À partir de sentiments bruts, Snail Mail crafte des chansons accrocheuses et addictives. Son langage de teen gâtée, ennuyé et direct et sa musique indie pop pleine d’énergie sont irrésistibles. Après Lush, son premier album qui lui a valu la célébrité et le succès à l’âge de 17 ans, et après un court séjour en centre de récupération, Snail Mail sort Valentine, un opus à vif aussi déchirant que puissant. Nous avons pu discuter avec Lindsey Jordan peu de temps avant la sortie de celui-ci. Nous avons parlé entre autres des étapes qu’elle a traversées et qui l’ont menées à l’écriture de l’album, de son travail de composition, et de lendemains de fête difficiles…
English version below
La Face B : Salut, comment ça va ?
Snail Mail : Ça va bien, et toi ?
LFB : Ça va bien !
Ton premier album Lush a été un succès massif, et tu es sur le point de sortir ton second, Valentine. Est-ce que tu t’es sentie sous pression face aux attentes des gens ou est-ce que l’écriture est venue naturellement ?
SM : Ce n’était définitivement pas naturel jusqu’à ce que je le force à l’être. Je pense que les attentes en général font qu’il est assez difficile de canaliser quelque chose d’authentique. Et ça m’a définitivement fait peur de m’y remettre.
De la même manière que je n’ai pas encore vu l’accueil du public pour Valentine, mais je ressens la même chose à l’idée d’écrire autre chose maintenant. Parce que je me sentais vraiment confiante pour cet album et je m’en sentais vraiment satisfaite. J’ai l’impression que l’idée que d’autres personnes l’aiment est, je ne sais pas, c’est difficile de se lancer dans quelque chose en sachant qu’il faut en quelque sorte faire mieux que ce qu’on a fait avant.
J’ai passé tellement d’années consécutives en tournée, que je suis devenue très douée à vivre comme ça. Et puis je me suis demander : « comment vais-je redevenir super indépendante ? et faire tout ça toute seule, écrire un autre disque et le faire ? ». L’histoire du deuxième album aussi, j’imagine que c’est un peu comme si je me disais « oh oui, ce premier album, je sais que je l’aime, mais qui sait si c’était juste une coïncidence ? Est-ce que j’ai juste fait quelque chose, en essayant de faire un gros truc ? » Je ne sais pas nécessairement si j’ai ce qu’il faut en tant que songwriter. Mais je sais que j’ai été très excitée une fois. Je suis souvent touchée par le syndrome de l’imposteur. Et je le suis toujours. Je suis toujours comme (rires) je ne sais pas, je n’ai pas l’impression d’avoir une science ou autre, je suis juste inspirée ou pas.
LFB : Tout ce succès t’est arrivé quand tu étais très jeune, et tu as dû passer un certain temps dans un centre de récupération. Est-ce que tu dirais que tout cela a affecté l’écriture de tes chansons d’une manière ou d’une autre ?
SM : Définitivement. Le plus gros avantage que j’en ai retiré est de recadrer les choses, et d’avoir l’esprit clair, ce que je n’aurais pas pu atteindre en me forçant à travailler. J’avais déjà commencé et fait une grande partie de l’écriture avant d’y aller. Mais j’étais vraiment bloquée à bien des égards, parce qu’il se passait beaucoup de choses. Donc, pour finir, j’avais vraiment besoin d’avoir les idées claires et une nouvelle perspective.
J’étais presque grillée par l’industrie de la musique, j’étais comme « fuck this ». Faire cet album était si important pour moi, et ça devait l’être, sinon je ne pense pas que j’aurais pu me résoudre à le faire.
En sortant de la cure de désintoxication… j’étais privée de… Ils ne vous laissent pas écouter de musique ou avoir un téléphone ou autre. La seule musique que j’entendais c’était celle de la salle de gym. C’était comme Diplo‘s Revolution sur SiriusXM (une chaîne satellite de musique électronique) . Et je me suis dit « j’aime vraiment la musique, ça me manque ! ».
En sortant de la cure de désintoxication, j’écoutais tellement de musique, et j’étais tellement heureuse de retrouver quelque chose qui m’intéressait vraiment.
Parce que je n’ai pas envie de parler de santé mentale toute la journée dans une salle de classe en Arizona. C’était juste comme, « putain, j’aime vraiment la musique et j’en ai vraiment besoin ! ». Mais c’était bien. C’était bon pour l’écriture de mes chansons, je pense.
LFB : Je croyais que tu avais commencé l’album en cure de désintoxication ?
