Face à l’urgence climatique et écologique, le secteur de la Musique a un rôle prépondérant à jouer. C’est pourquoi le mouvement Music Declares Emergency vient d’ouvrir en France avec une déclaration visant à rappeler à tout un chacun à prendre sa part de responsabilité sur la question du climat et de l’urgence écologique Mais aussi de rappeler aux gouvernements la nécessité d’agir maintenant pour inverser la chute de la biodiversité et atteindre l’objectif de zéro émission de gaz à effet de serre d’ici 2030 au plus tard.
C’était il y a bientôt un an, la sortie de Room With a View. C’est avec le collectif de danseurs de La Horde et les 18 danseurs du ballet National de Marseille que l’album a vu le jour, désireux de mettre le sujet de l’urgence climatique sur le tapis, Rone et la Horde ont construit un ballet électronique qui se nourrit des thèses de collapsologie et des notions d’effondrement.
Nouveau Monde, un titre évocateur de cet album résume parfaitement l’urgence climatique et écologique à laquelle nous faisons face et la nécessité de changer nos comportements.
A la fin du morceau ce sont les paroles d’Aurélien Barrau, astrophysicien et Alain Damasio l’écrivain et ami de Rone qui nous interpellent. À coup de paroles évocatrices et poignantes les deux personnages hauts en couleur nous offrent des pistes de réflexion sur notre société et sur nos actions.
Damasio pose l’idée selon laquelle nous devons passer par des modes de perception, des affects qui sont engendrés notamment par l’art pour arriver à changer notre regard et notre comportement.
Ces paroles font un écho tout particulier et remettent au coeur de la question écologique et climatique le rôle de l’art.
Si on parle de cet album et de ce morceau c’est parce que Rone est un des signataires de la déclaration de « Music Declares Emergency » et comme lui ils sont plusieurs, Fakear, Lord Esperanza, Hyphen Hyphen pour ne citer qu’eux en France mais c’est aussi un mouvement international, Thom Yorke, Massive Attack, Billie Eilish ou Brian Eno ayant signé la première initiative du mouvement en 2018.
C’est désormais à la France de suivre le pas et de s’engager dans cette voie.
« MDE France s’adresse à tous·tes les acteur·rices de la filière musicale quels que soient leur esthétique ou leur profession. Elle est gérée par des bénévoles de divers horizons : artistes, professionnel·les de la musique (musique enregistrée, live, médias, audiovisuel) et de la mode responsable. Des individus convaincus que la musique a le pouvoir d’incarner mais aussi de soutenir la transformation culturelle nécessaire à un avenir durable. » Music Declares Emergency
Trois grands piliers façonnent cette déclaration, l’entraide et le partage d’expertises en tant que filière et communauté, s’exprimer face à l’urgence climatique et écologique et travailler pour rendre nos entreprises écologiquement durables et régénératrices.
Alors oui, ils sont bien loin les arbres citoyens de Yannick Noah, mais il ne s’agit plus aujourd’hui d’informer épisodiquement, cette déclaration vise à changer structurellement le secteur pour ne pas reproduire les erreurs du passé.
La musique comme beaucoup d’autres secteurs contribue grandement au réchauffement climatique et à la pollution, on pense tout de suite au live et aux gros festivals générateurs de beaucoup de déchets mais la pollution n’est pas que l’affaire du spectacle. C’est aussi des façons de produire et de distribuer pour le physique notamment, c’est encore les tonnes de mails échangés entre attachés de presse et média, aux pièces jointes toujours plus lourdes qui viennent surchauffer les data center.
C’est tout un tas de petits éléments qui constituent le coeur de nos entreprises et structures qui peuvent être modifiés.
Mais pour cela il faut s’unir, s’informer et informer, partager les pratiques et s’entraider.
Concrètement c’est une action qui commence par des mots, mais ces mots rassemblent et de l’union de tout un secteur ressortiront des actions concrètes, des espaces de discussions et de partage et surtout la fin d’une indifférence et d’un marasme complet sur de tels sujets. On ne résumera pas mieux le propos que sur le site de la déclaration :
« Voici quelques suggestions pour vous aider à agir après avoir signé notre déclaration :Persistez à dénoncer l’urgence climatique et écologique. En plus de votre engagement politique, agissez au niveau individuel. Quel que soit votre environnement, vous pouvez vous impliquer de multiples façons. Le résultat sera aussi hétéroclite que notre communauté. Certes, sans changement systémique radical, les actions individuelles peuvent sembler futiles ; en réalité, ces actions aident à ouvrir la voie et à façonner le monde à l’image des valeurs que nous portons. Elles permettent de créer le dialogue et de donner une place prépondérante à l’écologie dans nos vies quotidiennes. Nul besoin de tout faire à la fois : nos voix et actions collectives résonneront à l’unisson au sein de la communauté musicale. » Music Declares Emergency
Pour ce qui est du concret, des actions sont déjà prévues, parmis elles, on retrouve :
- conférences et tables rondes sur diverses manifestations
- annuaire d’acteur·rices engagé·es, carte interactive
- conseils en formation
- participation à des études et états des lieux avec nos partenaires
- animation d’un forum de professionnel·les engagé·es
- campagnes dans le cadre du Green Deal (en collaboration avec MDE International et nos partenaires européen·nes)
- éducation artistique et culturelle
Pour conclure en musique (bien évidemment), le morceau de clôture de l’album de Rone, Solastalgia vient donner de l’espoir aux prémices de ce mouvement, il sonne comme un balbutiement, l’image d’une parole qui se fait difficile, apprendre à parler est un changement, réapprendre à vivre en est un également.
Les balbutiements trouvent leur nature dans le commencement de quelque chose, le début d’un mot, peut être sommes-nous à l’orée de quelque chose de nouveau, et à l’image d’un langage à apprendre c’est toute la vision de notre secteur qu’il faut redécouvrir.
On parle beaucoup en ce moment de déconstruction, le propos de cet album déconstruit aussi bien qu’il construit, sans jamais être moralisateur ni reproduire les écueils trop souvent rencontrés de la culpabilisation des individus et sans tomber dans le piège de la mièvrerie et de la naïveté sur un thème si important, ce qui compte aujourd’hui, c’est l’action.
A ce jour, 4272 structures, artistes et individus ont déjà signé la déclaration, alors, à notre tour on fait passer le mot, on signe et on s’engage parce que plus que jamais la musique à son rôle à jouer !
Pour signer ou s’informer sur la déclaration, rien de plus simple, il suffit de suivre ce lien.