S’il existe depuis 33 ans, le premier dispositif français de soutien au démarrage de carrière et de professionnalisation est loin de faire son âge tant qu’on le sent agile à devancer les tendances des musiques actuelles. Depuis 1989, de Suprême NTM à Miossec en passant par Bertrand Belin, Orelsan, Chassol, Feu ! Chatterton, Pomme ou Christine and the Queens, plus de 500 groupes ou artistes sont passés par le FAIR. Son éclectisme musical et ses sélections pertinentes font qu’à chaque session, nous attendons avec un certaine impatience de connaitre les lauréats – ravis de voir partager certains coups de cœurs que l’on a pu avoir à la Face B ou curieux de découvrir ceux qui le deviendront.
Nous avons profité de la session de présentation de la première Session 2022 des lauréats du FAIR, pour discuter avec Julien Soulié qui dirige depuis huit ans la structure, avec passion et enthousiasme.
La face B : Bonjour Julien, pour commencer, peux-tu nous présenter le dispositif du FAIR ?
Julien Soulié : Le FAIR est une association loi 1901 créée à la demande du ministère de la Culture en 1989. Déclarée d’intérêt général, le FAIR est le premier dispositif d’accompagnement et de professionnalisation pour la musique actuelle, en France. On est financé par toute la filière musicale grâce à la copie privée. La SACEM nous soutient, ainsi que l’ADAMI, la SCPP (Société civile des producteurs phonographiques) et SPPF (Société Civile des Producteurs de Phonogrammes en France) pour les producteurs phonographiques et le CNM (Centre National de la Musique).
On a aussi des partenaires mécènes. Comme par exemple, le Café de la Danse qui nous accueille pour les soirées où l’on présente les lauréats en petits showcases. Et aussi le Crédit Agricole Mécénat, \Else ou Amazon Music. Ces partenariats nous permettent de compléter notre budget.
On a deux sessions par an, en début et milieu d’année. Les critères d’éligibilité sont détaillés sur le site lefair.org. Sur 400 groupes qui postulent, 160 à 200 font l’objet d’une première présélection. Ensuite un comité artistique indépendant prend le relais. Il change à chaque fois et est paritaire. Ce sont sept femmes et sept hommes qui choisissent les artistes.
Ils ont un choix au coup de cœur artistique. Ce n’est donc pas facile de passer de 160 à écouter à un seul à choisir. Cela se passe d’abord sur l’artistique et ensuite ils peuvent nous demander des éléments présents dans leurs dossiers comme les partenaires autour du projet, leur vision de l’avenir et ce qu’ils attendent du FAIR – ce qui est hyper important pour nous.
Une fois sélectionnés, il existe cinq axes sur lesquels on peut les accompagner.
- Le premier axe est pécunier. Une bourse qui est cette année de 8 000 €.
- Le second axe est orienté formations. Il est important pour les auteurs-compositeurs-interprètes de comprendre l’univers dans lequel ils évoluent. C’est un métier et comme dans tout métier, il faut connaître ses tenants et aboutissants.
Cela prend la forme d’un séminaire de cinq jours où ils apprennent le statut social de l’artiste, la fiscalité, les contrats phono, les contrats de l’édition, du spectacle, des droits d’auteurs, des droits voisins. L’objectif est de comprendre comment parler avec tel ou tel interlocuteur ou partenaire potentiel. Formation aussi économique avec la structuration. On regarde aussi tout ce qui est compte SACEM, ADAMI, passage du régime général à l’intermittence, congés spectacles. Tous ces éléments sont hyper importants pour comprendre comment cela fonctionne.
Et au-delà de l’aspect formation, il existe aussi un intérêt à réunir les artistes ensemble, en séminaire, car souvent des choses naissent ensuite, d’un point de vue artistique.
Formation artistique avec le Studio des Variétés comme partenaire chez qui on dispose de créneaux pour que les artistes puissent se perfectionner soit en chant, en instrument ou en MAO en fonction des problématiques.
On a aussi des formations sur le corps et la santé des musiciens avec un séminaire de trois jours avec un osthéo-kiné spécialisé dans la médecine des arts et une coach en aisance corporelle. On fait des filtres auditifs moulés pour tous les lauréats, des audiogrammes. Il s’agit quand même de leur outil de travail. C’est important !
On réfléchit également à comment intégrer la santé mentale dans toutes ces formations. Aujourd’hui une structure, l’INSAART (INstitut de Soin et d’Accompagnement des Artistes et des Techniciens) a été créée. La GAM (Guilde des Artistes de la Musique) avec CURA se saisit aussi de ces questions-là en envoyant des questionnaires à la fois pour les artistes mais aussi pour les gens de la filière. On se dit que c’est bien de continuer à développer cet aspect-là.
