Biche : « Un bon rythme, un bon beat, c’est imparable »

Une Brève Interrogation sur les Cycles Humains Eternel, acronyme B.I.C.H.E., c’est le nouvel album de Biche sorti en début d’année. On avait rencontré Alexis, tête pensante du groupe, au moment de sa sortie. Alors que le groupe jouera début juillet à Petit Bain, on vous partage aujourd’hui ce long entretien où l’on parle autant du temps qui passe, que de l’importance des textes et des lieux, du rythme qui fait tout et de la volonté de créer un élan collectif et politique dans la musique.

La Face B : Salut Alexis, comment ça va ?

Biche : Et ça va très bien. Ça va bien, ça va avec un peu de légèreté après une sortie d’album dont je suis particulièrement content.

LFB : Il faut quand même que je te pose une question avant de parler de musique, parce que c’est une idée qui était déjà dans le premier album, qui traverse aussi cet album, parce que c’est le premier mot qui apparaît dans cet album. Je me demandais quelle était ta notion du temps ? Et si elle avait évolué, justement, pendant toutes les années ?

Biche : (rires) C’est une bonne question parce que je pense que j’ai voulu la faire évoluer, ma notion au temps, la notion du temps que j’ai en général, en essayant de devenir peut-être un peu plus rapide, un peu plus efficace et force est de constater que ça n’est pas arrivé donc j’ai un rapport au temps assez étiré, plutôt étiré.

LFB : Est-ce que tu as l’impression que c’est quelque chose qui nourrit ta musique autant qu’il peut la foutre en l’air ?

Biche : Absolument, carrément. C’est pour ça que j’ai voulu devenir de plus en plus efficace et essayer d’accélérer un peu le process en me disant que ça allait en posant des contraintes, en faisant des choses comme ça. Et en fait je pense que je ne fonctionne pas en portant la charge et la responsabilité de mon album, je ne fonctionne pas bien de cette manière. Donc j’accepte de travailler sur le long terme, j’accepte les mauvais côtés de ce que ça induit et j’accepte aussi tous les bons côtés que ça apporte. Le temps d’infuser, le temps de réfléchir, le temps de se renseigner, le temps d’apprendre des choses. Là on parle du coup des thématiques abordées et tout ça, et surtout… Le fait de prendre son temps sur ces choses-là, moi ça me fait… C’est ce que j’ai déjà dit, je trouve que l’album c’est un peu mon PFE, mon projet de fin d’études. J’ai pris du temps à buter sur des choses, à ne pas savoir comment résoudre le truc, à me documenter, à comprendre et à contourner mes problèmes.

LFB : J’ai l’impression qu’il y a aussi « des excuses » parce que là il y a 6 ans entre le premier album et le deuxième mais entre temps tu as quand même produit des disques, tu as fait de la musique, tu as fait un EP collaboratif avec Pearl & The Oysters aussi, et malgré tout, tu t’es un peu fait flinguer par le Covid aussi, puisqu’au moment de la Maroquinerie en 2020, juste avant, tu sortais pour moi un discipline qui est, j’ai l’impression, une transition douce entre ce qu’était La nuit des perséides et ce que va devenir, justement, Biche.

Biche : Sur le moment, je vais être franc avec toi, je n’ai pas eu l’impression de me faire flinguer. J’ai juste eu l’impression qu’on nous avait un peu coupé l’herbe sous le pied parce qu’on avait des dates cool qui commençaient à se booker sur la période du Covid notamment. Et heureusement, on a eu le temps de faire cette Maroquinerie. Mais oui, ensuite la période du Covid, très honnêtement, quand j’ai compris que ça allait s’arrêter là pour ce disque-là, je ne savais pas du tout de quoi j’allais parler, je ne savais pas du tout ce que j’allais faire. Donc déjà je pense que c’est au moins 5-6 mois dans la vue où j’ai rien fait. Et puis après petit à petit il a fallu s’y remettre mais il a fallu aussi entretenir son intermittence du spectacle et du coup ça sous-entendait de bosser sur des albums, qui n’étaient pas les miens.

LFB : Et du coup, il y a aussi cette idée, parce que je sais que tu as un lieu à toi, un studio… Est-ce que ça aussi c’est un avantage et un inconvénient ?

Biche : Ouais.

LFB : J »aime beaucoup ta musique et c’est vrai que des fois on est un peu frustré qu’il n’y en ait pas plus, mais je me dis, tu vois, le fait d’avoir un lieu à toi où tu peux travailler tous les jours, peut aussi te permettre d’être perfectionniste à l’extrême et de faire trop de recherches.

