Bandit Bandit vient de dévoiler son premier album, 11:11. Un premier album qu’on attendait depuis longtemps et qui permet au duo d’ouvrir sa musique vers des styles différents tout en affirmant toujours sa patte. On a discuté avec Maeva et Hugo de ce premier bébé, de l’évolution stylistique, de voix et de karaoké.
La Face B : Salut Bandit Bandit ! Comment est-ce que vous allez ?
Maeva : Alors là on est un peu souillés par la vie mais c’est ok. J’ai acheté tout à l’heure à la pharmacie des trucs contre les reflux gastriques, donc stressés mais joie.
Hugo : Ça se manifeste comme ça visiblement, de l’acidité dans l’estomac… (sourires)
Maeva : C’est acide mais ça remplit le cœur quand même.
Hugo : Non mais plus sérieusement on est presque soulagés qu’enfin il soit là parce que c’était quand même long. Donc ouais soulagés d’enfin reprendre la route aussi parce que ça a été long cette pause pour nous finalement de presque un an sans concert.
Maeva : 9 mois. 9 mois sans concert. C’est vrai que j’ai bien passé 4-5 mois sur mon canapé à regarder mon plafond en écoutant Barbara l’intégrale.
Hugo : Donc ouais soulagés parce que ça y est quoi. Alors stressé effectivement c’est normal parce qu’on y a mis beaucoup sur cet album et que ça a toujours la symbolique du premier album. Il y a toujours un truc très symbolique quoi.
Maeva : Ouais et puis on a eu le temps de vivre un truc, tu sais les montagnes russes quoi. Genre de l’écouter et de dire ah c’est du génie et de l’écouter et de dire ah c’est de la merde. Et donc là il y a un peu le truc de bon il va appartenir aux gens et il sera vraiment…
Hugo : C’est eux qui feront leur avis quoi. Toute façon maintenant c’est trop tard. Il est figé, c’est pressé.
La Face B : Ma vraie première question que j’avais envie de vous demander ; 4 interviews en 4 ans est-ce que vous pensez qu’on a encore des choses à se dire ? (Rires)
Hugo : Alors ça je sais pas. Après sur les chansons sûrement.
Maeva : J’ose espérer que oui quand même. Même si tu sais déjà tout. Je vais essayer de le dire d’une manière différente.
La Face B : L’album il s’appelle 11:11. Il y a 11 titres dans l’album mais je me demandais si ça avait une signification particulière pour vous…
Hugo : Alors déjà, c’est 11h11 du coup (sourire). C’est une heure miroir.
La Face B : J’avais mis 11h11 l’heure du crime.
Hugo : C’est quoi la question ? (rires)
La Face B : S’il avait une signification particulière ce titre parce que le premier EP c’était un EP éponyme. Le deuxième EP reprenait un titre de l’EP mais là c’est un vrai titre d’album.
Hugo : En fait il s’est un peu imposé à nous. C’est une heure miroir qui est souvent tombée quand on était en studio. Le matin quand on était en studio on tombait sur cette heure. C’était assez long cette séance de studio. On n’était jamais restés autant de temps en studio. Et du coup on est tombé quasiment tous les jours sur cette heure. Je ne sais pas si c’était l’heure où on avait faim. Et du coup on a regardé la signification. Et donc ça nous a parlé, en numérologie, c’était une histoire de truc d’une connexion avec les anges.
Maeva : Un truc de se trouver pleinement et d’ouvrir la voie à un renouveau. Un renouveau mais en se trouvant tout à fait. Donc il y avait vraiment cette idée-là dans l’album je pense.
Hugo : Ça a résonné sur les textes aussi. Et puis après bon aussi c’est marrant, 11h11, Bandit Bandit, c’est bon.
Maeva : Le syndrome de la répétition. Le miroir quoi.
La Face B : Non mais c’est intéressant parce que tu vois, même si au départ c’était une blague, ce truc de miroir il est toujours présent entre ce que vous mettez dans votre musique et votre vie en fait. Ça continue là.
