Bobby Gillespie & Jehnny Beth : “le mystère est un pouvoir.»

Bobby Gillepsie, leader de Primal Scream et Jehnny Beth artiste solo et chanteuse de Savages ont annoncé Utopian Ashes, à la surprise générale. Un album de collaboration aux sonorités rock, country et soul, bien loin de ce à quoi nous avait habitué deux musiciens. De leur première rencontre à un concert hommage à Suicide à Londres en 2015, à l’été suivant lorsqu’ils interprétaient ensemble Some Velvet Morning de Nancy Sinatra et Lee Hazlewood, les deux artistes ont ensuite commencé à jouer ensemble avec les autres membres de Primal Scream ainsi que Johnny Hostile, le partenaire de longue date de Jehnny Beth. Le résultat est un album introspectif intense et majestueux, dont les deux musiciens nous parlent en profondeur…

Bobby Gillespie & Jehnny Beth
Crédit photos : Inès Ziouane pour La Face B

English Version below

LFB : Salut, comment ça va ?

Bobby : Je vais bien. Comment vas-tu ?

LFB : Je vais bien, merci !

Votre collaboration et l’annonce d’un album ensemble a été une réelle surprise. Je me demandais comment le projet a commencé ?

Jehnny Beth : Nous avons répondu à cette question tellement de fois ! (rires)

Bobby : Je dirigeais le fan club de Jehnny pour Savages, la branche londonienne (rires). Et je suis allé voir Bo Ningen et Yuki portait une robe rouge. Je portais une chemise rouge et ma femme trouvait que nous allions si bien ensemble que nous devrions nous marier, Yuki et moi. Puis Jehnny en a entendu parler et a dit : « Oh, si vous vous mariez, je serai l’officiante de la cérémonie ». Donc Jehnny allait diriger la cérémonie et nous marier Yuki et moi, vous savez, la dame et le monsieur en rouge… deux dames en rouge. Et puis, nous nous sommes soûlés et l’un de nous s’est soûlé plus que l’autre (je ne bois plus). Je ne sais pas si c’est le genre de réponse que tu attendais. Désolé. J’invente, désolé !

LFB : Pas de soucis. Désolée, c’était une question un peu basique, autant pour moi ! (rires)

Où et quand l’album a-t-il été composé et comment avez-vous réussi à le garder secret pendant si longtemps ?

Bobby Gillespie & Jehnny Beth

Bobby : C’est facile pour moi parce que je ne vois et ne parle jamais à personne, tu sais (rires). Je suis un peu de la vieille école et superstitieux, donc je cache bien mon jeu. Je ne parle pas de mon travail en public, je me contente de le faire, je ne parle pas vraiment de ce que je fais. Andrew, je pense, Andrew Innes, il parle toujours avec ses amis. Moi jamais. Je ne dis jamais rien à personne. Et je pense toujours que c’est la meilleure stratégie.

J’ai pensé garder ça… personne ne nous attendait. Si tu en parles et que tu dévoiles ton secret, tu n’as plus de mystère. Et je pense vraiment que le mystère est un pouvoir, tu sais. Parce que tout le monde aujourd’hui, surtout avec les réseaux sociaux, dès qu’ils ont une idée, ils la disent à tout le monde. Ils disent à tout le monde ce qu’ils font et je pense que c’est beaucoup plus puissant de garder les choses cachées et beaucoup plus sexy. Tu sais, si quelqu’un se promène nu tout le temps, ce n’est pas très sexy. Alors que s’il/elle porte une robe ou une chemise, on se dit « qu’est-ce qui se cache derrière le masque ? » et c’est attirant. Et je ressens la même chose pour l’art, je pense qu’il est préférable de le garder caché jusqu’à ce qu’il soit prêt à être révélé.

LFB : Nous avons entendu dire que lorsque vous avez commencé à travailler ensemble, le projet allait plutôt vers des sons électroniques, et je me demandais comment vous avez changé et quel a été le déclic, quand vous avez su que vous aviez trouvé la direction que prendrait l’album.

Jehnny : Je pense que ces sons électroniques étaient les premières sessions d’essai que nous avons faites à Paris avec Bobby, Andrew Innes, Johnny Hostile et moi. C’étaient des sessions initiales, pour voir, tester l’eau et voir comment nous nous sentions d’être en studio ensemble et ce qui en sortait, voir l’humeur et comment nous nous sentions en compagnie des autres.

Et ces deux sessions se sont très bien passées, mais musicalement, nous avons en quelque sorte continué dans cette direction, sans vraiment penser à ce que nous faisions comme album. Peut-être que nous essayions de recréer le paysage sonore de Primal (Scream), tu sais, le genre de sons répétitifs, électroniques et de faire du rock électronique. C’est probablement ce que nous avions à l’esprit.