On fait également des 5 à 7 d’information – quatre dans l’année où on fait intervenir des experts dans des domaines particuliers – marketing digital, distribution, artistes entrepreneurs, les aides qui existent. C’est fait en partenariat avec la GAM et le Studio des Variétés.
- Le troisième axe est celui de la diffusion qui est un peu mise à mal depuis deux ans avec la pandémie. On a voulu garder les concerts au Café de la Danse. Ils sont importants. Celui de mars l’an dernier a été un peu triste parce qu’il n’était pas possible d’accueillir du public mais on a pu faire jouer les artistes.
Avant, on faisait des dates dans les SMAC, avec des festivals. On a mis cela de côté parce que déjà l’incertitude était là et qu’on n’est pas armé, comme les producteurs de spectacles, pour gérer les annulations ou les reports. Les budgets étant aussi ceux qu’ils sont aujourd’hui, il fallait choisir. On a préféré garder une bourse assez élevée, des formations, importantes et pertinentes dans la structuration d’une carrière. Cette pierre à l’édifice que l’on mettait à la diffusion, on a préféré pour le moment la mettre en suspens. On espère reprendre un jour.
En tout cas, on continue avec l’Institut Français à emmener nos artistes au-delà de nos frontières pour pouvoir s’exporter. En espérant que 2022 soit une année où les frontières se rouvriront.
- Le quatrième axe est celui de la communication. Cela porte, comme on l’a déjà évoqué, beaucoup sur de la création de contenus. Les 15 minutes du Café de la Danse, une session live en studio qu’on offre aux lauréats le tout réalisée par \Else TBWA notre partenaire. On fait des interviews pour eux. Julie qui est chargée de communication au Fair peut les aider, leur montrer comment gérer les réseaux sociaux. C’est quelque chose d’important. Il y a trois ans, pas un artiste n’avait Tik-Tok. Aujourd’hui ils l’ont tous. On a également les playlists Deezer, Spotify, Apple Music, Amazon Music qui est notre partenaire. Et Patricia Teglia qui est notre attachée de presse aide le dispositif à être visible et, par ricochet, les artistes aussi.
- Le cinquième axe regroupe le conseil. Conseil en management quand l’entourage présent autour d’un projet n’est pas suffisant. On peut nous demander de bosser sur les rétro-plannings afin d’avoir une feuille de route plus précise. Certains artistes n’ont pas l’habitude de cela. On les connecte aussi avec la filière quand il n’y a pas de partenaires. Mezerg a signé chez Sony ATV par exemple. On fait en sorte d’aider au mieux les projets en leur expliquant ce dont ils auraient besoin en partenaires. Et déterminer lesquels pourraient correspondre à leurs esthétiques. En fonction des attentes, voir quel éditeur, producteur phono, manager, tourneur pourraient correspondre au projet.
Conseil juridique aussi, on travaille avec des avocats spécialisés dans la propriété intellectuelle. On conseille aux artistes de ne plus signer de contrats sans au moins les faire relire pour qu’ils comprennent ce qu’ils sont en train de signer.
Avec ces cinq axes, il s’agit d’un accompagnement à 360°. Depuis le début du FAIR, près de 500 artistes ont bénéficié de cet accompagnement, toutes esthétiques confondues.
C’est le fait d’être d’intérêt général qui est motivant. On est tous heureux, Fabienne, Julie et moi. On s’occupe des projets mais aussi et surtout des individus derrière ces projets. C’est souvent ce qui est délaissé par les partenaires.
Bien faire comprendre à un artiste ce que c’est qu’un pacte de préférence, ce à quoi ça engage. Si la galette des partenaires – éditeur, tourneur, producteur, manager – est déjà en place, on reste à notre place. Ils sont là pour s’occuper du projet. De notre côté, on bichonne le côté individuel parce qu’on sait que, quand ça va très vite, on ne prend pas le temps de bien expliquer les choses. Les artistes ont plutôt tendance à dire « Oui, oui » plutôt que « Je n’ai pas compris ». On est là pour qu’ils aient une compréhension globale de la filière.
LFB : En quoi le dispositif du FAIR complète, diffère des autres dispositifs qui peuvent exister ?
Julien Soulié : Nous sommes tous sur l’émergence mais à des endroits différents. Pour moi, l’Inouïs c’est vraiment le premier tremplin national de super visibilité qui permet souvent de récupérer des partenaires au Printemps de Bourges. Mais c’est plus en amont.
