Dana Gavanski sort aujourd’hui When It Comes son deuxième album. Un opus nourri de mélodies intemporelles et précieuses, brillamment élaborées en chansons intimes et inspirantes. De Under the Sky, une berceuse nostalgique créée pour célébrer la fin de l’été, à l’envoûtante I Kiss the Night, la lumineuse Indigo Highway, en passant par la plus sombre The Reaper, When It Comes est rempli de chansons délicates et magnifiquement écrites. Nous sommes tombés sous le charme et avons posé des questions à la musicienne serbe-canadienne basée à Londres…
Nous avons parlé (entre autres) de When It Comes, de ses road trips à Tijuana quand elle était enfant, et de mimes…
English version below
La Face B : Salut, comment ça va ? Comment tu te sens à l’idée de sortir When It Comes dans un peu plus d’un mois ?
Dana Gavanski : Excitée ! J’ai l’impression qu’il y a eu tellement de retards que ça semble un peu irréel, mais c’est proche, c’est très bientôt. J’ai hâte de l’avoir sous forme physique !
LFB : Tu as perdu ta voix à un moment donné après la sortie de ton premier album Yesterday Is Gone (2020) et de ton EP de reprises Wind Songs (2020) et tu as récupéré depuis. Je me demandais si cette expérience avait changé quelque chose en toi ou dans ta façon de chanter ?
DG : Oui. C’est difficile de décrire ce que ça a changé exactement. J’ai perdu ma voix à la fin du mois d’août 2020… Enfin, j’ai commencé à avoir des problèmes, puis il m’est apparu clairement que cela devenait assez grave. Et je ne l’ai retrouvée qu’en novembre 2021. Sans avoir à y penser constamment, tu sais… (rires).
Comment cela a-t-il changé mon approche de la musique ou de l’écriture de chansons ? J’ai dû apprendre à être un peu plus patiente et à prendre le temps dont j’avais besoin. Ne pas me presser ou m’attendre à faire quelque chose que je ne pouvais peut-être pas faire sur le moment. Il y avait beaucoup de choses à faire, comme laisser venir les choses.
C’est un peu dans le titre When It Comes. Il s’agit de laisser les choses arriver de la seule façon possible et d’essayer d’être ouvert à ça. C’est différent. Tu dois redémarrer. J’ai dû me recadrer à bien des égards, car les vieilles habitudes sont très fortes et je les ai toujours. Mais les vieilles habitudes dans le cadre d’une limitation sévère, à savoir que ma voix étaient un problème, ont été un défi et, d’une certaine manière, une liberté.
LFB : Oui, cela a dû être effrayant aussi…
DG : Oui, il y avait beaucoup de choses qui se passaient, comme tout le monde probablement pendant ces deux années. Et donc c’est difficile de ne pas parler. C’est en fait exceptionnellement difficile de ne pas parler. Surtout pour… comme je vis avec mon partenaire et il sait que j’ai des problèmes de voix. Je sais que j’ai des problèmes de voix, mais c’est vraiment difficile, même quand je ressens de la douleur et d’autres choses, c’est vraiment difficile de dire « non » et de passer la journée en silence. C’est vraiment difficile. C’est quelque chose auquel j’ai dû réagir intuitivement, et apprendre à être présente.
LFB : L’album nous projette dans un endroit onirique et plein de grace, il semble très introspectif et personnel. Comment as-tu procédé pour l’écrire ?
DG : Il a été écrit sur une période assez longue. J’étais censée l’enregistrer beaucoup plus tôt. En 2020. J’espérais l’enregistrer à la mi-2020 quand j’ai perdu ma voix. C’était à peu près au moment où nous l’avions organisé. Mais ensuite, j’ai eu tous les problèmes de voix et la pandémie était assez déprimante… Il a donc fallu du temps pour que ça se réalise.
Je ne sais pas pour les autres, mais je me sens assez… c’est vraiment difficile d’écrire quand on est triste ou anxieux. Et donc c’était une sorte de « comment trouver la paix et l’inspiration ? » pendant tout ce temps.
Et aussi j’étais, comme beaucoup de musiciens, en train de penser « quand est-ce que la musique live va recommencer ? ». Donc je pense que la seule façon d’être inspirée était un face à face. J’étais juste coincée avec moi-même pendant deux ans (rires). J’ai l’impression d’avoir fait le tour de beaucoup d’endroits et de cercles différents, mais, oui… ça a pris beaucoup de temps.
LFB : Est-ce que tu as un processus d’écriture particulier ?
