Une authenticité qui transpire autant que son amour pour le rap dans Briques Rouges, permettent au jeune lillois de faire toujours un peu plus de bruit. Entre jeunesse à Lille, ascension rapide dans le monde de la musique et futur en construction, on a posé quelques questions à l’une des sensations rap de l’automne, et plus si affinité.
LFB : Comment ça va pour le moment ?
BEKAR : Bah écoute, je vais très très bien. J’ai vraiment hâte que la mixtape sorte, là on a jamais été aussi proche, on est à trois jours de la sortie, forcément j’ai hâte, je suis confiant. Forcément il y a un peu de stress quand même mais sinon ça va très bien.
LFB : On va d’abord parler un peu de tes inspirations. Dans Soleil s’allume, tu dis qu’au lycée t’écoutais 1995, à part ce collectif qu’elles sont tes références ? Que ce soit dans le rap ou ailleurs, qu’est ce qui t’as bercé ?
BEKAR : C’est assez large, aujourd’hui j’écoute principalement du rap, même quasiment que ça. Je suis au courant de tout ce qui sort même si parfois je passe à côté de certaines sorties. Là, par exemple, Damso j’ai commencé à écouter, Freeze, pareil. Sinon dans mes influences, j’écoute beaucoup O’boy, tu parlais tout à l’heure de 1995, j’ai écouté plus jeune, L’Entourage pareil. Sinon, régulièrement je me remets des classiques, Temps Mort de Booba par exemple. Voilà, c’est assez large, j’écoute de tout.
LFB : T’as vraiment été bercé par le rap francophone ?
BEKAR : Ouais, beaucoup plus que par le rap cainri. Franchement j’ai pas une culture incroyable en rap américain.
LFB : On va revenir vite fait sur 1995, est-ce que pour toi ce genre de collectif a apporté quelques choses à la scène rap francophone ?
BEKAR : A mes yeux, bien sur. Ils ont apporté quelque chose d’hyper frais, de nouveau. Je pense qu’ils ont ré-importé ce côté très collectif qui était déjà grave présent à l’époque. Ils ont ramené ce côté là puis ça rappait très très bien et ça rappe encore très bien quand t’mu écoutes ce qu’ils font encore aujourd’hui. Ils se sont grave adaptés avec le temps, avec comment le rap a pu évoluer. Je pense que clairement, ils ont marqué une génération et puis ils ont marqué le rap, ouais.
LFB : Maintenant tu travailles avec Fonky Flav, comment s’est opéré le choix pour Panenka ?
BEKAR : Pour moi c’était la meilleure manière de ne pas oublier le côté très humain. C’est ce qui est ressorti dans les discussions que j’ai eues. Ça a mis grave du temps, peut-être huit mois, avant de signer. Au début c’était beaucoup de discussions, on s’est vu plusieurs fois, on a passé des aprèms ensemble, on a échangé, on a envoyé des morceaux. Et pour moi c’est hyper important de garder ce côté humain dans la musique. Même quand t’es professionnel, je ne voulais pas rentrer dans un moule trop industriel, grosses maisons de disques, grosses majors où tu t’enfermes un peu dans un truc, où tu as beaucoup de monde autour de toi… Sans forcément critiquer, je ne suis pas du tout en train de tailler les grosses majors. Je dis juste que le modèle qui me correspondait le plus, à moi, ma mentalité, la mentalité de mon équipe, comment je voyais le rap et tout ça, on fait que j’ai choisi Panenka. Au final ça m’a paru logique de signer là-bas.
LFB : Surtout qu’ils ont aussi sorti des têtes d’affiches, il y a PLK notamment.
BEKAR : Clairement, il y a du travail fourni aussi. Tu parles de PLK, c’est un sans faute clairement. Ils ont très bien bossé ensemble.
LFB : Du coup, ça t’as apporté quoi pour le moment d’être signé chez Panenka ?
BEKAR : Ça m’a apporté un oeil musical en plus. Un oeil sur ma musique, plutot qui n’existait pas avant. Plus d’expérience forcément, puisque si tu prends Fonky Flav, c’est quelqu’un qui connait la musique, c’est quelqu’un qui a rappé, qui fait partie d’un collectif, qui a une victoire de la musique avec son collectif. Il a eu cette carrière avant de se diriger plus vers le développement d’artistes. Du coup, voilà, pour moi il a une expérience monstre et il m’apporte beaucoup dans ma musique et puis il y a plus de gens qui interviennent dans le processus. Je pense que c’est ça la principale chose qui a changé. Après, franchement je continue à faire de la musique de la même manière, avec mon équipe, mes gars. Ceux avec qui je fais du son depuis le début. Et aussi l’exigence. J’aiai appris à faire beaucoup plus de morceaux, à savoir trier. Prendre du recul sur certains morceaux et me dire « ah ouais, celui-là en fait, non » alors que peut-être un an et demi avant, je l’aurais sorti et j’aurais regretter avec le temps. Voilà, c’est plutôt ce côté là.
LFB : T’es hyper jeune et t’as gravi les échellons assez rapidement. Comment tu l’as vécu ? Est-ce que tu étais préparé ou justement c’est en signant que ça a changé ?
BEKAR : Ouais, c’est vrai que ça s’est fait assez rapidement. Franchement, pour l’instant, je vis ça très bien et je ne peux pas demander mieux que faire ce que je fais. C’estest super gratifiant pour un artiste, surtout que ça fait 6-7 ans que je fais du son. Depuis cette année je commence à avoir un peu plus d’exposition. Je rencontre plus de médias, je vais à plus de choses qu’avant et c’est hyper cool, ça veut dire que ça évolue, que j’avance, que je prends mes marques… Mais je me dis que la route elle est encore super longue et que je suis encore qu’au début donc je garde les pieds sur terre. Pour l’instant, c’est super cool, il y a pleins de choses qui se passent bien mais il faut que ça continue. Il faut encore travailler mais je vis super bien le truc, c’est super cool.
LFB : Maintenant, on va parler plus de l’aspect musical. Ton premier projet Boréal était entièrement produit par Lucci, tu travailles beaucoup avec lui, comment s’est faite la connexion entre vous deux ?
BEKAR : Alors, la connexion elle s’est faite très simplement. C’était il y a, je dirais, trois bonnes années. Je faisais déjà du son, je rappais déjà et en gros, je cherchais quelqu’un qui pouvait m’enregistrer, qui pouvait m’accompagner, faire des prods… Et je me rappelle, j’avais demandé sur Facebook si il y avait des beatmakers qui me suivaient pour qu’ils m’envoient prods et Lucci est clairement sorti du lot. On s’est rencontrés dans un studio à Roubaix, pas loin de chez moi. On a parlé musique, je lui ai fait écouter ce que je faisais. Puis voilà on a lancé l’aventure ensemble. Avec le temps, j’ai appris à connaitre toute l’équipe dans laquelle il était, c’est devenu mes frérots et l’équipe avec laquelle je roule aujourd’hui. Voilà, ça s’est fait vraiment de manière naturelle avec Lucci. On s’est rencontrés par le biais de la musique et puis voilà, aujourd’hui on est ultra poto et on s’entend aussi bien musicalement qu’humainement.
LFB : Ca fait plusieurs fois que tu évoques le fait que t’avances avec ton équipe. C’est une volonté de ta part de tout faire avec tes proches ?
BEKAR : Ouais, clairement. Il y a des gens qui sont bien dans leur délire et qui ont besoin d’être seul dans leurs bulles. Je respecte totalement, c’est propre à chaque artiste. Moi, j’ai besoin d’avoir des gens autour de moi, c’est hyper important pour moi, de sentir une présence bienveillante qui m’accompagne dans la musique et qu’on vive ça ensemble. Je n’ai pas envie de vivre le truc tout seul. Vraiment, c’est simplement ça en fait. Je trouve que c’est un truc où on fait tout ensemble, on fait du son ensemble et genre on marche ensemble aussi longtemps qu’on peut.
LFB : Pour revenir à Lucci, est-ce que ça serait possible de te voir sans lui ?
