On termine notre après midi consacré à Porches avec notre rencontre avec l’américian. Malgré le confinement, les questions concernant Ricky Music nous brulaient le bout des doigts. On a donc discuté par mails de ce nouvel album, sa conception, la ligne fine entre le fantasme et la réalité, la couleur des chansons et un peu de fin du monde.
VERSION ANGLAISE EN BAS / ENGLISH VERSION BELOW
La Face B : Bonjour Aaron, comment vas-tu en ces temps assez étranges pour le monde ?
Porches : Salut. Je vais bien, je reste à l’intérieur et j’essaye de rester paisible.
LFB : Tu viens de sortir Ricky Music, cet album semble très divers musicalement avec des notes de soul sur Patience, de la pop avec Do You Wanna et même de la dance avec Madonna… Comment l’as-tu conçu ?
P : Je l’ai composé sur deux années, en écrivant de manière assez régulière. À un certain moment, je me suis retrouvé à avoir suffisamment de chansons où l’on avait l’impression qu’il y avait un album qui se créait. J’ai commencé à réduire le nombre de chansons que je voulais inclure, celles qui créaient le genre d’univers que j’avais à l’esprit. J’ai fait un genre de collage, avec un énorme dossier de chansons que j’ai rassemblées. À la fin, j’ai passé en revue ces souvenirs et j’ai essayé de recréer un instantané de cette période de ma vie.
LFB : Est-ce que la couleur de la chanson aura au final une influence sur ta façon d’utiliser ta voix ?
P : Absolument, bien que ce soit généralement une chose intuitive, et pas quelque chose que je décide explicitement de faire, mais chaque élément est censé réagir aux autres lors de la création d’une chanson.
LFB : Les chansons semblent avoir une âme différente en fonction de l’endroit ou elles ont été conçues. Cet album ayant été conçu à différents endroits, peux-tu nous dire quelle influence ont sur ta musique les lieux où tu te trouves ?
P : L’une des idées qui a guidé la réalisation de ce disque était d’essayer de saisir la disparité des humeurs et des attitudes que l’on peut ressentir en si peu de temps, les hauts et les bas, la gauche et la droite. Il est difficile de déterminer avec précision comment les lieux influencent ma musique, mais je pense que j’aurais fait un disque entièrement différent si j’avais vécu à trois pâtés de maisons de l’endroit où je vis actuellement.
LFB : Quel recul portes-tu sur ces chansons maintenant qu’elles sont figées pour l’éternité ? Est-ce que quand tu les écoutes, des souvenirs de l’époque ou elles ont été faites te reviennent ?
P : Je me souviens quand elles ont été faites et comment je me sentais quand je les ai faites. J’ai appris à ne pas trop penser à ces moments pour « l’éternité », la vie continue et on a ces fenêtres étranges sur notre passé. Il faut parfois se lancer.
LFB : Cet album semble naviguer entre la réalité et le fantasme… Comment as-tu traité ces chansons ? Quelle part de ta propre personne y as-tu injecté ?
P : Le fantasme est une grande partie de ma réalité, tu vois ce que je veux dire ? J’ai injecté autant de moi-même que je sais le faire dans ce disque.
LFB : Maintenant que le projet Porches a presque 10 ans, as-tu le recul nécessaire pour analyser toutes les étapes qui t’ont menées à cet album ? Comment analyses-tu tes anciens albums en comparaison à Ricky Music ?
P : Eh bien, j’essaie toujours de penser à ce que j’ai fait dans le passé, surtout pour pouvoir grandir et ne pas me répéter. Mais avec celui-ci, j’ai eu l’impression de regarder en arrière et de réfléchir aux différents « processus » de création de ces disques, et d’essayer de trouver les espaces positifs et de trouver comment les habiter, ou ce qui fonctionne à leur sujet.
LFB : J’ai adoré ta version live de Do You Wanna qui sonnait presque grunge. Est-ce la direction que tu envisages pour tes futurs concerts ? Aimes-tu retravailler tes chansons pour le live afin de leur donner une cohérence globale ?
P : J’ai toujours aimé modifier un peu les choses pour le live. Et j’ai vraiment été très intéressé par les guitares récemment, en centralisant un peu tout autour de ça, quoi que cela signifie. Les spectacles que nous avons préparés sont assez fidèles à la façon dont le disque sonne, mais il y a aussi des arrangements spontanés, plus lourds, différents, pour que ça reste excitant pour tout le monde.
LFB : Je trouve la pochette de ton album absolument sublime. Peux-tu m’en parler ? Est-ce un autoportrait ? Quelle résonance a-t-elle comparée aux chansons qu’elle abrite ?
P : Il s’agit en effet d’un autoportrait. Il m’a semblé approprié d’avoir cet autoportrait d’un album accompagné d’une peinture que j’ai faite de moi-même pendant cette période. J’étais juste un peu obsédé par l’idée d’être aussi sincère par rapport à l’expérience, ou à mon expérience de l’expérience, que je peux l’être (rires).
