Alban Claudin se dévoile avec It’s a Long Way to Happiness

Un instrument à lui tout seul peut être le coeur d’un projet, il convient de l’apprivoiser comme s’il s’agissait d’un animal sauvage, connaitre le moindre de ses mouvements, de ses réactions. C’est la proposition que nous fait Alban Claudin avec It’s a Long Way to Happiness son premier album de piano où il nous dévoile au travers d’une déclinaison de mélodies entêtantes sa personne, son univers et nous permet de retrouver un sentiment d’insouciance bien trop souvent oublié.

C’est dans la maison familiale dans laquelle il a grandi qu’Alban Claudin a voulu redécouvrir l’instrument qui lui est si cher, un piano sur lequel il compose en toute intimité la musique qui le définit en tant qu’artiste mais aussi en tant que personne.
Plus qu’un instrument classique, le piano se mue en groupe d’instruments à lui tout seul via des structures pops bien enjouées et des effets qui donnent une signature sonore si singulière.
On ne peut réinventer un instrument, on peut en revanche le faire livrer ses plus belles esquisses au travers d’une connexion et d’une retranscription personnelle. Du bout des doigts, extension de l’être et de l’âme, Alban Claudin et son piano nous offrent 11 morceaux pour un plongeon dans un univers enchanté.

Le morceau d’introduction, Dandelion, est une ballade au creux de la vie, dans la vidéo présentée avec le morceau on s’aventure aux côtés de l’artiste dans le coeur d’une soirée où chaque émotion est retranscrite.
Alban Claudin acteur effacé constate, Dandelion c’est sentir que la vie grouille tout autour, les sourires, les pleurs, l’amour, c’est une mélodie qu’on connait et qu’on chérit, on l’observe avec un détachement passionné, nous ne sommes plus acteurs mais contemplateurs de la fresque magistrale qui se dessine sous nos yeux.

Crédits : Bastien Reveco
Crédits : Bastien Reveco

Peaceful Mind c’est l’image qu’on se fait d’un sourire apaisé sur un visage décomplexé, ce sont des paupières qui se ferment et un imaginaire infini qui s’ouvre, c’est presque une dimension sacrée, à la croisée du divin et du féérique.
Que dire du morceau éponyme, It’s a Long Way to Happiness dont l’alternance des graves et des aigus viennent vibrer et s’entrechoquer dans nos entrailles. Des morceaux comme Coton Reverie ou 2904 si délicats et entêtants nous laissent ce doux sentiment d’accomplissement, un sentiment éphémère mais si précieux et nécessaire.

Notre imagination trouve un relai grandiose dans les compositions de l’artiste, les mélodies sont le terreau parfait pour une escapade onirique, tout y est mouvement, couleurs, formes. Un impressionisme musical bien guidé par une mélancolie maitrisée. Il l’explique lui même en présentant la mélancolie comme une forme de nostalgie digérée, laissant place à une certaine légèreté.

Si l’insouciance que nous provoque cette douce mélancolie est aussi plaisante c’est aussi et surtout parce qu’elle résulte d’une inspiration, une spontanéité.
C’est avec une certaine fascination qu’on arrive à saisir l’émotion au delà de la technique car le pianiste se fait d’abord artisan par le travail du son, la maitrise et l’expérimentation permanente de son instrument.

C’est via cette « bonne inspiration » que l’artistique revient, transformant le côté exclusif de la technique acquis comme une compétence en un penchant plus personnel et singulier mais pouvant être divulgué et partagé au fil de l’interprétation.
La technique se transpose ainsi en émotion, et le piano jusqu’alors outil devient une machine à rêve aux sonorités exquises.

Au travers de l’album Alban Claudin se dévoile, comme si le langage musical se faisait plus riche que la parole, l’artiste ne se présente pas, il nous fait simplement ressentir, on comprend qu’il n’est pas question de savoir ce qu’il est, mais de savoir ce qu’il aime.
Cette exposition qu’on qualifierait presque de mise à nu semble être le fruit d’une recherche profonde, si les mélodies sont si justes et si entêtantes c’est qu’elles touchent avec un détail millimétré à la maille de nos émotions.
Cette précision provient d’une confiance acquise de l’artiste envers sa musique et qui peut pourtant être si frêle face à un instrument aussi lourd de sens et d’histoire.

Assis face à son piano, l’artiste retrouve une sanctuaire, une safe place. A l’image de son dernier clip, One Thousand Trees, Alban Claudin se reconnecte presque par nécessité à son piano et réussit à s’évader loin de la réalité, du bout de ses doigts il pave pour nous le chemin d’une escapade par delà les champs et les forêts, une bouffée d’air qui alimente nos poumons au son des touches tour à tour effleurées.

Le morceau de clôture est un rappel à l’introduction, une reprise de Dandelion, comme pour nous ramener à la réalité en figeant cette boucle onirique dans nos esprits.
Comme annoncé, le chemin vers le bonheur est long, il est d’ailleurs probable que cela reste à jamais un objectif inatteignable, cependant le temps d’un instant, on se laisse happer par la beauté du disque et on s’éloigne un peu, avec légereté et une certaine insouciance de notre quotidien.

Il n’y a pas de recettes miracles, Alban Claudin ne trouve pas plus que quiconque le chemin du bonheur, à défaut de mettre un terme à la course effrénée vers une aspiration éternelle, Alban Claduin a su trouver un raccourci, plus concret et atteignable, celui vers une identité et un univers, le sien.
Il nous le livre comme un témoignage magnifique à la croisée du classique et de la pop et c’est tout simplement somptueux.