see around you the loneliness that social networking can create and it makes you actually want to clean other human beings. In the middle of a that technological hurricane that blow everyone away, you just want to hold on this people, they’re real. At the same time, it’s sad, the fusion that’s happening between IA and people. It’s a slow process, that’s is slower than what people can think. We sort of surrounded ourself to the discretion of IA and you can picture yourself being pushed along something outside. Everything you order, see, listen to and do is part of a network of arranged algorythms based on the opportunity the network wants to give you.
LFB : Is the analog recording of Engine of Paradise is a response to the society ?
AG : For me, I wanted to feel the recording like a hug. I wanted to make a record that has the sound of whisky, aged in a barrel for twenty years. My album is recorded on equipments that are sixty years old.
LFB : I have the feeling that before, you were a teenager acting like and adult, and now you’re an adult acting like a child in your music.
AG : Right, maybe, it makes sense. Maybe a trade kind of happened. I was signed really early with Rough Trade, going out in England, playing shows.. When I first started playing concerts, people were like «where are you parents ?». And now, I am a parent, and all I want is some free time to just draw pictures with crayons.
LFB : You have a strong connexion with people like Coming Soon, or Ryder The Eagle : how did you met them and what’s your feeling about the french scene right now ?
AG : I think I met everyone through the connexion of Kimya marrying Angelo who were from Annecy. And subsequently, Coming Soon that are from Annecy, and then I met Ryder The Eagle. I knew some people from Paris, bunch of different people from when I was playing here in the 2000s. Now Leo does The Pirouettes, they were playing songs before us which is crazy cause they just played the Olympia lately. And also the Herman Dune of course. Moldy Peaches first came over to Paris, our first show was organized by Benoit who runs this venue. As you get older, there’s a longer history. When I got to doctors, they’re now younger than me. They look like kids to me. French scene is cool. I think that there’s individually brillant people. They are traveling, coming to NY and California, and it never felts like Paris is a epic home base for them. It just never felts like that. There has always been a little bit of discrepancy between whether people sing in french or english. For example, The Pirouettes who are having a really great run doing french songs. I like the songs of Jacques Brel or Francoise Hardy, Edith Piaf. It’s nice it’s in french. But I understand why people don’t. Since I’ve grown up, there has become a new language, continental european english language. It’s not british or american english, it’s their own. And it’s not defined as a thing, but when you’re from America or England, you see that there are bands that exists in between language state..
LFB : How do you react to people’s feelings about your music ?
AG : It’s funny, I honestly wake up everyday thinking that no one knows about my music. Yesterday we were in Gent, I was telling Jacky Cohen (who opens the show) «you know what, I’m really happy that people came to see my show in Gent, cause that place seems pretty random to me». And she was like «you’re just in denyal that people know your music». I really am, for some reasons I have got in my head that nobody is listening. Sometimes you have surprise, like tonight it’s sold out, so people are listening. Sometimes I think like it’s subculture than I am doing.
LFB : Do you think love can save a soul ?
AG : I hope so. I still actually have hope that art can make a difference with it too. I assume that there is some kind of artwork out there that will cast some kind of magic spells that will change and transform people. There is some reflexion that people can see. Life isn’t a one-sided miror. It’s the actual kindness to other people that will save the world. That will also require people to have some kind of introspective looking to themself, and see what they have in common with other people. I’m optimistic in that way.