Biche : Oui. En vrai, mon rapport à mon temps de travail sur la musique de Biche ou sur la musique que je fais en général il a changé parce que je passe tellement de temps assis derrière l’ordinateur à mixer la musique des autres ou à l’enregistrer ou à bosser sur la musique des autres que parfois je n’ai surtout pas envie de rester en fait. Il y a eu des moments où je suis forcé de constater que pour un mois que je vais passer à bosser sur le disque d’un client, je vais avoir besoin de décrocher à la fin. Je vais mettre une semaine ou deux à redevenir pertinent sur ce que je vais faire personnellement. Et puis si je dois retravailler une semaine après, ça re-switch et ainsi de suite. Donc en gros, ça a forcément changé ma façon de bosser. Ça a forcément changé mon temps d’exposition à ma propre musique. Et oui, effectivement, quand j’ai décidé de dégager à une plage de 3 à 6 mois pour bosser sur l’album, j’ai pu me faire des journées où je commençais à 10h et je les terminais à 4h du mat. Ce qui n’est pas sain, ce qui n’est pas bien. Et ça, en vrai, c’est un vrai problème. C’est juste que parfois tu te perds. Moi ce qui me pose problème c’est d’habiter là où je travaille. C’est surtout ça mon vrai problème. Tu n’as pas de recul finalement. Tu ne sais pas trop, tu es dans une sorte de faille spatio-temporelle qui dure… Ca peut faire deux mois mais tu as l’impression que ça fait un an, c’est très bizarre et tu te perds un peu. Et en même temps, il y a du positif qui sort de ça. Et c’est difficile un peu au quotidien de gérer son rythme de travail perso, je trouve. Ce qui est un peu différent quand je bosse sur d’autres musiques.

LFB : Tu parlais d’ordinateur, juste avant. Est-ce que c’est une des principales évolutions du son de Biche, l’apport de l’ordinateur et d’autres choses moins organique que ce qui avait pu être sur La nuit des perséides et même en termes d’instruments des choses qui t’ont permis de faire évoluer le son vers quelque chose pas d’inattendu mais presque ?

Biche : J’en ai un petit peu parlé dans d’autres interviews. Je me rends compte que c’est assez moindre et que finalement la différence de temps d’exposition à l’ordinateur entre le premier disque et le deuxième ce n’est pas si grand c’est juste que j’ai utilisé des VST donc j’ai utilisé des instruments logiciels quelques-uns, dont une émulation de buchla, qui est un synthé modulaire, semi-modulaire en l’occurrence. Et comme je n’ai pas l’argent pour m’en acheter, ça m’a permis d’avoir une approche un peu plus directe avec la synthèse du son de cette machine et de créer des trucs avec ça. Je passais déjà tellement de temps sur le disque précédent, j’ai passé tellement de temps à le mixer avec la tête dans l’ordinateur. Et finalement, le procédé est toujours un peu le même, c’est-à-dire que pour le premier disque, c’était un mix mi-analogique, mi-digital, parce qu’on a passé tous les mix sur bande. Ensuite, on a remixé un peu dans la machine et renvoyé dans l’ordinateur. Là, c’est la même chose, mais c’est juste avec une autre machine. C’est avec une autre console qui n’était pas à bande. C’est à peu près le même procédé.

LFB : On en vient à ce deuxième album. Qu’est-ce qui t’a donné envie de transformer le nom du groupe en acronyme ? J’ai l’impression que c’est un code de mors, qui, en plus, va bien avec la pochette.

Biche : Cest Brice Lenoble, le guitariste et graphiste du groupe qui a réussi à concevoir et à donner de la suite dans cette idée qui était l’idée de moi qui vieillis et pour qui, en fait, Biche, ça ne veut pas dire… ça n’avait pas trop de sens, en fait. Je ne savais pas trop ce que ça voulait dire à un moment donné. J’avoue que la quête de sens, en général, elle me plaît. J’ai du mal à envisager de faire qu’il n’y ait pas de sens à l’origine d’une création quelle qu’elle soit d’ailleurs. J’ai besoin de donner du sens et à ce moment là de ré-envisager un album dans sa globalité. Je n’avais vraiment pas envie de le faire en mode bon bah on va le faire avec un maximum de légèreté on va faire des morceaux on va voir bla bla bla. Je trouvais plutôt cool l’idée d’avoir quelque chose de global et donc je me suis dit qu’est-ce que ça veut dire, comment je le décortique ce que j’ai trouvé qui est la brève interrogation sur les cycles humains éternels je trouve ça horriblement long et pompeux mais du coup c’est pour ça qu’on l’a laissé un peu en code.

LFB : C’est marrant parce que tu parles de global et tu grilles un peu mes questions mais c’est hyper intéressant sur cet album. Parce que la pochette elle représente bien l’idée que l’album c’est un projet global mais qui n’existe que par les composantes qui l’habitent. Je trouve que la pochette elle dit bien ça aussi.

Biche : Je suis d’accord, je suis absolument d’accord. J’ai évidemment bossé avec Brice sur la pochette et sur tout l’objet. Il se trouve que Brice aussi, pour lui, il met du sens à tous les niveaux, c’est quelque chose de naturel, et du coup il est allé un peu plus loin. Il a pris des mots-clés, comme un boulot de graphiste j’imagine, mais il a pris des mots-clés assez importants et les composants qu’ils font de cet album, effectivement du coup on voit là cette espèce de composant un peu pris et associé à chaque lettre, mais il y a aussi plein de petites données, de trucs un peu qui relèvent des madeleines de Proust. LFB : On dirait un tapis de jeu. Biche : En vrai c’était ça l’idée. C’était vraiment l’idée, le fait de pouvoir zoomer dans la carte. C’est qu’une fois on était au studio, il y avait un problème avec le Philicorda, qui est un orgue, on a dû l’ouvrir pour faire une soudure et avec Brice on l’a ouvert, on a vraiment fait « waouh » comme des enfants. C’est parce qu’on a regardé toute la carte comme ça où il y avait toutes les soudures et on trouvait que ça avait l’air d’une ville. Au final, ça matchait avec la thématique de l’album. Ça centralise un peu tout ce qui est dit dedans.

LFB : Est-ce que l’album n’est pas une réflexion et une recherche de l’humanité dans le monde moderne ? Moi je le vois comme ça, sur plein de morceaux et sur une réflexion sur ce que c’est qu’être humain, là, maintenant…

Biche : En fait, toute l’ambiguïté de Biche en général, c’est que c’est un groupe qui n’en est pas vraiment un parce que la personne qui écrit, je trouve, met une empreinte qui est toujours un peu plus forte sur la musique en général. En tout cas, elle lui donne les grandes thématiques abordées, elle donne le ton. De fait, je pense qu’effectivement, il y a beaucoup de questionnements, il y a des thèmes… Comment dire ? Essentiells, dans les sens, un peu philosophiques, un peu métaphysiques d’une certaine manière, mais qui sont vus par mon propre prisme. Et je n’aurais pas la prétention de dire que ça s’applique au monde et aux sociétés en général. Néanmoins, c’est un regard hyper personnel sur où est-ce que je me trouve dans la société, où est-ce que je vois mes amis dans la société, comment j’interprète cette société. Oui, par mon propre prisme.

LFB : Parce que tu vois un morceau comme Ca va ? par exemple, derrière sa légèreté de surface, je trouve qu’il interroge vachement justement sur nos relations à l’autre et sur cette question qui est à la fois hyper importante mais qui perd tout son sens à force d’être répété.

Biche : C’est clair, c’est clair. Et en même temps, je vais être honnête avec toi, au moment où on était en train de bosser sur ce morceau-là, c’était presque une jam qui durait le temps du morceau. On avait enregistré en groupe, il n’y avait pas de ligne de chant, il n’y avait rien. On avait mis ça dans un tiroir et on s’est dit, ça on le garde pour plus tard parce que j’aimerais bien faire ça avec quelqu’un. Que ce soit quelqu’un d’extérieur qui apporte une vision différente. Ce qui était important au bout d’un moment, parce qu’à force d’être toujours à la tête dans les tours comme ça, ça fait du bien d’avoir des personnes extérieures qui arrivent et donc quand Nick qui a accepté tout de suite et qui a compris immédiatement le propos de l’album qui a compris immédiatement le ton aussi à donner quand il a chanté je ne savais pas du tout que le morceau allait s’appeler Ca va ? , je ne savais pas du tout qu’on allait se demander ça va c’est parce qu’il en a fait un texte hyper sombre en vrai. Il est terrible. Son texte il est… Wouah ! Quand je l’ai pris je me suis dit mais c’est horrible ! Au secours ! Et en même temps il a cette note d’humour à la fin qui m’a fait me dire bon bah essayons en français, essayons de dire totalement l’inverse. Et effectivement le truc le plus logique c’était d’aborder cette espèce de question hyper récurrente à laquelle tout le monde répond sans vraiment répondre puisque la réponse est dans la question littéralement effectivement ça ne veut plus rien à dire mais c’était envisagé plutôt comme un truc léger je t’avoue sur un texte moins léger de Nick (sourire).

LFB : Mais du coup on va parler de construction de l’album, construction sonore. Je trouve que c’est un album qui est vachement centré sur la batterie. Et c’est intéressant parce que la batterie c’est l’élément qui peut être le plus robotique dans la musique comme le plus humain en fait. Biche : Ouais, carrément. LFB : Et j’ai l’impression que tout l’album est construit autour de cette ambivalence-là.

Biche : Ce n’était pas réfléchi, ce n’était pas quelque chose de voulu nécessairement. Mais j’ai commencé à bosser de nombreux morceaux en commençant par la basse batterie. C’est l’instrument que je pratique depuis le plus longtemps la batterie. Et j’ai ce truc là où je trouve que un bon beat, un bon rythme, c’est imparable. Et je ne dis pas que les rythmes et les patterns de cet album sont imparables, je dis juste que pour moi c’est assez porteur en fait. Si tu trouves une bonne rythmique, quelque chose qui te fait déjà hocher la tête, Ouais moi j’adore les morceaux où c’est basse batterie et chant en fait. J’adore ça. Et tu mets 2-3 percus et j’adore ça. Moi ça me met en route, ça me fait déjà réfléchir. Alors si en plus de ça les patterns sont un peu alambiqués, sont un peu distordus, répétés… Parce qu’en fait c’est des patterns qui se répètent non-stop mais qui ont des points de chute. C’est des patterns compliqués qui se répètent en groupe. Au bout d’un moment, on s’en accommode. J’imagine que dans le sens et à la lecture du disque dans sa globalité, on pourrait penser que c’est aussi ce que représente une machine, etc. Mais en vrai, c’est juste qu’à la base de ça, c’est moi qui me fais kiffer sur la batterie et à la basse. Il y a un moment, d’ailleurs, je pense qu’au trois quarts de l’écriture de l’album, je me suis dit, il y avait la batterie partout au secours ! En vérité, c’est vraiment l’instrument que je préfère.

LFB : C’est intéressant parce que tu vois, je trouve que le premier morceau il ouvre très bien l’album parce que tu as justement la batterie qui est hyper présente. Des bruitages électroniques, des choses qui arrivent un peu étranges. Mais en même temps, tu as les cordes qui peuvent rappeler le premier, qui font une espèce de transition, une introduction sur l’album et qui est aussi justement cette espèce de confrontation entre sonorité organique et sonorité électronique avec la voix au milieu.

