LES CLIPS DE LA SEMAINE #83 – Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont à la fois fait vibrer ses yeux et trembler ses oreilles. On enchaine de suite avec la seconde partie du quatre-vingt-troisième rendez vous des clips de la semaine.

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Wolf Alice – No Hard Feelings

On approche à grand pas du très attendu Blue Weekend, troisième album de Wolf Alice qui sortira le 11 juin prochain.  Le groupe londonien nous délivre le clip de No Hard Feelings après ceux de The Last Man On Earth et Smile. Encore une fois, le style est assez différent des singles précédents mais l’ensemble reflète une même volonté d’amener chacune des onze pistes du futur opus dans un registre cinématographique.

Avec ce nouveau titre, Wolf Alice emporte son chagrin sous la houlette, une nouvelle fois, de l’excellent réalisateur des pubs de parfum, Jordan Hemingway.  Le jeu de lumière met l’accent sur les contrastes entre le bleu nuit qui symbolise ici l’harmonie et l’apaisement et le rouge chaud de la passion, sous le grain d’un caméscope des années 1990. La tristesse ne domine pas face à l’apaisement dans ce court clip. Les deux amants se quittent à jamais à une station de bus, laissant partir en fumée leurs sentiments. C’est de toute beauté.

Vinss Ft Parcker – Vbnrgy Outro

Si on enlève le morceau bonus Sur les mains en featuring avec Bupropion., Blurred Story, le dernier et récent projet du jeune Vinss se clôture avec Parcker sur le titre Vbnrgy Outro. Une conclusion qui a été mise en image par Antoine Duchamp.

Un clip qui prolonge parfaitement l’univers proposé par un des nombreux membres de la Digitalwav. L’ambiance y est à la fois nocturne et lumineuse, une dualité qui colle bien avec les mélodies presque robotiques émises par l’artiste. Ce qui est également appuyé par le psychédélisme se dégageant du visuel offrant un jeu de lumière efficace et des plans de caméras ralentis envoûtant. Une manière de donner vie à un morceau sans avoir besoin de différents lieux. Effectivement, ici un seul lieu a été utilisé mais les heures devant l’ordinateur et les divers logiciels de traitement vidéo ont dû être plus conséquent. Mais, c’est aussi cela qui fait la patte visuelle du collectif Digitalwav qui risque avec les années de développer de plus en plus cette griffe.

Khali – La Toile

Dans un premier temps, c’est la voix atypique de Khali qui aura pu étonner, et surtout la maîtrise avec laquelle, le jeune artiste arrive à la modeler pour en faire un instrument au service d’instrumentales actuelles. Mais, au fur et à mesure des écoutes, quelque chose émane de cette voix singulière, venant tout droit des entrailles de Khali. En effet, c’est avec justesse et froideur que l’artiste arrive à transmettre des émotions à ceux qui l’écoute. Une capacité pas toujours évidente à attraper qui se retrouve dans son dernier morceau, La Toile qui a été prolongé dans un clip tout aussi troublant que le morceau réalisé par SwimTheDog.

Un texte imagé, presque poétique mis en image dans un clip où Khali apparaît comme le peintre de la toile métaphorisant sa vie. Entre déceptions amoureuses, parcours dans la musique ou discrimination dû à sa couleur de peaux, le titre aborde une multitude de thèmes angoissant l’artiste qui se réveillera à plusieurs reprises en sursaut durant la nuit. Des angoisses occasionnées par un manque d’espoir suite à des échecs.  Heureusement, le soleil semble se lever et avec lui, Khali commence à réveiller de plus en plus de monde avec sa musique, lui donnant, on l’espère l’espoir qu’il semble avoir perdu.

https://www.youtube.com/watch?v=hnoTjOwBQpQ

Freeze Corleone Ft Central Cee – Polémique

Les rappeurs francophones s’exportent de plus en plus à l’étranger et cette connexion entre le londonien Central Cee et Freeze Corleone ne vient que confirmer la chose. Pour la peine, les deux artistes ont pu travailler directement ensemble, ce qui se ressent sur le morceau où les couplets s’enchaînent avec une efficacité déroutante. Cela a également permis aux rappeurs de clipper le morceau sous la caméra de Kunography.   