Mais quand Bobby est retourné à Londres avec Andrew, on a tous senti qu’il y avait quelque chose. On sentait tous que les voix, les voix de Bobby et moi, fonctionnaient ensemble comme par magie. Et puis je crois que Bobby m’a appelé, et m’a dit qu’il y avait réfléchi et on a travaillé quelques parties des chansons avec sa guitare et il a décidé qu’il voulait faire un disque de rock plus mélodique, un disque de balades.

Et j’ai senti qu’il y avait une vraie vision du côté de Bobby. Et cela doit être respecté, parce que, tu sais, si tu as quelqu’un qui a une vision sur un projet, alors tu peux parcourir des kilomètres, tu sais que tu vas atteindre la cible, parce que le pire des cas est quand tu n’as pas de vision, et que tu fais juste de la musique pour la musique. C’est mieux d’avoir une cible ou d’avoir une sorte de structure, un thème ou une ambiance que tu cherches. Et je pense que c’est ce que Bobby a soudainement eu, il a attrapé ce gros poisson (rire), un poisson inspirant.

Il s’agissait donc de retravailler la chanson et Johnny et moi sommes venus à Londres dans leur studio – dans la petite pièce qu’ils ont dans un studio dans des bureaux au centre de Londres – et comme ça nous avons composé Chase It Down et j’ai posé quelques voix dessus. Ensuite, on a réécrit certaines parties et on a écrit d’autres chansons, c’est comme ça que ça s’est fait.

Et j’ai pensé que le thème de l’album sur lequel Bobby a suggéré que nous écrivions, cette idée avec les voix masculine et féminine, cette idée d’un mariage brisé, de deux personnes qui sont arrivées à un point dans leur relation où elles ont probablement été un peu paresseuses et trouvent qu’il y a du travail à faire pour sauver cette relation, et donc, de dures vérités doivent être dites… c’est un excellent cadre pour écrire quand on a cette vision. Quand Bobby a suggéré ça, j’ai pensé que c’était un sujet très courageux et aussi très peu commun, de parler d’une relation sous cet angle, qui est assez mature, assez adulte et aussi assez vulnérable.

Et c’est généralement un point de vue féminin, vous savez, dans une relation, c’est généralement la femme qui dit « Je pense que nous devons travailler sur cette relation / nous devons faire des efforts / nous devons avoir ces discussions difficiles ». Et je trouvais ça intéressant que ça vienne de Bobby, tu sais, ce point de vue. Et j’ai adoré ça. Ouais. Ça m’a rendu assez émotive en fait. Donc je trouvais qu’il était nécessaire qu’il dise ces choses et c’est tout ce qui comptait, si ça a un sens.

LFB : C’est très profond, c’est très sincère et ça se ressent tout au long de l’album.

Le son de l’album ne ressemble à aucun de vos styles musicaux, et j’ai l’impression qu’il s’agit d’un retour aux racines de la musique, comme la soul, la country ou le rock’n’roll. Et avec les instruments analogiques et les vidéos en noir et blanc avec les citations, dépouillées parce que vous êtes d’accord ?

Bobby Gillespie & Jehnny Beth

Bobby : L’instrumentation est très traditionnelle, guitare, basse, batterie, piano, deux voix, cordes, cuivres. Oui, et les chansons sont écrites de manière traditionnelle. Il y a un certain cadre en termes d’arrangement, oui. Mais je pense que le sujet des paroles parle de, tu sais, nous écrivons sur deux personnes qui vivent ensemble, seules séparément. Ils sont pris dans cette stase émotionnelle, ils sont émotionnellement inarticulés… des thèmes très adultes pour la musique rock et je pense que c’est la différence vraiment.

Mais cela appartient peut-être à une tradition de disques de duos de gens comme Kris Kristofferson / Rita Coolidge, George Jones, voire John Parsons / Emmylou Harris. Nous n’avons pas voulu imiter ces artistes ou leurs disques, mais Utopian Ashes s’inscrit définitivement dans cette lignée, je pense, et fièrement.

Et si vous travaillez de manière traditionnelle et que vous êtes jugé par rapport aux artistes qui vous ont précédé, et vous savez que ça peut être difficile. Parce que si vous êtes face à de grands auteurs, chanteurs et compositeurs, si votre matériel n’est pas bon, ça va se voir assez facilement. Mais je pense que le matériel de ce disque est très fort et tient plus que bien la route avec tout ce qui a été enregistré, et un style, des duos vocaux homme/femme, des ballades…

Oui, Jehnny disait dans une autre interview aujourd’hui que les gens s’attendaient à autre chose, quand ils entendent que Jehnny et moi avons fait un album ensemble. Ils s’attendaient peut-être à une sorte de punk électrique, à un son agressif, mais la plupart des gens ne s’attendaient certainement pas aux chansons d’Utopian Ashes.

