ADN #368 : Al-Sarwib

ADN : Acide du noyau des cellules vivantes, constituant l’essentiel des chromosomes et porteur de caractères génétiques. Avec ADN, La Face B part à la rencontre des artistes pour leur demander les chansons qui les définissent et les influencent. Aujourd’hui, on laisse la parole aux musiciens de Al-Sarwib qui nous raconte son ADN musical à l’occasion de la sortie de leur album, Loin des Terres.

Radiohead – Morning Bell (Armelle Scholl : clavier et chant)

Je me rappellerai toujours de la sortie de Kid A et du moment précis où j’ai écouté Morning Bell pour la première fois ; l’endroit, la lumière, l’ambiance, et moi, scotchée sur un tapis, hallucinée par une manière de travailler les sons que je n’avais jamais entendue auparavant, une nouvelle galaxie sonore s’ouvrait à moi. Bref, un tournant dans mon ADN.

La liberté créatrice et la capacité à se réinventer sont restées les motivations principales dans mon parcours musical et c’est ce que j’ai le plaisir de partager avec Al-Sarwib. De plus, Morning Bell contient une bonne partie des matériaux musicaux qui m’attirent depuis toujours et que je peux petit-à-petit intégrer au sein du band: les rythmes composés, les basses très mélodiques, les synthés et sons électroniques expérimentaux et l’harmonisation sinueuse qui sort des sentiers de la pop ou du rock.

Après avoir travaillé avec Al-Sarwib sur le squelette d’un set préexistant à mon arrivée, je suis impatiente de repartir pour un nouveau trip loin des terres.

Goat – Talk To God (Thibaud Gerber : batterie)

Je me rappelle d’un hiver froid. On s’est retrouvé dans le local à Fabrice, presque aussi froid qu’à l’extérieur. On a commencé à jouer ses « riffs » qu’il avait écrits et déjà enregistrés.

En rentrant à la maison après notre première répète, les rythmiques me tournaient dans la tête sans cesse, j’étais comme possédé par ces nouvelles mélodies. J’ai mis un disque sur la platine que je venais d’acquérir, c’était l’album Commune de Goat. Je me suis senti ultra inspiré, car je dois l’avouer, j’étais tout perdu à la répète, je comprenais pas encore comment ça tournait tout ça.. et en fait, Goat, c’est rock’n roll, du coup, ça je connaissais déjà un peu.

Aretha Franklin – Chain Of Fools (Arnaud Carnal : guitare et chant)

J’ai rejoint Al-Sarwib peu avant l’enregistrement du premier album mais en tant que dernier venu et guitariste, trouver ma place n’était pas gagné dans un band comportant déjà trois guitares.

Après une écoute minutieuse des différents sons de mes camarades j’ai pu trouver la gamme de fréquences dans laquelle je pouvais évoluer et qui pouvait apporter un plus aux morceaux déjà bien avancés si ce n’est terminés sans les surcharger. Très vite j’ai pensé à ce grand classique qui m’obsède depuis toujours non pas en raison de cette voix légendaire mais de l’excellence des sons de guitares et basse. La suite était évidente: il me fallait un magnifique clean ample et chaleureux. J’ai donc sorti une vieille guitare de jazz des 50’s, un bon ampli à lampes avec une belle reverb à ressorts. Un petit coup de tremolo par-ci, de l’écho à bande par-là et le tour était joué. Quel plaisir!

J’applique encore cette recette aujourd’hui mais avec un petit twist: j’utilise également une guitare électrique 12 cordes. Elle me rend fou.

Master musician of bukkake – People of the drifting houses (Adrien Guerne : Guitare et gourou du pédalier de basses)

Lorsque j’ai intégré Al-Sarwib j’ai tout de suite pensé au groupe M.M.O.B qui m’a influencé dans la manière d’aborder le mélange entre rock psychédélique et musique traditionnelle.

Ce qui me plait le plus au sein d’Al-Sarwib est de réussir à composer des mélodies entêtantes qui survolent les structures rythmiques complexes,

c’est toujours un défi de trouver la manière la plus naturelle d’y parvenir.

C’est ce que je trouve inspirant dans le morceau people of the drifting houses, qui utilise un thème populaire et répétitif pour pouvoir amener les auditeur.ices dans des carcans plus expérimentaux.

Tinariwen – Sastanàqqàm (Diego Company : guitare et chant)

Quand Fabrice Pittet m’a invité à rejoindre son projet et qu’il m’a parlé de ce qu’il avait à l’esprit, le groupe malien s’est rapidement imposé comme l’une de mes références principales.

On retrouve sur ce titre quelques formules qui ont inspiré l’écriture de plusieurs morceaux d’Al-Sarwib : le chœur répondant au chant lead, la guitare doublant la mélodie du chant, ou encore l’alternance des parties chantées et des parties instrumentales.

Le son du guitariste lead, qui mêle un phrasé africain avec un groove blues résolument électrique, m’a aussi beaucoup séduit. Venant du blues traditionnel, j’ai souvent tenté de modestes incursions dans des sonorités africaines ou orientales, tout en gardant les racines afro-américaines de mes débuts (par exemple sur Mirage ou La ville maudite).

The Jimi Hendrix Experience – 1983…(a merman should I turn to be) (Joachim Kaufmann : guitare et chant)

Un de mes morceaux favoris de tous les temps.

J’aime la façon assumée de faire de la science fiction dans une chanson, de pouvoir parler de ce qu’on vit par archétype, sans que le temps ou l’espace soit forcément définis, libre des conventions et pourtant en les utilisant comme tremplin à l’imagination.

Par rapport à l’univers d’Al-Sarwib c’est ce que j’ai voulu faire en reprenant le flambeau de Mesa et les notes qu’avait écrit Luc (avant de quitter le groupe), pour faire vivre une histoire.

Pour moi, c’est une force quand la musique exprime, plus qu’une métrique, une mélodie ou un rythme, mais que chaque note, coup de cymbale ou respiration donnent vie au détails des dimensions parallèles, décors, ambiances ou parfums que l’on souhaite, parfois même inconsciemment, donner à une création.

J’essaye de m’inspirer de ça. Et avec un groupe pareil, je me réjouis d’aller plus en profondeur, explorer les possibilités de ces mondes à découvrir.

Moondog – All Is Loneliness II (Fabrice Pittet : fondateur de Al-Sarwib, batterie et chant)

On pourrait penser qu’al-sarwib tire ses influences de lointaines contrées orientales, mais c’est bel et bien Moondog qui, le premier, me plongea dans les charmes intrigants des rythmes asymétriques.

L’envie de lier ces rythmes à des riffs de guitare blues et à des jeux de percussions, donna naissance à la première formation d’al-sarwib. Ouvrant les portes sur l’orient, le nom al-sarwib (acronyme de Superimposed Asymetric Rhythms With International Bluesguitars) apparu dans un second temps.

Bien plus que la liberté de création, l’authenticité ou même l’audace de Moondog, c’est bien son héritage rythmique qui est profondément inscrit dans la généalogie d’al-sarwib. All is Loneliness II, mélancolique canon en 5/8. Humble présentation du Viking.

Découvrir Loin des Terres de Al-Sarwib :

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