Fraîchement arrivé de la capitale anglo-saxonne, Central Cee arrive à Pantin pour rejoindre le membre éminent du 667. Une fois arrivée à destination, le courant passe vite entre les deux artistes et c’est sur la même longueur d’ondes qu’ils vont montrer la suprématie d’un rap souvent qualifiée d’underground car ne pliant pas sous la pression des labels. C’est donc à coup de technique cinq étoiles, flow à toute épreuve et esthétique sombre qu’ils prouvent qu’ils ont fait d’une scène de niche, une des scènes les plus en vue du moment. Peu importe les Polémique où ce qu’on dit d’eux, ils peuvent compter sur leur authenticité et leur talent pour conquérir un public plus qu’investi à leurs causes, prouvant qu’ils n’ont pas spécialement besoin de suivre le circuit promotionnel habituel pour propager leur musique. Et ce n’est pas le million et demi de visionnage en seulement deux jours qui viendra dire le contraire.

St. Vincent – Down

Inspiré par son histoire familiale et de ses épreuves les plus intimes, le nouvel album de St. Vincent Daddy’s Home est sorti le 14 mai.

Down fut le dernier single pour présenter le projet, l’artiste surprenant ainsi à coups de groove ultra funk et d’esthétique 70’s. Annie Clark aborde pourtant ici un sujet grave qu’est la violence conjugale, mais le transcende en une revanche joyeuse. « You hit me one time, imagine my surprise/ You hit me two times, you got yourself a fight”. Très loin de glamouriser ces rapports de domination comme certaines artistes actuelles, elle remet à sa place cet homme pitoyable et se lance dans la vendetta.

Elle court façon héroïne de thriller dans la maison, recueillant preuves sur preuves afin de l’envoyer plus bas que terre. Une manière bien plus subtile que celle de son compagnon afin de l’humilier et prendre le dessus. La chanteuse finit par projeter la caméra jusqu’en bas des escaliers, allégorie de sa revanche bien orchestrée.

Sans fautes absolu tant dans la façon de traiter le sujet, la finesse des paroles, et une musicalité funk parfaitement maitrisée. Merci !

Kimberose – Sober 

Plus de quatre mois après la sortie de son album OUTKimberose dévoile un nouveau clip, celui du titre Sober.

Comme elle nous l’expliquait elle-même dans une interview il y a quelques temps, Sober fait partie d’un album libérateur pour la chanteuse. 

A l’image du morceau aux inspirations gospel, le clip est un hymne à la communion entre plusieurs êtres. Communion, union dans un moment libérateur, les protagonistes du clip de Sober se livrent à des chorégraphies criantes d’émotions. 

Il est difficile de trouver plus belle façon de mettre des images sur des maux, ceux qu’une relation peut laisser dans la tête et dans le cœur et dont le sevrage n’apporte que renouveau et légèreté. 

Poupie – Comme les autres 

La rappeuse Poupie nous préparais une grande surprise dont l’annonce s’est faite attendre : elle donnera naissance à son premier album à la rentrée. Enfant Roi, c’est le titre de cet opus dont Poupie a révélé le premier morceau cette semaine. 

Comme les autres, c’est un morceau et un clip très autobiographiques. On plonge dans le monde de la rappeuse à travers ses yeux d’enfant, quand elle savait déjà qu’elle n’était pas vraiment comme tout le monde. 

Poupie se sent un peu à part, différente et l’assume clairement : elle ne compte pas rentrer dans un moule pour satisfaire qui que ce soit autour d’elle. 

Une belle façon de nous faire connaître son univers, entre rythmiques endiablées et looks décalés et futuristes. Poupie pense ce qu’elle chante et chante ce qu’elle pense, et ça : on adore. 

PAYS P. – Vassily

Des grosses guitares saturées, un bourdonnement d’énergie qui tour à tour s’amplifie, puis se calme un peu pour repartir de plus belle et une voix puissante – celle de Laura Boulic – qui mugit à plein poumons des textes poétiques qui explosent avec le refrain aussi entêtant qu’intrigant : « Vassili Voir où vont les toits / du monde dehors (…) !». Les paroles sont urgentes et possédées, introspectives et déjantées : « Je recevais moins bien les transmissions des autres / perdant l’espoir de la possibilité d’accès à mes pensées meilleures…. » Pays P. nous scotchent autant qu’ils nous subjuguent.