LFB : C’est vrai. Tout dans ce projet est une surprise, mais c’est magnifique.

Chacune des chansons d’Utopian Ashes parle d’un homme et d’une femme qui sont à la fin d’une relation. Cependant, votre relation musicale est toujours aussi forte. Je me demandais comment vous avez travaillé ensemble ? Comment décririez-vous votre relation musicale, qu’apportez-vous l’un à l’autre ?

Bobby : J’ai parlé, je pense que c’est ton tour…

Jehnny : Oh allez !! (rires) Tu me laisses généralement les questions les plus difficiles ! (rires)

Eh bien, je ne dirais pas que les personnages sont à la fin de leurs relations. Je pense que, pour moi, dans le disque – c’est personnel, mais je le ressens juste – ils viennent d’une période, je pense, où il y avait, comme Bobby l’a dit, une inarticulation émotionnelle. Mais le disque est vraiment le son de leur expression et ils me disent qu’ils commencent à parler, et que des choses difficiles sont dites et pour moi, c’est ce qui sauve la relation et ne la termine pas.

Tu sais, si au moment où tu dis à la personne que tu aimes : « je ne t’aime plus ». Et « je ne t’aime même plus ». Ce n’est pas « je ne t’aime plus », c’est « je ne t’aime même plus », c’est presque une plainte, c’est comme si on suppliait pour survivre, pour avoir de l’aide. C’est une demande d’aide, je pense plus que tout.

Mais à part ça, je pense que notre relation a grandi avec la réalisation de ce disque. Parce que je pense que faire un projet comme celui-ci avec quelqu’un est définitivement un moyen de se connaître, différent de toute sorte d’amitié.

Je connais Bobby mieux et plus qu’avant de faire ce disque. Et surtout maintenant que nous sommes en mode interviews au jour le jour, j’ai l’impression que Bobby et moi sommes en thérapie ou quelque chose comme ça (rires).

Je trouve que c’était bien que ce soit un projet où il était facile de chanter, bien que cela aurait pu être un défi parce que c’est très mélodique et qu’il y a beaucoup d’harmonies… mais il n’y avait aucune difficulté nulle part. Le travail difficile était dans les paroles, la musique, toute l’écriture.

C’était juste une belle amitié, j’ai l’impression que nous avons créé quelque chose ensemble et nous ne réalisons même pas ce que nous avons créé. C’est intéressant de voir comment on crée quelque chose et je pense que pour moi ça va prendre un peu de temps pour réaliser qu’on a vraiment fait ça ! Et je commence à le réaliser maintenant et je me sens très fière.

Bobby : Moi aussi.

LFB : Oui et vous vous êtes un peu éloignés de vos chemins et vous vous êtes rencontrés ailleurs, vous avez créé quelque chose de magnifique ensemble…
Remember, We Were Lovers le premier single de l’album est assez déchirant, c’est sombre, lent et romantique, vraiment dramatique. Vous avez créé des personnages pour l’album. Est-ce que vous pouvez nous parler un peu de cette chanson et de la création des personnages ?

Bobby : Eh bien, Jehnny avait ces très bonnes paroles sur cette personne se tenant au bord d’une falaise et contemplant sa vie. C’était des paroles très dramatiques. Et nous avions de très beaux accords de piano, les belles paroles et la mélodie de Jehnny, et c’est la première chose que nous avions pour la chanson. Et j’ai pensé que ça ressemblait à une putain de chanson phare.

Alors je suis retourné à Londres et j’ai vraiment réfléchi pour écrire des paroles qui correspondraient à la puissance de son refrain et je pense que j’ai réussi. C’était un défi que ce refrain soit si bon et j’ai vraiment apprécié le défi d’essayer d’écrire ce qui correspondrait.

Et à ce moment-là, l’instrumentation ressemblait à du Kraftwerk, vous savez, des machines à cordes et des tambours électroniques… et je ne le sentais pas vraiment, je pensais que c’était bien, mais je ne pense pas que ça allait en profondeur et je voulais aller en profondeur. Alors quand j’ai écrit la chanson, ma partie de la chanson à la maison sur ma guitare acoustique, j’ai juste visualisé un groupe qui jouait dessus. Batterie, basse, piano, un peu comme une ballade à la John Lennon, période Plastic Ono Band, comme Mother, tu vois. (Bobby commence à chanter)  » Mother. You had me, but I never had you…” ce genre de balade rock soul et catchy et c’est comme ça que je l’ai visualisé, du moins dans ma tête. Et donc, c’est vraiment comme ça que cette chanson est née.