Maeva : On est monomaniaques ça se voit bien.
La Face B : J’ai écouté l’album forcément.
Maeva : Ah merde (rires)
La Face B : Moi je trouve que dans tout ce qu’on a pu lire ou dire à propos de Bandit Bandit, on vous a toujours un peu à tort résumé à cette espèce d’idée de l’énergie du rock. Et je trouve que là finalement, cet album là c’est plus un kaléidoscope très pop finalement. Et je me demandais si ce besoin de se mettre en danger et de surprendre les gens, il était venu dès le départ ou si c’était pour vous une évolution naturelle en fait.
Hugo : Alors, je pense qu’on a mis quelques pistes dans les premiers EPs, genre je pense au titre Pixel par exemple, qui n’était pas spécialement un titre vraiment rock, qui avait un côté assez pop et presque chanson. Et on a toujours, Bandit Bandit depuis le départ, on a toujours parlé du fait que c’est un groupe de rock, mais avec un curseur de chansons presque variet’. Là on a peut-être poussé le curseur chansons variet’ un peu plus fort.
Maeva : Le curseur, le curseur. Voilà. Pour paraphraser.
Hugo : Et en fait, je crois que si ça a été grâce au confinement, c’est marrant de dire ça, mais le fait qu’on ait eu cette pause imposée, d’écouter beaucoup de choses, de ce truc là où tout s’est arrêté, où on a l’impression que du coup on a envie de prendre des risques parce que tout peut s’arrêter, donc il faut y aller à fond quoi. On a eu cette volonté et cette évolution naturelle de prendre plus de risques et aussi sur le format album, ça te permet d’aller ailleurs quoi.
Maeva : Prendre plus de risques et de s’assumer en fait. Parce que, comme on a toujours dit, Hugo c’est le rock pur et dur anglo-saxon et moi je suis la pop française.
Hugo : Ben moins maintenant, tu vois, c’est moins maintenant. C’est l’évolution, j’écoute moins de rock et plus de chansons.
Oui oui, c’est sûr.
Maeva : Enfin, je t’ai sucé la gueule mon gars. Passer Julien Clerc à force de te regarder de travers.
Hugo : Non, pas Julien Clerc (rires). Non, ça je pense aussi, forcément à chaque fois, je reparle de ça, mais au Chantier des Francos, on a beaucoup traîné avec des gens qui font de la chanson française et ça nous a finalement beaucoup plus inspirés que quand on tournait avec des groupes de rock. Parce que finalement, on connaissait les codes du rock et…
Maeva : Les codes du rock.
Hugo : Les codes, pas l’école. L’école. L’école du rock. Les codes du rock. Et du coup, on trouvait ça beaucoup plus inspirant parce que finalement, on avait moins ces codes peut-être de cette chanson qui évolue et qui est moderne aujourd’hui.
Et voilà, après, ça reste quand même un album de rock, je pense, 11h11, mais il y a quelques titres qui peuvent être surprenants pour les fans de la première heure. Et étonnamment, c’est un peu nos préférés, je crois. Je pense au titre La Montagne, par exemple, qui est un truc presque groove.
Et en fait, on a beaucoup écouté St.Vincent, même Bowie, ce genre de trucs, où c’est des artistes qui font des albums très…
Maeva : Qui racontent une histoire et les albums peuvent avoir totalement changé d’esthétique et ils s’autorisent totalement des échappées belles de ouf et sans pour autant rendre compte à qui que ce soit. Ça nuance, ça nuance beaucoup. Ça nuance beaucoup et je trouve ça hyper…
La Face B : Parce qu’il y a une thématique dont on parlera après, mais voilà, même sur votre album, il y a une thématique qui est centrale, mais qui évolue en fonction du contexte et du coup, ce qui permet aussi de faire évoluer la musique qu’il y a autour. Mais ce qui est d’intéressant aussi, c’est qu’il y a un soin extrême qui est apporté aussi à la production et qui fait que… Avant, tu vois, les deux EP, il y avait un côté un peu plus rugueux, un peu plus rentre dedans, alors que là, je trouve que le soin qui est apporté, c’est aussi ce qui donne ce côté pop, c’est vraiment un truc…
Maeva : C’est plus léché.
