Un miroir entre le passé et le présent, c’est ce que nous proposent Vassilena Serafimova et Thomas Enhco. Tel un reflet entre ciel et mer.
C’est le mariage de deux instruments par le prisme de personnalités, virtuoses avant tout, qui font scintiller un peu plus l’éclat des créations de Jean-Sébastien Bach à travers le temps. Comme on s’amuse avec les miroirs et les reflets, Bach Mirror est un jeu de lumières subtil qui nous dévoile une pièce exquise.
La musique de Bach, une matière inépuisable
Il n’y a certainement pas d’égal à l’héritage de la musique de Jean-Sébastien, c’est un fait.
On ne compte plus les artistes qui ont repris le travail de l’Allemand. Chaque époque a su trouver une clé de lecture associée à ses compositions.
Les originaux demeurent magistraux même avec le temps. Certains y consacrent leur vie sans jamais percer tous les secrets du compositeur. C’est aussi ça le charme de Bach. Une musique qui traverse les âges sans prendre une ride, constamment retravaillée et redécouverte.
Plus qu’une inspiration, Bach anime ceux qui l’écoutent et le jouent. On pense aisément aux interprétations passionnées d’un Glenn Gould qui transpirait d’une sueur fiévreuse tout le nectar créatif de l’oeuvre de Bach.
Le compositeur n’est pas que l’affaire des auditeurs de musique classique. Il accompagne la majorité d’entre nous depuis le berceau tant son travail a imprégné chaque strates de notre culture. Tout le monde connait un air de Bach et a su apprécier à un moment de sa vie une mélodie passagère, qui même lorsqu’elle est inconnue demeure familière.
Utiliser une matière aussi riche que les compositions de Jean-Sébastien Bach c’est se donner la possibilité de découvrir l’infini. C’est un terreau à la fertilité garantie et ça Thomas Enhco et Vassilena Serafimova l’ont bien compris.
Dans cet album, les morceaux choisis n’étaient initialement pas écrits pour un duo. Ce sont des pièces pour orchestre, pour des solo.
C’est donc tout un travail de retranscription à laquelle se sont livrés les deux artistes pour arriver à délivrer une oeuvre pour duo.
Qui plus est avec des instruments pas prévus sur ce type de compositions. Disons le clairement, l’association Piano Marimba relève de l’extra-ordinaire. C’est donc une chance inouïe pour nous de pouvoir l’expérimenter.
Ce sont des structures que nous n’avons pas l’habitude d’entendre mais qui se fondent avec une grâce certaine dans nos oreilles.
C’est par exemple toute la personnalité d’un piano fou qui s’exprime. Il peut aussi se muer en guide pour paver le chemin de la douceur pour un Marimba qui vient apporter cette rondeur sublime à la musique.
Les rôles s’inversent, se mêlent et se confrontent dans un tourbillon d’émotions dont les artistes ont le secret.
Le Miroir est une symbolique toute trouvée avec un artiste comme Bach dont les oeuvres sont autant d’éclats qui scintillent entre passé et présent.
Le jeu des miroirs c’est aussi le jeu de doubles, deux artistes, deux instruments, deux personnalités. Les reflets sont omniprésents, jusque dans la structure des morceaux qui en s’appuyant sur l’existant donnent naissance à de nouvelles pièces.
A l’image des miroirs, c’est un dialogue permanent entre les sonorités, les genres et les énergies.
Les deux artistes dont la rigueur et le travail minutieux permettent de nous proposer ce délice musical, y vont aussi de de leurs propres compositions.
Car Bach ouvre des portes insoupçonnées et délie les affres de la créativité.
Toute la symbolique du miroir est retranscrite dans le génial clip d’Avalanche, où les lumières, le ciel et la mer prennent le rôle de ces reflets omniprésents.
La complémentarité artistique, une symbiose amicale avant tout :
Si le disque nous transporte autant c’est aussi et surtout parce qu’il est le fruit d’une collaboration artistique bien nourrie par une amitié de longue date.
L’amour pour la musique et la nature est un lien infaillible qui a su réunir les artistes à travers le temps.
On doit leur rencontre à l’inspiration sublime de la professeure de Piano de Thomas Enhco. C’est Gisèle Magnan qui a su imaginer le potentiel créatif de ce duo et de leurs instruments. La complémentarité s’est construite sur scène aux quatre coins du monde et grâce à une trajectoire liée par cet amour de l’improvisation et de l’expérimentation.
Car oui, il ne faut pas oublier que Thomas Enhco est issu du Jazz. Vassilena Serafimova est de son côté imprégnée du folklore bulgare qui laisse beaucoup de place à l’improvisation.
Ce duo c’est d’abord la curiosité qui le guide, nous avons pu le constater avec leur très beau premier album en duo Funambules sorti en 2016. Créer et jouer de la musique reste avant tout un jeu et Bach Mirror en est la parfaite illustration.
Dans le disque on ressent ce registre théâtral. Ce sont des personnages incarnés à tour de rôle. Une vraie discussion s’installe entre les deux instruments. On se cherche, on se trouve, on se pique et on s’enlasse.
En clair Bach Mirror est un disque qui ravira les connaisseurs car il est truffé de détails et de clés de lecture sur l’oeuvre de Bach. Il est en plus, une porte d’entrée vers une musique classique qui parle aux émotions avec une facilité déconcertante. C’est aussi là le talent de nos deux artistes.
On ne peut que conclure en évoquant la nécessité de voir ce disque vivre en live. Car plus que des musiciens Vassilena Serafimova et Thomas Enhco sont des performeurs. Leurs instruments vivent à travers eux, ils sont l’incarnation d’une musique qui fait chavirer. C’est un souffle, une énergie qu’il faut savoir contempler et pouvoir saisir.
Bach Mirror est une expérience, un voyage magnifique et par dessus tout, un disque somptueux.
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