DG : Il s’agit simplement de s’asseoir avec un instrument pendant un long moment et de me donner un jour ou plusieurs jours pour explorer l’instrument, ma voix et ma réaction. Cela demande beaucoup de patience. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je pense que c’est une bonne chose que je me sois mise à la musique, car j’ai appris à être beaucoup plus patiente avec moi-même. Il faut l’être pour laisser les choses venir. Tu ne peux pas vraiment les forcer. Ou alors, si on le fait, je pense que ça ne sort pas de façon très résonnante.
Cet album a été écrit il y a plus de deux ans. La première chanson a été écrite à Montréal juste avant la pandémie. Et la dernière chanson a été écrite en août 2021. C’est une grande différence dans le temps.
J’ai l’impression que toutes les chansons de l’album sont assez différentes à bien des égards. C’est comme si elles étaient des tableaux différents de ma vie. Comme toutes les choses que j’ai traversées… Elles sont assez personnelles en fait. Quand tu penses à The Reaper, c’était comme « ahh ! ». (rires). Mais The Reaper est sorti et j’étais comme « waw, « the reaper » ça sonne vraiment lourd ! » (rires). « Est-ce que je veux ça comme paroles ? ». Et j’ai juste coulé avec parce que j’ai réalisé que ça se sonnait bien dans ma bouche quand je l’ai chanté. Pour moi, chanter des paroles a beaucoup à voir avec la façon dont elles sonnent dans ma bouche. Et surtout si elles sonnent bien quand je les chante ou si elles m’interpellent… Donc j’ai suivi ça…
Et j’ai réalisé qu’elle avait en fait beaucoup de résonance dans ma vie et dans la vie en général à cette époque. Et la chanson est un peu une caricature, la peur de la mort avec laquelle nous avons tous vécu pendant la pandémie et au-delà. Parce que nous avons tous pensé à la mort, à la maladie et à tout cela au cours des deux dernières années, alors… c’est un peu théâtral, je peux genre jouer le rôle de ce sentiment effrayant et avoir peur en même temps (rires). Je suppose que c’est une façon d’y faire face.
LFB : Avais-tu un objectif en tête lorsque tu as composé le disque ? Ou avais-tu des influences particulières auxquelles tu pensais en le faisant, des choses que tu écoutais… ?
DG : Beaucoup de choses ! Un objectif ? Je ne pense pas que j’avais un but. Je voulais simplement me dépasser sur le plan sonore et sortir de ma zone de confort. J’ai commencé avec mon partenaire, James Howard, qui l’a également coproduit avec moi. Pour la première fois, j’ai mis mes chansons sur Logic et je les ai construites à partir de là pour les explorer soniquement plutôt que de les avoir simplement à la guitare. J’ai eu plus de temps pour y réfléchir et pour savoir quel genre de monde et de sons je voulais incarner.
Quant aux influences, j’en ai tellement, que ce n’est jamais vraiment facile. J’écoutais beaucoup d’Arthur Russell. J’ai tendance à écouter beaucoup de choses très différentes. J’ai découvert Stereolab. Je ne les avais jamais vraiment écoutés avant et je me suis plongée dedans. Toutes les mélodies et les harmonies différentes, les parties qui s’entrecroisent et juste le groove… Quoi d’autre ? Alice Coltrane que j’écoute toujours. Oui, juste un tas de choses. C’est difficile de déterminer exactement quelles influences sont liées à l’album. Juste un mélange de tellement de choses… Keyboard Fantasies de Beverly Glenn-Copeland, David Bowie, Television, Space Lady, Anna Domino, Abba, Roberto Cacciapaglia, les Cocteau Twins, Linda McCartney… Oui, et juste la vie, la vie quotidienne.
LFB : J’avais l’impression que sur le premier album, Yesterday’s Gone, il s’agissait plutôt de mettre un terme au passé. Alors que, pour moi, When It Comes semble presque heureux. C’est toujours rêveur et mélancolique, mais ça sonne plus serein, et tourné vers l’avenir peut-être. L’amour semble prévaloir, alors que le précédent était plutôt un album de rupture. Est-ce que tu es d’accord ?
DG : Je suppose que c’était un album de rupture. J’ai toujours trouvé amusant que les gens le décrivent comme un album de rupture parce que ce n’était pas nécessairement mon état d’esprit. Mais je pense que j’ai mis fin à une relation de cinq ans à cette époque, mais ce n’était pas un album de rupture douloureuse. J’étais en train de me trouver en tant qu’individu et de réfléchir à ce que cela signifie d’être seule et d’explorer de nouvelles choses par moi-même… Je suppose que c’était comme cet album ! (rires)
Cet album, tu trouves qu’il est plein d’espoir ?
