Groupe flegmatique et emblématique du plat pays, Balthazar est revenu enchanter nos oreilles, deux ans après la sortie du magnifique Fever. Sand, ses onze nouveaux morceaux et sa réalisation en plein épisode de pandémie mondiale sonnent comme un joyau à chérir au coeur d’un début d’année toujours aussi morne pour la culture.

Balthazar, c’est cette personne que vous adorez détester. Celle à qui tout semble venir facilement, que rien ne semble pouvoir atteindre. Déjà plus de dix ans d’existence pour la formation Belge, le temps de s’établir comme une référence indétrônable et de sortir cinq albums. Mais ne vous y trompez pas, si Sand est frappé du numéro 5, c’est plutôt comme deuxième album post-pause qu’il faut le voir. En effet, en 2016/2017, les deux leaders s’étaient octroyés une pause en solitaire, chacun de son côté. Le temps de sortir un album pour l’un, deux pour l’autres, avant de se retrouver et de relancer la machine de plus belle. Si Fever sonnait un retour éclatant, que dire de Sand si ce n’est qu’il est au moins au niveau de son prédécesseur ? Décortiquons.
Février 2020 : après un an de tournée triomphale suivant la sortie de Fever, le groupe se pose pour commencer à préparer la réalisation de son successeur. Pas de chance, une pandémie mondiale vient mettre à mal les projets d’enregistrement à cinq en cabine et isole les protagonistes. Qu’à cela ne tienne, l’album prendra une couleur différente. Les batteries sont remplacées en bonne partie par des boîtes à rythme, les synthétiseurs prennent plus de place que jamais. Peut-être l’une des meilleures évolutions du groupe et qui lui permet d’atteindre une qualité de production encore plus aboutie qu’auparavant. Si Fever était goovy, Sand est exceptionnel du point de vue de l’écriture et des mélodies développées. Presque tous les morceaux font se mordre la lèvre et fermer les yeux, les rythmes emportent et on écoute chaque chanson deux fois avant de passer à la suivante. On apprécie particulièrement On a roll, Linger On même si on pourrait presque toutes les citer.
On retrouve le côté sexy et sensuel de Balthazar, presque reptilien. Comme un lézard au soleil se laisse réchauffer le sang par une journée éclatante du début d’été, Sand évoque l’oisiveté et l’art de prendre son temps. Thème récurrent de l’album, de ses paroles jusqu’à son imagerie de couverture reprenant une sculpture nommée Homunculus Loxodontus ou « The One Who Waits », on se sent porté par cette réflexion qui peut paraître anodine mais qui prend son sens lorsqu’on fait partie d’un groupe depuis déjà 17 ans. Le clip de On a Roll l’illustre particulièrement bien et avec une maîtrise sublime, la répétition de scénarios simples et banals alors que l’on s’abîme au fur et à mesure que le temps passe. Qui n’a jamais constaté des changements physiques entre le début et la fin d’un boulot, d’un projet, vu ses parents commencer à vieillir ? Autant de mesures que le temps ne s’arrête jamais et autant d’appels à profiter du moment présent. Hourglass le résume bien dans son texte où le narrateur s’impatiente au point d’en venir briser le sablier du temps pour constater la futilité de son geste. Avec ses arrangements de cuivre et de cordes, ses choeurs féminins, c’est l’un des moments forts de l’album.
Il ressort peut-être de ce nouvel album moins de tubes que de ses prédécesseurs (encore que Losers soit dans une philosophie similaire à I’m Never Gonna Let You Down Again), mais l’orfèvrerie Belge se concentre différemment. On passe 43 minutes de qualité, pendant lesquelles il n’est question de rien d’autre que d’apprécier le moment. Définitivement l’un des albums de cette année où prendre le temps n’a jamais été aussi important.