Cinq très bonnes raisons d’écouter Chord Memory de Jean Felzine

Il y a un tas de raisons d’écouter ce premier album solo, Chord Memory de Jean Felzine mais comme il serait trop fastidieux de toutes les énoncer, j’ai donc décidé de m’arrêter sur 5 points qui sont pour moi clés.

Photo Bérangère Gimenez

 Petit retour en arrière, j’ai eu vent de la sortie de cet album alors que je venais de l’écouter sur la scène du café de la danse où il nous avait servi une séance impeccable avec Jo Wedin. A cette époque, l’heure était alors de défendre le disque chahuteur et complice Jo et Jean. L’EP Hors l’amour était sur toutes les plateformes depuis 2019 et je m’empressais de l’écouter en rentrant chez moi. Aujourd’hui, un album solo vient compléter cet ep, onze titres géniaux que je ne me lasse pas d’écouter.

1- Parce que Jean est un musicien tout terrain.

Dis comme ça, on l’imagine roulant en jeep cherokee ronflant, écrasant les accords, escaladant les styles, cette image serait bien trompeuse. Jean n’a pas la prétention de renverser les genres ni de révolutionner son monde. Artiste et artisan invétéré, Jean construit des disques avec ses outils, ses instruments, sa culture, sa passion et son authenticité. Il était facile pour la presse au début de Mustang d’encarter sa musique de la mention rockabilly. Le terme n’est en aucun cas faux, seulement réducteur et incomplet. La preuve en est qu’il revendique l’appellation chanson française lorsqu’il lui faut nommer les deux albums où il associe sa voix à celle de Jo Wedin.. En solo, Jean  propose un album où il est possible de trouver au même endroit des emprunts à la musique rap par les rythmes et les échos et les textes d’un chansonnier bien connu écrivant il y a plus d’un siècle, Dans La Rue

Pochette de l’album Chord Memory

2- Parce qu’on adore les synthés qui tirent des lasers

Chord Memory, n’est pas pas que le titre d’un album et de la chanson d’ouverture de celui-ci. Tous les musiciens auront compris la référence à cette touche de synthés permettant d’enregistrer des accords. On aura compris la référence directe donc à cet univers électronique plus proche de Cerrone que de Presley. Lorsque Jean se produit sur scène pour nous chanter Ordi dis-moi, des faisceaux lumineux transperce la nuit comme la lumière des écrans des insomniaques. Le digital et le numérique sont au centre de ce monde de Fanfiction piégé entre les nouveaux imaginaires sexuels et une Nintendo. Acceptant lui-même de se considéré comme geek, fan de musique de jeu vidéo, Jean trace finement avec Doudou, le fil tendu d’une génération parfois tristement solitaire prête à se réfugier sous les jupons de leurs mère et dans l’insouciance nostalgique de l’adolescence. 

3- Parce qu’il ose les sujets dont il est le seul à parler 

Comme nous venons de le dire, Jean s’emploi magnifiquement à chanter les failles endémiques de notre époque, mais s’ il y a bien un domaine où cet artiste excelle c’est sa capacité à traiter de thèmes existentiels avec la belle simplicité d’une chanson française. Il suffit d’écouter Je Vis Quand Même pour affirmer qu’il n’y a pas de façon plus belle, juste, complexe et concise pour exprimer ce sentiment de fatalité et de satisfaction que je suis moi-même bien incapable d’exprimer ici. Quand a A Blanc, je n’ai pas le souvenir d’avoir déjà entendu une chanson sur ce sujet. Peut être est-ce un tabou dans la chanson française, dans la musique en générale ou dans toute une société, encore fallait il quelqu’un comme Jean pour le faire. Son terrain est l’équilibre bien senti entre des sujets sensibles, l’humour parfois grinçant, et une mélodie touchante. Le tout en fait une chanson renversante par son originalité et sa musicalité qui ouvrira probablement, et on l’espère, la voie à d’autres artistes.   

4- Parce que son écriture est le contraire du cliché

A l’heure des étiquettes prédécoupées et à appliquer sur toutes les têtes, on ferait bien de prendre le temps, se poser et écouter. La grave erreur serait de s’arrêter à sa ganache de rockeur et son costume de crooner  car Jean n’a rien d’anachronique bien au contraire. Car si Jean se fout de la mode dans la musique tout en prêtant une oreille attentive à son évolution, c’est bien une leçon d’écriture. Ici pas de punch line pour manier l’humour et l’impact ni de paillardise ou de vulgarité abusive pour parler de sexe. Tout ceci est peut due à une culture musicale bien trempée et en dehors des références nommées par l’actuelle génération. Roy Orbison est son idole et c’est bien dans ses pas que Jean a décidé de marcher. C’est donc tout un sens de la mélodie et des textes anti machisme qui avouent ses faiblesses d’homme tout en tirant de la fierté. C’est sûrement ce que l’on appelle la nuance. Cette Femme est un Mystère, traduction originale de She’s a Mystery to Me est un parfait hommage à son mentor qui pour des question de droit et d’adaptation aura un peu retardé la sortie de cet album, mais ça c’est du passé. 

5- Parce qu’ en vrai, c’est un super disque

Je sais que ce n’est pas le plus percutant des arguments et qu’on ne déclenche pas les rires quand on doit expliquer une blague après coup. Je vous encourage surtout à aller écouter ce fabuleux disque pour vous en faire votre propre idée. Ce disque représente pour moi, le génie d’un mec qui n’a finalement pas besoin des meilleurs studios d’enregistrement, ni d’être entouré de cinquante personnes. S’il est possible de faire de grands plats gastronomiques dans sa propre cuisine, Jean démontre qu’il est possible de construire un grand album en appartement.

Retrouvez notre interview de Jean Felzine par ici

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