LFB : Oui, je l’ai trouvé assez optimiste, paisible et serein…
DG : Oui, surement. C’est un mélange. Ces deux dernières années ont été marquées par une telle vague d’émotions que j’ai l’impression qu’il y a aussi beaucoup de mélancolie. Mais je pense que la musique m’a permis de voir au-delà de la mélancolie. Ou du moins de lui trouver de la beauté et de jouer un peu avec elle, plutôt que d’en être trop attristée
C’était déjà très difficile de vivre ces deux dernières années, non ? J’ai l’impression que la musique devait trouver un peu d’espoir ou explorer l’espoir et la fantaisie et quelque chose en dehors de ce que nous vivions tous en quelque sorte pour que je survive… ça semble assez sombre, je ne sais pas comment décrire ça, mais… les deux dernières années étaient assez lourdes, alors la musique devait dépasser ça… elle devait explorer autre chose.
C’était trop pour écrire sur ce qui se passait réellement, je devais juste explorer un peu plus ce genre de royaume magique, créer une petite mythologie.
LFB : Comment dirais-tu que ta musique a évolué depuis la sortie de cet album ?
DG : J’ai l’impression qu’elle a beaucoup évolué d’une certaine manière, mais je sens qu’il y a définitivement des connexions. Je pense que je suis devenue un peu plus idiosyncrasique. J’étais plus ouvert à l’inconnu. Je n’essayais pas nécessairement de faire une chanson pop parfaite. J’essayais plutôt d’explorer les sons. Et comment les sons et les sentiments sont liés, et comment les sons et les souvenirs sont liés.
Comme pour Indigo Highway, je l’ai composé sur le Moog Grandmother, sur lequel on ne peut jouer qu’une note à la fois. Et cette simplicité a déclenché en moi la simplicité nécessaire pour travailler dans le cadre de ces limitations et décrire quelque chose de très important pour moi.
Cette chanson parle d’une personne de mon enfance qui m’est très chère. Je pense toujours à elle et j’ai toujours essayé d’écrire sur cette relation. Mais la chanson n’a pas tout le poids de cette relation. Elle exprime exactement ce que j’avais besoin d’exprimer. Je ne sais pas, c’est étrange…
LFB : Ma prochaine question concerne une autre de tes chansons… Under the Sky, qui est ton dernier single. C’est une pause dans le temps, une ballade béate et mélancolique sur l’amour qui nous projette dans une chaude journée d’été … Peux-tu nous parler un peu de ce morceau ?
DG : C’est la dernière chanson que j’ai écrite de l’album. Je l’ai écrite pendant l’été. Bien que l’été dernier n’ai pas été pas très estival au Royaume-Uni, c’était un été assez froid … Mais j’essayais juste d’écrire quelque chose qui ressemble à l’été, quelque chose comme l’amour. Surtout quand on est en plein milieu et qu’on a envie de s’allonger sous un arbre.
Tu sais, la façon dont les pensées se déplacent autour de toi et ces expériences dans ton esprit changent et prennent forme et tu remets en question ta réalité et tes relations…
LFB : C’est très beau. Et la vidéo montre la chaleur d’une journée d’été ensoleillée, et c’est quelque part en Croatie, dont j’ai lu que tu étais assez proche. Est-ce le point de rencontre de ta famille ? Est-ce que tu peux nous parler de ce lieu et de la vidéo ?
DG : Oui, le film a été tourné sur l’île de Korcula, à une heure de ferry de Split. C’est en Croatie et la Croatie a beaucoup de petites îles. C’est l’une des îles sur laquelle le partenaire de ma mère a une maison. Il a grandi sur cette île et quand il était assez jeune, il a acheté un terrain dans une baie. Je pense qu’il a été l’un des premiers à le faire dans cette région. Maintenant, il y a environ six ou sept maisons sur cette petite baie. Il est sculpteur et a acheté un terrain avec l’argent qu’il a gagné en vendant ses premières pièces.
Il a acheté ce beau terrain et, au cours des 30 dernières années, il a construit sa maison à la main, avec l’aide de quelques amis. C’est un bâtiment à l’ancienne. Tous les bâtiments de cette région sont assez grossièrement construits. On peut voir la forme de la pierre. Il y a des sols en mosaïque et des vignes…
Et il y a toutes ces sculptures partout, soit ses sculptures, soit des sculptures anciennes de têtes de dieux, de dieux grecs ou de déesses sans tête, etc. C’est intéressant, il y a beaucoup de choses qui attirent l’attention. C’est une collection de sa vie. C’est face de la mer et il y des cyprès et des lauriers dans ce climat assez sec. Il fait très chaud.