LFB : Tu étais impliqué dans l’écriture et la réalisation des vidéos pour Do You Wanna et Patience. Est-ce important pour toi d’être impliqué dans toutes les parties de Porches ? Envisages-tu de réaliser des clips pour d’autres personnes ?
P : Je ne sais pas si je serais assez bon pour réaliser des vidéos pour quelqu’un d’autre. J’ai beaucoup de mal à m’engager pour la réalisation de mes propres vidéos. Ce n’est pas quelque chose sur lequel je n’ai aucun contrôle, mais je suis totalement à la merci de quand une idée vient ou ne vient pas. Mais, oui, il est très important pour moi d’être impliqué dans tous les visuels.
LFB : As-tu des coups de coeur récents (musique, livres, films …) à partager avec nous ?
P : J’écoute en boucle Do What You Gotta Do de Nina Simone depuis quelques jours.
LFB : Si tu devais choisir une dernière chanson à écouter avant la fin du monde, laquelle serait-ce et pourquoi ?
P : Je pense que je ferais juste face, sans chanson.
English Version :
La Face B : Hi Aaron, how are you during this really weird period for the world?
Porches : Hello. I am doing alright, I’m staying inside and trying to keep it peaceful.
LFB : You’ve just released Ricky Music, this record seems really diverse musically, with soul notes on Patience, or pop music on Do You Wanna, and even dance music with Madonna…. How did you conceive it?
P : I conceived it over about 2 years of writing pretty regularly. At a certain point I found myself going back to enough songs where it felt like there was an album in there. I started to kind of narrow down which ones i wanted to include, which ones created this kind of world I had in mind. Putting it together is kind of like a collage, where I have this huge folder of songs i’ve collected, and at the end i sift through these memories and try and recreate a snap shot of that period in my life.
LFB : Will the colour of the song will ultimately influence the way you use your voice ?
P : Absolutely, though this is usually an intuitive thing, not something that I actively decide to do, but every element is meant to be reacting to the others when making a song.
LFB : The songs seem to have a different soul depending on where they were conceived. This album having been created in different places, can you tell us how the places you are in, influence your music?
P : One of the ideas in piecing this record together was to try and capture the disparity in moods and attitudes that one can experience in such a brief period of time, the highs and the lows and lefts and rights. Hard to pinpoint how places influence my music, but I think i would’ve made an entirely different record if lived even 3 blocks away from where i do now.
LFB : How do you feel about these songs now that they’re frozen for eternity? When you listen to them, do you remember when they were made?
P : I do remember when they were made, and how I was feeling when I made them. Freezing these moments for “eternity” is something I’ve learned to not think about too much, life goes on, and you have these weird windows into your past. You gotta just go for it sometimes.
LFB : This album seems to navigate between reality and fantasy… How did you treat these songs? How much of yourself did you inject into them?
P : Fantasy is a large part of my reality, does that make sense? Ive injected as much of myself as I know how to into this record.
LFB : Now that the Porches project is almost 10 years old, do you have the necessary hindsight to analyse all the steps that led you to this album? How do you analyse your old albums compared to Ricky Music?
P : Well, yea I always try and be thinking about what I’ve made in the past, mainly so I can grow, and not repeat myself. Though with this one I felt like I was looking back, and really thinking about the varying process’ in making these records, and trying to find the headspaces that were positive and figure out how to inhabit those, or what was working about them.
LFB : I loved your live version of Do You Wanna that sounded almost grunge. Is this the direction you’re considering for your future shows? Do you like to rework your songs for the live show to give them a global coherence?
P : I’ve always like switching stuff up for the live show. And i’ve definitely been very into guitars recently, kind or circling back around to them, whatever that means. The shows that we had been preparing for, were pretty true to the way the record sounds, but there are also some spontaneous, heavier, different arrangements happening as well to keep it exciting for everyone.
LFB : I think the cover of your album is absolutely beautiful. Can you tell me about it? Is it a self-portrait? What resonance does it have, compared to the songs on it?
P : It is in fact a self-portrait. It just seemed fitting to have this self-portrait of an album accompanied by a painting I made of myself during that time. Just kind of obsessed with being as true? to the experience, or my experience of the experience, as i can haha.
LFB : You were involved in writing and directing the videos for Do You Wanna and Patience. Is it important for you to be involved in all parts of Porches? Do you plan to direct videos for other people?
P : I don’t know if I’d be any good at directing videos for anyone else. I have a pretty hard time committing to videos of my own. It’s not something that i don’t have any control over, i’m totally at the mercy of when an idea comes or doesn’t come. But, yes it’s very important to me to be involved with all the visuals.
LFB : Do you have any recent favourite (music, books, movies …) to share with us?
P : ‘Do What You Gotta Do” by Nina Simone has been on repeat the last couple days.
LFB : If you had to choose one last song to listen to before the end of the world, which one would it be and why?
P : I’m think I would just try and take it in, no song