ADN : Acide du noyau des cellules vivantes, constituant l’essentiel des chromosomes et porteur de caractères génétiques. Avec ADN, La Face B part à la rencontre des artistes pour leur demander les chansons qui les définissent et les influencent. Désormais, dans l’objectif toujours plus fort et nécessaire de mettre en avant la scène indépendante qu’on aime, on ouvre le format aux Labels. Aujourd’hui c’est Bertrand Burgalat, grand patron de Tricatel, qui nous délie l’histoire de son label en deux sessions d’anecdotes, entre les labels qui l’ont influencé et les artistes qui l’ont poussé à la création de Tricatel.
Quatre labels qui m’ont particulièrement fasciné et influencé :
Mike Alway et el Records
Au milieu des années 80, quand j’ai 20 ans, ce label est en rupture totale avec l’époque et en même temps totalement en avance. Saint Etienne, Cornelius lui doivent beaucoup, et bien d’autres parfois même sans le savoir. Le graphisme est magnifique, tout est conçu pour rester mystérieux, les musiciens ne sont jamais mentionnés, même le nom des artistes est choisi par Mike qui agit comme un metteur en scène (je ferai par la suite exactement le contraire). J’ai travaillé avec Mike et Louis Philippe, Momus, Simon Fisher Turner et, juste avant de monter Tricatel, Mike et moi avions un projet de label.
Tot Taylor et la Compact Organization
Une écurie tout aussi mystérieuse et fantasque. A la différence de Mike, Tot est lui-même un musicien accompli et un songwriter incroyable, comme le montre ce morceau The Girl With Everything.
Ou un de ses derniers singles, Featurette, enregistrement aujourd’hui d’une chanson qu’il avait écrite quand il avait 14 ans…
Michel Esteban, Michael Zylka et Ze Records
Entre New York et Paris, Ze a sorti des merveilles avec l’aide de musiciens fantastiques comme August Darnell. Les patrons faisaient chanter leurs copines (Cristina, Lizzy Mercier…), pas un seul de leurs disques n’a pris la moindre ride.
Trevor Horn, Paul Morley et ZTT
En quelques mois, ZTT a enchainé les succès : Art Of Noise, Propaganda, FGTH. Une version plus conceptuelle de Stock, Aitken et Waterman, qui commençaient à inonder les charts (avec de grandes réussites comme Mel & Kim). J’étais très ami avec Suzanne, de Propaganda, qui m’avait bien expliqué le fiasco qui avait suivi l’ascension du label, les procès etc, et il semble que la gestion de Jill Sinclair, l’épouse de Trevor Horn, y avait beaucoup contribué. Son mari lui-même devait lui demander de l’argent de poche, et je crois que le chanteur de Frankie était tétanisé quand ils sont passés pour la première fois à Top of The Pops, car il continuait de toucher le chômage pour vivre et avait peur que son allocation soit supprimée.
Et quatre artistes m’ont donné envie de créer le label pour sortir leur travail :
Louis Philippe
J’avais produit son album Sunshine en 1994. C’était en juin, à Chiswick, dans un studio tenu par un ancien ingénieur de Trojan, Vic Keary. Un moment inoubliable. Philippe avait rameuté ses amis musiciens, Danny Manners, Dave Gregory d’XTC, Dick Cuthell des Specials, même si beaucoup de morceaux se jouaient à deux dans le studio. En le réécoutant je me dis que j’étais bien présomptueux de jouer la batterie sur des titres comme Delta Kiss, je ne suis pas Stevie Wonder, ou de la flute traversière, mais il n’y avait pas de touche undo, c’était encore sur bande, et du coup je devais peut être m’appliquer un peu plus…
Etienne Charry
Ce morceau ouvre le deuxième album d’Etienne Charry, Aube radieuse serpents en flammes. Si j’ai créé Tricatel c’était aussi parce que j’admirais son travail depuis Oui Oui.
Eggstone
Ils étaient sur le même label que Louis Philippe au Japon, Trattoria. Ils jouaient en trio une pop énergique, élégante et hyper bien écrite, bref exactement l’inverse des standards de l’époque. Il y avait à Malmö une super scène avec eux, les Cardigans, les Mopeds, le studio Tambourine et le label Vibrafon. J’ai aussi travaillé avec Cinnamon, à Stockholm.
Count Indigo
J’avais produit et arrangé un single pour lui pour Cowboy Records, avec deux arrangements différents : le premier, que la maison de disques trouvait trop old school, et que je préfère (je ne trouve que l’instru sur Youtube) et ensuite celui-ci.
Pour moi Bruce était -et est- un Bryan Ferry noir, aux antipodes des poncifs, particulièrement répandus à l’époque. Comme avec April March, il nous a fallu beaucoup de temps pour sortir son album, Homme Fatale, le fait de ne pas être dans la même ville n’arrangeait pas les choses. Je considère Trinity comme un des meilleurs titres que j’ai pu faire. Il n’a eu aucun succès.
Avec A.S Dragon.