ADN : Acide du noyau des cellules vivantes, constituant l’essentiel des chromosomes et porteur de caractères génétiques. Avec ADN, La Face B part à la rencontre des artistes pour leur demander les chansons qui les définissent. Alexandre Delano dévoile aujourd’hui son nouvel album, La nuit des couleuvres. À cette occasion, il nous présente aujourd’hui ses influences musicales.
Thousand – La vie de mes sœurs
Stéphane Milochevitch a démontré, en quelques albums de Thousand et sous son propre nom, que la pop en français pouvait être rythmée, lettrée, subtile, inspirée. Ses albums dans leur ensemble sont des bijoux de poésie, de musicalité et d’inspiration.
C’est un génie que la France ne sait pas reconnaître puisque la France est la France et que le désert culturel y est vaste et prédominant. Difficile d’extraire un titre de cette œuvre majeure, mais La vie de mes soeurs fut mon premier choc, avec la voix incroyable d’Emma Broughton qui scande à la fin du morceau : « Parle-moi du paysage, tu vois sur mon visage, à la lumière du dehors qui filtre sur ton lit, parle-moi du chaud et froid, entre ma peau et tes draps et ton ivresse et mon corps et toi, et moi, et la mort, parle-moi de l’instant, l’instant où tu oublies tout, à part de ce qu’on est au souffle dans le creux de mon cou, parle-moi du moment, du moment où t’es plus rien, que de la lave et du sang qui coulent entre mes reins, mais parle-moi ».
Alex Cameron & Angel Olsen – Stanger’s Kiss
Probablement le titre que j’ai le plus écouté ces dernières années, cette chanson, qui pourrait être un hit des années 70’/80’, réunit les deux immenses songwriter que sont Angel Olsen et Alex Cameron pour l’interprétation d’un couple que se balance à la gueule les souffrances relatives à la fin de leur histoire d’amour aussi bien que leur liberté retrouvée. Il y a un élan amer et une énergie folle, qui enrobe le désespoir engendré par leur rupture, des émotions contrastées parfaitement retranscrites, autant à travers les paroles que la musique. Un titre qui, sous ses airs premiers de variété dégoulinante cache énormément de puissance et de profondeur. C’est aussi un fabuleux souvenir d’un concert à L’Épicerie Moderne en mars 2022.
Superflu – Une bataille perdue d’avance
J’ai découvert le premier album de Superflu sur une compile des Inrocks quand j’avais seize ou dix-sept ans. J’écoutais alors des musiques variées, plutôt adolescentes et bruyantes. Et je suis tombé sur une petite chanson ritournelle en français qui, par sa profonde sincérité, m’a conforté dans l’importance d’écrire, d’écrire des chansons, d’écrire des chansons en français. Quelques années plus tard sortait le second album de Superflu avec ce titre dont les paroles du refrain sont devenues un crédo : « c’est bien plus beau qu’une victoire, une bataille perdue d’avance ».
Népal – Sundance
Un petit miracle, un titre à part, qui emprunte autant à Mac Miller qu’à des influences Indie, comme Youth Lagoon ou Alex G. Je pense que ces inspirations ne sont pas forcément volontaires (l’écoute du reste des productions de Népal me conforte dans cette idée), mais il reste un petit bijou de rap français de trois minutes à peine, avec une fin abrupte, qui donne envie de remettre le titre à l’infini.
Elliott Smith – Angeles
Pas très original, ce dernier choix, on le retrouve dans le top et les inspirations de tout un tas d’artistes, mais c’est un choix honnête, puisque c’est la chanson qui a bouleversé mon rapport à la musique et à l’émotion qu’elle pouvait dégager.
Un jour, une voix m’a soufflé que je devais écrire un titre aussi fort qu’Angeles avant d’arrêter la musique, ce qui est complètement con puisqu’il est évidemment impossible d’arriver à la cheville d’Elliott Smith.
D’ailleurs, il y a dans les paroles d’Angeles, toute l’ironie du rêve inaccessible qu’on n’atteindra jamais : « all your secret wishes could right now becoming true » ou encore « did you add up all the cards left to play ».
Pris dans les mailles d’Angeles, je continue à jouer.