Mais c’est un endroit où je vais depuis que j’ai peut-être 17 ans. Et, oui, c’est un endroit très important pour moi à bien des égards. L’une des premières chansons que j’ai écrites parlait de lui. C’est un homme intéressant et assez sérieux…
J’ai donc invité une de mes amies, Laura Lynn-Petrick, qui est vidéaste. Elle est venue et a enregistré la vidéo avec un caméscope. J’aime la texture des images au caméscope et la texture de la chanson a cette sorte de grain qu’a le caméscope. Donc, oui, je pense qu’elle l’a plutôt bien capturé.
LFB : Y a-t-il une chanson sur le disque qui te tient à cœur et dont tu aimerais nous parler ?
DG : Laisse-moi voir…
Indigo Highway. C’est une chanson qui est simple et qui parle de l’enfance. Je ne veux pas trop entrer dans les détails parce que c’est quelque chose qui me semble être un souvenir très privé. Mais il s’agit d’un moment de mon enfance. Elle me fait retomber en enfance d’une certaine manière… Moi, mon amie et sa famille avions l’habitude de partir de Vancouver – parce que je suis née à Vancouver – et nous allions en Californie pendant les vacances de printemps.
En chemin, on s’arrêtait, on mangeait un donut, un cheeseburger… en route pour la Californie. Sa mère avait un tas de multipropriétés (timeshares) qui, je suppose, sont des parts dans différents hôtels. On ne restait pas longtemps dans un hôtel, on ne restait que quelques jours, puis on allait dans un autre. C’était une expérience assez magique pour moi. Nous avions beaucoup de liberté. Nous étions des enfants et nous allions à Disneyland et nous allions à Tijuana… et je n’ai compris pourquoi nous allions à Tijuana que récemment. C’est parce que sa mère se faisait refaire les dents ! (rires) C’est beaucoup moins cher de se faire faire les dents à Tijuana.
Sa mère allait se faire soigner les dents, et moi et mon amie explorions Tijuana seules. Nous étions assez jeunes, nous avions 12 ans. C’est un endroit étrange, c’est une ville frontalière, assez pauvre, mais très colorée et vivante… Il y a des vendeurs dans la rue qui vendent de jolis petits bibelots… Donc oui, il y a beaucoup de choses dans cette histoire ou dans mon enfance.
J’ai l’impression que cette chanson a réussi à le condenser en quelque sorte. Il n’est pas nécessaire d’entrer dans les détails. Il s’agit juste de savoir comment capturer une émotion. Et je pense que l’humeur m’a vraiment aidé à le faire à cause de sa simplicité. C’est sorti tout seul.
Il y a aussi The Reaper. Il y a deux grands thèmes, qui sont cette relation avec cette fille et puis récemment cette présence de la mort et de la peur et tous ces trucs. C’est comme si j’avais voulu consciemment parler de la mort, je n’aurais probablement pas appelé la chanson « The Reaper », tu sais. Je ne l’aurais pas nommée d’emblée. J’aurais probablement essayé de trouver quelque chose de plus nuancé, mais c’est sorti tout seul.
Quand ça sort comme ça, c’est comme si on se demandait si on devait l’explorer. Je pense que c’est toujours une bonne idée.
LFB : La dernière fois que nous t’avons parlé, tu commençais à faire du mime et du clown. Est-ce quelque chose que tu as poursuivi depuis ?
DG : Je n’ai finalement pris que quelques cours. C’était un mélange de mime et de clown. Je le faisais avec mon partenaire James et c’était vraiment bien. J’aimerais y retourner. J’espère le refaire bientôt !
Cela m’a vraiment aidé à explorer la présence corporelle. Cela nous a juste aidés à nous incarner un peu plus, nous et nos pensées, et à ne plus être aussi sérieux tout le temps. Je ne sais pas faire de mime. Mais nous concentrions surtout sur des exercices, sur la façon d’être présent et de réagir aux choses… Juste être présent dans le moment plutôt que d’essayer d’apparaître d’une certaine façon et juste réagir à ce que le professeur nous demandait de faire.
On se mettait sur la sellette et on acceptait d’être, d’avoir l’air, de se sentir et de sonner comme des idiots et d’improviser… ce qui est quelque chose que je trouve très difficile. Et c’est vraiment difficile et ça devrait être difficile. Mais c’est comme ouvrir mon esprit pour être un peu plus sans jugement, avec le cœur léger et curieux. Donc c’est bien. J’adorerais y retourner. C’était vraiment charmant. C’est vraiment dur ! (rires)
J’ai un peu regardé Marcel Marceau. C’est incroyable ce qu’il fait. Il vous donne l’impression qu’il tient des choses dans sa main ou qu’il fait quelque chose, et il est si convaincant et c’est vraiment difficile ! (rires).
LFB : Est-ce qu’il y a des scénarios à suivre ?
DG : Juste des exercices que nous faisions. Il nous faisait nous déguiser ou choisir quelques objets et improviser autour. Il fallait juste se contrôler un peu plus.
Je pense que c’est comme, j’ai tendance à rire anxieusement si je suis nerveuse. Mais je pense que ça vient du fait de ne pas être concentrée. Quand tu te concentres, ton esprit peut faire tellement de choses. Et je pense que c’est si difficile de se concentrer en ce moment parce que notre esprit passe d’une image à l’autre, à des posts, à des articles de journaux… tu sais comme s’il était constamment occupé sans l’être vraiment pendant très longtemps. C’est quelque chose qui m’inquiète beaucoup. Mais je pense que nous en sommes tous de plus en plus conscients.
LFB : Oui et j’espère pouvoir y remédier. C’est inquiétant ! Ça m’inquiète beaucoup…
DG : Je sais et c’est vraiment dur. Tu ne te rends même pas compte que tu le fais. On se dit qu’on fait défiler les pages et on se rend compte qu’on le fait après l’avoir fait pendant une demi-heure ! (rires) Tu sais !
LFB : Oui, c’est fou.
Tu viens de terminer une tournée au Royaume-Uni et à Paris. Et je me demandais s’il y aurait bientôt d’autres concerts ?
DG : Oui ! Avec un peu de chance, nous prévoyons une grande tournée en septembre. Parce que les dates allemandes que j’avais prévues à cette époque, pour le mois de mars, ont été reportées à septembre, donc nous allons faire une grande tournée en septembre.
LFB : Y a-t-il quelque chose que nous n’avons pas mentionné et dont tu voudrais parler ?
DG : Juste que suis juste très heureuse de remonter sur scène. J’ai l’impression qu’hier soir, quand je suis allée voir de la musique live, ce sentiment d’excitation est vraiment précieux pour tout le monde. Les musiciens, le public… tout le monde est si excité d’être en présence de la créativité et de la musique et c’est vraiment excitant d’y revenir, même si cela semble totalement étrange et toujours un peu effrayant. J’avais hâte d’y être. J’ai l’impression que les deux dernières années ont été une période intéressante et introspective, et je suis impatiente de voir comment cela se traduit.
LFB : Et la dernière question est toujours : as-tu découvert quelque chose récemment, que tu aimerais partager avec nous ?
DG : Laisse-moi réfléchir ! Bonne question. Eh bien, beaucoup de choses, mais j’ai découvert Naima Bock récemment, et j’ai eu la chance qu’elle se joigne à nous lors de notre dernière tournée. Sa musique et son son sont si beaux. J’ai hâte que d’autres personnes puissent l’entendre !
LFB : Merci beaucoup !
English version
Dana Gavanski is releasing her second album, When It Comes, today. An LP full of timeless and precious melodies, brilliantly crafted into intimate and inspiring songs. From Under the Sky, a nostalgic lullaby created to celebrate the end of the summer, to the enchanting I Kiss the Night, the luminous Indigo Highway, to the darker The Reaper, When It Comes is filled with delicate beautifully crafted songs. We fell under the spell and asked a few questions to the London-based Serbian-Canadian musician. We talked about When It Comes, her road trips to Tijuana as a child, clowning, and more…
La Face B: Hi, how are you? How do you feel about releasing When It Comes in just a bit more than a month?
Dana Gavanski: I mean… excited! I feel like it had so many delays that it feels a little unreal but it’s approaching, it’s really soon. I’m excited to have it in physical form!
LFB: You’ve lost your voice at one point after the release of your first album Yesterday Is Gone (2020) and your cover EP Wind Songs (2020) and you’ve recovered since. I was wondering if this experience changed something in you or in the way you sing now?
DG: It did. It’s hard to describe what it exactly changed. I lost my voice at the end of August 2020… well I started to have problems and then it became clear to me that it was getting quite bad. And I only just got it back in November of 2021. Like without having to constantly think about it, you know… (laughs).
