La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre, la seconde partie de la sélection numéro 133 des clips de la semaine.
Adèle Castillon – Impala
Adèle Castillon annonce le début de l’été avec Impala, premier titre en solo pour l’ex chanteuse du groupe Videoclub.
Impala est un hymne au glow up. Entre « tout envoyer balader » et « sortir sa jupe noire », Adèle compte bien nous faire danser et oublier notre chagrin d’amour. Dans le clip, on suit la chanteuse à travers un enchaînement de séquences : de la détresse d’une fin de relation, maquillée en clown offrant un regard confiant vers la caméra, habillée sur son 31. Tournée principalement aux Etats-Unis, Adèle a fait appel à son amie photographe et directrice artistique Alice Moitié pour réaliser la vidéo. C’est peut être ce qui ajoute la touche très personnelle des images.
Un extrait était déjà viral sur Tiktok, on ne doute pas que le clip à l’esthétisme des années 90 et reprenant les dernières trends du réseau devrait suivre le même succès.
$-Crew – 22
Toujours aussi discret, c’est par surprise que le $-Crew c’est reformé. Après avoir annoncé la sortie d’un nouveau projet par leurs propres canaux, ils en ont dévoilé le premier extrait cette semaine, avec le clip de 22, réalisé par Bleu Desert.
La formule n’a pas radicalement changé : on retrouve des couplets remplis de technique et de maîtrise, un refrain efficace et une symbiose entre les quatre collègues et amis que sont Mekra, Framal, Nekfeu et 2Zer. L’engagement est également toujours présent : à l’instar de son titre, ce morceau traite de la police, et surtout des manquements de cette dernière. Un propos excellemment appuyé par le clip. Dans un premier temps, il plonge le spectateur dans la peau des officiers de la BAC, dans une ronde nocturne agitée où, entre les trafics de stupéfiants et les discussions houleuses, ils usent de leur position pour légitimer un comportement agressif et autoritaire, qui ne s’apparente pas vraiment à de la fiction mais plutôt au quotidien de nombre de personnes.
Après un énième contrôle trop musclé qui dégénère, l’équipe de la BAC se fait subtiliser sa voiture par la team du $-Crew, qui ride à toute vitesse vers l’annonce de leur projet SZR 2001, qui, par surprise (encore une) est disponible depuis ce vendredi.
Sïan Able – The Choice Is Yours
A l’approche de son premier album, Sïan Able dévoile The Choice Is Yours et son clip, réalisé par Visolume, Diego Crutzen et Anaïs Elba. Dotée d’une formation classique, cette artiste bruxelloise n’hésite pas à s’en servir pour composer elle-même la bande sonore de ses récits empreints d’émotions et nourris par des influences diverses, puisant dans toutes les époques.
The World Is Yours présente une composition lyrique, teintant toutefois cette dernière d’une joie de vivre mélodique et d’un discours positif, rappelant que malgré les duretés de la vie, on peut toujours faire le choix d’aller y chercher du bien.
Dans un visuel à l’esthétique rétro, la chanteuse met en avant divers profils de personnes qui ne se laisseront guider que par leur choix, et par la musique chargée en émotions de Sïan Able.
Benjamin Biolay – Rends l’amour !
Des notes de guitare électrique jumelées à une basse impertinente. À cela, ajoutons une image désuète, qu’on dirait presque filmée par un caméscope autrefois utilisé pour figer à jamais les chants d’anniversaires dissonants, les bougies soufflées en famille. Il ne faut pas plus de quelques secondes pour comprendre que l’on écoute Benjamin Biolay.
C’est avec Rends l’amour !, extrait de son prochain album Saint-Clair, qu’on le retrouve. Les codes sont les mêmes. Musicaux, d’une part. Visuels, de l’autre. Comme à son habitude, c’est dans une destination balnéaire que les caméras se sont posées, alternant entre le bleu de l’eau et le noir de ses lunettes.