Et je pense que lorsque je réfléchissais à l’instrumentation de cette chanson, cela m’a fait penser aux autres morceaux que nous avions écrits pour l’album, ou qui étaient en cours d’écriture, et j’avais l’impression que cela devait être un disque de rock, vous savez, avec une batterie, une basse, de la guitare traditionnels, du piano, des cordes, des cuivres, et pas des disques électroniques.

Et je savais que Remember We Were Lovers était une chanson phare. Même si ce n’est pas une chanson phare dans les charts, c’est une grande chanson et je pense qu’au fil des ans, elle signifiera beaucoup pour les gens. J’ai déjà des gens qui m’envoient des SMS, qui l’ont entendue à la radio et qui me disent à quel point ils l’aiment, à quel point ils s’y reconnaissent. Et tu sais, tu n’as pas ça tous les jours. Du moins pas moi, peut-être que d’autres oui, mais je n’ai pas ce genre de réaction. Je pense que c’est un album brut et émotionnel, et la musique est très majestueuse, presque au rythme d’un enterrement, et il y a une vraie grâce et dignité, et je pense qu’’avoir fait ce disque est une réussite. C’est l’une des meilleures choses dans laquelle j’ai été impliqué. Je suis très fier.

LFB : Y a-t-il une chanson sur l’album qui vous tient particulièrement à cœur ?

Bobby Gillespie & Jehnny Beth

Jehnny : L’une de mes préférées, je le dis toujours, est You Can Trust Me Now. J’aime vraiment l’instrumental et les parties de cordes qui ont été ajoutées à la chanson et c’est très dramatique et beau. Mais je pense que c’est aussi le thème de la chanson qui est vraiment, pour moi, le cœur de l’album, avec les paroles parlées du début. Et j’ai senti qu’il y avait de vraies vérités qui étaient dites et une vraie vulnérabilité.

Et encore une fois, le point de vue d’une voix masculine était vraiment courageux et j’ai été vraiment touchée par ces paroles et j’ai immédiatement su que Bobby écrivait certaines de ses meilleures chansons. Et je me souviens qu’en fait Bobby, j’ai dit ça à Katie (England, la femme de Bobby), j’ai dit « Katie, tu as écouté les chansons ? et elle a dit « Non, je ne les ai pas encore écoutées », j’ai dit « Tu dois les écouter, c’est la meilleure chose qui ait jamais été écrite ! ». (rires).

L’atmosphère dans le studio était légère, amicale et amusante, mais je savais que nous faisions quelque chose de précieux et de solide. Et ces mots ont été soigneusement élaborés et mon rôle était, quand vous avez une telle lourdeur dans les paroles, je pense que mon rôle était d’essayer de les envelopper, d’essayer de les protéger avec des chœurs, d’essayer de leur donner de la légèreté, de trouver la légèreté et d’apporter la lumière et j’adore ce rôle. C’est comme être attentionnée, tu sais, parce que nous avons parlé de personnages, mais vraiment quand tu chantes c’est toi, c’est définitivement toi, tu ne joues pas quand tu chantes. Tu parles, ta propre expérience est dans ta voix, sinon tu n’aurais pas l’air authentique.

Et donc, j’ai senti que lorsque j’accompagnais Bobby en faisant toutes ces voix et ces chœurs, j’ai senti que je servais un but, et qu’il y avait un objectif et un vrai message et une vraie signification.

C’est ma chanson préférée parce qu’elle est au cœur de l’album. Elle parle de l’idée de rédemption, de l’idée d’essayer de changer pour être meilleur, de l’idée de changement, je veux dire qu’en amour, c’est quelque chose dont on parle rarement, que la personne que vous aimez change, que vous devez vous adapter à cela, que ce n’est pas toujours facile. Et le fait qu’une relation est aussi quelque chose sur lequel il faut travailler. Je dois changer, sinon c’est juste faire des erreurs, et demander pardon et on retombe toujours dans ses travers.

Et puis je trouve que le changement est une chose puissante et c’est l’un des sujets que j’aime le plus dans la musique, mais on en parle rarement parce que… ce n’est pas très brillant et vous savez ce n’est pas très… c’est plus intérieur, c’est plus personnel, c’est plus fragile, subtil, mais j’ai trouvé ça beau.

Et encore une fois, d’un point de vue masculin, d’avoir cette perspective sur l’amour… mon travail était presque terminé parce que d’habitude c’est la femme qui le dit, mais je n’ai pas eu à le faire, Bobby servait tous ces aspects de la relation et oui, c’était intéressant, très touchant, très émotionnel. Et dans le studio, c’était aussi très amical et léger.

LFB : Avez-vous l’intention de jouer l’album en live à un moment donné ? Avez-vous prévu de faire une tournée ensemble ?

