Ce n’est que de l’eau … La musique de Clay And Friends se rattache à l’eau, comme l’indique le titre de leur dernier EP, Agua. Plus tôt cette année, on a eu le plaisir de discuter avec le quintet. L’occasion de revenir sur ces dernières années, leur succès au Québec, leur rapport à l’indépendance et l’envie profonde d’étendre au monde La Musique Populaire de Verdun.
LFB : Hello les gars ! Comment ça va chez Clay and Friends ?
Clay and Friends : Ça va bien !
Poolboy: Bon, c’est bien que tu demandes ça, parce que ça va pas du tout ! (rires). Je viens de casser mes lunettes de soleil… (rires).
Pops: Le directeur de tournée est devant, ça fait une heure…
Poolboy : Mais en fait, ça va bien, ça va bien. On a eu quelques petits… pépins ici et là, tu sais c’est pas facile de voyager à cinq band members, on a beaucoup d’équipement, ils ont égaré un de nos bagages à Air France,
Pops: Le bagage qui valait le plus.
Poolboy: Donc tu viens d’ouvrir la boîte de Pandore, là (rires).
Emile: Pis en ce moment, juste pour compléter ce qu’il disait, notre directeur technique, Antoine, est devant là, sur les clignotants, il est au téléphone avec Air France.
Ils viennent de retrouver la valise, mais on ne sait pas où. On ne sait pas si elle est à Marrakech ou à Paris. Donc on vient de l’apprendre…
Clay and Friends : Mais sinon ça va ! (rires).On vient de tourner une petite vidéo, un petit épisode assez incroyable… Rocambolesque, oui. Il faut chaud à Paris donc, on est super contents d’être finalement en Europe après deux ans de pause forcée. Et toi, ça va ?
LFB : Moi, ça va très bien ! Il fait beau.
Clay and Friends : Ouais, c’est ça, il fait beau… On est bien…
LFB : Cette période de pause forcée qu’on a tous vécu, pour des gens qui sont habitués à faire du live, beaucoup de live, vous l’avez vécu comment ?
Poolboy : Alors… On a été chanceux quand même.
Mike : On a été chanceux, on a continué à faire du live. Le Québec nous a vraiment ouvert les bras, on a gagné un énorme prix : on a été la révélation en chanson de Radio Canada. Ça a fait en sorte que toutes sortes de plateaux et de portes se sont ouverts à nous alors même qu’il y a plusieurs groupes qui ont arrêté de tourner.
Pops : Alors ouais, c’est ça… En fait, tu connais le principe des spectacles virtuels ?
LFB : Ouais.
Pops : On en a fait notre part, et puis on a été assez chanceux comme Mike disait de faire énormément de plateaux télé, et puis en même temps, on a composé.Je crois qu’on a fait l’équivalent de trois albums, donc…
Mike : Même si on a pas eu autant de spectacles et de festivals qu’on a l’habitude de faire, on a contrôlé le seul truc qu’on peut contrôler : l’expansion de la musique populaire de Verdun.
Poolboy: L’expansion du monde.
LFB : Quand on fait de la musique comme la votre, qui pour moi est très influencée par la vie que vous vivez, tout ça, qu’est-ce qu’on compose en temps de pandémie ?
Poolboy: Je pense que c’est important de rester positif, pis de pas trop se laisser aller dans les ténèbres, tu sais, dans la noirceur… (rires des autres). Mais je pense que c’est ça, on a continué à faire de la musique à notre façon, c’est ça que comme tu as dit, on parle beaucoup de nos expériences et tout, mais on aime ça, amener une énergie positive avec un petit grain de sel de…
Emile : De négatif ! (rires).
Mike: Moi pendant cette année-là, j’en ai profité pour continuer à voyager, je suis allé à des endroits où il y avait absolument personne, c’était incroyable. Alors ça m’a permis de me ressourcer, pis d’entendre avec des oreilles fraîches la musique sur laquelle on travaillait constamment, parce que tout ce qu’on a fait, c’est travailler sur de la musique. Je pense aussi qu’on a un éventail d’expériences vécues non-exploitées…
Clay and Friends: Ouais ! Dans la banque de donnés.
