ADN #272 : Namoro

C’est un son narratif qui emmène quelque part, qui raconte une histoire terrible. Les sons sont primaires, comme si on voyait des peintures rupestres, écouter Kraftwerk c’est se connecter à des ancêtres de la musique électronique, il y a quelque chose d’émouvant et qui marche toujours aujourd’hui.

Les vidéos des premiers live qu’ils font sont géniales, ils jouent, il y a un côté performatif dans leur posture et c’est quelque chose qu’on développe beaucoup dans nos concerts. Quand l’une de nous a une bonne nouvelle et qu’on veut la célébrer, on écoute cette chanson, on chante et on danse.

Ce qui est fort avec Kraftwerk, c’est qu’ils arrivent à donner de l’âme avec des choses qui sont purement et revendiquées comme synthétiques et c’est ce qu’on fait aussi avec Namoro, on aime travailler avec de la musique numérique. Le titre Hyène Soeur de Louve, c’est être au plus près d’une bête, d’un animal mais complètement synthétique car tous les sons sont créés par ordinateur et les voix sont transformées.

C’est une chanson qu’on a entendue une fois à la radio il y a une petite dizaine d’années quand on s’est rencontrées, c’était un matin et ça devait être une des premières nuits qu’on a passée ensemble, on allume la radio, on a eu la même réaction de dire « j’adore cette chanson », elle ne nous a jamais quittées. On l’écoute souvent et toujours avec la même émotion.

Je me souviens d’une fois, pendant le premier confinement, on faisait les courses, seule activité possible et le moral n’était pas là, La nuit je mens se met à passer, et on se met toutes les deux à pleurer devant le rayon Bières de Franprix !! Quelle désolation ! C’était piteux et drôle ! Ce qui est splendide dans cette chanson c’est tout, la voix, la mélodie intense et les paroles très poétiques. Les mots et leur mystère c’est quelque chose qui nous touche beaucoup parce qu’avec Namoro on écrit des poèmes qui ont une grande part de mystère, ils sont source d’évocations multiples et ouvrent des espaces d’imaginaires possibles.

C’est un son sur lequel on a envie de danser, la musique de Camilla Sparksss a quelque chose de très expiatoire. Quand on la voit en concert, elle éprouve vraiment la scène. C’est de la musique électronique qui est intense et qui ne laisse pas indifférente, le corps et les émotions réagissent. Pour la dernière scène d’un spectacle que Mascare avait écrit et mis en scène, il y avait Precious People qui partait et les interprètes quittaient la scène pour offrir des fleurs au public. Au delà de ce que cela signifiait dans la pièce, le titre de Camilla Sparksss permettait vraiment de relier la scène et la salle dans un élan fort. 

Sexy Sushi c’est un groupe qu’on adore et qui nous a permis de se sentir légitime à faire de la musique parce qu’ils y allaient avec énormément de liberté dans toutes les propositions. Il a aussi beaucoup d’humour et de dérision dans leurs sons et ça fait du bien d’écouter des choses sérieuses mais qui ne se prennent pas au sérieux, Rachida c’est ça. Avec la chanson L’amour courant de Namoro, on a voulu raconter une histoire déroutante et drôle avec un titre saturé, c’est un hommage à Sexy Sushi.

C’est un chant populaire qui parle des souffrances du peuple, et ce cri de détresse est doux et posé, il avance, déterminé. On est toutes les deux d’origine algérienne mais plutôt coupées de ces racines, on n’a jamais encore mis les pieds dans ce pays et l’émotion qui découle de l’écoute de cette chanson nous dépasse un peu.

C’est aussi le fait que c’est un chant populaire qui nous touche, toutes les deux on aime aller en manif, et on est toujours émues de se trouver rassemblées avec d’autres personnes, de faire corps, de chanter des slogans, de marcher ensemble, de pouvoir se dire « nous ne sommes pas seules ». Le titre de Namoro Echos parle des fantômes des pays qu’on ne connait pas. Le titre Magny est dédiée à Colette Magny qui a aussi chanté des chansons populaires et politiques.