Hugo : Voilà. Ouais, ouais, mais c’est pareil, c’était une volonté de notre part de mettre aussi…
Maeva : De sonner plus anglais qu’américain, comme au début.
Hugo : Je ne sais pas, ouais, il y avait aussi cette volonté qui est presque plus synthétique.Voilà, on a voulu mettre plus de synthé.
Maeva : Je me rappelle au tout début, tu voulais jamais entendre de synthé.
Hugo : Ouais, mais c’est l’évolution, quoi.
Maeva : Là, il y en a par-tout !
Hugo : Non, mais tu vois, je pense que c’est… On évolue, on change et… J’ai écouté beaucoup MGMT et voilà, beaucoup de trucs 80’s. Et je pense que ça nous a inspirés à un moment donné. Et voilà, quoi.
Maeva : Clairement.
La Face B : Mais ce qui vous permet, justement, tu parles de synthé, de choses qui évoluent avec la musique, moi je trouve que ce qui vous permet d’évoluer dans le son aussi, c’est que pour moi, la section rythmique sur l’album, elle est hyper importante. C’est-à-dire que la basse et la batterie sont là et sont une espèce de colonne vertébrale qui permet d’autoriser les déviations et les bizarreries, en fait, sur le côté.
Hugo : Mais en fait, je sais que dans la manière d’écrire cet album, ce que je faisais avant, avant j’écrivais tout à la guitare. Ce qui fait qu’il y avait beaucoup de riffs avant dans Bandit Bandit, et là j’ai écrit beaucoup de titres avec la basse. C’est vraiment parti, il y a quelques titres qui sont partis de la basse. Et du coup, après on a construit autour de la basse. Et je pense que ça a amené forcément des patterns différents.
Maeva : Des BPM plus rapides aussi. Des BPM plus rapides. Plus dansants, ce qu’on n’avait pas forcément.
La Face B : Ouais, côté disco sur certains morceaux.
Hugo : Ouais, voilà, exactement. Et ça, en fait, je sais pas pourquoi c’est venu comme ça, je pense que c’est simplement parce qu’on avait envie de ça, quoi.
Maeva : On avait envie de danser, un peu.
Hugo : Ouais, ça et surtout pas envie d’être dans la redite de quelque chose. On voulait surtout pas refaire un mot ou un truc comme ça.
Maeva : Alors qu’on adore.
Hugo : Oui, bien sûr.
La Face B : Oui, mais justement, tu parlais du live tout à l’heure, mais c’est aussi quelque chose qui te permet après, de t’apporter des variations, des émotions différentes, tu vois.
Hugo : Tout à fait. On a beaucoup pensé au live, d’ailleurs, pour les titres. À chaque fois, on s’imaginait des clips, etc. dès qu’on écrivait une chanson, mais il y avait beaucoup de titres, on se disait putain, genre Pyromane, je me rappelle…
Maeva : Banger !
Hugo : Pyromane, mais ça en live, ça va être chanmé. Et on avait cette vision qu’on n’avait jamais eue jusqu’alors.
Maeva : Je suis d’accord.
Hugo : De se dire, putain, ça en live, on pourra faire un truc comme ça, on pourra faire durer ce passage et tout.
Maeva : Ouais, c’est vrai qu’on a beaucoup pensé live.
Hugo : Ouais, ouais. Alors que bizarrement, l’enregistrement était plus léché et au moins live, en tout cas, parce qu’il y avait beaucoup de re-re. Ça te permet de retransformer après, d’offrir une expérience différente et une vie différente au morceau.
Maeva : Exactement.
La Face B : Ouais, carrément. Mais je pense que c’est une évolution logique. Le fait est que Bandit Bandit est né en 2019, que malgré tout, il y a eu le Covid et que vous avez quand même pu tourner beaucoup. Mais les deux premiers EP, ils ont quand même été enregistrés dans une autre perspective où tu te disais, enfin pas le premier, mais le second en tout cas, où tu étais bloqué en disant, est-ce que tu pourrais le faire vivre sur scène…
Maeva : C’est clair, c’est vrai. C’est très pertinent. T’es loin d’être con toi quand même (rires)
La Face B : Je trouve que l’évolution la plus importante de l’album, c’est la voix de Maeva…
Hugo : Ca aussi, on en a beaucoup parlé. Tu sais pourquoi ? Je me rappelle très bien qu’on parlait désorganisé, où on mettait plus ta voix moins dans les graves. Enfin, moi je faisais chanter dans les graves, à fond.
Maeva : Toi, tu me mettais à la cave.
Hugo : Et du coup, on avait envie de te faire chanter plus vers ta texture, dans le plus haut. Et je me rappelle qu’on parlait beaucoup de tonalité. La tonalité de ta voix. Ça parait, en fait, je pense que c’est fait… Parce qu’on a appris du passé. Et du coup, on savait que Maeva, dans sa texture plus haute, elle était plus à l’aise aussi. Plus de chansons, en fait, ça aussi. Et on avait envie de mettre plus en valeur la voix.
Maeva : Il fallait que je sois audible, il fallait que les gens comprennent à un moment donné peut-être les textes que je dis. Parce que des fois…
Hugo : Arrête d’être second degré dans tes réponses, tu vas être second degré sur toutes les réponses ? (rires)
Maeva : Non, mais c’est marrant parce que quand on a fait écouter… On a enregistré ce putain d’album et on l’a fait écouter forcément à notre manager et à notre éditeur, Thomas (?) . Et c’est le premier truc qu’il nous a dit. Il a dit, putain, là Maeva, il s’est passé un truc au niveau de la voix.
Et j’avais même pas moi conscientisé, tu vois. Parce qu’il faut savoir que les premiers prises voix, genre la première journée de prises voix, c’était une catastrophe.
Hugo : Non, c’était pas une catastrophe. C’est toi qui te mettais une pression. C’était pas une catastrophe.
Maeva : Peut-être que je me mettais une pression de ouf et tout, mais j’en ai pas mis une. Non, la première journée, j’en ai pas mis une. J’en ai pas mis une, alors que le lendemain, toutes mes prises étaient nickels.
Hugo : Oui, tu t’es stressée.
Maeva : Mais j’étais stressée et j’avais peur de me tromper dans l’intention, de me tromper dans… Soit d’en faire des caisses, soit pas assez. Mais en fait, vu que j’ai renouvelé un peu ma palette, il y avait un truc de me retrouver. Et effectivement, quand je l’écoute, cet album, même en termes d’interprétation, je trouve que c’est… Pas plus investi, mais c’est différemment investi.
La Face B : Oui, mais du coup, j’ai deux questions par rapport à ça. Est-ce que tu as l’impression de t’être débarrassée d’une partie de ton complexe de l’imposteur ?
Maeva : Oh non ! Parce que je sais que tu as un petit complexe de l’imposteur. Ça, on est toujours dedans, mon petit pote.
La Face B : J’ai l’impression que t’as quand même… C’est quand même plus assumé en tant que chanteuse. J’essaie de tirer du premier degré.
Hugo : Non, mais bien sûr. Je sais pas, mais tu dis ça, mais… Je te vois évoluer depuis 2019, ça n’a rien à voir. Même ta position sur scène, tu vois…
Maeva : Oui, c’est clair. Non, bien évidemment que ça a évolué. Après, je reste toujours quand même ma première meilleure critique, ou la pire, je sais pas trop, mais… J’ai toujours énormément de mal à être très objective sur moi, mais… Mais effectivement, oui, oui, quand on écoute, j’ai évolué sur ce truc-là, mais… Je sais pas, j’ai encore du mal à process. Il faudrait que j’en parle à ma psy.