Jehnny : Oui. Nous aimerions beaucoup ! Nous en avons l’intention. Nos équipes sont en train d’examiner les options. C’est une période difficile pour ça mais nous voulons faire quelques concerts cette année avec ce disque, c’est sûr. Donc nous espérons que nous pourrons. Au Royaume-Uni, je pense, ça devrait arriver. En Europe, avec un peu de chance, aussi.

*Updates : Les deux musiciens viennent d’annoncer des dates pour le Pitchfork Festival. Ils seront le 15 novembre à l’Église Saint Eustache à Paris et les 10 et 11 novembre à EartH à Londres.

LFB : La dernière question que nous posons généralement à gauche à La Face B est : y a-t-il des choses que tu as découvertes récemment et que tu aimerais partager avec nous ?

Jehnny : Oui ! Il y a toujours de bonnes choses qui se passent.

Bobby : J’écoutais ce disque de Black Country, New Road (For the first time, 2021). C’était assez intéressant. Un jeune groupe anglais…

Jehnny : Oui

Bobby : Billy Nomates. J’ai eu son disque l’année dernière aussi (Billy Nomates, 2020)… Ouais, beaucoup de bonnes choses se passent… en Grande-Bretagne, un artiste plus jeune, le disque que j’ai vraiment aimé était par – j’oublie toujours son nom – Il s’appelle Archie, cheveux roux…

Jehnny : King Krule

Bobby : J’ai vraiment apprécié ce disque (Man Alive!, 2020), je trouvais que c’était un très bon disque. Pendant le lockdown, j’ai beaucoup écouté ce disque. C’est un disque étrange, avec beaucoup de curiosités, plutôt que des chansons, c’est comme des petites sculptures ou quelque chose comme ça. C’est très étrange, mais intéressant.

Jehnny : Tous les artistes que tu aimes sont des artistes que j’avais dans mon émission de télé. (Echoes avec Jehnny Beth sur Arte tv)

Bobby : Ah, génial !

Jehnny : King Krule et Billy Nomates

Bobby : Super. Est-ce que tu as eu Black…

Jehnny : Black Country, New Road, je les ai eus avec Kim Gordon.

Bobby : C’est un personnage sympa. Isaac (Wood) le chanteur. Il est adorable.

Jehnny : Oui, très intelligent.

Bobby : Oui, il est plus âgé qu’il n’y paraît.

Jehnny : Oui, tout à fait.

Bobby : C’est un type des années 30 ou quelque chose comme ça, tu sais. Un personnage intéressant.

Jehnny : J’ai aussi adoré écouter récemment le nouvel album de Sons of Kemet (Black To The Future, 2021). Je suis une grande fan de Chewbacca – oh Chewbacca (rires) . Quel est son nom ? Je ne me souviens plus de son nom, un saxophoniste incroyable, dont le nom m’échappe maintenant (Shabaka Hutchings). Mais Sons of Kemet a sorti quelques disques que j’aime vraiment. La chanson Hustle est vraiment géniale. Mais j’aime aussi, dans un autre registre, mais du côté du hip hop, le nouveau disque de J. Cole est vraiment bon (The Off-Season, 2021). C’est un rappeur que j’aime beaucoup.

LFB : Super ! Merci beaucoup !

English Version

Bobby Gillepsie, the leader of Primal Scream and Jehnny Beth, solo artist and singer of Savages, have announced Utopian Ashes, to everyone’s surprise. A collaborative album with rock, country and soul sounds, far from what two musicians personal styles.
From their first meeting at a Suicide tribute concert in London in 2015, to the following summer when they performed Nancy Sinatra and Lee Hazlewood’s Some Velvet Morning together and cemented their relationship, the two artists then began playing together with the other members of Primal Scream as well as Johnny Hostile, Jehnny Beth’s longtime partner. The result is a dark album of rare elegance that both musicians spoke to us about in depth…

LFB : Hi, how are you?

Bobby: I’m good. How are you?

LFB : I’m fine, thank you!

Your collaboration and the announce of a whole record together came out quite a surprise. I was wondering how did the project started?

Jehnny Beth : We’ve answered that question so many times! (laughs)

Bobby: I was running Jenny’s fan club for the Savages, the London branch (both laugh). And I went, to see Bo Ningen and Yuki was wearing a red dress. I was wearing a red shirt and my wife thought both of us looked so good together, we should get married Yuki and myself. And then Jehnny heard of it and she said “Oh if you two are going to get married I’ll be the officiant of the ceremony”. So Jehnny was going to be like the administer and marry Yuki and myself, you know, the lady and the gentleman in red, two ladies red. And then we just, we got drunk and one of us got drunker – I don’t drink anymore – but I don’t know if that the kind of answer you were waiting for. Sorry. I’m just making it up sorry!

LFB: No worries. Sorry, it was a bit of a basic one, my bad!