So how it changed my approach to music or songwriting? I had to learn to be a little bit more patient and take the time I needed to. Not to hurry or expect myself to do something that maybe I couldn’t do at the moment. There was a lot of just like, letting things come.
That’s kind of in the title When It Comes. It’s just like letting things happen in the only way that they can and trying to be as open to that. It’s different. You have to restart. I had to reframe myself in many ways because old habits are really strong and I still have them. But old habits within a severe limitation which was my vocals being a problem, was quite a challenge, and in some ways a freedom.
LFB: Yes it must have been scary as well…
DG: Yes, there was a lot of stuff going on, you know, like all of us probably had during these two years. And so it’s hard not to talk. It’s actually exceptionally hard not to talk. Especially to… like I live with my partner and he knows that I had voice problems. I know that I had voice problems, but it’s really hard, even when I feel pain and stuff, it’s really hard to go “no” and spend the day silent. It’s really difficult. It was something I had to really intuitively react to, and learn to be present with.
LFB: The album projects us in a dreamlike and graceful place, it feels very introspective and personal. How did you go about writing it?
DG: It was written over quite a long period of time. I was supposed to record it a lot earlier. Like in 2020. I was hoping to record it in mid 2020 when I lost my voice. That was around the time that we had organised it. But then I was having all the voice issues and also the pandemic was quite depressing… So it took quite a long time to come about.
I don’t know about anyone else, but I feel quite… it’s really hard to write when you’re sad or when you’re anxious. And so it was kind of “how to find peace and inspiration?” during the whole time.
And also I was, like many musicians, really thinking “when is live music ever going start again?” So I guess the only way to get inspired was quite a face to face thing. I was just stuck with myself for two years (laughs). I feel I’ve gone around in many different places and circles, but, yeah… it took a long time.
LFB: Did you have a particular writing process?
DG: It’s just sitting with an instrument for a long time and giving myself a day or many days to explore the instrument and my voice and my reaction to it. It needs a lot of patience. Which is one of the reasons why I think that’s really nice that I picked up music, because I’ve learned to be a lot more patient with myself. You have to be in order to let things come. You really can’t force it. Or if you do then I guess it just doesn’t come out quite right resonantly.
This album was written over two years ago. The actual first song was written in Montreal just before the pandemic. And the last song was written in August 2021. So quite a big difference in time.
I feel like all the songs on the album actually are quite different in many ways. It’s like they’re different tableaux of my life. Like all the things that I was going through… They’re quite personal actually. When you think about The Reaper, that in many ways was like “ahh!” (laughs). But The Reaper just came out and I was like “waw, “the reaper” that sounds really heavy!” (laughs). “Do I want that as a lyric?”. And I just flowed with it because I realised that it felt right in my mouth when I sang it. For me singing lyrics has a lot to do with the way that they sound in my mouth. And especially if they sound good when I sing them or if they challenge me… So I followed that…
And I realised that it actually had quite a lot of resonance in my life and in life in general at that time. And the song is a bit of a caricature, the fear of death that we’ve all been living with during the pandemic and beyond. Because we’ve all been thinking about death and illness and all that for the last two years so… it’s a bit theatrical, so I can kind of play the part of this scary feeling and be scared at the same time (laughs). I suppose it’s a way of coming to terms with it.
LFB: Did you have a particular goal in mind when composing the record? or did you have particular influences that you were thinking of when making it or things you were listening to?
DG: A lot of things! A goal? I don’t think I had a goal. I just wanted to sonically excite myself and get outside of my comfort zone. I started with my partner, James Howard, who also co-produced it with me. For the first time I took my songs to Logic and built them up from there and explored them sonically rather than just having them on guitar. I’ve had more time to think about them and what kind of world and sounds I wanted to inhabit.
As for influences, I have so many of them, it’s never really easy. I mean, I was listening to a lot of Arthur Russell at the time. I tend to listen to a lot of really different things. I discovered Stereolab. I had never really listened to them before and got deep into them. All the different melodies and harmonies and intertwining parts and just the groove. What else? Alice Coltrane I’m always listening to. Yeah just kind of a lot of things. It’s hard to pinpoint exactly what influences are connected to the album. Just a mix of so many things… Keyboard Fantasies by Beverly Glenn-Copeland, David Bowie, Television, Space Lady, Anna Domino, Abba, Roberto Cacciapaglia, Cocteau twins, Linda mccartney… Yeah, and just life, daily life.
LFB: And so I had the feeling that on the first album, Yesterday’s Gone, it was more like putting an end to the past. While, to me, When It Comes sounds almost content. It’s still dreamy and melancholic, but it sounds more serene, and turned toward the future maybe. Love seems to prevail, while the previous one was more a break up album. Do you agree?