La Face B: La question, pour moi, c’est intéressant, mais pour le coup, cette envie de changer de tessiture, t’as dû travailler ta voix différemment pour cet album ? Ou ça s’est fait naturellement ?
Maeva : Non, ça s’est fait assez naturellement.
Hugo : Non, alors, je pense pas, parce que Maeva, elle a fait beaucoup, beaucoup de reprises dans sa vie, donc elle a pu chanter dans des endroits graves et aigus, donc elle savait le faire. C’est juste que, du coup, c’était plutôt trouver l’intention par rapport à la musique qui était autour.
Maeva : Oui, l’intention, oui.
Hugo : Et c’est pour ça que je pense que t’as eu un blocage, parce que ça, c’était nouveau.
Maeva : Oui.
La Face B : Et justement, l’autre question que je me posais par rapport à cet album-là, c’est est-ce que, en tant que chanteuse, t’avais envie d’incarner chaque morceau ? C’est-à-dire que, tu vois, de personnifier chaque morceau comme si c’était une histoire différente avec une personne différente, en fait ?
Maeva : Oui, il y a un peu de ça. Il y a un peu de ça, effectivement. Tu vois, quand tu passes de Pyromane, par exemple à L’orage est passé, les voix sont complètement différentes. Je trouve que j’utilise des… Mon timbre de voix diffère totalement, tu vois ? Et je trouve ça assez cool d’avoir pu jouer… C’est pas linéaire, en fait. Et je me suis pas emmerdée dans ce truc-là. Il y a vraiment plusieurs facettes de ma voix et de ma tessiture, je trouve.
Hugo : Et oui, en fait, je pense que c’est un rapport avec le mood de la chanson. Pyromane, dès qu’on a écrit cette chanson, par exemple, on imaginait un truc qu’on n’avait jamais trop fait, qui était beaucoup plus foufou, quoi. Beaucoup plus… Ouais, je sais pas…
Je m’imaginais très Zinzin.
Alors que L’orage est passé, une balade plus smooth, effectivement, on avait… Les mots qu’on utilisait, les… Enfin, beaucoup d’images encore, quand on parlait des titres, c’était pas du tout les mêmes, tu vois ? Donc forcément, ça a amené une interprétation différente.
La Face B : Mais ce qui est normal, puisque, tu vois, Pyromane, c’est quand même… C’est un peu un titre de vengeance, entre guillemets.
Maeva : Oui, totalement.
La Face B : Alors que L’orage est passé, c’est un truc d’apaisement, en fait.
Hugo : Bienveillance, à fond. Ouais, bien sûr.
La Face B : Qui, d’ailleurs, moi, m’a surpris, parce que moi, j’aurais… Pour moi, c’était un morceau de fin, en fait, tu vois ?
Hugo : On s’est posé la question, avec Méchant garçon et L’orage est passé.
La Face B : De contrer l’attente, en fait, avec un morceau comme ça, qui aurait pu terminer l’album.
Hugo : Ouais, je suis d’accord. Ça aurait pu.
Maeva : De ouf.
La Face B : Et du coup, on va venir sur la thématique de l’album, puisque, finalement, s’il y a vraiment une variété d’influence, c’est parce que t’as la thématique de l’album, qui est clairement sur l’amour, sur toutes ces facettes de l’amour. Est-ce que, pour vous, vous pensez que l’amour, c’est une source d’inspiration intarissable ?
Maeva : Apparemment, oui.
Hugo : C’est même pas par rapport à nous, c’est par rapport à toutes les chansons qui ont été faites sur ce sujet.
