Pendant toute l’année 2021, La Face B a suivi les artistes et les salles de concerts à travers le Not Dead Project. Maintenant que l’horizon s’éclaircit légèrement et que les concerts reprennent, on a décidé de poursuivre notre volonté de suivi et de prise des paroles des artistes avec Finally A Live ! Dans ce nouveau format, nous partons à la rencontre des artistes pour parler de live et l’impact qu’a pu avoir la crise sanitaire sur leur manière de vivre cet élément si essentiel à leurs existences et à la nôtre. Aujourd’hui, on va à la rencontre Aurus et Bonnie Banane pour parler de promenade, hugs, lavage de mains et insolation.
Aurus
La Face B : Comment as-tu vécu ton premier concert post covid ?
Aurus : Mon premier concert post covid… j’essaie déjà de me souvenir. En fait, on a eu une petite chance: moi j’étais à la Réunion et on a été déconfiné, et on n’a pas été reconfiné. On a pu faire pas mal de concerts là-bas. Donc, ça remonte après le confinement … Ouais, j’ai l’impression que ça ne s’est pas vraiment arrêté. Bon si, il y a eu quand même pendant le premier confinement.
Je crois que ce qui était le plus bizarre, c’était une espèce de confusion des sentiments: il y avait ce plaisir de retrouver les copains, la musique et tout… Et en même temps, avec une espèce de distance bizarre parce que c’était assis, de voir des gens masqués. Une espèce de truc contradictoire comme ça. Je ne sais pas si c’est heureusement ou malheureusement… Je crois qu’on s’habitue à tout.
Voir des gens masqués à la Coursive, on était contents de les voir, que tout le monde danse, se lève à la fin, brave les interdits. Ce qui fait plaisir c’est ça: de voir malgré ces masques, ces restrictions, qu’il y a une VRAIE réponse, et une vraie envie de notre part, mais aussi des gens. Un vrai dialogue qui semble n’être ni rompu ni perdu, et ça, ça fait plaisir en tout cas !
LFB : Des habitudes que tu avais avant que tout change ?
Aurus : Marcher dans la rue sans masque… Je pense que ce qui est le plus changeant, c’est les masques. Je crois qu’il y a ces histoires de bises aussi…
Je me suis rendu compte, on en parlait la dernière fois, que quand je regardais des films, où d’un coup y a une espèce de contact physique, une bise ou un truc comme ça, il y a une partie de moi qui fait ‘’OUH mais ! » Comme si on s’était habitué à cette espèce d’interdit, et qu’on était passé d’un moment d’hyper connexion aussi physique à un truc un peu distanciel. Pour moi, j’ai vraiment l’habitude et j’adore faire des hugs, et ça, ça a vachement changé pendant un temps. Et là, j’avoue que je me remets un peu plus à reconnecter avec les gens parce que c’est important, et faut pas laisser ça !
On fait de la musique et c’est une invitation: on crée du lien. Et y a aussi cette envie de retisser quelque chose, de renforcer ce lien-là, et il ne faut pas qu’il soit rompu !
LFB Concert assis ou debout ?
Aurus : Concert debout ! Parce que dans le show, y a des vrais moments où ça invite la danse, à bouger.
C’est quelque chose qui nous a été dit sur certains concerts, des gens qui disaient: “roh! j’avais trop envie de danser ! “
Et de pouvoir être debout, et que chacun soit libre ! Donc je dirais plus debout ! Parce que plus de liberté !
LFB À La Coursive on dansait, mais durant les balades on était sage: L’espace joue la dessus ?
Aurus : Oui, y a l’espace, la musique et la texture: en concert, on est sur une configuration avec guitare, percu, SPD, un truc électro, batterie. Et là ce matin, on était dans un truc plus acoustique, plus intimiste: pas de micro, pas d’ampli, et effectivement ça appelle à autre chose qu’en concert. On n’aime en tout qu’à voir cette énergie se déployer.
C’est un aller-retour. Et on a senti ça à La Coursive: c’est une réponse. Tu as les gens qui réagissent à des moments, et c’est un dialogue: on insuffle quelque chose, et il y a quelque chose que le public nous insuffle.