Biche : Ouais, c’est totalement ça (sourire). Là, pour le coup, j’aurais pas pu dire mieux. C’est pas pour rien que t’es journaliste, à mon avis. Non, ouais, c’est exactement ça. Ce n’était pas voulu, mais en tout cas, quand il a été question de le mettre en ordre dans la tracklist, c’est pour ça que la vraie interrogation s’est retrouvée en première place parce que c’est le morceau qui fait le lien entre ce qui s’est passé avant et ce qui se passe directement après dans l’album. Donc là-dessus c’est une réponse que je ne pourrais pas t’apporter parce que tu l’as apporté toi-même.

LFB : J’ai l’impression que pour cet album-là, tu as laissé un peu de côté toutes tes influences d’enfance, d’adolescence, tout ça, qui reviennent quand même, parce que malgré tout on ne les efface jamais vraiment, mais tu t’es laissé vraiment porter par des envies du moment et par une recherche esthétique assez forte qui peut être surprenante par rapport au premier album et par rapport à ce que tu avais pu faire au tout début.

Biche : Et ça va plutôt dans l’autre sens… On va parler concrètement. Sur le premier disque, on voyait quel spectre planait au-dessus. Il y avait effectivement le truc de la library, il y avait de toute évidence une espèce de lubie pour la scène néo-psyché, Tame Impala et compagnie. Une fois que l’album a été mis en boîte, une fois que le mix a été terminé, ce sont des choses qui étaient là, figées, qu’on continuait à faire un peu en live parce que c’était l’idée de faire vivre le disque. C’était notre façon de faire vivre cette musique mais en vrai je pense que je n’ai pas réécouté cette musique, ce genre musical une fois que j’ai terminé de mixer cet album. Tu sais, c’est une sorte de convergence de qu’est-ce qui t’a plu à un moment donné, à quel moment tu commences à faire un album, qu’est-ce qui t’a poussé à le faire, qu’est-ce que t’as voulu y mettre, et il se trouve que moi j’ai fait ça, parce qu’il a mis littéralement 4 ans à être fait ce premier disque. Quand je suis arrivé au bout des quatre ans, en fait, je n’avais plus trop envie d’écouter ça.

LFB : Mais justement, là, cet album-là, est-ce que tu te reconnais dedans ?

Biche : Je me reconnais dedans parce qu’en fait, il y a beaucoup plus d’influences de mon adolescence. Enfin, j’ai aimé des choses qui étaient plus adolescentes, au final. Il y a un peu de Beck, il y a y a un peu plus de nineties, il y a un peu plus de Blur, il y a un peu plus des Strokes aussi, il y a un peu plus de choses de cette époque-là, que j’écoutais quand j’avais 14-15 ans, je pense. Et en même temps ; s’il y avait bien un truc que j’écoutais sur le premier disque que j’ai écouté sur le deuxième, c’est Stereolab. Et ça ne bouge pas, c’est quelque chose qui est beaucoup trop important pour moi et donc voilà, le tout se mélange et donne cette espèce de matière sonore-là.

LFB : Est-ce que c’est important pour toi que Biche soit justement un projet en évolution constante ?

Biche : Ouais. Mais parce que ça me fait sentir que moi je ne stagne pas. Les méthodes de travail, la temporalité au sein du groupe, elle est bizarre. C’est quand on se retrouve tous ensemble, qu’on est un groupe et qu’on décide, sur un laps de temps assez court, de faire un effort. Et puis après, on travaille pour un objectif. Et puis à partir du moment où les gars partent du studio et que moi je me retrouve tout seul pour genre un mois. C’est le seul truc qui me motive un peu, c’est de me dire que je me teste, je m’emmène un peu plus loin que là où je serais. Sinon, ça viendrait d’une espèce de quotidien un peu banal que de faire de la musique et je crois que ça ne me plairait pas trop.

LFB : Est-ce que tu n’as pas l’impression que Biche est une intermittence entre un projet de groupe et un projet solo ?

Biche : Ouais, carrément. C’est un terme bizarre, je dirais que de la manière dont s’est constitué ce groupe. Je dirais que c’est un mec, en l’occurrence moi,qui essaye de faire une musique que toutes les personnes qui acceptent de jouer avec lui auront plaisir à jouer.

LFB : Moi je trouvais qu’il y avait des évolutions intéressantes dans l’album et notamment je trouve qu’il y a beaucoup plus de chœurs féminins, qu’il n’y en avait pas forcément avant qui rapportent beaucoup de contraste et en même temps, je trouve aussi une vraie évolution dans la façon dont tu utilises la voix. J’ai l’impression que tu l’assumes beaucoup plus.

Biche : C’était le levier le plus évident pour faire avancer la musique de Biche. Quand tu écoutes le premier disque, en vrai, je trouve que c’est un peu obvious. Tu te rends compte que là où ça pêche, c’est un peu l’interprétation, un peu les textes aussi. Il n’y avait pas énormément de projections personnelles sur l’interprétation parce que je n’y disais pas grand chose de personnel.

LFB : C’est la question suivante que j’allais te poser.

Biche : Du coup, ça rejoint un petit peu ce truc-là. C’est plus facile d’assumer la voix quand on est des choses qu’on croit, je crois.