Maeva : Et que sinon, finirons pas de… Oui, il y a eu plein de… Oui, oui, je pense que l’amour, bien évidemment, déjà, on est sur une thématique complètement universelle. Qu’on en vive ou pas l’amour, ça nous inspire, ou des sentiments, dans tous les cas, que ce soit négatif ou positif. Et bien évidemment, avec Hugo, par rapport aux périodes qu’on a traversées ces derniers mois, il y a des trucs qui résonnent plus fortement.
Hugo : Si je pense à Des fois, par exemple. Mais au-delà de ça… C’est vraiment prophétique. C’est vrai que ce qui est étonnant, c’est qu’il y a toujours de nous dans la chanson, mais à la fois, on a eu la sensation, sur des titres comme Toxic Exit, comme Pyromane, d’ailleurs, ou Lucky Luke, qu’on était plus en mode, c’est sorti de conversations qu’on a eu avec des amis, ou des sujets qu’on débattait. Lucky Luke parle de féminicide, par exemple. Donc ce sont des trucs qui ne sont pas liés à notre histoire directement, c’est plus des trucs dont on a parlé tous les deux, et qui ont coulé sur la chanson.
Maeva : Oui, des choses qui nous ont touchés. On a eu l’impression d’être moins nombrilistes. Moins nombrilistes, peut-être. Pas sur tous les textes.
La Face B : Ce qui est intéressant, tu vois, on parle d’amour, mais moi, ce qui m’a plu, c’est qu’il y a de la nuance, en fait. C’est-à-dire que, un peu comme la musique, tu explores toutes les facettes, et que tu n’es pas que sur un album de personnes qui ont un cœur brisé, et qui vont écrire des chansons au coin du feu. Ça parle de désir, ça parle de questionnement, ça parle de vengeance. Ce n’est pas noir ou blanc, en fait.
Hugo : Oui, bien sûr.
Maeva : Oui, carrément. Et puis j’ai l’impression que c’est toujours quand même avec… Bon, à part Pyromane, bien sûr, où on a envie de lui foutre le feu, mais c’est quand même toujours fait avec relativement de bienveillance. Je trouve qu’il n’y a pas de ressentiment où… Tu veux que je t’aide à te manger les ongles ?
Hugo : Non, ça va. (sourires)
La Face B : Vous y avez un peu répondu, mais est-ce que, justement, vous trouvez que vous avez réussi à trouver le point d’équilibre entre parler de votre réalité et parler de celle des autres ?
Maeva : Oui, je l’ai l’impression que oui.
Hugo : Oui, bien sûr. Après, même au-delà de ça, c’est que des fois, c’est fait dans un second temps, parce que je ne sais pas si on a vu l’avenir ou je ne sais pas, tu vois. Mais il y a les textes qui ont été écrits avant certaines choses, quoi, qu’on a redécouverts après et qu’on s’est dit « Ah ouais, putain, finalement, peut-être qu’il y avait quelque chose qui était en train de naître. »
Maeva : Qui était latent. Donc, oui. Toi-même, tu sais.
Hugo : Et justement, voilà, c’est notre pendant.
La Face B : Est-ce qu’il n’y a pas des fois quelque chose d’un peu trop dangereux à trop écrire sur soi ?
Maeva : Bref. Le truc, c’est qu’avec Hugo, ça nous a toujours permis de communiquer quand on n’arrivait pas à le faire, quoi. Les deux premiers EPs, il y a des chansons qu’on s’est écrites ou c’était des choses qu’on n’arrivait pas à se dire et qu’on a réussi à se dire dans ce sens-là. Et je crois que des fois, pour le coup… Le curseur, c’est assez évident. C’est vraiment marrant. C’est marrant avec le recul.