SM : Non, j’y travaillais déjà depuis un moment, en fait. La plupart de l’écriture formative a eu lieu juste avant la pandémie. À ce moment-là j’étais dans tous mes états à bien des égards. Je vivais avec mes parents. J’avais mon appartement à New York, mais j’avais peur d’y être parce que j’avais des colocataires et je ne sais pas… Je me disais « Je ne veux pas être dans ce petit espace. Je ne veux pas être à Brooklyn… »
J’étais chez mes parents quand j’ai commencé à écrire la plupart des morceaux qui m’ont fait avancer. Avant la pandémie, au cours des dernières années, quand j’essayais d’écrire, j’avais Glory, C et al, Light Blue, Mia. Et puis, au début de la pandémie, j’ai écrit Automate, Valentine, Madonna et Headlock. Et je me suis dit « ok cool, j’ai quelque chose sur lequel je travaille d’un peu légitime maintenant », tu sais. Pas juste une collection de chansons, mais plutôt un truc homogène.
LFB : Tu viens de sortir le deuxième single de l’album, Ben Franklin. Il est très catchy, très dramatique et les paroles sont très personnelles. Peux-tu nous en dire un peu plus sur ce titre ?
SM : J’adore cette chanson. Je suis vraiment heureuse qu’elle soit sortie dans le monde. J’ai travaillé sur l’instrumental avant de travailler sur les paroles, ce qui ne fonctionne normalement pas pour moi. Ça m’a pris plusieurs mois pour essayer de mettre du chant à cette musique. J’étais comme « je sais que les instrumentaux sont géniaux ». J’étais comme « ça pète ! Mais les syllabes, la façon dont le refrain… » Essayer de trouver les mots m’a pris des mois.
Et puis j’ai ajouté plus tard – après avoir trouvé les paroles et la mélodie vocale comme (elle fredonne la mélodie) – une partie de guitare à la fin, j’étais juste en train de d’essayer des trucs dans ma chambre avec les fichiers Logic, ou autre, et, ouais !
La chanson est censée sonner délibérément comme gâtée, et comme avide, et croire avoir tous les droits (« entitled ») et tout ça parce que… » entitled » n’est pas le mot « gâtée » et « sale gosse » et comme « ennuyée » presque. Parce que c’est comme une version dramatisée de la fierté que j’essayais d’afficher si fort quand j’étais pas bien.
Et feindre l’apathie était la façon dont je voulais vraiment être capable de faire face au fait d’être si sensible que c’était difficile de mener ma vie de tous les jours. Parce qu’à l’époque, je faisais l’expérience d’une douleur nouvelle pour moi. Comme l’amour réel/ la perte réelle, ce genre de choses. Et j’étais juste totalement anéantie. J’étais détruite par tout ça.
Et ça commençait à devenir une chose où je me disais qu’il n’y avait rien de présentable dans ma personnalité à ce moment là. Je ne pouvais plus faire face à ça. Je ne pouvais pas en parler, donc je faisais des textes qui respirent l’ennuie et le fake… Mais c’était le contraire, je montre le contraire pour souligner ce que je ressens vraiment et c’est terrible. (rires)
C’était aussi difficile de… Je connais mon ton, en général avec beaucoup de chansons de l’album déjà, j’étais comme mélodramatique, intense… comme, assez ouvert sur les hauts et les bas et autres… Et cette chanson a un rythme si amusant presque, j’étais comme, « Je ne veux pas juste prendre mon écriture habituelle et juste la mettre sur ça. Je veux voir jusqu’où je peux l’adapter ».
Et c’est difficile parce que c’est comme sauter dans quelque chose dont tu ne sais pas si tu peux faire ou pas. Donc, en grande partie, c’était juste moi étant comme « Qu’est-ce que je fais exactement ? Je parle de sexe. Et… Ouais, je ne sais pas, peu importe ! ». C’est tout l’opposé, je m’en souciais. Tout est dramatisé as fuck !
SM : Oui, il y a un côté brut et sur l’ensemble de l’album c’est vraiment intime et intense et ça semble très profond. Et oui, les mélodies sont très accrocheuses… Dans quel état d’esprit étais-tu quand tu as composé l’album ?
SM : J’étais juste épuisée ! Je ne voulais pas commencer à écrire des chansons avant d’avoir eu une sérieuse expérience de vie entre deux tournées. Je n’ai vraiment pas envie d’écrire sur les tournées. Donc je me suis dit, je vais juste vivre ma vie, et ensuite je vais voir si quelque chose se passe. Et puis j’ai vécu ma vie pendant un certain temps, et c’était vraiment dur. Je n’avais aucune référence à ce que je vivais, alors c’était…
La vie de musicien.ne est dure, mais c’est un type distinct de difficulté que tu arrives à surmonter et puis tu réalises… par exemple, j’ai été en tournée pendant 3 ans, et je suis rentrée de tournée et j’ai vécu des choses et j’étais comme « Non », ce n’était pas du tout ce que j’attendais de la « douleur » ou n’importe quel autre truc du genre « grandir ».
Et puis, j’étais si fragile émotionnellement que je me suis dit « Je veux écrire sur ça ». Ça a fini par être assez authentique et cathartique parce que je sentais que j’avais besoin de travailler sur ces sentiments d’une manière ou d’une autre. Je me suis dit qu’au moins je faisais ça pour une raison autre que celle d’essayer de réussir et de gagner de l’argent.
Parce que c’est ce qui m’inquiétait. Avoir du succès, c’est assez addictif. Et je me disais que je ne voulais pas faire de la musique pour servir ça. Je veux juste le faire pour la raison pour laquelle je le fais et c’est pourquoi c’est bon. Parce que tu sais, comme pour Lush, je n’avais pas d’attente. J’ai passé beaucoup de temps naviguer à travers ces émotions. Donc je pense que toutes les étapes du deuil sont présentes, que je le réalise ou non à ce moment-là.
LFB : Y a-t-il une chanson en particulier qui te tient à cœur sur cet album ?
SM : Automate est ma préférée, et Forever vient juste après, parce qu’elles ont été si spéciales pour moi. Je veux dire, Automate était plus tôt dans le processus que Forever. Et j’ai pris beaucoup de temps pour que les paroles soient les bonnes. Et je pense que l’une des raisons pour lesquelles c’est ma préférée, c’est parce que j’avais une image en tête, et c’est comme ça que la chanson commence.
Il y a une certaine tristesse quand tu es avec beaucoup de gens, et que tu sais que ça va se terminer. On fait la fête et tout ça, on fait n’importe quoi, on fait un gros truc et on peut ignorer toutes les émotions. Puis, une fois que tout le monde est parti, et que tu es ivre, ou peut-être en descente, le cœur brisé et tout ça… c’est vraiment horrible (rires). C’est avec cette image que ça commence, et ensuite elle devient un peu plus spécifique. Mais j’ai l’impression d’avoir très bien réalisé l’image que j’avais en tête et ça m’a pris beaucoup de temps.
A l’origine, j’avais écrit le refrain avec des paroles emo qui ne sont pas restées, parce que je trouvais qu’elles n’étaient pas assez sérieuses. Puis elles ont cliqué d’une certaine manière qui a fonctionné. Mais essayer de les remplacer était vraiment difficile, parce que je me disais « ce n’est pas le ton », mais elles s’adaptaient parfaitement. Et puis une fois que tu as déjà des paroles dans ta tête, essayer de les remplacer… Vous seriez surpris du nombre de phrases qui ne fonctionnent pas dans le refrain !
La fin est géniale. C’est une de mes choses que j’ai écrites préférées. Comme le changement de signature temporelle, c’est quelque chose que je n’avais jamais fait auparavant et ça me rend toute émotive.
Et puis Forever, je manquais de temps en studio, je travaillais avec Brad et il m’a dit « il nous en faut dix ». J’avais un tas de démos et je me disais : « Elles sont cutting edge et j’ai besoin de choses qui font « bang » et il faut que ce soit maintenant ! ».
C’était assez difficile. J’avais ce petit échantillon avec lequel j’ai commencé. Et puis j’ai passé le reste du temps en studio, quand je ne travaillais pas activement sur des morceaux, dans la salle des invités, à l’étoffer avec une guitare. Ce qui était une saloperie ! Parce que la chanson n’a presque pas de guitare, mais c’est comme ça que j’écris. Et puis j’ai produit le reste de la chanson. J’ai fini par manquer de temps en studio.
Le dernier jour, je me suis engagée à avoir une chanson dont je sois assez fière, mais je voulais la retravailler. J’ai donc fait le reste dans mon appartement à Manhattan. Je n’avais jamais vraiment fait ça sur un morceau. Je le fais tout le temps sur des démos mais c’était vraiment cool de travailler sur le morceau dans mon appartement. Et c’est de là que viennent toutes les guitares, les voix, les harmonies et tout le reste. J’ai eu l’impression d’avoir atteint une sorte de super démarche créative en faisant cette chanson.
Je me disais : « Je ne sais pas d’où viennent ces riffs. Je n’ai pas d’expérience dans ce domaine, mais ça vient du coeur je suppose ». Et je pense que comme c’est le morceau le plus récent, il me tient à coeur pour cette raison.
LFB : Valentine a été conçu dans un petit studio avec Brad Cook (Bon Iver, Waxahatchee). Peux-tu nous parler du processus de création de l’album ?
SM : J’ai commencé l’album avec quelqu’un d’autre en fait. Et ça n’a pas fonctionner. Je tatais le terrain en essayant de trouver qui allait réaliser ma vision. Et j’ai les ressources pour être plus exigeante maintenant, ce qui est cool. Pas nécessairement que je ne les avais pas avant, mais juste plus de temps et d’argent pour passer plus de temps à chercher, tu vois ce que je veux dire ?
Donc, j’étais vraiment difficile. Et puis j’ai fini par être l’une des principales productrices sur ce projet. Je faisais des démos très détaillées chez moi, dans mon appartement, avec des synthés et tout ça… des chœurs, des harmonies et tout ça. Et quand j’ai décidé de travailler avec Brad, – ce qui était en fait après la cure de désintoxication – j’ai apporté ces démos presque finies.
Il m’a dit : « Tu peux le faire, si tu veux être la productrice, tu devrais le faire ». Et donc j’étais juste comme « ok ! ». Il voulait que je participe parce qu’il disait « les chansons sont bonnes, donc tu devrais suivre ton coeur parce que ça marche ». J’étais inquiète alors j’en ai juste fait beaucoup… J’ai fini par faire beaucoup, beaucoup, et comme j’étais l’auteur, personne ne m’a aidé de ce côté-là. Il y avait beaucoup d’essais et d’erreurs. Toutes les instrumentations auxiliaires ajoutées, comme des cordes, tout ça, n’ont été ajoutées qu’une fois que les chansons soient complètement terminées.
Parce que je suis contre le fait d’ajouter des choses juste parce que vous pouvez vous le permettre. Il faut que ça élève vraiment la chanson. Ça me rend folle d’entendre (en voix dramatique) des cornes et des harpes…. quand la chanson est bloquée, tu sais. C’était un gros truc. On se demandait « est-ce que c’est nécessaire ? » ou est-ce qu’on est juste… tu sais ?! Donc c’était une grande priorité de terminer les chansons avant de commencer à déconner.
LFB : As-tu eu des influences conscientes en créant Valentine ?
SM : Oh, je ne sais pas ! C’est difficile pour moi de canaliser quelqu’un quand j’essaie de faire en sorte d’être unique. J’ai toujours peur que quelque chose ressemble à quelque chose d’autre.
Cet album est si différent. J’étais comme si j’emmerdais l’album de tout le monde, tu sais ! (rires)
Et je suppose que pour ce qui est des héros et autres, mes artistes préférés… J’adore Elliott Smith, il est toujours au sommet de mon esprit, tout le temps.
J’aime Alex G, comme Oasis… Honnêtement, j’adore The 1975. Et aussi beaucoup de musique pop, j’ai toujours aimé Drake… ouais, j’écoutais beaucoup plus de pop, de hip hop, de R&B et de trucs, et honnêtement beaucoup de jazz. J’écoutais des tonnes de Bill Evans. Et j’aime vraiment l’album Devotion de Tirzah. Je l’ai toujours un peu en tête. Donc ouais.
LFB : As-tu écouté son dernier album ? Il est très bon.
SM : C’est vraiment bien. C’est assez expérimental pour quelque chose que je mets dans mes écouteurs, mais je l’aime bien. Hum, je suppose que Mica (Levi) n’a pas travaillé sur celui-là ?
LFB : Si, elle a participé. Et Coby Sey aussi. Tous les trois.
SM : C’est vrai. Oh, c’était Devotion, non ?
LFB : Oui, c’est la même équipe. Ils ont retravaillé ensemble sur Colourgrade et ils jouent ensemble sur scène, tous les trois.
SM : Oui ! J’ai eu la chance de les voir deux fois lors de la tournée Lush et je perdais la tête en regardant leur performance live ! Si bon, si minimal. Comme t’as un son minimal, et puis tu le joues en live et c’est vraiment bien. Ils sont tous super bons avec leurs instruments et savent vraiment bien jouer, tu vois ce que je veux dire ? des trucs minimaux. Je suis comme « allez-y, je ne sais pas comment vous faites ça », tu sais ?
LFB : Ouais, c’est vraiment magique. Ça a l’air très simple, mais c’est complexe et vraiment beau.
Il y a une forte scène musicale féminine qui se développe aux Etats-Unis depuis quelques années. Le monde de la musique indépendante semble beaucoup plus favorable aux femmes de nos jours. Est-ce que tu le ressens ? Est-ce que tu te sens proches de certains artistes ? (Je pense à Soccer Mum, Japanese Breakfast, Phoebe Bridgers, Lucy Dacus, Julien Baker, …)
SM : C’est juste Soccer Mommy. Je pense que nous sommes vraiment proches de ce groupe. Comme nous sommes amis avec les gens de Clairo, les gens de Soccer Mum… Tu sais comme j’ai des amis qui sont des femmes dans la musique mais garde à l’esprit que c’est juste moi. Au-delà de ça, je ne sais pas vraiment ce qu’est cette scène… Je ne sais pas quels en sont les rouages parce que je ne la vois jamais vraiment en action, tu sais.