Et c’est pour ça que cette histoire de masque, c’est un peu biaiser: ça devient une sorte de petite barrière. On essaye de faire sans maintenant, et on sent que les gens malgré ça, ils sont plus expressifs pour rompre cette barrière-là.
On a accès aux yeux, c’est déjà cool.
LFB : C’est quoi ta routine d’avant concert ?
Aurus : Ce que je fais, c’est que je m’habille: je mets mes petites broches comme ça, sur ma chemise. Je mets ma coiffe. et ensuite, on se retrouve, et on se fait un check ensemble. Après, je fais de la cohérence cardiaque. J’aime faire ça, prendre 5 min pour respirer.
La cohérence cardiaque, c’est un exercice de respiration où tu respires sur un certain rythme pendant 5 minutes, et c’est quelque chose qui détend, qui aligne.
J’aime prendre ce temps-là, comme une micro-méditation. Je prends pas le temps de vraiment me poser ou méditer, mais il y a ce temps-là de respiration, de se charger d’une certaine forme d’énergie et de mettre de côté le reste. Après, on descend, et on se refait un check derrière la scène. Et puis c’est parti !
LFB : Est ce qu’il y a un morceau incontournable que tu joues ou que tu joueras tout le temps sur scène ?
Aurus : En vrai, il y en a plusieurs qu’on joue tout le temps ! Ah ah ! On ne change pas de setlist.
On a une setlist qui est assez encrée, qui a quand même un titre qui est sorti le mois dernier, qui va intégrer le show: il y a quand même du nouveau, des choses qui bouge un peu. Mais effectivement,il y a les morceau de l’EP qui sont déjà sorti qu’on retrouve, et tous les morceaux de l’album à venir qui sort le 4 septembre.
Et tous les membres de cette chimère se retrouvent là. Il y a quasi tous les morceaux qu’on a plaisir à faire, à jouer: Ils sont tous incontournables ! ahah !
Je crois que pour l’instant, on est dans un plaisir de A à Z parce que cet album n’est pas encore sorti non plus, et c’est un nouveau show en live.
Peut-être avec le temps… On a hâte de voir avec le temps, et les tournées qui se préparent : il y en a une, en novembre et décembre, une belle tournée qui s’annonce. On verra au fur et à mesure la réponse des gens, de voir qu’est ce qui devient pour les gens, incontournables.
Il y a d’autres singles qui vont sortir…
Ça dépend aussi des territoires: une fois, on a joué en Inde. On a un morceau qui s’appelle North Sentinel : qui est une île qui est dans la Mer d’Andaman sous la coupe de l’Inde mais qu’on laisse un peu indépendante. J’étais ravie de voir que ça leur avait vachement parlé : ‘’ Ah mais super ! Un morceau sur North Sentinel !’ Parce que ça a une vraie histoire pour eux en fait. Mais ça va moins toucher en métropole ou ailleurs. Les morceaux prennent des échos différents en fonction des gens et de ce qui les touchent.
LFB ; Meilleur ou pire souvenir de concerts ?
Aurus: On va parler du meilleur ! Ah ah ! TOUS LES CONCERTS !
Il y a un truc qui a vraiment résonné: c’était le deuxième concert du projet Aurus, et c’est au Sakifo Misik Festival à la Réunion, qui est le plus gros festival là-bas. Et, étant Réunionnais, j’y allais toujours en tant que public dans ce festival-là. D’un coup, avoir cette vitrine-là, parce que beaucoup de gens ne connaissaient pas le projet, se retrouver là….
On était juste avant la grande scène. Les gens ont commencé à aller vers la grande scène, et finalement ça a fait une espèce de bouchon, et c’est devenu une foule immense ! Tout le monde restait et c’était dingue ! Donc il y avait vraiment ce côté, à la fois la naissance du projet chez moi, sur ma terre, sur un festival que je connais : donc y avait une résonance particulière.
Je me souviens qu’on avait eu un problème de son, du coup il y a eu un moment un peu hésitant sur certains trucs, et pourtant j’en garde un souvenir fort !
Après, il y a d’autres moments hypers vibrants, notamment quand tu joues devant des gens qui ne te connaissent pas et qui adhèrent. Par exemple, on avait fait la première partie de Vendredi sur mer à l’Olympia. Bon, et bien déjà, salle mythique ! Et se retrouver en première partie où les gens ne viennent pas forcément te découvrir, enfin ils ne viennent pas pour toi, et de voir à quel point les gens ont été vraiment à fond, une énergie de dingue ! C’était la folie ! Nous, on était là en kiff total. Et ça c’est cadeau !