LFB : C’est ce que j’allais te demander. Est-ce que c’est l’écriture qui a influencé le chant ou est-ce que c’est le chant qui a influencé l’écriture ?

Biche : Et l’un et l’autre. Mais je pense quand même que l’écriture a beaucoup plus eu un impact sur l’interprétation que l’inverse. Parce que l’interprétation, je ne peux pas dire que je l’avais avant d’avoir les textes. J’avais des mélodies. Les mélodies induisaient quand même une façon de chanter un tout petit peu différente. Et je savais une chose, c’est que je voulais aucun effet sur la voix. Je voulais pas que la voix soit naillée, j’avais envie d’avoir une voix franche. Parce que du coup, c’était le truc le plus radicalement opposé à ce qu’il y avait sur le premier disque. J’allais sentir que j’allais me dépasser et que j’allais devoir faire autre chose et mieux, suivant mon propre avis bien sûr. Et du coup, tout ceci se concentre en un point qui est qu’au moment de faire la prise de voix, je suis obligé de donner quelque chose d’autre. Je vais te dire honnêtement, je pense que sur la musique que je continuerai à enregistrer, il faudrait que j’aille encore un peu plus loin parce que moi j’ai un tempérament assez calme. Pudique. Donc déjà, le fait de chanter, tu vois, j’arrive de très très très loin. Maintenant, je voudrais réussir à chanter un peu plus fort, je voudrais réussir à ouvrir un peu plus encore. Mais c’est des tests, tu vois, c’est toujours des tentatives. Honnêtement, là j’ai pu assumer ça parce que j’étais content du résultat, mais si un jour je fais une tentative et que je ne me retrouve pas du tout dedans, je ne forcerais pas.

LFB : Parce qu’il y a les morceaux, comme on disait tout à l’heure, avec un point de vue sur la société. Les deux morceaux qui m’ont le plus marqué sur l’album, c’est Labrador et Le Mont Ventoux, qui sont deux morceaux, je trouve, qui sont les plus personnels pour toi, mais qui, en même temps, au milieu de l’album, semblent les plus surréalistes.

Biche : Je suis content. En vrai, ce sont mes deux morceaux préférés de l’album. Déjà, je me souviens parfaitement du moment où j’ai écrit le texte. En général, j’ai dû prendre entre une semaine et deux semaines pour écrire chaque… Non, peut-être un peu moins. Ouais, en moyenne une semaine pour écrire chaque texte. C’est beaucoup, quand tu vois le nombre de pieds qu’il y a dedans. C’est quand même beaucoup de temps passé dessus. Je me souviens des moments de réflexion que j’ai eus au moment de l’écriture du Mont Ventoux. Ça a été un texte qui n’était pas nécessairement très simple à écrire. Mais par contre, quand j’ai terminé de l’écrire, j’étais heureux parce que j’étais allé au bout de mon idée, que j’avais trouvé des toplines qui me faisaient rire. J’avais réussi à faire une analogie qui me plaisait. Je m’en rappelle vraiment vivement et Labrador c’est la seule chanson d’amour que j’ai été capable d’écrire. C’est parce qu’elle est super premier degré que je pense qu’elle est revenue dans ce disque-là.

LFB : C’est ça parce que tu écoutes le morceau et tu te dis qu’il est vraiment en train d’écrire une chanson d’amour pour son chien (rires). C’est fou parce que c’est très beau finalement quand tu comprends que oui c’est totalement premier degré, ça rend la chanson encore plus belle…

Biche : Je me suis dit que c’était cool d’assumer une chanson très premier degré au bout d’un moment dans ce disque parce que je pense que j’aspire un jour à faire un peu plus que ça. Enfin, je t’avoue que le fait de traîner avec Côme Ranjard et Gaétan Nonchalant, au bout d’un moment, ça me pèse sur les épaules et je me dis, putain, les mans, ils parlent à cœur ouvert tout le temps et ça me touche systématiquement, donc ça m’intéresse quand même. Ça m’intéresse parce que j’ai l’impression que c’est aussi comme ça que l’on parle. Pas dans le but d’agrandir forcément son public mais je trouve que ce qui devient intéressant, c’est de pouvoir toucher le plus de monde. Parce qu’en fait avec une musique un peu exigeante. Je n’aime pas dire ça, mais comme c’est ce qu’on dit. Souvent une musique exigeante ou alors une musique de niche entre guillemets, je trouve que ça fait du bien de d’aborder des trucs assez universels, ça décloisonne un peu le propos musical en tout cas.

LFB : Une recherche de sincérité, mais ça va plus sur Gaétan et Côme, mais c’est pareil. Ce sont des gens qui au niveau de la voix influence vachement les propos et la façon dont les chansons existent… Et que l’on minimise un peu, tu vois, je trouve qu’on minimise trop l’apport de la voix sur des projets comme ça.

Biche : Je me suis beaucoup posé la question… Enfin, tu vois, dans ce genre de musique, en France, donc écrit en français, avec des voies de masculine, t’attendras jamais vraiment un man arriver et envoyer une énorme voix ultra puissante. C’est des voix qui sont souvent très confortables, un peu chaleureuses, mais un peu douces et tout ça. Souvent des voix graves. Franchement, c’est particulier de chanter en français. C’est vraiment très particulier.

LFB : C’est un truc qui continue à te challenger ?