Mais je suis heureuse de faire partie d’une culture qui encourage les femmes, les personnes homosexuelles, et surtout les jeunes, et même si ce n’est pas pour faire de la musique, se voir dans les personnes que l’on admire et avoir ça comme point de référence, juste en tant que fan, c’est cool. Je suis carrément pour faire grandir cela. Comme « Let’s go! ».
Et je me souviens que j’étais une enfant paumée et qu’il n’y avait même pas de putain de femmes… Maintenant, on se dit : « Regardez, il y a des gays, tout ça ». En fin de compte, je pense que c’est une bonne chose. Mais, ouais, je ne sais pas, je ne connais pas vraiment les rouages de tout ça. C’est juste que ça me semble un peu suspect.
LFB : Oui, en grandissant, il y avait principalement des hommes blancs dans le rock, mais oui, avec le temps, on dirait que beaucoup plus de femmes se sont lancées et sont assez importantes, donc c’est bien à voir !
Tu vas commencer une grande tournée fin novembre, et tu joueras en Europe en février et mars de l’année prochaine, c’est quelque chose qui t’avais manqué ?
SM : Oui ! Je suis à Paris en ce moment, c’est fou ! Et je suis comme, « Oh mon Dieu ! ». Je n’avais pas été dans ce bureau depuis des années, depuis que j’étais une adolescente, donc je suis vraiment excitée de refaire des choses en tant qu’adulte.
Il y a beaucoup de choses que je ferais différemment et c’est une perspective excitante parce que je ne peux avoir que du recul sur les choses que j’aurais faites différemment.
Mais oui, j’ai hâte de faire des concerts, nous sommes en mouvement, ce qui est excitant. Le groupe a répété comme des fous. Nous répétons ensemble aussi, ils répètent de leur côté, je pense qu’ils répètent en ce moment dans le Maryland. Et on est vraiment excités.
Nous avions du temps libre, avant que le cycle de presse ne commence et tout ça, et nous avons juste répété, donc nous sommes devenus très liés. Mon principal sentiment sur la tournée est généralement la fièvre, parce que je trouve ça vraiment difficile de rester en bonne santé. J’attrape des virus à droite et à gauche et avec COVID, le système immunitaire de tout le monde est encore plus bas donc je suis un peu nerveuse. Mais je pense que ça va être génial. Je n’ai pas vraiment fait de concert depuis deux ans !
LFB : Pour finir : Y a-t-il quelque chose que vous aimez particulièrement, que vous avez découvert récemment et que vous aimeriez partager avec nous ?
SM : Je suis vraiment à fond dans Pink Pantheress. Je crois qu’elle est anglaise, et je l’ai découverte il y a une semaine ou deux et j’ai été vraiment obsédée ; je crois qu’elle a sorti un nouveau disque (to hell with it). Et c’est cool, j’aime être obsédée par les choses. Je n’ai pas été obsédé par quelque chose depuis si longtemps, mais oui, tu devrais la découvrir si tu ne l’as pas fait.
LFM : Merci !
*Snail Mail a depuis annoncé qu’elle devait reporter ses tournées américaines et européennes, du à des questions de santé. La jeune musicienne américaine a écrit sur les réseaux qu’elle devait subir une opération suivie de 3 mois de récupération pour retrouver sa santé vocale. On lui souhaite de se remettre vite !*
English Version
From raw feelings, Snail Mail crafts catchy and addictive songs. Her language, bratty, bored and blunt and her energetic indie pop music are irresistible. After Lush, her first album that brought her fame and success at the age of 17, and a short stint in recovery centre, Snail Mail releases Valentine, a raw opus that is as heartbreaking as it is powerful. We got to chat with Lindsey Jordan shortly before the release of the record. We talked among other things about the stages she went through leading to the writing of the record, her songwriting process, and about difficult aftermaths of partying…
La Face B: Hey, how are you?
Snail Mail: I’m good, how are you?
LFB: I’m good!
Your first album Lush was a massive success, and you’re about to release your second, Valentine. Did you feel under pressure with people’s expectation or did writing come naturally to you?
Snail Mail: It definitely wasn’t natural until I forced it to be natural. I think the expectation in general makes it pretty hard to channel anything genuine. And it definitely made me scared to jump back in.
In the same way that I haven’t even seen the crowd reception to Valentine yet, but I feel the same way about writing something else now. Because I felt really good about it and I felt really satisfied with it. I feel like the concept of other people liking it is, I don’t know, it’s difficult to jump into something knowing that you have to sort of top your last thing.