DG: I guess it was a breakup album. I always found it funny that people would describe it as a breakup album because that wasn’t necessarily my frame of mind. But I guess I did end a five year relationship at that time. but it wasn’t a sorrowful breakup album. It was coming into myself as an individual and thinking about what it means to be alone and exploring new things on my own… I guess it was like this album! (laughs)
This album, did you think it’s hopeful?
LFB: Yes, I found it quite hopeful, peaceful and content…
DG: Yeah, definitely. It’s a mix. Really, it’s just been such a wave of emotions in the last two years that I feel like there’s also a lot of melancholy in it. But I think music provided a way for me to see outside melancholia. Or at least to find beauty in it and play with it a bit, rather than become too saddened by it.
It was already really hard to live the last two years, right? So I feel like music had to find some hopefulness or to explore hope and fantasy and something outside of what we were all kind of experiencing in order for me to survive… that sounds quite dreary, I don’t know how to describe that, but like… the last two years were quite heavy so the music had to exceed that… it had to explore something else.
It was too much to write about what was actually happening, I just had to explore a bit more of that kind of magical realm, create a little mythology.
LFB: How would you say your music evolved since you first released in this album?
DG: I feel like it evolved quite a lot in a way, but I feel there are definitely connections. I just think I became a little bit more idiosyncratic. I was more open to following the unknown. I wasn’t trying to make a perfect pop song necessarily. It was more just trying to explore sounds. And how sounds and feelings are connected, and how sounds and memories are connected.
Like with Indigo Highway, I composed it on the Grandmother Moog, on which you can only play one note at a time. And that simplicity kind of triggered simplicity within me to work within the limitations and then also describe something very important to me.
That song is about someone very dear to me from childhood. And I always think about her and I’ve always tried to write about that relationship. But the song doesn’t have all the weight of that relationship. It expresses exactly what I needed to express. I don’t know, it’s strange…
LFB: My next question is about another of your song… Under the Sky, which is your latest single. It is a pause in time, a blissful and melancholic ballad about love projecting us on a warm summer day … Can you tell us a bit about this song?
DG: That was the last song I wrote on the album. I wrote it in the summertime. Although I feel last summer in the UK wasn’t very summery, it was quite a cold summer… But I was just trying to write something that felt like summer feels, the way that love feels. Especially when you’re in the middle of it and you just want to lie down underneath a tree.
You know the way that thoughts move around you and these experiences in your mind shift and take shape and you both question your reality and your relationships…
LFB: It’s really beautiful. And the video shows the heat of a sunny summer day, and it’s somewhere in Croatia, which I’ve read you were quite close to. Is it your family meeting point? Can you tell us about it and about the video?
DG: Yeah, it’s filmed on the island of Korcula, which is a ferry ride from Split. It’s in Croatia and Croatia has many little islands. This is one of the islands that my mom’s partner has a house on. He grew up on that island and when he was quite young, he bought some land in a bay. I think he was one of the first to do so in that area. Now there are about six, seven houses on that small bay. He’s a sculptor and he bought land from the money he made when he sold his first pieces.
He bought this beautiful land and over the last 30 years has been building his house by hand, and with help of some friends. It’s an old fashioned building. All the buildings around that area are built in that roughly hewn tone. You can see the shape of the stone. There are mosaic floors and vines…
And there are all these sculptures everywhere, either his sculptures or antiquated looking sculptures of god heads, Greek gods and headless goddesses and stuff like that. It’s interesting, there are lots of things to feast on. It’s a collection of his life. And it’s right overlooking the sea and cypresses and bay leaf trees in this kind of quite dry climate. It gets really hot.
But that’s a place that I’ve been going to since I was maybe 17. And, yeah, it’s a very important place to me in many ways. One of the first songs I ever wrote was about him. He is an interesting and quite serious man…
So I invited this friend of mine, Laura Lynn-Petrick, who’s a videographer. And she came down and recorded the video on a camcorder. I like the texture of the camcorder and the texture of the song kind of has this kind of graininess to it that the camcorder has. So, yeah, I feel she captured it pretty well.
LFB: Is there a song on the record that is close to your heart or that has a special story behind which you would like to tell us about?
DG: Let me see…
Indigo Highway. I mean, it’s a song that is simple and it’s about childhood. I don’t want to go too much into detail because that’s something I feel like it’s a very private memory. But it’s just about a time in my childhood. It makes me feel like a child in a way… Me and my friend and her family used to always go from Vancouver – because I was born in Vancouver – and we’d drive on spring break to California.