Hugo : Mais c’est ça. C’est qu’il y a beaucoup de trucs assez inconscients dans l’écriture, mais en fait, l’inconscient, finalement, c’est le truc très juste que tu as au fond de toi quand tu le sors. Et c’est qu’après, quand tu re-analyses, tu dézoomes, tu fais « Ah ouais, d’accord. »
Maeva : « Ah, mon con ! Si j’avais su. » (sourires)
La Face B : Pour rester un peu sur les textes, j’aime bien cette notion d’équilibre parce que je trouve que ça va bien avec l’album, je trouve. Et dans les textes, ce que j’ai aimé, c’est que tu as beaucoup d’images, genre la montagne ou des choses comme ça. Mais je trouve que là où pareil, vous avez évolué dans votre écriture, c’est que les thématiques sont beaucoup plus évidentes qu’elles ne pouvaient être avant et que c’est beaucoup plus direct tout en étant une écriture très imagée et très poétique.
Maeva : Il faudrait remercier Azzedine.
Hugo : Non, il n’y a pas que ça. Ça, c’est un second temps. Mais je me rappelle qu’on a pas mal parlé de ça. On avait ce côté très imagé, très poétique. Et j’aimais bien ce truc hyper immédiat qui le faisait dans le rap, par exemple Orelsan, où il y avait ce truc assez immédiat dans les textes. Et surtout, je disais à chaque fois à Maeva, ce serait bien qu’on arrive à chanter comme on parle aussi plutôt que de faire un truc trop lyrique. Et ça, c’est un truc qu’on a plus expérimenté sur cet album.
Et effectivement, avecAzzedine , on a fait un travail dans ce second temps sur les textes. Parce qu’en fait, on a changé les structures. Des fois, il nous manquait des textes.
Maeva : Et des fois, on a complètement réécrit…
Hugo : Nan, nan… C’est pas ça. Il nous a posé la question de quoi on voulait parler et en fait on n’était pas encore assez sûrs de quoi on voulait parler.
Maeva : Des images qu’on voulait…
Hugo : Voilà ! On a resserré le truc en se disant le texte il parle de ça et en fait, je trouve ça beaucoup plus cool et finalement plus pop aussi, plus chanson. Et pas se cacher derrière des métaphores et ç’a été vachement dur en fait. Quand t’es habitué à vouloir jouer qu’avec les mots et du coup perdre un peu l’auditeur, t’essaies de recentrer et d’être…
La Face B : Puis tu te caches moins finalement…
Hugo : Exactement ! Y a un truc de se foutre à poil complètement…
La Face B : Je vais prendre l’exemple de deux morceaux que j’aime beaucoup, tu vois l’évolution entre Nyctalope et Point d’suture par exemple… C’est plus limpide et plus fluide… Tu vois l’évolution du Bandit Bandit.
Hugo : Avant, les textes, on s’essayait… On trouve les textes bien meilleurs sur cet album-là que ce qu’on a fait avant.
Maeva : Pas bien meilleurs, ils sont juste différents je trouve…
Hugo : Moi, je trouve que c’est meilleur…
La Face B : Peut-être parce que c’est plus les mêmes personnes non plus… Le fait est qu’au départ vous écriviez aussi en anglais… Finalement la bascule elle s’est faite parce que cet album-là il est moins nombriliste, tu disais mais il est plus personnel… Peut-être un album d’adultes aussi (rires) Ce que je veux dire par là c’est qu’y avait des trucs plus adolescents sur le premier EP et que là, y a du recul et y a de la vie en fait…
Hugo : Ouais bien sûr, ça c’est vrai !
La Face B : Vous avez commencé à tourner avec l’album, vous avez fait vos premières dates…
Maeva : On en a fait deux !
La Face B : Oui puis vous avez tourné en Allemagne aussi… Comment est-ce qu’ils vivent ces morceaux sur scène, comment ils s’incorporent avec les morceaux d’avant ?
Hugo : En fait l’Allemagne, c’était surtout une tournée pour tester les nouveaux titres justement… Mais tu vois, y a quand même des titres qui font le pont entre l’avant Bandit Bandit et l’après. Tu vois tu parlais de Point d’suture, dans la musique, pour moi c’est un titre qui est assez proche de ce qu’on faisait avant ou même Lucky Luke.