Where and when was the album composed and how did you manage to keep it secret for so long?

Bobby: It is easy for me because I never see or speak to anybody, you know (both laugh). I’m kind of old school and superstitious, so I just keep my cards close to my chest. I don’t talk about my work in public, I just do the work and you know I’m always thinking about it until… Yeah, I don’t really discuss what I’m doing. Andrew, I think, Andrew Innes, he always tells his friends. I never. I never say nothing to nobody. And I always feel that’s the best strategy.

I thought keep this, you know… no one’s going to expect us. If you talk about it and you give away your secret you have no mystery. And I really believe that mystery is power, you know. Because everybody these days especially with social media, as soon as they get an idea they tell everybody that idea. They tell everybody what they’re doing and I felt was much more powerful to keep things hidden and much sexier you know. You know, if someone’s walking about naked all the time it’s not very sexy. While if they wear dresses, or a shirt, you know, you think, “what’s behind the mask?” so that’s attractive. And I feel the same about art, I think it’s best to keep it hidden until it’s ready to be revealed.

LFB: We’ve heard when you started working together, the project was more going to towards electronic sounds, and I was wondering how did you switch. And what was the click, when you knew you’d find the direction the album would take.

Jehnny: Well I think those electronic sounds were very the first initial trying sessions we did in Paris with Bobby, Andrew Innes, Johnny Hostile and myself. They were initial sessions, to sort of test out, try out the waters and see how we felt about being in the studio together and what came out of it what was the mood and how we felt about each other’s company.

And those two sessions were really well, but musically, we sort of went on in this direction, without really thinking of what we were doing as an album. So it was more, maybe we were trying to recreate the landscape of Primal (Scream), you know the sort of repetitive, sort of electronic sounds and make some rock electronic. So we were probably with that at the back of our minds.

But it’s when Bobby went back to London within Andrew, we all felt there was something there. We all felt the voices were, me and Bobby’s voices were working magically together. And then I think Bobby called me, and then said that he had thought about it and we worked some parts of the songs with his guitar and he decided that he wanted to make a more of a melodic songwriting rock record, and a record of ballads – I think at that point, that’s what we said.

And I felt there was a real vision from Bobby side. And that is to be respected, because, you know, if you have someone with a vision on a project, then you can go for miles, you know it’s gonna hit the target because the worst case is when you don’t have a vision, and you’re just making music for music sake. It’s better to have a target or to have a sort of a structure or a theme or a mood that you’re looking for. So I think that’s what Bobby had suddenly caught, he caught that big fish (laugh), an inspirational fish.

And so then it was about reworking the song so then me and Johnny came to London in their studio – in the small room they have in like an office studio in the centre of London – and this way we had Chase It Down and so I put down some vocals to it. And then it was this sort of rewriting some parts and writing more songs and so that’s how it came about.

And I thought the theme of the record, which Bobby suggested we write about, this idea with the male and female vocals, this idea of a broken marriage, of two people who have come to a point in their relationship where they’ve probably been a bit lazy and find that there’s some work that needs to be done in order to save this relationship, and so harsh truths need to come up… that’s a great frame for writing when you have that vision of what it is.

And also when Bobby suggested that, I thought it was very brave as a subject and also not very common, to talk about a relationship from that angle, which is quite mature, quite adult and also quite vulnerable. And usually quite a feminine point of view, you know, in a relationship it’s usually the woman who says “I think we need to work on this relationship / we need to put on some work / we need to have those hard discussions”. And I thought it was interesting that it came from Bobby, you know, that point of view. And I loved it. Yeah. It made me quite emotional actually. So I thought there was some necessity for him to say these things and that’s all that mattered, if that makes sense.

LFB: It’s very deep, it’s very sincere and you can feel it all along the record.

The sound of the album doesn’t sound like any of your musical styles, and it feels to me that it’s kind of going back to the roots of music like of soul of country of rock’n’roll. And with the analogue instruments and with the black and white videos with the quotes, stripped down because do you do you agree?

Bobby: The instrumentation is very traditional, you know, guitar, bass, drums, piano two voices, strings, horns. Yeah, and the songs are written in a traditional way. There’s a certain framework to them in terms of arrangement, yes. But I think the subject matter of the lyrics is tackling to, you know, we’re writing about two people who are living together, alone apart. They’re caught in this emotional stasis, they have emotional inarticulacy… very adult themes for rock music and I think that’s the difference really.