Mike : Dans la banque, tu sais, avec tellement de tournées, de spectacles, de voyages etc, tellement de moments passés ensemble et les uns avec les autres… on avait un catalogue où l’on pouvait aller puiser pour s’inspirer au moins, pour commencer des idées.
Pops: Et je pense que c’est, pour compléter ce que tu disais sur le positivisme tout ça, je pense que c’était important pour nous de démontrer aux gens qui eux stressent que les artistes justement, on peut amener de la couleur dans la vie, pendant que tout est arrêté tout ça. On écrit de la musique, on fait des vidéos, pis eux ça les garde motivés, enfin…
Poolboy: Et puis aussi, la Covid c’est de passage, mais la musique qu’on va faire, ça va rester pour toujours, donc on veut pas vraiment…
Mike : Je pense à une chanson comme Bouge ton thangqui a été sortie en pleine… je ne sais plus quelle vague, pis la quantité de retours, de messages qu’on a eus, en disant que cette chanson-là avait amené du soleil, du bon temps, pis… tu sais, en surface c’est une chanson qui dit : « bouge ton thang, remue ton popotin », mais si tu regardes les paroles, ça parle vraiment de la life, de la vraie vie, ce n’est pas une chanson qui est la vie en rose, alors… je pense vraiment que c’est des musiques, t’écouterais du Clay and friends pis tu te dirais : « Ah, sounds great, it makes me happy ». Si tu portes vraiment attention, c’est des textes, la musique est réelle, la vie c’est pas tout le temps que du beau, que du sale pour qui que ce soit.
LFB : Justement, j’ai l’impression que plus que sur les précédents EPs, sur cet EP-là il y a limite plus de profondeur dans les paroles. Vus avez plus creusé sur les histoires. Un morceau comme Cardin tu vois par exemple, sur le rapport à la célébrité ou des choses comme ça, je trouve qu’il y a des choses un peu plus profondes dans l’écriture.
Mike : C’est bien dit. Je pense que… C’est sûr que depuis La musique populaire de Verdun, on a eu dans nos carrières des moments incroyables, qui sont le résultat de tout le travail qui a été fait avant, tu sais, dormir à terre en Italie pendant un été complet, pis faire des spectacles partout au monde pis pas dormir et en arriver à où est-ce qu’on en est et toujours en vouloir plus, c’est sûr que ça nous donne une espèce de perspective, un recul. Au début, c’était les premières parties, je pense qu’avant La musique populaire de Verdun, on n’avait jamais fait un show où les personnes nous chantaient nos chansons mieux que nous-mêmes on les connaissait.
Poolboy: Ouais, c’est vrai ça.
Mike : On n’avait jamais été dans des positions où on était dans des pièces, des plateaux, des entrevues, avec des personnes cinq, six fois plus connues que nous, qui nous disaient : « Oh, j’adore votre musique, c’est incroyable ce que vous faites… ». Wow ! Je peux-tu te toucher, est-ce que t’es vrai, qu’est-ce qui se passe ?
Poolboy : Après tu réalises que c’est un robot ! (Mime le bruit d’une décharge électrique).
Mike : Mais tu sais, vraiment être dans l’avion avec Charlotte Cardin, et de me dire justement que si l’avion s’écrase, on va parler juste d’elle, mais que Charlotte Cardin doit se sentir de cette façon-là par rapport à quelqu’un d’autre. C’est un cycle infini. Alors de pas tomber là-dedans, je pense que ce soit pour un médecin, ou un avocat, ou qui que ce soit. Everyone can kind of relate à ce sentiment. Donc je suis content que tu aies repéré ça, pis j’espère continuer sur cette lancée-là, d’aller décortiquer l’expérience humaine. Moi, en tout cas, c’est ça que ça me permet de faire.
LFB : Dans votre bio, il y a cette phrase: « Agua, c’est le mantra ». Et je me demandais si finalement l’eau, ce n’était pas l’élément parfait qui peut représenter votre musique ? