On a découvert Dana Gavanski plus tôt cette année avec la sortie de son magnifique premier album Yesterday Is Gone et sommes tombés sous le charme de Wind Songs, son EP de reprises enregistré quelques semaines avant le confinement. On a voulu en savoir un peu plus sur sa conception, sur le choix des morceaux à la fois éthérés, mélancoliques et déterminés et sur le parcours de la musicienne serbo-canadienne basée à Londres. Nous lui avons posé quelques questions…
VERSION ANGLAISE DESSOUS / ENGLISH VERSION BELOW
La Face B : Tu as grandi au Canada et fait des études d’ingénieur du son avant de te consacrer à la musique. Quand et comment la musique est-elle devenue la chose principale ?
Dana Gavanski : Oui, j’ai un peu étudié l’ingénierie du son (sound engineering). Le diplôme s’est avéré ne pas être très bon, et je me suis trouvée fatiguée de regarder tellement d’écrans donc c’est là que j’ai recommencé la guitare. Je l’emmenais à l’école et en jouais dans mon temps de studio plutôt que de travailler sur des projets.
J’ai commencé à jouer tout le temps, et me suis lentement hissée vers l’écriture de chanson et jouer des petits concerts mais je n’ai pas commencé à me prendre un peu plus au sérieux avant le moment où j’ai enregistré mon premier LP.
LFB : Tes plans de tournée pour ton premier album Yesterday Is Gone qui est sorti il y a quelques mois ont été mis en pause. Comment Wind Songs ton EP de reprises a pris forme ? Comment as-tu décidé d’enregistrer des reprises ?
DG : Oui… Wind Songs a en fait été enregistré quelques semaines avant la pandémie, avant même que je ne puisse imaginer que les choses se passeraient ainsi.
J’ai décidé de les reprendre assez naturellement. Je jouais quelques reprises durant mes deux derniers tours et pensais que ce serait sympa de m’essayer à les enregistrer. Les gens semblaient apprécier la reprise de King Crimson. Et j’adore être en studio et créer des sons, essayer des trucs, donc c’était une bonne excuse pour y retourner. C’était aussi un bon procédé pour savoir ce qui se passait soniquement dans ma tête, d’essayer de capturer les sons j’absorbais et expérimenter avant de travailler sur un nouvel LP.
LFB : Comment as-tu choisi et sélectionné les chansons qui apparaissent sur Wind Songs ?
DG : Je jouais I Talk To The Wind de King Crimson pendant ma tournée de novembre 2019 et Never Too Far de Tim Hardin en tournée avec Damien Jurado, donc j’étais assez confortable avec ces chansons. Jano Mome était une chanson que j’avais apprise à Belgrade quand j’ai pris de leçons de chant traditionnel il y quelques années et je la chantais depuis quelques temps déjà. Les deux dernière je les admirais juste. Judee Sill est une inspiration musicale immense. J’adore sa musique depuis des années et The Kiss doit être l’une des chansons les plus magnifiques qui existe. La reprise de Chic, je l’ai découverte à travers Robert Wyatt. Ses reprises sont des choses à contempler. J’adore sa reprise de Te Recuerdo Amanda de Victor Jara.
LFB : Tu as joué live la plupart des morceaux qui apparaissent sur le EP. Y-a-t-il une différence entre les jouer live et les enregistrer ?
DG : Oui c’est assez différent. Jouer quelque chose live et l’enregistrer est selon mon expérience différent à cause des superpositions (layering) et de l’expérimentation. Les live sont un peu plus simplifiés en ce moment. Moins de jouets avec lesquels jouer.
LFB : L’album et le EP expriment tous les deux des émotions profondes de manière magnifique. Nous avons lu que tu avais fait un stage d’écriture à Banff en Alberta qui t’as appris « l’art d’être seule avec ses émotions ». Est-ce que tu peux nous en parler ?