Le Chantier est vraiment spécialisé sur l’aspect scénique et, nous, plutôt spécialisés sur l’aspect structuration et la compréhension de tout ce qui est filière pour les artistes. Leur expliquer par exemple que de monter son label, c’est chouette mais avoir des partenaires, ça peut être bien aussi.
On ouvre beaucoup la porte à l’artiste producteur-entrepreneur car il n’y a pas assez de place en label pour tout le monde. Mais tous les artistes ne peuvent pas s’engager dans cette voie. On leur demande déjà de faire des super chansons, d’être très bons sur scène, en image, sur les réseaux sociaux. En plus il faudrait qu’ils soient bons en compta et facturation. On sent que certains sont armés pour affronter ce genre de problématiques et d’autres moins, voire pas du tout.
C’est aussi apprendre à connaître les artistes avec lesquels on travaille pour pouvoir les orienter au mieux. Pour certains, une licence, un contrat ou un distrib sera très bien mais pour d’autres il vaut mieux un contrat d’artiste parce que justement ils n’auront pas cet aspect-là à gérer. C’est vraiment important.
Notre dispositif est très large et la bourse sert à énormément de choses. Finalement, il y a beaucoup d’endroits où on peut aller pour aider le projet ou l’individu.
LFB : Qu’est ce qui fait que, pour un artiste lauréat, tu aies le sentiment que le FAIR a servi à quelque chose ?
Julien Soulié : Il n’y a pas de réponse unique. Pour certains, on a passé des mini étapes et on aurait aimé aller plus loin mais parfois ce n’est pas possible. Pour d’autres, on a pu passer de grosses étapes. C’est ce qui est chouette.
Quand on dit : « -M- a eu le FAIR», en fait c’était au début de sa carrière, au moment où -M- n’était pas le –M- que tout le monde connaît aujourd’hui. Louise Attaque n’était pas encore Louise Attaque. Orelsan n’était pas encore Orelsan. On a conscience, lorsqu’ils sont sélectionnés, de leurs niveaux de notoriété et de là où on souhaite les mener. Mais on ne fait que participer à quelque chose. On ne s’approprie jamais rien. Ce n’est pas le but. Ce sont aussi les partenaires autour qui sont importants.
On est toujours content quand Terrenoire vient d’avoir la révélation masculine aux Victoires de la Musique parce qu’ils sont passés par chez nous et qu’on a fait beaucoup de choses avec eux. Justement, ils étaient en licence chez Neuve – Universal. Ils étaient producteurs et on les a accompagnés sur l’aspect prod/exe, les contrats d’engagement pour respecter la convention collective, les recherches de subventions. Même le crédit d’impôts phono parce qu’ils avaient monté leur structure avant d’être au FAIR et qu’ils pouvaient en faire la demande.
Ou Pomme qui envoie un disque de diamant au bureau pour l’équipe du FAIR. Pour nous, ça montre l’importance que l’on a pu avoir un moment donné dans une étape de sa carrière. C’est ce qui est chouette.
Et on a un petit mot qui est un peu con mais qui veut dire beaucoup, c’est « FAIR un jour, FAIR toujours ». C’est vrai que l’on a six mois, un an d’accompagnement, ou même 18 mois parce que la bourse dure 18 mois. Mais on n’est pas très bons pour se dire au revoir avec les artistes. On préfère bien les accueillir et ensuite maintenir un lien avec eux.
Je suis à la tête du FAIR depuis huit ans. Mais, j’ai aussi pu travailler avec des artistes qui avaient eu le FAIR avant que j’y sois parce que l’ancienne directrice Claude Guyot avait eu ce même discours : « Je suis là mais après mon départ, il y aura quelqu’un ». C’est comme cela que des EZ3kiel, des Joseph d’Anvers, ou d’autres artistes sont venus parce qu’ils ne savaient pas vers qui se tourner. On a pris en main leurs problématiques. Ou Claire (Pomme) qu’on peut avoir régulièrement au téléphone parce qu’elle a des questions et qu’elle sait qu’elle peut nous les poser parce qu’on est d’intérêt général. De même Pierre de Radio Elvis ou les Grands Blancs sont revenus vers nous dernièrement.