Biche : Ouais, carrément. Ce qui me challenge aussi, en même temps, c’est d’essayer d’écrire un texte en anglais qui ait autant de profondeur, en tout cas à mes yeux, que ce que je mets en français. Je crois que maintenant, c’est foutu, je pourrais difficilement arrêter d’écrire en français. D’ailleurs, franchement c’est une des étapes de la conception de l’album que j’ai préféré moi l’écriture des textes c’était vraiment enrichissant pour moi. Donc je n’ai pas envie d’arrêter pour le coup.

LFB : On parlait de ces morceaux-là qui sont très personnels, et à côté de ça, tu as un morceau comme Ca va ? dont on parlait avant, mais tu as un morceau comme Le Code ou comme Americanism qui sont, comme on disait tout à l’heure, un point de vue assez glaçant sur la société qui t’entoure toi, mais au final, mine de rien, qui entoure un peu tout le monde aussi. Enfin, je veux dire, un morceau comme Le Code

Biche : Évidemment, quand je sors de chez moi pour aller me mêler à la société, j’essaie d’être vigilant et d’être ouvert vers les autres. Moi, le plus clair de mon temps, je le passe avec des gens.

LFB : Mais ils sont comme toi…

Biche : Ils sont comme moi en fait. C’est soit je décide de donner du temps à des personnes qui ne sont pas comme moi, mais c’est une démarche qui est autre et je décide de faire société, ce qui est un vrai sujet pour moi, c’est quelque chose qui est très important. Néanmoins, naturellement, les personnes qui vont venir au studio, les personnes avec lesquelles je vais travailler naturellement, ce sont des personnes… LFB : Avec qui tu as des affinités. Biche : En général, oui. Je pense que les textes et la façon d’écrire en général s’adressent plus facilement à ce genre de profil. LFB : Mais je trouve qu’il y a l’envie d’aller plus loin. Biche : Moi j’ai envie d’aller plus loin.

LFB : Un morceau comme Le Code, le traitement de l’information et de la réalité à travers les réseaux sociaux. Là on est en plein dedans !

Biche : Mais Americanism aussi ! Avec Margaux on se disait mais c’est n’importe quoi ! Là actuellement c’est notre focus track de l’album donc vraiment l’album il est sorti avec ce morceau qui était mis en avant et en même temps toute l’actualité on s’est dit what ? Trop bizarre.

LFB : Tu t’es posé la question ?

Biche : Non, pas au moment de la conception.

LFB : Oui, non, mais au moment de la sortie.

Biche : Au moment de la sortie, ouais, on s’est dit, mais c’est trop, c’est chelou. Là, pour le coup, c’est la première fois. Enfin, c’est un truc de timing. Je pense que ça arrive à plein de gens. Mais le fait de sentir que ton morceau, il colle à l’actualité, que ta chanson, elle colle à l’actualité. Avec plein de nuances, parce qu’en vrai, Americanism, ça parle pas nécessairement de ça. Ça fait bizarre, ça. Donc en fait, j’ai quand même abordé un truc, ce qui était un fait de société. Mais de base, je n’ai pas voulu aborder ce fait de société comme quelque chose de… Ce n’était pas un statement à la base de l’écriture. C’est juste que c’est des sujets qui m’intéressent. Je pense que la vraie différence, c’est qu’entre le premier disque et le deuxième disque, j’ai vieilli…

LFB : Toujours le temps.

Biche : Oui, mais c’est surtout que j’ai dû maturer un tout petit peu. Mûrir, pardon.

LFB : Ouais, maturer, c’est bien aussi (sourire).

Biche : Ça marche aussi, ouais.

LFB : En parlant de toi de vision personnelle, qu’est-ce qui t’a donné envie d’être le plus indépendant possible pour cette sortie d’album ? Et quel regard, justement, tu portes sur un peu, un peu moins maintenant je trouve, mais un peu le manque de solidarité parfois dans le milieu indé entre artistes et la sur-compétition justement qu’il peut y avoir par moment ? J’ai envie de te challenger sur cette question.

Biche : Ça me challenge, c’est un truc qui me challenge au quotidien en vrai parce que c’est central dans nos questionnements du quotidien avec tout mon entourage, avec Vincent, avec qui on est tout le temps au studio, Margaux, avec qui on est tout le temps au studio, la plupart des gens de mon entourage aussi, la question de l’indépendance, est-ce qu’elle se pose par défaut, est-ce qu’elle se pose par choix. C’est un vaste sujet à la lumière du fait qu’on habite en France et qu’on soit français aussi. Et qu’il y a un truc, un cas particulier aussi, je pense. Pour être tout à fait honnête, il est sorti donc en 2025, toute l’année 2024, il était prêt. Le disque, il a été fini en gros, en octobre 2023. Et, depuis, il n’a pas bougé. Donc je n’ai pas fait de retouches, c’est promis, je le jure. Mais j’ai quand même pris en gros de novembre 2023 à avril-mai 2024 le temps d’envoyer le disque et d’essayer de démarcher auprès de labels plus gros, on va dire, que ce qu’on avait pour le premier disque parce que je me suis dit que c’est un peu la suite logique des choses. On s’est dit qu’il fallait essayer d’installer vraiment l’entité Biche. Il faut avoir une sensation de progression, peut-être pas en arriver à signer un contrat d’artiste, mais commencer à monter un peu dans l’échelle des labels. L’idée de base c’était toujours de proposer une licence puisque moi je suis producteur à 100% du disque à chaque fois, c’est-à-dire que c’est moi qui mets tout le temps de travail, c’est moi qui fournis les locaux. Mais voilà, en fait la vérité c’est que le disque il n’a intéressé personne. Il n’a intéressé personne en France. On a eu 2-3 petits retours cools. Mais personne n’a eu envie de sortir et en vrai, je crois que je comprends, c’est juste qu’il suffit de relever le nez un peu et regarder ce qu’il se passe autour de nous et en fait, on comprend que ça ne les intéresse pas.