Le groupe a d’abord été repéré par Michael Jaworski et Sohrad Habibion de SAVAK – qui les ont invités à enregistrer leur premier album sur leur label Peculiar Works. Le groupe a par la suite ouvert toute une partie de la tournée européenne de Big Thief en février 2020, (écourtée d’une date seulement par le confinement), après avoir tapé dans l’oeil/oreille de Buck Meek pour qui ils ouvraient la date parisienne.

Un groupe à suivre de très près, qu’on a extrêmement hâte de voir en live !

Vassili Voir est le premier morceau tiré du premier album du groupe qui s’intitule Ça v aller, et dont la sortie est prévue pour le 10 septembre prochain. 

The Vaccines – Headphones Baby

3 ans après l’excellent Combat SportsThe Vaccines font leur grand retour (vu l’actualité, c’est un peu leur heure de gloire par procuration) cette semaine avec Headphones Baby, premier extrait d’un cinquième album à venir. À travers un clip futuriste réalisé et animé par Belle Hex, le groupe nous emmène faire une virée psychédélique rythmée par ce nouveau banger power-pop. 

Si ce dernier nous frappe par son énergie vibrante et délicieusement kitsch, il cache tout de même beaucoup de mélancolie dans sa thématique. C’est peut-être dans cette dualité que se trouve toute la force du comeback du quatuor britannique ainsi que le remède à la morosité ambiante.

Andy Sauf – Living Room

The Neon Skyline, c’est le dernier album de Andy Shauf, sorti l’année dernière. L’artiste nous propose aujourd’hui un nouveau clip pour illustrer l’un de ses morceaux : Living Room. Comme à son habitude, Andy nous raconte une histoire qui pourrait paraître banale mais dont l’articulation et la narration nous emportent, surtout couplés à un visuel à la fois cartoonesque et cauchemardesque.

Chaque tableau correspond au texte mais d’une manière déformée au possible, partant d’une anecdote et la transposant au sein d’un Halloween malaisant, avec des protagonistes issus d’un film d’horreur. Pas de doute, Andy Shauf sait surfer sur une période printanière et de début d’été en tuant toute lueur d’espoir et de joie chez son auditeur. On recommande !

Nina Savary – Second Guessing

Coiffée d’un voile noir et de fleurs, Nina Savary incarne le féminin sacré au travers de son clip Secong Guessing. Avec des allures tantôt de veuve tantôt de jeune mariée, on pourrait la comparer à une déesse. D’autant plus que la musique qui l’accompagne est aérienne et douce comme du velour. Rappelant aussi bien Future Islands que Lana Del Rey. Le clip réalisé par Lucie Bourdeu reste dans cette atmosphère. Il y a un léger brouillard sur la pellicule, un voile. L’image est douce, pastel. La lumière domine, comme celle que l’on fait briller la mer sur certaines séquences. Il y a aussi quelque chose de lumineux dans la voix et dans les harmonies de la chanson Second Guessing. Bien que l’on sente une certaine tension, voire tristesse lorsque la chanteuse répète comme une litanie qu’elle sera mieux demain : “I’ll be better tomorrow”.

La Femme – Foreigner

On est combien à parler anglais avec un accent français très prononcé ? beaucoup se reconnaitront dans la diction du morceau Foreigner. La Femme propose un neuvième clip pour illustrer son dernier album intitulé Paradigmes qui n’en finit pas de nous étonner. Une fois de plus, le groupe nous fait marrer avec des images grotesques. Comme s’ils avaient fait le pari de celui qui aura l’air le plus ridicule pour déambuler dans la capitale, on retrouve les Marlon Magnée, Sacha Got et leurs acolytes dans des lieux emblématiques de Paris avec un montage vintage.

Les premiers clips nous plongeaient dans un univers gothique chic avec une post-production soignée, là, ils ont misé l’aspect trente sixième degrés. La réalisation est signée de Jean François Julian qui a déjà travaillé avec le groupe pour les morceaux Paradigme et Hypsoline. Le réalisateur a collaboré dans divers projets visuels, aussi bien pour des marques comme Longchamp, Zadig & Voltaire ou Levi’s que pour des artistes (Paul Johnson, Paris Combo).

Bon, prenez votre déguisement et allez les rejoindre pour danser sur la péniche la plus WTF de Paris.