I’ve spent so many years on tour consecutively that I got really good at living like that and then I was like “how will I be super independent again? and just do all this by myself, write another record and make it?”. The sophomore album thing too, I guess it kind of feels like, “oh yeah that first album, I know for a fact that I love it, but who knows if it was just a coincidence? Have I just made something, trying to make a big thing?”. I don’t necessarily know that I have it as a songwriter. But I do know that I gotten really excited one time. You definitely get rocked with imposter syndrome, a lot. I still do. I’m always like (laughs) I don’t know, it doesn’t feel like I have it down to a science or anything. I just get inspiration or don’t.
LFB: All this success came to you when you were really young, and you’ve had to spend some time in a recovery facility. Would you say this affected your songwriting in any way?
SM: Definitely, I mean, the biggest takeaway that I got from that is just a reframing of things, and clear headedness that I couldn’t have achieved probably just forcing myself to work. I mean I had gotten started and done a lot of the writing already before I went. But I was definitely locked in so many ways, because there was a lot going on. So, in order to finish this I definitely needed a clear head and a new outlook.
I nearly fried on the music industry, I was very much like “fuck this”. Making it was so much for me, and it had to be or else I just don’t think I could have brought myself to do it.
So coming out of rehab I was very much deprived of like… they don’t let you hear music or like have a phone or anything. The only music I would hear would be in the fucking gym. It was like SiriusXM Diplo’s Revolution. And I was like, « I actually really like music, I miss it! ».
Out of the rehab I was just listening to so much music, and I was just so happy to be reunited with something I actually cared about. Because I don’t want to talk about mental health all day in a classroom in Arizona.
It was just like, “damn, I actually really love music and actually really fucking need it!”. But it was good. It was good for my songwriting ultimately I think.
LFB: I thought you started the album in rehab?
SM: No, I had already been working on it for a while, actually. Most of the formative writing happened right before pandemic. That’s when I was just all over the place in a lot of ways.
I was living with my parents… I had my apartment in New York but I was scared to be there because I had roommates and I don’t know… And I was like “I don’t want to be in this tiny space, I don’t want to be at Brooklyn” like I gotta…
Yeah, so I was at my parents’ house when I started writing most of the tracks that really got me going. Before the pandemic, over the last years, when I was trying to write, I had Glory, c et al., Light Blue, Mia. And then, in the beginning of the pandemic I wrote, Automate, Valentine, Madonna and Headlock. So I was like “okay cool I have like something kind of legit now that I’m working on”, you know. Not just a collection of songs, more a thing that all goes together.
LFB: You just released the second single of the album, Ben Franklin. It is really catchy and it is very dramatic and the lyrics are very personal. Can you tell us a bit more about this track?
SM: I love that song. I’m really happy that it’s out in the world. It was a situation where I worked on the instrumental before I worked on lyrics which kind of doesn’t work for me. So it took so many months trying to put that music with vocals, I was like “I know this instrumentals are fire”. I was like “this is psyched!”. But the syllables, the way like, the chorus… like just trying to come up with the words took me months.
And then I added later, after I figured out the lyrics and the vocal melody that’s like (hums the melody) a guitar part at the end, I was just messing around in my room with the logic files, or whatever, and, yeah!
I mean the song is meant to sound purposefully like spoiled, and like grabby, and entitled and stuff because… “entitled” is not the word “spoiled” and “bratty” and like “bored” almost. Because it’s like a dramatised version of the pride that I was trying to put on so hard when I was struggling.
And feigning apathy was like how I was really wanting to be able to cope with being so sensitive that it’s like hard to carry out my daily life. Because I just think at the time I was experiencing a lot of pain that was new to me. Like real love / real loss that kind of stuff. And I was just totally wrecked. I was destroyed by it.
And it was starting to be a thing where I was like there’s nothing presentable about my personality right now. Like, I can’t cope with this anymore. I can’t talk about it anymore so this is making lyrics that are completely like bored and fake… Like this is the opposite, this is me presenting the opposite to emphasise how I actually feel and that’s terrible. (laughs)
It was also hard to like… I know my tone, generally with a lot of the songs in the record already, I was like it’s melodramatic, it’s intense, it’s pretty open about highs and lows and stuff… And that song having such a fun beat almost, I was like, “I don’t want to just take my songwriting that usually is and just put it over this. I do want to see how far I can adapt it”.
And that’s hard because it’s like jumping into something you don’t know that you can do or not, you know. So that a lot of it was just me being like “what am I actually doing? I’m talking about like sex. How do I even…” And like for the record like, “yeah I don’t know whatever!”. It’s all opposite, like, I care. it’s all like dramatised as fuck.
SM: Yeah, there’s a rawness about it and on the whole album it’s really intimate and intense and it feels very deep. But yeah the melodies are very catchy… What state of mind were you when composing the album?