LFB : Oui, voilà. Moi si tu veux mon opinion, quand je vois des influenceuses qui font de la musique et des majors qui savent plus faire du développement d’artistes, ça me fait un peu flipper.

Biche : Ouais, je sais. Moi aussi, mais en fait, on ne va pas pouvoir non plus trop lutter. De toute façon, on sait déjà que c’est foutu.

LFB : Mais d’où l’idée de solidarité, j’ai l’impression qu’il y a de plus en plus des petites poches d’humains solidaires et qui font corps. Je pense à toi, avec En Attendant Ana, avec Côme Ranjard, avec Eggs…

Biche : Tu remarqueras que c’est des lieux.

LFB : La bergerie qui fait ça aussi. J’ai vraiment l’impression, comme tu dis, genre des lieux de contre-culture un peu.

Biche : Carrément. Ce sont des lieux et je pense que nous, notre lieu c’est le studio Claudio. C’est un endroit où il y a beaucoup d’artistes, beaucoup de groupes qui y sont passés et c’est un endroit de rencontre en fait à certains moments aussi. Donc ça créé une sorte de communauté entre guillemets. Mot que Côme Ranjard aimera d’autant plus qu’il est fan du Seigneur des Anneaux. La vraie question c’est de savoir comment on se fédère en fait. Comment on se fédère parce que ma musique désormais, et c’est déjà le cas sur ce disque-là, je la veux engagée d’une manière ou d’une autre. Politiquement, politiquement comme humainement, comme dans le procédé de fabrication. Et je pense que ça a été le cas et on en a entendu parler avec le Front des Musiques Indépendantes, le fait de re-politiser un tout petit peu la démarche artistique et la création musicale en France. Je trouve que c’est un pays où on peut se permettre de le faire. C’est un pays où ça a du sens de le faire. C’est sûr que par rapport à certains autres pays, ça doit être le cas, mais pour être un peuple assez politisé, assez militant, d’une manière ou d’une autre, pour le meilleur ou pour le pire. Très honnêtement, ça c’est un truc que j’ai appris au contact d’un autre groupe qui s’appelle Belvoir.

Mais ce sont des personnes qui m’ont beaucoup apporté et qui m’ont fait voir que le collectif avait beaucoup plus d’impact, beaucoup plus de bons et en fin de compte c’est ce qu’on a un peu inséminé, c’est ce qu’on a voulu mettre dans le studio et je pense que c’est ce qui aujourd’hui transparaît un peu. Mais bon, oui, sa question de l’indépendance, elle est touchy quand même. Il y a beaucoup de layers, et on peut en reparler si tu veux, en dehors de l’interview, parce que c’est vraiment un truc qui me passionne. Mais elle est liée à la question de l’industrie musicale, évidemment. Elle est liée à la question, en France, du secteur culturel subventionné. Elle est donc liée à l’intermittence. Et tout ça fait que, globalement, comme il y a plein de petits privilèges qu’on peut avoir à gauche à droite en France avec certaines aides et des trucs comme ça, il y a une compétition qu’il n’y a pas aux Etats-Unis, on ne sait pas pourquoi. En fait, circuit indépendant ou pas circuit indépendant, tout est un peu à l’image de nos politiques, quand même, j’ai l’impression, de nos sociétés. Mais en France, on a le cul entre deux chaises actuellement, entre un truc qui se libéralise de plus en plus avec Macron et les acquis sociaux qu’on a de longue date. Là, par exemple, quand on fait des concerts dans des salles DIY, etc. Là, on peut encore faire des demandes au fond PEP, ce qui sont des aides. En milieu d’année, c’est fini.

LFB : J’ai partagé une vidéo tout à l’heure d’une dame qui disait ça, que du jour au lendemain, la salle avait annulé son concert parce qu’elle n’avait pas fait assez de promos autour de la date, comme si c’était à elle de défendre son concert et pas à la salle, qui est financée pour faire jouer les artistes, de le faire aussi.

Biche : Ça, c’est fou quand même. Mais tout ça va péricliter, je pense. Tout ça va se casser la gueule, franchement. Et il ne restera plus qu’à se serrer les coudes. C’est pour ça que je pense qu’on gagne tous à être très sympas et à être très gentils, respectueux des autres.

LFB : Je t’ai vu en live au Pop Up. La formule a un peu évolué puisque vous n’êtes pour l’instant plus que 3.

Biche : C’est une des formules, ouais en gros c’est ça.

LFB : Comment tu le vois cet album-là sur le live justement ? Ça aussi c’est une question d’indépendance, est-ce que c’est important d’avoir plusieurs formules pour pouvoir présenter ta musique ?