Along the way, we would stop, and have a donut, and you know, have a cheeseburger… on our way to California. Her mum had a bunch of timeshares which I guess are shares in different hotels. So we wouldn’t stay at a hotel for a very long time, we’d stay for a few days and then go to another one. It was quite a magical experience for me. We had quite a lot of freedom. We were children and we’d go to Disneyland and we’d go to Tijuana… and I only realised why we’d go to Tijuana recently. It’s because her mom was getting her teeth done! (laughs) It’s a lot cheaper to get your teeth done in Tijuana.
So her mom would go get her teeth done, and me and my friend would just explore Tijuana alone. We were quite young, we were like 12. It’s a strange place, it’s a border town. It’s quite poverty stricken but It’s very colourful and lively… Such beautiful… there’s vendors in the street selling these beautiful little trinkets and stuff… So yeah, there’s so much in that story or in my childhood.
I feel like that song managed to condense it somehow. You don’t have to go into details. It’s just about how to capture an emotion. And I think the mood really helped me do that because of the simplicity of it. It just came out.
There’s also The Reaper. There are two really big themes, which were this relationship with this girl and then recently this presence of death and fear and all that stuff. It’s like, if I had consciously wanted to talk about death, I probably wouldn’t call the song The Reaper, you know. I wouldn’t just go out outright and name it. I would probably have tried to find something more nuanced, but it just came out.
When it just comes out like that, it’s like, “should I explore it?”. I think it’s always a good idea.
LFB: When we last spoke to you, you were starting mime and clowning. Is it something you’ve been pursuing since?
DG: I only ended up taking about a few classes. It was a mix of mime and clowning. I was doing it with my partner James and it was really lovely. I’d love to go back to it. Hopefully sometime soon!
It did really help explore body presence for me. It just helped us embody ourselves and our thoughts a bit more and let go of being so serious all the time. I don’t know how to do any mime tricks or anything like that. But because we were just mostly focusing on exercises on how to be present and how to react to things… Just being present in the moment rather than trying to appear a certain way and just reacting to what the teacher was asking us to do.
And we’d be putting ourselves on the spot and embracing being, and looking and feeling and sounding foolish and just like improvising… which is something that I find very difficult. And it is really difficult and it should be difficult. But it’s like how to open up my mind to just being a bit more non-judgmental and light hearted and curious. So that’s good. I would love to go back to it. It was really lovely. It’s really hard! (laughs)
I watched a bit of Marcel Marceau. It’s amazing what he does. It’s like he makes you feel like he’s holding things in his hand or he’s doing something, and he’s so convincing and it’s really hard!! (laughs).
LFB: Are there like screenplays you need to follow?
DG: Just exercises that we were doing. He’d make us dress up or choose a few objects and kind of improvise around it. You just had to control yourself a bit more.
I think that’s like, I have a tendency to laugh anxiously if I’m nervous. But I think that comes from not being focused. When you focus, your mind can do so much. And I think it’s so hard to focus in these times because of how much our mind shifts from image to image, to posts, to news articles to… you know, just like constantly being occupied without really being occupied for very long. It’s just like something I’m quite worried about. But I think we’re all becoming more aware of it.
LFB: Yes and hopefully be able to do something about it. It’s worrying! It worries me a lot…
DG: I know and it’s really hard. You just don’t even realise you’re doing that. Like just say you’re scrolling or something like that and then you realise you’re doing it after you’ve done it for like half an hour! (laughs) You know!
LFB: Yeah, it’s crazy.
You’ve just finished a tour in the UK and Paris. And I was wondering if there will be more live shows soon?
DG: Yeah! Hopefully, we’re planning a big tour in September. Because the German dates that I had scheduled from this time, for March, got postponed to September so we’re playing a big tour in September.
LFB: Is there something we haven’t mentioned that you would like to talk about?
DG: I’m just really happy to get back up there. I feel like, last night when I went to see some live music, that feeling of excitement is really treasured by everyone. The musicians, the crowd… everyone’s so excited to be in the presence of creativity and music and it’s really exciting to come back to it even though it feels totally strange and still kind of scary. I had been looking forward to it. I feel like the last two years have been an interesting, introspective time so I’m excited to see how it translates.
LFB: And the last question is always: have you Is there anything that you’ve discovered recently, that you would like to share with us?
DG: Let me think! Good question. Well, lots of things, but I discovered Naima Bock recently, and was really lucky to have her join us on our last tour. And her music and sound is so beautiful. I’m excited for more people to hear it!
LFB: Thank you very much!