SM: I was just wrecked as fuck! Didn’t want to start writing songs until I had some serious life experience in between tours. I really don’t want to write about tour. So I thought I’m just gonna live my life, and then I’m gonna see if anything comes about. And then I live my life for some time, and it was really hard. I was like fuck I don’t have a reference for what I’m living, so it was…
Musician’s life is hard, but it’s like one distinct type of hard that you figure out how to work through and then realise… like I’ve been on tour for 3 years, and I got off tour and experience some shit and I was like, “No”, like it was not at all what I would have ever expected “hurt” to feel like or like any of this “growing up” type of stuff.
And then, I was so emotionally fragile that I was like “I do want to write about this”. It ended up just being pretty genuine and cathartic because I did feel like I needed to work through those feelings somehow. I was like at least I’m doing this for some reason other than to like try to be successful and like try to make money.
Because that was what I was worried about. Just like to be in a success, it’s pretty addicting. And I was like I don’t want to make music to serve that. I want to just do it because of why I do it and that’s why it’s good. Because you know, like for Lush, I didn’t have an expectation for it. And during it, yeah, it was real time, I was really wading through as I went through those emotions. So I think all the stages of grief are like present, whether I realised it at the time or not.
LFB: Is there a particular song, that is especially close to your heart on the record?
SM: Automate is my favourite, and Forever is a close second, because they’ve been so special to me. I mean, Automate, was earlier in the process than Forever. I took serious amounts of time to make the lyrics right. And I think one of the reasons it’s been my favourite is I had an image in my head which is how the song kind of starts with, you know, there’s a sadness when you’re with a lot of people just knowing it’s gonna end.
Partying and all that stuff, doing whatever, and having like a big thing and you can ignore whatever emotions. Then once everybody’s gone, and you’re whatever, drunk, perhaps in a situation and coming down, and heartbroken and stuff, it’s really horrifying (laughs). It’s how the imagery starts, and then it gets a little more specific. But I just felt like I carried out the image in my head really well and it took me a long time.
I originally wrote the chorus to have these pretty emo lyrics that didn’t stay, because I felt like they weren’t serious enough. And then they hit in a certain way that worked. But then trying to replace them was really hard, because I was like “this is not the tone”, but they fit perfectly. And then once you already have lyrics in your head trying to replace them… You’d be surprised how many phrases, don’t work in the chorus!
The ending is brilliant. It’s like one of my favourite things that I’ve ever written. Like the time signature change, it’s something that I’ve never messed with before and that makes me feel really emotional.
And then Forever, I was running out of time in the studio, and I was working with Brad and he was like “well we need ten”. I had a bunch of demos I was like “These are cutting edge and I need things that kind of “bang” to throw in there and it needs to be like now!”
So that was kind of hard. I had that little sample in that I started with. And then spent the rest of the time in the studio when I wasn’t working actively on tracks in the guest room fleshing it out on a guitar. Which was a bitch! Because the song has almost no guitar on it but that’s how I write. And then I produced the rest of it.
I ran out of time eventually in the studio. On the last day I committed to have a song which I was pretty proud of but I wanted to work on it. So I did the rest of it in my apartment in Manhattan. And I’ve never really done that on an actual track. I do it on demos all the time but it was really cool to work on the track in my apartment. And that’s where all the guitars come from and the vocals and harmonies and stuff so I actually felt like I hit kind of a creative super stride during that song.
I was like “I don’t know where these riffs are coming from. I don’t have any experience with this, but it’s coming from the heart, I guess”. And I guess since it’s the most recent it’s close to me for that reason.
LFB: Valentine was crafted in a small studio with Brad Cook (Bon Iver, Waxahatchee). Can you tell us about the process of creation of the album?
SM: I started the record actually with someone else. And it didn’t end up lining up. I was really playing the field trying to figure out who was going to carry out my vision. And I guess I have the resources to be more picky now which is cool. Not necessarily that I wasn’t before but just more time and money to spend more time looking around, you know what I mean?
So, I was just really picky. And then I ended up being one of the main producers on it. I was making these very detailed demos in my house and in my apartment with synths, and all this stuff… backing vocals and harmonies and all the parts. By the time I decided to work with Brad, – which was actually after rehab – I brought those pretty much finished demos. He was very hands off, like « You can do it if you want to be the producer, you should do it ». And so I was just like “okay!”. He just wanted me to be a part of it because he was like “the songs are good, so you should just like follow your heart because it works”.
I was worried so I just made a lot… I ended up doing a lot, a lot, and like being that like, you know I was the writer, nobody helped me on that front. There was just a lot of trial and error. Any auxiliary instrumentation that was added, like strings, all that, was only added after the songs were completely done.