Biche : Ce n’est pas tant une question d’indépendance, c’est plutôt une question qu’il faut faire avec la réalité du secteur. Et la réalité du secteur, c’est que quand tu te présentes auprès des programmeurs, des salles type SMAC ou autre salle, et que tu dis que t’as un groupe de 5 voire 6 personnes, on va te dire, non merci, au revoir, nous allons plutôt privilégier un duo de french-pop-sainte-pop, voire un DJ set. Voilà. Et la réalité elle est là, c’est que techniquement, les gens ont plus envie de se faire chier avec des plateaux lourds où t’as 5 musiciens qui ont tant d’instruments par musiciens, tant de micros, etc. Ils veulent pas se faire chier avec des changements de plateaux entre différents groupes.

LFB : C’est pour ça que j’aime les groupes québécois. Quand ils viennent en France, ils viennent à 6, à 7.

Biche : Mais ils ont un système d’aide aussi qui est particulier pour la tournée, pour promouvoir la musique québécoise à l’international. Nous on n’y est plus, malheureusement on n’y est plus, on n’est pas aidé par l’industrie en général, elle s’en branle totalement des artistes en développement, il n’y en a plus. En fait tu te débats un peu comme tu peux, nous on a décidé de tirer parti de la musique un peu plus répétitive, un peu plus transe, entre guillemets, de ce disque-là, pour proposer quand même une formation à trois qui soit faite sans compromis et qui soit artistiquement une composition artistique, enfin, que ce soit une composition artistique.

LFB : Puis les anciens morceaux rendent vachement bien aussi.

Biche : On s’est bien amusé à les refaire, à les remonter et tout. Et du coup ce live à 3 va servir de base pour le live à 5 et à 6 en vrai, puisque maintenant Margot va nous accompagner le plus souvent.

LFB : Est-ce que ça t’a rassuré quand même de faire deux Pop Up complets après cinq ans d’absence ?

Biche : J’avoue que je ne m’y attendais pas trop. Mais même la sortie en elle-même, ce n’est pas qu’elle me rassure, c’est plutôt qu’elle me dit…

LFB : Tu as un motif d’espoir.

Biche : Ouais, et en vrai, ce qui m’a grave touché, c’est qu’on a reçu des messages de groupes que j’estime être des groupes voisins. On est au même stade de non-développement-développement, qui nous disent que ça envoie un message assez positif au final. Ça envoie un message positif parce que ça veut dire qu’il y a encore une chance de faire exister et de diffuser cette musique. Et si je dis ça c’est parce qu’effectivement on a eu un vrai soutien de France Inter. Marion Guilbauld et toute l’équipe de Côté Club, les programmeurs IS de toute la radio, FIP, n’en parlons pas. Là, on a eu le plaisir de faire Basique les Sessions, on a rencontré les équipes. Quand je suis arrivé, j’avais plein d’à-prioris, la télé et tout, je me suis dit… Non, en fait, il y a encore beaucoup, beaucoup, beaucoup de gens.

LFB : Ce sont des passionnés !

Biche : Ouais, il y a trop, trop de teams qui sont hyper passionnés. La réussite dans tout ça, c’est pas tant que le disque soit… Si bien sûr, moi j’en tiens à une satisfaction personnelle, évidemment, et tout le groupe d’ailleurs. C’est une réussite parce que les gens aiment bien le disque. C’est terrible d’en arriver là, mais ce qui me rassure le plus, c’est effectivement de voir qu’il y a encore des créneaux de diffusion pour ce genre de musique. Et que même si ce n’est pas reçu, et même si ce n’est pas enregistré par les personnes qui le reçoivent, il y a encore une pluralité de gens sur ce genre de canaux.

LFB : Si tu pouvais ranger cet album dans une bibliothèque à côté d’un album, d’un film et d’un livre, tu choisirais quoi ?

Biche : Tu me donnes deux heures ? (rire) Mais du coup, je vais essayer de ne pas faire comme tout dans la vie, c’est-à-dire donner trop d’importance à tout et je vais le faire de façon légère, je pense. Donc, à côté d’un album, j’aurais personnellement envie de le ranger à côté de quelque chose de différent. En bouquin, je le mettrai à côté de la trilogie du Seigneur des Anneaux, ça c’est sûr et certain. Voilà. Ce n’est pas pour Côme, c’est parce que je suis en train de le relire et que je suis en train de passer un bon moment. Donc bouquin, c’est bon. Il y en aurait d’autres en vrai, mais là j’y suis allé du tac au tac. En film… Scott Pilgrim, parce qu’en vrai, je n’avais même pas fait le rapprochement. Mais bête de film, bête de B.O !

LFB : C’est marrant, j’en ai parlé avec EggS et je leur ai dit que l’album sur certains morceaux, ça me faisait penser à la B.O de Scott Pilgrim.

Biche : Ah c’est énorme. Bah en vrai, moi je suis un peu d’accord avec toi. Je te parlais un peu des Madeleines de Proust et des souvenirs d’adolescence et tout en fait. En fait c’est un film qui va en ce sens.

LFB : Tu as lu le comics ?

Biche : Non je n’ai pas lu le comics. Il est bien ?

LFB : Vachement bien.

Biche : Ouais, vas-y faudrait que je le check. Et un autre album… C’est dur. C’est dur mais je vais décider de le mettre à côté de l’album d’En attendant Ana en fait, de Principia je pense. La famille, c’est-à-dire qu’on les a fait côte à côte et s’ils peuvent rester côte à côte dans l’étagère, c’est cool.

Crédit Photos : Félix Hureau-Parreira

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