Pleins de gens qui découvraient, ça reste de supers souvenirs !
LFB: Peux-tu nous parler de l’importance du catering ?
Aurus: AH AH! Ok, écoute, c’est simple. Tu parles à quelqu’un qui aime manger et qui adore cuisiner. Le catering c’est TRÈS important parce qu’il y a déjà un peu ce moment de convivialité d’avant. Bien évidemment, le rôle premier et utile qui est de te sustenter, de te donner un peu l’énergie, de rester vivant jusqu’au prochain repas, mais aussi un vrai moment de plaisir !
Je pense qu’on s’en souvient des supers caterings. Les trucs où t’es hyper bien reçu, accueilli, où tu manges bien !
Et pour moi, c’est ça prend une autre forme : je suis devenu végétarien il y a 4 ans. J’en parle d’ailleurs dans l’une de mes chansons, qui est un duo avec Sandra NKAKÉ où je parle de ce rapport avec les animaux et tous….
Et il y a aussi ce truc-là, d’être reçu en adéquation avec tes convictions, ton régime alimentaire etc.
Donc ouais, je kiff manger, je kiff cuisiner; donc l’importance du catering est MÉGA IMPORTANTE ! QUELLE QUESTION !
te incroyable, elle nous avait dessiné plus d’yeux, c’était incroyable. Et pour l’occasion, j’avais envie de faire plaisir aussi à tout le monde alors j’avais cuisiné plein de trucs, des trucs de la Réunion, des trucs thaïlandaisIl y a aussi ce plaisir-là, de voir tout le monde, il faisait un peu froid, c’était des grosses journées, et du coup, de pouvoir te poser y a quelque chose de réconfortant là-dedans, quand tu es sur la route, y a plein de dates … Te poser, au chaud devant un bon plat : c’est un cadeau, c’est cool de le recevoir. Et j’aime bien le donner aussi quand je peux.
Bonnie Banane
LFB : Comment as-tu vécu ton premier concert post covid ?
Bonnie B : Avec une insolation ! J’ai eu une mini isolation parce que j’ai joué en fin d’après-midi, en plein canard. Et je n’ai pas mis de crème solaire parce que je ne m’y attendais pas. Je suis sortie de scène, j’étais ROUGE, MAIS ROUGE ! J’avais envie de vomir. J’ai donc bu deux litres d’eau, et c’est passé. C’était à la Villette Sonique à Paris, sous le périph, le 30 mai dernier.
Et franchement, j’avais une sale gueule quand je suis sortie ! Whouah ! Je ne faisais pas la fière ! Et j’ai failli tomber dans les pommes plusieurs fois. Mais c’était super-cool en tout cas. J’étais hyper contente ! Un peu stressée, évidemment… C’était super-cool d’avoir le trac avant de jouer. De retourner la scène, le public… Après ce n’était pas un public ‘normal’, auquel on s’attendait dans ce genre de lieu, mais c’est déjà ça… C’était assez cool. Il y avait des gens derrière le grillage qui s’accrochaient parce qu’ils n’avaient pas pu rentrer, des gens qui avaient leur masque enlevé.
LFB : Des habitudes que tu avais avant que tout change ?
Bonnie B : Eh bien, je sais pas si je me lavais autant les mains avant, je ne suis pas sûre. Je ne suis pas sale hein ! Mais je ne me lavais pas autant les mains. Et je ne sentais pas autant mon haleine aussi. Mais je suis contente car grâce au covid, je me suis rendu compte que je n’avais pas une aussi mauvaise haleine que ça !
LFB Concert assis ou debout ?
Bonnie B : Bah concert debout ! Largement ! Ayant vécu des concerts aussi en tant que public, ça rend flemmard d’être assis, tout simplement. Ça inhibe. Déjà qu’il y a le masque, la position assise ça fait que ça rend flemmard. Que ça soit en tant que public ou interprète, ce n’est pas recommandé d’être flemmard. On est là, c’est déjà bien d’être attentif mais la participation, l’énergie… Quand on est debout, on est proche physiquement des gens et l’énergie passe plus facilement : c’est concret.
