Notre rencontre avec CORPS, on s’en souvient comme si c’était hier. Un concert à la maroquinerie en 2019, un moment de noirceur et de brutalité qui nous avait totalement retourné et qui nous avait laissé K.O. Un uppercut comme on en fait peu, suivi par d’autres ensuite et une écoute assez régulière de son premier EP et de Sur L’autoroute. Alors que 2020 a mis un frein à ses projets, CORPS et de retour avec Ingénue, premier extrait de CARNIVORE prévu pour le 28 mai. Et le moins qu’on puisse dire c’est qu’au petit jeu du corps à coeur, CORPS surprend et ravi.
.
Une évolution dans le son…
Mais que lui arrive t-il ? Voilà ce qui jaillit dans nos esprits à la première écoute d’Ingénue, le nouveau titre de CORPS. Il faut dire que le morceau à de quoi surprendre à première vue avec ce côté attirant, groovie et dansant, ce petit piano qui sonne doux à l’oreille.
Lui qui nous avait habitué à un univers désespéré et sombre, plus proche de Mad Max que de Disney, aurait-il succombé aux appels de la lumière ? On vous rassure tout de suite, il n’en est rien.
En réalité, c’est même plutôt l’inverse. On pourrait voir en Ingénue une sorte de virus musical. Un travail d’infiltration parfait dans l’univers des « groupes disco-pop » (cela même qui nous donnent envie de nous percer les oreilles avec un tournevis rouillé), qui sous couvert de nous faire danser explore toutes les obsessions et les noirceurs déjà découverte dans la musique de CORPS. Ainsi le morceau se joue de manière assez disruptive. Si on note une évolution musicale, s’autorisant ainsi s’éloigner du minimalisme musical qui le caractérisait, on retrouve dans Ingénue les ingrédients qui faisait tout le sel de sa musique; entre un beat puissant et obsédant et une guitare répétitive qui apporte au titre ce petit côté déglingué qui l’éloigne de la concurrence.
Un mélange des genres explosifs et particulièrement réussi qui surtout guide une chose importante et nécessaire dans le monde de CORPS : la musique est un écho, un amplificateur aux propos du musicien, à ses thématiques, l’amour, le sexe et l’humain, qu’il explorait déjà précédemment.
… pour rappeler les obsessions de CORPS
Le tout devient d’ailleurs assez évident lorsqu’il commence à chanter, forçant le trait de sa voix caverneuse, la transformant au départ, l’amplifiant de manière presque ridicule pour devenir une sorte de dandy-crooner sous acide avant de revenir progressivement à la normale, laissant par la même occasion apparaitre les doutes et les failles de cette histoire, celle d’un homme à la fois attiré et effrayé par une femme et une relation qui le bouleverse.
En parallèle à ce chant languissant interviennent les chœurs. À première vue étranges, ceux-ci prennent toute leur ampleur au fur et à mesure que le morceau évolue, devenant peut à peu les chants d’une sirène, ceux auxquels CORPS essaie de résister avant de finalement succomber et de ce laisser aller dans le stupre qui l’appelle et qui termine le morceau dans une sorte de chute au ralenti qui l’entraine vers les abysses inexplorés.
Un clip théâtral et imagé au service de la musique.
Auparavant, l’univers visuel de CORPS était principalement associé aux travaux de Temple Caché, ce qui leur avait d’ailleurs valu un bon nombre de prix et plus récemment, une petite censure youtube. Un univers où le musicien restait en quelque sorte tapi dans l’ombre, un projet voulu sans visage et qui devait laissait exprimer la musique avant tout.
Mais cette « mue » sonore passe également par un évolution dans l’image. Et première surprise : CORPS a donc une tête. Sous la caméra Ludovic Verwaerde, il accepte le jeu de la mise en scène et permet au côté très théâtral d’Ingénue d’être amplifié à l’écran. Jouant ainsi avec aisance de son regard comme arme d’expression totale, aussi bien de ce corps statique face aux appels du monde, la vidéo est une plongée onirique absolument délicieuse.
Jouant parfaitement avec les codes couleurs, le rouge et le noir, la vie et la mort, l’amour et le sang. La vidéo est pleine autodérision et de sous entendu, avec ces mains féminines qui finissent par happer notre héros dans un dernier sourire. Car le plus important ce n’est pas la chute, mais l’atterrissage.
Avec Ingénue, CORPS s’offre donc une transition en douceur avant la déflagration CARNIVORE prévue pour le 28 mai 2021.
Retrouver notre interview de CORPS ici.