But it maybe belongs to a tradition of duet records by people like Kris Kristofferson / Rita Coolidge, George Jones even John Parsons  /Emmylou Harris. Not that we were emulating any of those artists, or the records that they made, but Utopian Ashes definitely is in that lineage, I think, and proudly so. And if you work within a traditional way and you’re judged in relation to the artists who came before you, and you know that can be hard. Because if you’re up against great songwriters, singers and songwriters, you know, if your material isn’t any good it’s going to show quite easily, but I think the material in this record is very strong, so, and more than holds its own with anything that has been recorded and a style, male/female vocalist duets, ballads…

Yeah, I mean, and I guess it’s, Jehnny’s been saying in another interview today that people may be expected something else, when they hear that Jehnny and I made a record together. Maybe they expected some kind of electrical punk, aggressive sound, but most people certainly were not expecting the songs from Utopian Ashes.

LFB: It’s true. Everything about this project is a surprise, but a beautiful one...

Each of the songs on Utopian Ashes are about a man and a woman that are at the end of a relationship. However your musical relationship is going on strong. How has it been working together? How would you describe your musical relationship, what do you bring to each other would you say?

Jehnny: laughs

Bobby: I’ve spoken, I think it’s your turn..

Jehnny: Oh come on!! (laughs) you usually give me the hardest questions! (laughs)

Well, I wouldn’t say the characters are at the end of their relationships. I think for me, in the record, that’s personal to me, but I just feel they come from a period of time, I think where there was, like Bobby said, emotional inarticulacy. But the record is really the sound of their expression and they tell me they are starting to speak, and difficult things are being said and for me that’s saving the relationship not ending it.

You know, if the moment you say to the person you love, you say “I don’t love you anymore” and “I don’t even love you anymore”… It’s not “I don’t love you anymore” it’s “I don’t even love you anymore”, it’s almost a complaint, you know, it’s like, it’s almost begging for survival, begging for help. It’s asking for help, I think more than anything.

But that apart, I think our relationship has grown from making this record. Because I think making a project like this with someone is definitely a way to know each other, which is different from any sort of friendship.

I know Bobby better and more than before making this record? And especially now we are on this like day to day interviews, I feel like me and Bobby are in therapy or something (both laugh).

I thought it was nice that it was a project where it felt effortless to sing. And although it could have been a challenge because it’s very melodic and there’s a lot of harmonies going on… but there was no difficulties anywhere. The hard work was in the lyrics, the music, you know, all the writing.

It just it was a nice friendship I feel that we’ve created something together and we don’t even realise what it is we’ve created. It’s interesting how you make something and I think for me it will take a bit of time to realise that we actually made this you know! And I’m starting to realise it now and I feel very proud, you know.

Bobby: Me too.

LFB: Yeah and you’ve been a bit out of your ways and met somewhere else, you created something beautiful together…

Remember, We Were Lovers the first single of the album is quite heart wrenching, it’s slow, it’s dark, it’s so slow and up romantic do it it’s very dramatic. You’ve created characters for the album. I was wondering if you could tell us a bit about the song and about your, the creation of the characters?

Bobby: Well, Jehnny had these really good lyrics about this person standing on the edge of a cliff and contemplating their life. They were very dramatic lyrics. And we had some very lovely piano chords and Jehnny’s beautiful lyrics and melody, and that’s the first thing we had for the song. And I thought this sounds like fucking head song.

So I went away back to London and I really thought hard about writing lyrics that would match the power of her chorus and I think I did it. So it was a challenge that that chorus was so good and I really enjoyed the challenge of trying to write what would match.

And by that point, the backing track was quite like Kraftwerk, you know string machines and electronic drums… and I wasn’t really feeling it, I thought it was nice but I don’t think it went deep and I wanted to go deep. So when I was writing the song, my part of the song at home on my acoustic guitar, I just always had a lot of feelings, and I just visualised a live band playing on it. Drums, bass, piano, kinda like a John Lennon, Plastic Ono Band era ballad like Mother, you know. (Bobby starts singing:) “Mother. You had me, but I never had you….” that kind of baiting soulful rock ballad and that’s how I visualised it, at least in my head. And so really that’s how this particular song came about, really.

And I think when I thought of the instrumentation later for that song, again, it got me thinking about the other tracks that we had written for the album, or they were in the process of being written, and I just felt like it should be like a rock record, you know, with traditional bass drums, guitar, piano, strings, horns, and not an electronic records.

And I knew that Remember We Were Lovers was a head song you know. Even if it’s not a head song in the charts, it’s a big song and I think over the years it will mean a lot to people you know. I already have people texting me, who heard on the radio telling me how much do you love you know, how much they relate to it. And you know, you don’t get that every day. Well I don’t, maybe other people do, but I don’t get that kind of reaction. I think it’s a raw and emotional, and the music is very stately almost at funeral pace, and it’s got a real grace and dignity and I think it’s an achievement that we made that record. One of the best things that I’ve ever fuckin been involved in. I’m so proud.

LFB : Is there a song on the record that is especially close to your heart?