LFB : C’est quoi ta routine d’avant concert ?
Bonnie B : C’est de faire des brouuuuu et mmmh… d’échauffer ma voix. Faire pipi. Et de me maquiller. Mettre des plumes et des chapeaux… et des trucs et des machins…
LFB : On a remarqué que tu changeais souvent de tenue de scène pour chaque concert.
Bonnie B : Ça dépend où je suis… Mais c’est une tenue que je prends avec moi sur la route celle-là. J’aime bien me costumer, j’aime bien aller chez le costumier et choisir, parce que ça m’amuse, ça me divertit personnellement. Et la scène pour moi, c’est un spectacle.
J’aimerais bien me tenir à une ou deux tenues mais je n’ai pas encore trouvé la forme parfaite. Mais j’aime bien aussi ce truc-là. Faut voir.
En tout cas, je sais que je n’ai pas envie d’être que sexy sur scène. Je trouve ça intéressant mais ce n’est pas mon truc de prédilection.
J’aime bien les costumes qui sont en plusieurs parties, j’aime bien tout ce qui évoquent le spectacle. On fait avec les outils qu’on a…
LFB: Est ce qu’il y a un morceau incontournable que tu joues ou que tu joueras tout le temps sur scène ?
Bonnie B: L’appétit, c’est un morceau que je jouerais toujours, je pense. C’est important pour moi de le faire: il me met dans un état que j’aime bien.
Et puis, depuis le début de la reprise, cette chanson de Brigitte Fontaine J’ai 26 ans . J’espère la chanter toujours parce qu’elle est importante. Je la chante pour que les gens l’entendent, parce que les gens ne la connaissent pas pour la plupart, et j’ai vraiment envie que les gens la connaissent.
La version Areski Belkacem est très belle. Je ne la fais pas parce qu’elle est plus courte.
LFB ; Meilleur ou pire souvenir de concerts ?
Bonnie B: Je ne pense jamais à ça. Le pire ? Si je galère à trouver, c’est que j’en ai peut-être pas … Peut-être quand je me suis cassé la gueule … plusieurs fois… mais est pas le pire souvenir parce que j’aime bien me casser la gueule.
Le pire souvenir, c’est quand je fais des fausses notes. Tu sais quand t’es sur la dernière note, et c’est une fausse note. Je peux pas te dire exactement, mais c’est arrivé et ça, je peux pas …
Et le meilleur souvenir… si ! C’est à Los Angeles: c’était dans un club Queer et je chantais des chansons en français. Et il y avait des drags queen qui étaient là : ‘’Yes French Girl ! Yes ‘’. Et c’était cool parce que c’est la première fois où je me suis dit que le français c’est exotique pour les gens en dehors de la France, et ça me plaît.
Après, j’avais fait une Release Party en 2015 pour de mon EP Soeur Nature au Gibus. Déjà, il y avait énormément de monde. Les gens étaient tous très très différents, c’est-à-dire qu’il y a eu un vrai mélange. Et pour moi, c’est les meilleurs concerts.
J’avais aussi un concert à la Boule Noire comme ça.
T’as des vieux, des jeunes, des ados, des enfants. des couples gays qui s’embrassent aux premiers rangs, et t’as des mecs du rap un peu arriérés /homophobes au fond qui voient ça. T’as des meufs un peu thugs qui embrouillent des potes… Je trouve que ça fait des confrontations de gens du passé, des gens qui se rencontrent, qui se frottent. Pour moi, c’est les meilleurs concerts. Je regarde les gens dans les yeux et ils sont tous hypers différents. Et ça me donne une vraie raison de vivre. Ce n’est pas le cas tout le temps.
LFB: Peux-tu nous parler de l’importance du catering ?
Bonnie B : Grosse importance ! J’adore manger, boire. Franchement je mange très bien. J’essaie de manger le mieux possible. Oui ! C’est très important ! C’est forcément plus agréable un catering avec des fruits de mer. Après on s’adapte, je n’ai pas besoin de grand-chose.
C’est quand même important pour n’importe quel chanteur, d’avoir une bouilloire, du citron, du gingembre et du miel. Si, on a ça, ça suffit.
Je ne mange pas trop avant d’aller sur scène… Ça me donne des gaz … (rires)