Because I am super anti adding things because you can afford to. This needs to actually elevate the song. It drives me crazy hearing like (in dramatic voice:) horns and harp…. when the song is trapped, you know. That was a big thing, we were like, “does it need this?” or are we just like… you know!! So it was a big matter of getting the songs done before I started messing around.
LFB: Did you have any conscious influences, while creating Valentine?
SM: Oh, I don’t know! It’s hard for me to like channel anybody when I’m trying my hardest to make sure it’s unique. I’m like always really fearful that something sounds like something else.
This album is so different. I was like fuck everybody’s album, you know! (laughs)
And I guess as far as heroes and stuff, my favourite artists… I love Elliott Smith, he is always at the top of my brain just all the time.
I love Alex G, like Oasis… and I honestly love The 1975. And just like also a lot of pop music that’s like always love Drake… yeah, definitely was listening to a lot more straight up pop, and like hip hop and R&B and stuff, and honestly a lot of jazz. I was listening to like a tonne of Bill Evans. And like, I really love that Tirzah album Devotion. That always kind of on my mind a little bit. So yeah.
LFB: Have you listened to her latest album? It’s really good.
SM: It’s really good. It’s pretty experimental like as far as things that I put on in my headphones, but I like it. Um, I guess Mica (Levi) didn’t work on that one?
LFB: Yes, she did. And Coby Sey as well. The three of them.
SM: Right. Oh, that was Devotion, right?
LFB: Yes, it’s the same team. They’ve work together again on Colourgrade and they play together on stage, the three of them.
SM: Yes! I had the chance to see them twice on the Lush tour and I was losing my mind watching the live performance! So good, so the minimal. Like having the minimal sound, and then play it live and it’d be really good. You’re all super good at your instruments and like really good at performing, you know what I mean? some minimal shit. I’m like “go off, I don’t know how you guys do that”, you know?
LFB: Yeah it’s really magical. It looks very simple, but it’s intricate and really beautiful.
There’s a strong women music scene that has been building up in the States for a few years. The indie music world seems a lot more woman friendly these days. Do you feel it? Do you feel close to certain artists ? I’m thinking of Soccer Mum, Japanese Breakfast, Phoebe Bridgers, Lucy Dacus, Julien Baker, …
SM: That’s just Soccer Mommy. I think we’re really close with that band. You know like we’re friends with the Clairo people the Soccer Mum people… You know like I have friends who are women in music but bear in mind it’s just on me. Beyond that, I don’t actually know what that scene… I don’t know what the inner workings of it are because I don’t really ever see it in action, you know.
But I am happy to be part of a culture that encourages women, queer people, and especially younger kids, and even if it’s not about making music, seeing yourself in people that you admire and having that as a point of reference, just as a fan is cool. I’m very much in support of growing that. I’m like, “Let’s go”.
I remember being like a little lost kid and there weren’t even any fucking women like… Now we’re like, look, there’s queer people, all this stuff. Ultimately I think it’s a great thing. But, yeah, I don’t know, I don’t actually know the inner workings of everything. I’m like just seems kind of suspicious to me.
LFB: Yeah, okay. Yeah, well, growing up there were mainly white male in rock music, but yeah, with time it looks like a lot more female took on and are quite big so it’s good to see!
You’re about to start a massive tour at the end of November, and you’ll be in Europe in February in March next year is that something that you’ve missed?
SM: Yeah! I’m actually in Paris right now which is crazy! I’m like, “Oh my God!” I hadn’t been in this office in years, since I was like a teenager, so I’m really excited to redo stuff as an adult.
I think there’s a lot of things that I would do differently and that’s exciting as a prospect because I can only have hindsight onto things that I would have done differently.
But yeah, I’m excited to play shows, we’re moving which is exciting. The band has been practising like crazy. I mean we practice together, they practice on their own, I think they’re practising right now in Maryland. And we’ve just been getting really excited.
I mean having time off, before the press cycle started and stuff, we just practiced, so we’ve gotten very tied. My main feeling on the tour is usually fever, because I just find it really hard to stay healthy. I catch viruses left and right and with COVID I’m like, a little like everybody’s immune system is still down so I’m a little nervous. But I think it’ll be awesome. I really didn’t have a show in two years!
LFB: Last question ! Is there something that you particularly like that you discovered recently and that you would like to share with us.
SM: I’m really into Pink Pantheress. I think she’s British, and I just discovered it like a week or two ago and I’ve been really obsessed I think she has a new record out (to hell with it). And it’s cool, I love being obsessed with things. I haven’t been obsessed something for so long, but yeah you should check her out if you haven’t.
LFM: Thanks, I will!
*Snail Mail has since announced that she has to postpone her American and European tours, due to health issues. The young American musician wrote on socials she had to undergo an operation followed by 3 months of recovery time to regain her vocal health. We wish her a quick recovery !*