Maeva : Curseur. Sur le live, on commence par Curseur et on fait Néant direct après…
Hugo : Nan mais après évidemment un live ça se construit. Faut construire son live. Par rapport au tempo aussi, un titre mal placé peut perdre 70%. Et ça on s’en est rendus compte en Allemagne quand on testait les titres.
Maeva : On a eu de la chance de bosser avec Bastien Burger pendant une semaine à Paloma. Il a l’habitude, il a bossé avec Izia qui est passée du rock à quelque chose de plus pop. Et il a eu le truc de faire la jonction entre ces deux univers-là pour que ça soit un live hyper équilibré. Et je pense que c’était vraiment la personne idéale pour bosser sur ce sujet-là. D’arriver à mêler l’avant et le maintenant.
Hugo : Ouais ça marche hyper bien carrément.
Maeva : Même un Si j’avais su, j’me disais « oh putain on va jamais arriver à le foutre au milieu celui-ci » « il va ressembler à une verrue au milieu d’une gueule, ça va être un enfer » et en fait trop pas ! Il fait du bien, il donne de la légèreté au live, il amène un truc beaucoup plus festif et c’est marrant parce que je me suis vue… Ben notre manager et Bastien, quand on a fait la résidence, ils font « putain Maeva t’as préparé une choré et tout » j’fais « ah mais non pas du tout » et ils m’ont dit que « t’sais depuis que tu joues les nouveaux titres, que tu incarnes les nouveaux titres, y a même ton corps… » Sachant que mon corps… Comme ça vient quoi. C’est assez spontané, je réfléchis pas du tout au projet. Et ils m’ont dit « Y a un truc qui se passe au niveau de ton corps aussi », mes mouvements changent… Plus ouverte… Je bouge un peu les hanches et tout… Mon corps est un réceptacle à sons et je le vois aussi que ça change complètement mais ça reste cohérent.
Hugo : Ce que j’aime aussi dans le live, c’est les titres plus banger, plus rapides, y a des titres qui donnent plus envie de faire la bringue en live quoi.
Maeva : C’est moins loud, moins lourd… La montagne ou Pyromane qui donne envie de faire la baston.
La Face B : Qu’est-ce que vous espérez pour cet album ?
Hugo : Le rêve secret serait de réussir à faire le pont…
Maeva : ‘fin c’est plus trop secret parce que tu l’as répété tout l’aprem ! (rires)
Hugo : C’est de faire le pont avec le rock en 2023 en France.
Maeva : Sans prétention aucune, on aimerait être les initiateurs entre le rock n’est pas qu’une musique de niche, tout le monde peut écouter du rock même les gens qui n’ont pas l’habitude d’en écouter, d’aller en voir… C’est un style qui peut être élégant, ça peut être mainstream et pas dans le mauvais sens du terme, que ça soit accessible de 6 ans à 99 ans peu importe.
Hugo : Enlever quelques clichés qui restent…
Maeva : Juste dire tu peux aimer le gros son, les grosses guitares mais aussi faire ce qu’on sait faire…
Hugo : On s’en rend compte quand on a fait des festivals plus mainstream… Quand on a fait les premières parties de Clara ou de Biolay, les publics tu vois sur papier c’est pas le nôtre mais à chaque fois, les gens ils viennent pas voir du rock, ils viennent nous voir après en nous disant « Oh normalement j’écoute pas trop de rock mais là j’ai trouvé ça super ».
Maeva : Et puis l’énergie sur scène. C’est hyper instinctif, immédiat, c’est une claque dans ta gueule… Que t’aimes ou t’aimes pas, y a quand même un show.
La Face B : D’habitude aux gens, je demande aux gens leurs coups de cœur mais là j’ai envie de vous demander les 3 chansons préférées à chanter en karaoké…
Hugo : Oh bah Gabrielle (rires) Je suis obligé de dire ça !
Maeva : Moi c’est Man I feel like a woman de Shania Twain.
Hugo : Et un p’tit Renaud… (sourires)
Maeva : Diane Tell !