À ceci près que Benjamin n’est pas seul, cette fois : il est suivi par une procession religieuse et un hélicoptère étatique, prêt à intervenir au moindre dérapage de ce qui semble être une manifestation, un plaidoyer pour l’amour, en somme. Et même si on peut difficilement passer à côté des allusions politiques, maquillées dans le clip par la présence d’un corps de l’autorité, qu’elle soit religieuse, militaire ou policière, on ne peut s’empêcher de penser à notre tour à un amour unilatéral que l’on aurait offert, piétiné à jamais, perdu dans le tourbillon des mensonges et des histoires avortées. Lorsque l’autre a tout pris sans jamais rien donner.
Et c’est bien là ce qu’on aime, avec Benjamin Biolay : que sa voix grave nous conte les désenchantements du coeur, l’amour, la haine, le chagrin. Reviens-vite à Saint-Clair, on en a besoin.
The Black Angels – El Jardin
The Black Angels ont annoncé cette semaine la sortie prochaine d’un nouvel album qui s’intitulera Wilderness of Mirrors, et sortent dans la foulée le single El Jardin, un morceau psychédélique à la fois trippant et dramatique, comme seul le groupe texan en a le secret. La vidéo qui accompagne le titre, réalisée par Vanessa Pia, offre à voir un monde dystopique dans lequel la nature n’existe plus. La réalisatrice décrit la vidéo : [c’est] “un futur où Mère Nature est morte parce que nous l’avons tuée, et où le seul moyen de la vivre est la réalité virtuelle – un sentiment déjà relatable, puisque la plupart du monde vit viscéralement à travers les médias sociaux. Qui sait où nous serons dans 100 ans. » Les images, montrant un enfant dans un hangar qui expérimente la nature avec un masque de VR, ont été réalisées en 35mm et accompagnent parfaitement le morceau. On a hâte de découvrir Wilderness of Mirrors, dont la date de sortie est prévue pour le 16 septembre.
COUR DE RÉCRÉ – À L’ombre D’une Jeune Fille En Pierre
A la recherche d’un temps suspendu, Cour de Récré semble délaisser les dance-floors pour se perdre dans les allées d’un parc nimbé d’un sentiment mélancolique, fruit d’un amour pétrifié : celui que l’on éprouve face à quelqu’un restant de marbre. A l’ombre d’une jeune fille en pierre porte l’attente d’un mouvement amoureux que l’on aimerait voir naître, et l’espoir de voir, par-delà le marbre, la jeune fille en pierre bouger et les sentiments l’animer.
Cour de Récré réussit à nous embarquer dans son tumulte émotionnel. Car si le début du morceau peut sembler sage, le tempo s’accélère ensuite et nous fait tourbillonner dans un flow musical so eighties. Il existe comme quelque chose de magique qui opère dans cette pirouette. Et nous ne sommes pas les seuls à pétiller. Les compteurs de vues Youtube s’affolent. Il doit, c’est certain, se passer quelque chose dans cette Cour de Récré. Pour le découvrir, vous pourrez les retrouver sur scène samedi prochain, le 18 juin, à l’International, rue Moret à Paris.
UTO – Heavy Metal
Depuis le temps qu’UTO traverse le paysage sonore de la nouvelle scène française, avec un esthétisme sonore qui lui est propre, nous sommes ravis d’apprendre que son premier album va enfin se matérialiser cet été. Touch the Lock sortira le 26 août sur Infiné et Pain Surprises. En attendant, et pour patienter, vous allez pouvoir explorer avec Heavy Metal un nouveau chemin du dédale musical qui forme son univers. Voix aérienne, prod trip hop terrestre, il s’entoure d’ambiguïtés qui font naître la curiosité, l’envie de découverte. Soyez obstinés pour mieux vous laisser aller, tout comme les protagonistes de la vidéo pris dans la tourmente d’un mythe de Sisyphe qui, enfin, finirait bien.