Jehnny: Well, one of my favourite I always say is You Can Trust Me Now. I really love the instrumental and the string parts that was added to the song and it’s very dramatic and beautiful. But I think it was also the theme of the song that really, for me it’s like the core of the record and that spoken word before it as well. And I felt there were real truths there being said and real vulnerability.

And again from a perspective of a masculine voice, I thought I was really brave and I was really touched like by those lyrics and immediately I knew Bobby was writing some of his best material. And I remember actually Bobby I told that to Katie (England, Bobby’s wife), you know I said “Katie and you listen to the songs? and she said “No I haven’t listened yet”, I was like “You need to listen it’s the best thing is ever written!” (laughs).

The atmosphere in the studio was very light and friendly and fun and, but I knew we were making something precious, of weight, you know. And those words were carefully crafted and my role was, when you have such heaviness in the lyrics I think my role was trying to envelope them, try to protect them with backing vocals with… trying to give them some lightness, find some lightness and them, some… bring the light you know and I love that role. It’s like caring, you know, it’s like, receiving… you know when someone is so… because we talked about characters but really when you sing, it’s you, it’s definitely you, you’re not acting when you sing. You’re talking, your own experience is in the voice, otherwise you wouldn’t sound genuine.

And so I felt that when I was backing up Bobby doing all this vocals and backing vocals and choruses, different things, I felt I was serving a purpose, and there was a goal to it and there was a real message and a real meaning to.

It’s my favourite song because it’s the core of the record. It talks about the idea of redemption, the idea of trying to change to be better, the idea of change, I mean in love is something we rarely talk about, that the person you love changes that you need to adapt to that, that it’s not always easy. And the fact that also a relationship is something that you need to work on. I need to change, otherwise it is just making mistakes, and asking for forgiveness and you always fall back in your things.

And then I think change is a powerful thing and it’s one of the subjects that I love the most in music and, but it’s rarely talked about because we… it’s not very shiny and you know it’s not very… it’s more within, it’s more personal, it’s more fragile, subtle, but I thought it was beautiful.

And again from a male perspective to have that perspective on love. My job was almost done because usually it’s the woman says that but I didn’t have to, Bobby was serving all those aspects of the relationship and yeah it was interesting, very touching. Very emotional. In the studio as well as very friendly and light.

LFB: And are you planning to play the album live at one point? Are you planning to tour together?

Jehnny: Yeah. We would love to! We are planning to. Our teams are looking at options. It’s a difficult time for that but we want to do some shows this year on this record for sure. So we hopefully we can. In the UK, I think, it should happen. In Europe, hopefully, yeah.

  • Update: The two musicians will be playing at the Pitchfork Festival. They’ll be in Saint Eustache in Paris on 15th November and in EartH in London on 10th & 11th November.

LFB: The last question we generally ask at left at La Face B is: are they things that you’ve discovered recently that you would like to share with us?

Jehnny: Yes! There’s always great things going on.

Bobby: I was listening to that Black Country, New Road record (For the first time, 2021). It was kind of interesting. Young English band…

Jehnny: Yeah.

Bobby: Billy Nomates. Got her record last year as well (Billy Nomates, 2020)… Yeah, a lot of nice things happening… in Britain, a younger artist, the record I really liked record was by – I always forget his name – His name is Archie, red hair…

Jehnny: King Krule

Bobby: I really enjoyed that record, I thought it was a really good record, you know (Man Alive!, 2020). During lockdown, I listened to that record a lot. It’s a strange record is like lots of curiosities, you know, rather than songs, it’s like little sculptures or something. They’re very strange, but interesting.

Jehnny: All the artists you like are artists that I had on my TV show. (Echoes with Jehnny Beth on Arte tv)

Bobby: Ah, great!

Jehnny: King Krule and Billy Nomates,

Bobby: Great. Did you have Black…

Jehnny: Black Country, New Road I had them with Kim Gordon.

Bobby: He’s a nice character. Isaac (Wood) the singer. He’s lovely.

Jehnny: Yeah, very clever.

Bobby: Yes he’s older that he seems.

Jehnny: Yeah, totally.

Bobby: He’s a guy from the 1930s or something you know. Interesting character.

Jehnny: I also loved listening recently to the new Sons of Kemet record (Black To The Future, 2021). I’m a big fan of Chewbacca – oh Chewbacca (laughs) . What’s his name? I can’t remember his name, incredible saxophonist, whose name escapes me now (Shabaka Hutchings). But Sons of Kemet released a few records I really love. The song Hustle is really great. But I also, in a different land, but like on the hip hop side like the new J. Cole record is really good (The Off-Season, 2021). He’s a rapper really like.

LFB: Great! Thank you so much!

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Lire notre interview de Jehnny Beth ici.