DG : Merci. Faire ce stage était peut-être la première fois que j’ai commencé à ressentir un peu plus une partie de ce monde d’écriture de musique. Enfin, c’était au moins le début du processus de reconnaissance, et du lâcher prise de ce sentiment de syndrome de l’imposteur… J’avais mon propre studio dans les bois dans les montagnes enneigées, parmi des musiciens incroyables et c’était très dur d’être seule là-bas à cause de toute l’excitation. Je veux dire j’ai toujours du mal à être seule et à me concentrer pour écrire de la musique, à me convaincre de continuer et de finir une chanson. Mais être là-bas pendant 3 semaines, avec un magnifique piano à queue et des guitares, et voyant d’autres musiciens faire leur choses m’a fait me prendre un peu plus au sérieux, ou du moins à considérer l’acte de faire de la musique plus profond, avec la sévérité du contexte qui m’entourait.
LFB : Yesterday Is Gone et Wind Songs sont sortis à seulement quelques mois d’intervalle. Est-ce qu’ils sont reliés d’une manière ou d’une autre ?
DG : Pas du tout ! Frères peut-être, mais il y a environ un an entre les deux donc il y a eu beaucoup d’évolution entre temps.
LFB : L’artiste et saxophoniste anglais, Alabaster DePlume a joué sur plusieurs morceaux de l’EP. Pourrais-tu nous parler un peu de cette collaboration ?
DG : C’est venu assez naturellement. Il était au TRC (Total Refreshment Centre) en même temps que nous, dans son studio et quand je l’ai croisé dans les couloirs, je lui ai demandé s’il aimerait bien jouer sur quelques morceaux et il était libre ! Je suis chanceuse !
LFB : Tes vidéos diffèrent en style mais sont toutes, comme tes chansons, très intimes et personnelles. De celle remplie de soleil pour Good Instead of Bad, à At Last I Am Free et ses multiples superpositions, et la prise live a capella de Jano Mome. Comment approches-tu la conception de tes vidéos ?
DG : J’aime travailler avec des gens qui m’inspire, et il se trouvent que les trois sont des amis. Mon approche est généralement celle qui est la meilleure pour la chanson et ce qui me semble intéressant à ce moment.
LFB : Tu as habité dans différentes villes, tu as grandi à Vancouver, étudié à Montréal, vécu à New York, passé du temps à Belgrade, et tu habites maintenant à Londres, quelle relation as-tu avec tous ces endroits ?
DG : Prèsque ! J’ai habité à Toronto, pas à New York. Donc, je suis née à Vancouver, puis ai déménagé à Montréal pour étudier/vivre ailleurs, et ai finalement vécu 7 ans là-bas. Puis j’ai déménagé à Toronto pendant un moment, pour y découvrir la scène musicale et voir une autre ville. Et quand j’étais là-bas j’ai commencé à aller à Belgrade pendant des mois car ma famille avait un endroit là et ailleurs en Serbie. Et pour Londres, mon frère est à Londres depuis quelques années maintenant, et Full Time Hobby (sa maison de disque) est basé ici donc cela fait un moment que je viens à Londres et je m’y arrêtais en chemin pour la Serbie.
LFB : Y-a-t-il quelque chose que tu as découvert récemment (pas nécessairement de la musique) que tu voudrais partager avec nous ?
DG : Les galettes ! Je ne suis normalement pas fan de choses sucrées, mais l’automne approche et c’est le moment parfait pour les tartes. Aussi, le mime et les clowneries ! Je viens juste de commencer. Donc pas sûr de où ça va mener.
ENGLISH VERSION
La Face B: You grew up in Canada and studied sound engineering before dedicating yourself to music. How and when did music become the main thing?
Dana Gavanski: yeah, I studied a bit of sound engineering. The degree didn’t end up being so good, and I found myself to be fatigued from staring at too many screens so that’s when I picked up a guitar again. I would bring it to school and practice in my studio time rather than work on projects.
I began practicing all the time, and slowly worked myself up towards writing songs and playing some smaller shows but I didn’t begin taking myself a little more seriously until around the time I recorded my first LP.
LFB: Your plans of touring for your first album Yesterday is Gone which came out a few months ago were put to a standstill. How did the Wind Songs cover EP take shape and come to be? / How did you choose to do covers ?
