Lorsqu’on quitte Bagarre le 29 novembre 2019 après un Olympia complètement dingue, on ne se doute pas qu’il faudra plus de quatre ans au quintette pour sortir son troisième album. Mais cette pause qui a pris de l’ampleur, si elle était inattendue, a sans doute permis à Bagarre de rester en vie, et encore mieux, de retrouver un souffle à la fois collectif et plus proche des intentions originelles du projet. Alors une nouvelle fois on retrouve Le Club, cet espace de liberté et de questionnement, pour une troisième aventure qui maintient la flamme en vie.
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Déconstruire : verbe transitif, Défaire complètement ce qui a été construit.
D’une manière ou d’une autre, l’idée de déconstruction a toujours habité Bagarre, que ce soit dans sa musique ou dans ses engagements. Depuis le départ, le quintette se nourrit de l’existence pour créer un univers créatif et humain dans lequel il se sent bien et où il place ses obsessions et ses questionnements : le club.
Depuis son premier EP, le club est une entité présente partout, jusque dans les titres des différents projets , exception faite de 2019/2019, album concept d’une année qui les mènera jusqu’à un Olympia sold-out et qui devait permettre au groupe de s’offrir une pause bien méritée.
Car après cinq ans d’existence, deux EPs, deux albums et des tournées intenses qui les auront menées partout en France et dans bons nombres de pays francophones, il était nécessaire de se recharger … et de vivre.
Ce qui devait être à l’origine un hiatus de quelques mois s’est finalement transformé en plusieurs années … un mal pour un bien ? À l’écoute de leur troisième album, le club c’est vous, cela semble être une évidence.
Avec ce nouveau projet, qui reprend un mantra bien connu des amateurs de Bagarre, Emmaï Dee, La Bête, Denis Darko, Mus et Majnoun s’offrent un retour remarquable et reviennent à ce qui faisait toute la puissance de leur musique à l’origine : un projet spontané, politique bien évidemment, mais désormais nourri par l’intime de manière complètement assumée.
Pour cela, il fallait tout déconstruire à nouveau. Garder la radicalité des productions, l’envie de faire une musique complètement dansante et basée sur le relâchement mais y apposer un traitement bien plus pop, plus lisse par instant, et mettre les voix en avant. C’est l’une des grandes réussite de ce troisième opus et qui en surprendra sans doute plus d’un, notamment avec des morceaux comme BOY ou TU M’RENDS FOU qui tirent le curseur pop à l’extrême alors qu’INJUSTE et AVEC OU SANS TOI, qui ouvre et clôture l’album, Bagarre s’autorise un versant bien plus organique et apaisé.
Bien évidemment, on retrouvera la patte des premiers jours, celle de l’énergie explosive du quintette sur des morceaux comme FAKE BOY, ON EST LES MÊMES ou encore LE CLUB C’EST VOUS même si là encore, l’évolution est plus que notable. Loin des morceaux individuels, c’est une pulsation collective qui dirige ces morceaux. Plus vraiment de leader, les voix se mêlent, se répondent et vivent désormais ensemble sur la majorité des morceaux.
Pourtant, au cœur de cet album vit une espèce de fantasme qui prend enfin vie pour les fans de Bagarre : LA BÊTE. Ce morceau qui existe depuis l’origine du projet voit enfin le jour dans un album. Et si il semble familier, il est lui aussi porté par l’évolution évidente de Bagarre. Dans sa forme mais aussi dans son texte, qui a changé avec le temps et qui en lui une autre idée de la déconstruction au sein de Bagarre; celles de idées.
Auparavant caché derrière des métaphores et une certaine idée de la poésie et des sonorités, les textes du CLUB C’EST NOUS se vivent désormais de manière franchement plus directe, bien que toujours portée par une forme d’humour.
Si l’idée même de défendre des idées est toujours aussi politique, elle est désormais totalement imbriquée dans le quotidien des quatres musiciens. Dès le départ d’ailleurs avec INJUSTE, sorte de thérapie collective qui met à nu les aléas d’une vide de groupe bien moins idéale que certains le pensent.
Jamais désespéré, Bagarre ausculte une société qui continue encore et toujours de dérailler. Sur le dancefloor, on parle ainsi d’une masculinité qui se doit encore d’évoluer vers le mieux (BOY, FAKE BOY) , d’un quotidien de plus en plus précaire et pas évident (BEST LIFE) , d’une sexualité qui se doit d’être défendue et assumée ainsi que des désillusions dues à l’amour (LA BÊTE, J’VAIS TE DIE) ou de la vision de la paternité (PEUR DE DEMAIN).
Les sujets sont sérieux, mais Bagarre cherche toujours à éliminer la noirceur, à chercher la lumière et le mieux malgré tout. C’est ça le club, un endroit où tout est permis et où le collectif permet d’avancer ensemble et de partager ses opinions avec les autres.
Avec ce troisième album, Bagarre continue d’évoluer et de se battre. Le club c’est vous, alors venez y faire la fête et grandir avec eux. Car au fond, on est jamais plus fort que lorsqu’on est ensemble.