C’est presque ce qui est le plus important, c’est qu’ils aient toujours ce phare en repère. Si aujourd’hui le projet avance bien – c’est génial et tu disposes de tous les partenaires dont tu as besoin – mais on n’est pas certain de ce que l’avenir peut te réserver. Je leur souhaite d’avoir leurs noms en haut de tous les festivals et de vendre des milliers de CD. Mais peut-être que cela ne va pas se passer comme prévu et qu’un partenaire va faire défaut. Dans tous ces moments de transition, ils savent qu’ils peuvent compter sur nous pour les écouter et voir si on peut répondre à leurs problématiques. C’est important de les accompagner dans la durée.
LFB : Personnellement, comment t’es-tu retrouvé à diriger le FAIR ?
Julien Soulié : J’étais manager d’Alexis HK. J’ai connu le FAIR quand Alexis a été lauréat en 2003. Je travaillais alors chez Musiques Hybrides, un petit label indépendant. J’ai rencontré Claude Guyot, la directrice du FAIR d’alors, l’équipe, le dispositif. J’ai aussi bossé avec Florent Marchet en management lauréat du FAIR en 2005. Ensuite Claude m’a appelé en me proposant de manager un groupe, Cabadzi (FAIR 2012).
Au moment où elle a senti qu’elle allait passer la main, elle a hyper anticipé sa succession. Elle avait cinq personnes, dont je faisais partie, à qui elle pensait : « Dans deux ans, je vais m’arrêter, prendre ma retraite. Est-ce que cela vous intéresserait de prendre la suite ? ». J’ai pesé le pour et le contre.
J’avais monté La Familia. C’est une structure qui existe toujours, gérée par Kevin Douvillez, ancien programmateur des Francos. Dans cette structure, il a développé à fond les aspects tours et éditions. Moi, j’avais juste le modèle économique le plus pourri, je faisais du management et de la production phono, donc autant dire que j’étais fou. Mais j’ai tenu tout seul pendant sept ans. Elle porte mal son nom, ça s’appelle La Familia mais en fait c’est plutôt une structure monoparentale. L’idée était de trouver des familles autour des projets. En vérité, pendant un moment, je me suis dit qu’il n’y avait pas beaucoup de missions qui m’intéressaient pour quitter cette aventure entrepreneuriale.
L’intérêt général, c’est quelque chose qui me parle et j’avais envie de mettre ma pierre à cet édifice. Je connaissais déjà les institutions, SACEM et autres. J’ai postulé à la direction du FAIR comme tout le monde, on était une cinquantaine de candidats. J’ai eu le poste. Ça m’a fait plaisir parce que cela validait tout ce que j’avais pu faire de mon côté auprès de La Familia. Et puis j’arrivais dans une petite équipe comme j’aime.
Avant j’ai été banquier, chargé d’affaires professionnelles pour BNP-Paribas. Donc je sais ce que c’est que d’être un numéro et de voir seulement son patron dans les feuilles saumon du Figaro. Ce n’était pas ce que j’avais envie de revivre. Je me sens bien dans les petites structures où on est un peu couteau suisse – à la fois directeur et en même temps roadie pour les artistes. C’est à la fois du cerveau, de l’huile de coude. Et puis avec Fabienne et Julie, on forme une super équipe. On a bien tous nos places et on avance. Les artistes le ressentent quand ils rentrent au sein du dispositif. Ils en sont ravis.
Et là, on commence aussi à avoir des familles de familles. Reÿn joue ce soir accompagnée au piano par Françis, le frère de Fils Cara. Fils Cara est pote avec Nikola. Ils ont fait The Artist sur France 2 ensemble. Joko est super pote avec Oré qui l’a grandement félicitée. Comme on essaye d’être bienveillant, d’être à l’écoute et vraiment tournés vers l’intérêt des artistes, le bouche à oreille se fait aussi entre artistes. Ils arrivent en confiance, parce qu’ils ont eu des bons retours des autres sur ce qu’on peut leur apporter. Ça facilite vachement.
C’est comme cela que je me suis retrouvé là. C’est vraiment cette notion d’intérêt général qui est – en plus – compliquée aujourd’hui. On ne va pas se mentir. En période de restriction budgétaire, il y a un repli sur soi qui est normal parce qu’il faut d’abord servir ses sociétaires et aider les artistes qui sont l’essence même d’une SACEM ou d’une ADAMI. Mais c’est vrai qu’en ce moment, il faut porter haut l’intérêt général pour que ces dispositifs qui existent depuis 30 ans, perdurent.
Ce n’est pas évident, mais on est toujours là !
LFB : Peux-tu nous partager quelques-uns de tes meilleurs souvenirs à la direction du FAIR ?