BEKAR : Oui, c’est possible. Ça l’est déjà sur Briques Rouges. Il y a des morceaux ou il n’est pas à la prod. J’ai été en séminaire à Bruxelles où il n’était pas là. Du coup j’ai bossé avec d’autres beatmakers. Mais disons que ça restera mon beatmaker de coeur, avec qui je m’entends le mieux. Il y a quelque chose de fort entre nous. On aime les mêmes choses dans la musique, du coup on se comprends vraiment musicalement et je pense que ça restera toujours. Mais après, je ne suis pas du tout fermé et je serais certainement amené à faire des morceaux qui ne sont pas produit par Lucci. Et c’est important aussi, je n’ai pas non plus envie de m’enfermer avec lui. Même pour lui en fait. C’est important aussi je pense qu’il produise pour d’autres artistes et c’est ce qu’il fait d’ailleurs. Qu’on ne soit pas forcément associé en permanence quoi, qu’on aille chercher ailleurs un peu, parce que tu as tellement à apprendre d’autres artistes, d’autres beatmakers, ils ont tellement à t’apprendre mutuellement. C’est ça la musique, c’est du partage.
LFB : Du coup, tu es clairement ouvert pour travailler avec d’autres beatmakers, voir même avec des gens qui ne sont pas encore connu ?
BEKAR : Ouais, clairement. Moi tant que la musique me parle je fonce quoi. Je m’en fous de si le beatmaker est connu ou pas. S’il est connu et qu’il fait une bête de prod bah allons-y. Et s’il est moins connu et qu’il fait une bête de prod, allons-y aussi.
LFB : Justement, pour les beatmakers, comment pourraient-ils te contacter pour t’envoyer des prods ? Ou tu préféres chercher par toi-même ?
BEKAR : Généralement des prods j’en reçois tous les jours. Il y a mon mail quinest disponible dans ma bio Instagram, sur mes réseaux tu trouves facilement mon mail. Du coup, je pense que les jeunes beatmakers m’envoient des prods là-dessus. Parfois j’écoute, parfois non. Je prends comme ça vient en fait. Il y a des moments je fais des storys en mode je recherche des prods. Je prends vraiment le truc comme il vient, sans pression.
LFB : Maintenant, on va parler de ton lieu de vie. Le projet s’appelle Briques Rouges, ça évoque la couleur des batiments que l’on peut retrouver dans la région de Lille, Roubaix et dans le Nord de la France. A quel point, ce lieu où tu as vécu a influencé l’homme et l’artiste que tu es devenu ?
BEKAR : Je pense que comme pour beaucoup de monde, ton environnement forge ta mentalité, la personne que tu deviens. Moi, j’ai grandi à Roubaix et à Lille. C’était important pour moi d’arriver avec un projet où je raconte un peu mon histoire, parce j’ai des choses à raconter qui me tiennent à coeur. Puis, le Nord c’est des conditions particulières, une région assez froide, ça a bel et bien la réput’ qu’on lui donne. C’est pluvieux, il y a vraiment une atmosphère particulière qui se dégage de Lille. Et ça m’a forcément influencé. J’ai un côté très mélancolique et je pense que ça vient peut-être de là où j’ai grandi et là où j’habite.
LFB : De plus en plus d’artistes pop à Lille, est-ce que tu suis un peu ce qui se fait dans ta région ?
BEKAR : Bien sûr. Déjà autour de moi, y a Sto, ça fait longtemps que je suis ce qu’il fait, ça fait longtemps qu’on se connait. On a fait du son ensemble. Voilà, maintenant avec le temps chacun fait ses trucs, il développe son style, je développe le mien, on se voit régulièrement. C’est vraiment mon poto, on sera encore amené à faire du son ensemble. Il y a aussi Konga, Salek, Balao qui sont dans le même label que moi. Je prends quelqu’un qui est en train de péter on va dire c’est ZKR qui vient de Roubaix que je trouve super fort. Je suis grave au fait de ce qu’il se fait prêt de chez moi. C’est important je pense.
LFB : Pour finir, qu’est ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ?
BEKAR : Dans un futur proche, que la sortie du projet Briques Rouges se passe bien, que les gens soient réceptifs au projet, qu’ils l’apprécient, qu’ils le comprennent, qu’ils comprennent la mentalité dans laquelle je l’ai écrit. J’espère que ça me permettra par la suite de continuer à faire du son comme j’ai envie et comme j’aime en faire. C’est tout simplement ça qu’on peut me souhaiter et la santé aussi, c’est hyper important. Donc on va dire la santé et la chance de continuer de vivre de ma passion.