Enfin de retour sur le devant de la scène électronique, le duo Bicep propose en ce début d’année son deuxième album : Isles. Après un premier album éponyme quatre ans plus tôt, grandement salué par la critique, l’alchimie électro nord-irlandaise est-elle toujours aussi fraîche qu’à l’époque de Glue ?
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Isles confirme la signature sonore de Bicep : comme au premier long-format, on y retrouve l’esprit breakbeat aérien et évolutif propre au groupe. Une boucle de percussions efficace, de longues nappes sonores et quelques voix mélancoliques, Andrew Ferguson et Matthew McBriar restent fidèles à un style qui avait fait ses preuves sur de nombreux morceaux désormais connus de tous les fans : Kites, Spring, Opal… Et bien sûr, comme cité précédemment, l’immense Glue.
Il est toujours remarquable à quel point la musique de Bicep en dit long avec peu, la magie du voyage sonore réside principalement dans une boucle évolutive. Celle-ci est rapidement identifiable dès les premières secondes du morceau, puis elle nous transporte tout naturellement vers un orgasme de sons, où toute la puissance de chaque élément est déployée à la fin de chaque morceau, à l’image du titre Sundial par exemple.
On pourrait d’ailleurs reprocher à Bicep de ne pas explorer une palette d’émotions extrêmement diversifiée, la formule étant souvent et subtilement placée entre la mélancolie et l’épique. Eventuellement le dernier morceau, Hawk, en collaboration avec la chanteuse japonaise machìna, qui propose une légère agressivité avec ses basses en premier plan et prend à contrepied le style global de Isles.
Si l’album éponyme de Bicep sorti en 2017 laissait souvent apparaître les racines house du duo, Isles prend une évolution beaucoup plus ambient, principalement breakbeat au niveau du rythme mais davantage épuré. Le ton avait été donné lors de la sortie des singles Atlas et Apricots, le focus étant mis davantage sur l’ambiance musicale que sur les percussions. Une transition qui a pu dérouter certains fans mais qui se révèle finalement bienvenue sur l’album dans sa globalité : moins électronique et plus aéré, avec même de l’ambient pur comme sur le morceau Lido. Cela laisse d’ailleurs davantage de place aux voix, ou plutôt aux samples allant puiser dans plusieurs régions du monde : des chants traditionnels bulgares sur Rever, une voix d’enfant Malawite sur Apricots, un a cappella de la chanteuse Israëlienne Ofra Haza sur Atlas… Et bien d’autres qui donnent ce cachet mystique au style Bicep, contribuant à l’évasion psychédélique voulue par le style de l’album.
Au final, on s’accorde sur le fait qu’il y a différentes manières de considérer ce nouveau projet : c’est un bon album de musique électronique, aussi novateur et immersif qu’on puisse l’attendre de la part d’un groupe aussi frais sur la scène électro. Malgré tout, en tant que deuxième LP d’un groupe rapidement considéré comme une étoile montante de la scène, cela peut paraître un peu léger. Sans tomber dans la dure critique du « le même en moins bien », Bicep n’évolue pas radicalement d’un album à l’autre, ce qui est un bon point pour affiner un style mais qui ne fonctionnera certainement pas sur un troisième album attendu au tournant : la formule Bicep doit être davantage revisitée pour impacter comme à ses débuts !