DG: Yeah… Wind Songs was actually recorded a few weeks before the pandemic broke out, before I could even imagine things would turn out this way.
I choose to do them quite naturally. I had been playing a couple covers during my last two tours and just thought it would be nice to try my hand at recording them. People seemed to be enjoying the King Crimson cover. And I love being in the studio and creating sounds, trying things out, so it was a good excuse to go back in there. It was also a nice process of trying to figure out what was happening in my mind sonically, to try and capture what sounds I was absorbing and experiment before working on another LP.
LFB: How/when did you find them and decide to make them your own? How did you select them?
DG: I had been playing King Crimson’s I Talk To The Wind during my November 2019 tour and Tim Hardin’s Never Too Far on the tour with Damien Jurado so I was pretty comfortable with those songs. Jano Mome was a song I’d learnt in Belgrade while taking some traditional singing lessons a couple years ago and had been singing it for a while already. The last two I just admired. Judee Sill is a huge musical inspiration. I’ve loved her music for years and The Kiss must be one of the most beautiful songs out there. The Chic cover, I discovered through Robert Wyatt. His covers are a thing to behold. I love his cover of Victor Jara’s Te Recuerdo Amanda.
LFB: You’ve been playing live some(/all?) of the songs which feature on the EP. Is there a difference between playing them live and recording them?
DG: Quite different. Playing something live and recording is different in my experience because of the layering and experimenting. The live shows are a little more simplified at the moment. Less toys to play with.
LFB: The album and the EP both express deep emotions in the most beautiful ways. We’ve read you had done a writing residency in Banff in Alberta, that taught you “ the art of being alone with emotion”. Can you tell us a bit about it?
DG: Thank you. Doing that residency was maybe the first time I began to feel a bit more a part of this world of making music. Well, it was at least the beginning of this reckoning process and of letting go of that imposter syndrome feeling… I had my own studio in the woods in the snowy mountains, among some amazing musicians and it was really hard to be alone there sometimes because of all the excitement. I mean I still find myself struggling with being alone and focusing on writing music, of convincing myself to follow through and finish a song. But being there for three weeks, with a beautiful baby grand and guitars, and seeing other musicians do their thing made me begin to take myself a bit more seriously, or at least consider the act of making music more profoundly, with the severity of the backdrop that surrounded me.
LFB: Yesterday is Gone and Wind Songs have come out just a few months apart. Would you say they are related somehow?
DG: Not at all! Siblings maybe, but there is about a year between them so there is a lot of growing in that in between time.
LFB: British artist, saxophonist Alabaster DePlume played on several songs of the EP. Can you tell us a bit about this collaboration?
DG: It came quite naturally. He was at the TRC (Total Refreshment Centre) at the same time as us, in his studio and when I bumped into him in the hallway, I asked him if he’d like to play on some of the songs and he happened to be free! So lucky me!
LFB: Your videos differ in style but all are, like your songs, very intimate and personal. From the sun filled Good Instead of Bad to the multi layered At Last I Am Free and the live a cappella take of Jano Mome. How do you approach the making of your videos?
DG: I like to work with people who inspire me, and all three just happen to be friends of mine. My approach is generally just what’s best for the song and what sounds interesting to me at the time.
LFB: You’ve lived in different places, you grew up in Vancouver, studied in Montreal, lived in New York, spend time in Belgrade, and you are now based in London, what relationship do you have with these cities?
DG: Almost! I lived in Toronto, not New York. So, I was born in Vancouver, then moved to Montreal to study/live somewhere else, and ended up living there for about 7 years. Then I moved to Toronto for a bit to check out the music scene and see another city. And while there I began visiting Belgrade for a few months at a time as my family had a place there and elsewhere in Serbia. And with London, my brother has been in London for a few years now, and Full Time Hobby (her record label) is based there so I have been visiting London for a while and would usually stop by on my way to Serbia.
LFB: Is there something you’ve discovered recently (not necessarily music) that you would like to share with us?
DG: Galettes! Not usually a fan of sweets, but autumn’s approaching and it’s the perfect time for pies. Also, mime and clowning! I’ve only just recently started. So, not sure where that’ll go.