Chiloo – Genèse
Sorti ce 10 juin, Genèse est le tout premier album du jeune Parisien Chiloo. À seulement 21 ans, le rappeur livre un projet de 14 titres sincère et puissant, et démontre son talent pour les textes travaillés. Pour célébrer cet événement, il a sorti le clip du morceau Genèse. Genèse, comme son nom l’indique, marque le début d’une belle carrière pour Chiloo.
Découvert sur les réseaux avec ses freestyles dans 1 min 2 rap, il a très vite montré une technique solide et une certaine originalité dans sa musicalité. Réalisé par Célestin Soum, on découvre un clip au visuel mélangeant esthétisme et brutalité. La tête plongée dans une sorte de bassin en or rempli d’eau, Chiloo lâche son texte avec une facilité déconcertante. La deuxième partie du clip est encore plus visuelle, le rappeur plonge dans une immense étendue d’eau et se débat pour essayer de garder son souffle. Il sera finalement sauvé par un groupement de mains dorées. Avec ce clip, Chiloo évoque peut-être une métaphore sur le fait de sauter dans le grand bain. Une chose est certaine, il offre à ses fans un album complet et de qualité, dont on espère que ce premier projet marque le début d’une longue série.
Saavan – Hometown
Saavan, duo aux sonorités électroniques, sortait ce vendredi 10 juin son nouvel album Chapters, ainsi que le clip Hometown. Accompagné par le label Yotanka Records (Stuffed Foxes, BRNS, Kid Francescoli, …), le groupe dévoile une musique pop aux textes évocateurs, entre douce mélancolie et refrains entêtants.
Le film, écrit et réalisé par Meska, nous immerge dans le nord de la France, au sein d’une région minière. Un jeune homme au volant de sa voiture arrive doucement dans la ville de son enfance et, le temps d’une journée, retrouve sa vie d’avant, ses amis, qui sont restés dans le coin et qui sont aujourd’hui en couple et avec des enfants, ses ruelles vides d’habitants et ses quartiers en cours de démolition.
Et au-delà de tout ça, il y a la joie de revivre des instants passés, mêlée à une certaine incompréhension, d’une vie qui ne nous correspond plus et des lieux aimés qui ont disparu.
Avec un effet pellicule qui nous plonge au sein des années 90, en France ou en Angleterre, peut-être du côté de Brighton, Saavan réussit le pari de nous embarquer dans leur univers, dans leurs souvenirs teintés d’amertume et de douceur. Car finalement, ce film narre leur histoire. Lucas Mokrani et Claire Lengaigne sont tous deux originaires du Nord, qu’ils quittent assez tôt pour la capitale et la Belgique. Mais on n’efface pas d’un revers de main la région dans laquelle on a grandi, aimé et pleuré. Ce clip devient un hommage, une déclaration d’amour, où leurs voix, à l’unisson, déclament des mots poétiques.
Saavan révèle avec ce nouvel album des morceaux oniriques et planants, flirtant délicatement avec un spleen rassurant et un appel vivifiant au voyage.
Lémofil – Perdre la raison
Lémofil est un coup de cœur, un coup de foudre, un coup qui ne tabasse personne, et qui au contraire nous libère. Son morceau Perdre la raison s’illustre avec un clip à la mise en scène limpide et touchante. Les images collent plutôt fidèlement au texte, chaque mot prend alors un sens précis.
Moins glauque que l’ambiance de Vol au-dessus d’un nid de coucou, le célèbre film dont l’histoire se déroule dans un hôpital psychiatrique, le clip de Lémofil reprend cette thématique pour y faire une délicieuse allusion à la passion amoureuse.
Nous pouvons aisément anticiper la tournure finale du clip, mais la minutie des plans nous invite à nous délecter du déroulement narratif. En clair, la réalisation menée par Lémofil et Alexandre Mameli (Errel, Azaria Nwtn, Dino, …) fonctionne à merveille. Ruez-vous sur Créatura, l’EP de ce jeune rappeur est d’une poésie assurément contemporaine !
Phoenix – Alpha Zulu
Cinq ans après la sortie du caniculaire Ti Amo, les versaillais de Phoenix ont annoncé leur retour avec la sortie d’Alpha Zulu, leur dernier single sorti le 1er juin. Alors que Ti Amo tirait son inspiration esthétique de la dolce vita d’une Italie rêvée des années 80, ici, ils semblent avoir été grandement influencés par une ère plus reculée, la Renaissance italienne possiblement.
Alors, pour accompagner ce single estival et novateur, le quatuor s’est tourné vers un trio de réalisateurs qui n’est autre que celui composé par Pascal Teixeira, Emma Besson et Louis Bes. Dans ce clip, on y voit des portraits en peinture dodeliner de la tête au rythme d’Alpha Zulu, et chantonner les paroles d’un morceau que l’on devine d’ores et déjà iconique : Woo ha / Singing Hallelujah / Pray to your God / Cover your lies / God or Guru / Hey Hey Hey.
Phoenix en a également profité pour annoncer leur tournée mondiale, qui débutera en septembre prochain aux Etats-Unis et s’arrêtera avec deux Olympia (presque complet, dépêchez-vous) les 28 et 29 novembre prochain. On y sera, et vous ?
Aloïse Sauvage – CROP TOP
En attendant de la voir en concert à la Cigale le 11 octobre 2022, Aloïse Sauvage nous revient et délivre un flow engagé au franc-parler sans pareil. Au croisement de la chanson pop et du hip hop, son hymne libérateur prend pour angle d’attaque la polémique autour du Crop-top et aborde sans détour sexisme systémique, violences faites aux femmes et harcèlement de rue. Le clip, réalisé par Zenzel, avec la participation de Reda Kateb et Polo, met en scène le déchaînement et les transgressions successives d’une bande de meufs qui expriment leur ras-le-bol. « Non c’est non c’est non / Quand on dit « non non » c’est « non non non non non » / Est-ce que t’entends ? / Faut t’le dire comment ? Non c’est non c’est non / Quand on dit « non non » c’est « non non non non non » / Est-ce que t’entends ? / Est-ce que t’entends ? ». Un peu plus clair, maintenant ?
Dani Terreur – Soleil de minuit
Composé, réalisé et arrangé par Dani Terreur, « Soleil de minuit », dernier clip en date issu de sa mixtape, nous fait passer de la mélancolie au romantisme sur un rythme entêtant aux sonorités orientales.
Seul en scène, sous la lumière bleutée d’un unique projecteur, Dani nous invite à un voyage aux confins de l’intime… Les méandres sentimentaux de ses fêlures enfin comblées par un hypothétique amour se révèlent sous la brûlure de l’astre solaire chanté comme un remède.
Sur ce titre électro-pop, le cœur brisé de la scène française semble renaître de ses cendres et passer de l’ombre à la lumière, tandis que le soleil sèche ses blessures. Aux percussions s’ajoutent le son d’une cithare et d’une guitare, tandis que les chœurs envoûtants achèvent de composer un titre chaleureux, sensuel et dansant.
Send Me Love Letters – Love Letters
Le jeune groupe lyonnais Send me Love letters revient avec un titre (quasi) éponyme en forme de relecture contemporaine du mythique Roméo + Juliette.
Réalisé par Gabrielle Grau et Loïc Largot, le clip illustre la voix lancinante et le rock’n’roll de Gabi, portés par des guitares saturées et transposés dans une soirée adulescente où à la brume se mêle l’iridescence des corps sous les néons. Dans le temps suspendu de la fête, une pilule en forme de cœur tendue par une main blanche entraîne l’un des protagonistes dans un voyage intérieur tortueux : la thématique de la salvation est abordée avec onirisme, la figure d’un ange (déchu ?) semblant ouvrir la voie à un salut possible… Le clip s’achève sur la métaphore d’une overdose, illustration du trop plein d’émotions provoquées par la violence des émois brisant les cœurs qui s’y risqueront… avec délectation.