Julien Soulié : Les 30 ans du FAIR que l’on a fêtés au Trianon avec plein d’artistes, comme Mathieu Boogaerts, Sages comme des Sauvages, Pomme, November Ultra – en trichant un peu car elle avait eu le FAIR en 2016 avec Agua Roja. C’était chouette d’avoir eu tous ces artistes. Cléa Vincent avait tout agencé en petite génie de l’organisation. Tout le monde avait joué le jeu. Et puis c’était émouvant que Jack Lang soit venu dire un mot. C’est le papa du FAIR, il a monté ça avec Bruno Lion à l’époque. Ça reste un super souvenir parce que 30 ans, ce n’est pas rien.
Et puis après, c’est plein de petites choses. Pomme qui faisait dans nos soirées les premières parties d’Olivia Ruiz, parce que tu peux ouvrir pour d’anciens lauréats. Et puis quand ça a marché pour elle, c’était au tour d’Arthur Ely de faire ses premières parties. Tu as un côté transmission.
C’est rempli aussi de petits moments informels pendant les séminaires. Avant, ils avaient lieu à Paris, chacun mangeait dans son coin. C’était assez impersonnel. On faisait les formations à l’IRMA (Information et ressources pour les musiques actuelles) et à midi ceux qui avaient un budget de 5 balles mangeaient un sandwich, ceux qui avait un budget de 10 balles mangeaient japonais et ceux qui avaient un budget de 15 balles et une bonne SACEM mangeaient une entrecôte. Maintenant on a préféré réunir tout le monde en séminaire à une heure de Paris. Ce sont les intervenants qui viennent aux artistes. De 10 heures à 19 heures, on bosse. Mais le soir, on est à la cool. On sort les guitares, on se met derrière les pianos et c’est génial.
Et c’est comme ça que Coco Bans et Chien Noir ont commencé à écrire ensemble. C’est comme cela que Mezerg et Macadam Crocodile se sont rencontrés et ont ensuite fait deux titres ensemble. Même si cela reste de la théorie, des contrats, on n’oublie pas que ce sont des artistes et que c’est bien aussi de pouvoir passer des moments comme ça. Je me souviens aussi de Johan Papaconstantino au bouzouki, Julien Granel au piano et Pierre, le chanteur de Structures, en train de beugler là-dessus. Tout le monde se marrait. Des trucs un peu improbables mais aussi de belles rencontres humaines. C’est un plus à chaque fois qu’on peut réunir les artistes ensemble car sinon ils sont quand même assez isolés.
LFB : La dernière question concerne l’avenir du FAIR. Vers quoi aimerais-tu l’emmener ?
Julien Soulié : L’avenir du FAIR, j’aimerais que cela passe par une révolution en 2023 parce qu’on aimerait aussi faire partie de la relance. Le budget 2023 va être compliqué mais on souhaiterait passer de 14 à 30 lauréats sur deux programmes différents. Un programme de 20 lauréats et un autre de 10 lauréats. Aujourd’hui, on a mis ça sur la table. Le conseil d’administration a validé l’idée mais maintenant il faut trouver le financement.
C’est une autre paire de manches. On espère avancer dans les prochaines semaines parce que pour être prêt en 2023, on a besoin de commencer très en amont, d’autant que l’on est une petite équipe. On sait nos financeurs mobilisés. Ils essayent tant que « FAIR » se peut de nous accompagner et on va trouver des solutions pour être encore plus présents dans la relance, dans l’émergence. C’était compliqué avant, ça l’est encore plus aujourd’hui. On voudrait prendre part à ça et accompagner davantage d’artistes.
Apporter notre pierre à l’édifice post pandémie avec toutes les incertitudes. On est en train de se prendre une guerre en Europe. Qu’est-ce qu’il va nous arriver en 2023, je ne sais pas. On disait en 2020, vivement 2021. En 2021, vivement 2022. Et là on a à peine entamé l’année 2022 que l’on est déjà en train de souhaiter 2023. C’est une espèce de course en avant. A ce rythme-là, on va vite arriver à la retraite [Rires].
En tout cas, on aimerait ça. C’est quelque chose qui est sur la table depuis un moment. Comme tout le monde dans ces périodes en suspens, de confinement et autres, on cherche à démontrer l’intérêt de nos actions. On nous a quand même répété qu’on était non essentiel. Ça ne fait pas forcément plaisir. Alors comment peut-on, à notre humble niveau, réagir pour essayer de faire plus ?
On a proposé ça à budget égal d’avant la pandémie. Il y a un truc intéressant à faire et j’espère que les financeurs vont s’en saisir de façon à nous accompagner là-dedans.