Indigo Birds sous l’influence de la solitude

Après trois années passées à chercher leur identité, allant de singles Pop étincelante en morceaux plus brumeux, Indigo Birds présentent ce 21 Janvier l’accomplissement de leurs aspirations : The Influence of Loneliness. Le résultat est un album fleuve, marqué d’un jusqu’au-boutisme rare et se jouant des codes du genre dans lequel on voudrait pouvoir les ranger : Le Rock Indépendant. En effet, le quatuor parisien déroute l’auditeur en faisant muter le genre qu’il emprunte tout au long des 11 pistes du disque. Mixant avec aisance les influences, ils puisent pourtant la base de leurs morceaux dans l’Indie Rock au sens large, notamment son revival au début des années 2000. Cependant, on peut dire qu’ils dévêtissent le genre et ses codes pour ensuite l’habiller à leur manière, le parant d’étoffes synthétiques et de rythmes non-binaires.

Artwork de The Influence of Loneliness par Rémi Levaufre

In a Jar ouvre le disque de manière très intimiste. La voix de Clément Barbier au premier plan, murmurant presque, simplement accompagné d’un piano sur un battement proche de celui du cœur humain. À première vue, Indigo Birds nous emmènent sur un terrain connu. Toutefois, les synthétiseurs s’installent doucement, jusqu’à venir tout recouvrir, s’entremêlant et prenant en intensité. Une tension inattendue se créé avant de disparaître subitement. Nous voilà lancés. On commence d’ores et déjà à entrevoir la force de cet album : garder l’auditeur en haleine, tantôt emporté, tantôt surpris.

Cockfighter naît des bribes éparses de la piste précédente. Plus entraînante, cette musique a quelque chose de sauvage, les parties instrumentales sont percutantes. On découvre par la même ce groove propre au groupe, que l’on retrouvera à de nombreuses reprises sur l’album. Notamment sur Noises, épopée empreinte de couleurs Psyché/Prog bien qu’également à mi-chemin entre Radiohead et Arctic Monkeys. Indigo Birds se permet même une envolée musicale pleinement maîtrisée aux portes de l’Acid Jazz. Une fois encore les instruments finissent par se mélanger pour créer un paysage sonore unique. Le morceau est accompagné d’un clip complètement barré. On y retrouve les membres du groupe dans une bataille contre un bourreau des châteaux de sable. Rempli de second degré, il n’en reste pas moins touchant et a comme un goût de revanche très appréciable.

De surcroît, Clément Barbier use avec brio d’un chant de crooner Rock, la voix légèrement saturée. Tout au long de l’album, le groupe apporte de ravissantes harmonies vocales, comme sur Last Night I Dreamt About You. En outre, la guitare qui se faisait jusqu’ici discrète prend d’assaut le groove avec un gimmick hautement efficace. C’est un morceau délicieux qui donne instantanément envie de bouger, à l’instar du cinquième titre de l’album, A Shark in Da Pool, encore assez Rock, comme toute la première partie du disque, se servant principalement de sections rythmiques issues de ce genre.

Jusqu’ici donc, nous pensions avoir affaire à un bon album d’Indie Rock aux influences variées. Un disque dans l’air du temps avec l’omniprésence des synthétiseurs et une tendance Electronica. Séduisant de par ses guitares qui ne débordent à aucun moment, restent là où elle doivent être, mais pas forcément où on les attend. Ce n’est pas tout. A partir de Burned, le groupe va s’enfoncer petit à petit dans des méandres qui s’assombrissent au fil des morceaux. D’abord modestes, le penchant Trip-Hop va fleurir. Affirmé sur la fantastique Gracias Hombre Lobo et donnant même des germes Industrielles sur Skyline, véritable bijou onirique baigné de reverb.

Les instrumentations se condensent, le ton introspectif se précise sur la seconde partie de l’album, en particulier dans Something’s Wrong. Au début, les sujets sombres des textes se cachent derrière des musiques rayonnantes, à la manière de The Smiths. Pourtant, ce sont bien des paroles cathartiques que chante Clément Barbier. Des textes intimes, parfois désabusés, pleins d’émotions, d’amertumes ou de vulnérabilité. Il est clair qu’une certaine mélancolie émane des ces onze titres, sans jamais tomber dans le pathos. C’est là que le groupe finit de puiser sa force.

Indigo Birds ont finalement trouvé leur style propre, nourri des très nombreuses influences. Captivant du début à la fin, le groupe étonne, touche, nous rend l’envie de danser. Rare sont les premiers albums aussi maîtrisés et cohérents. The Influence of Loneliness commence au petit matin, devient solaire puis crépusculaire, avant de s’éteindre au milieu de la nuit. C’est un premier album très réussi et surtout très prometteur au vu de la faculté du groupe à onduler entre les genres.

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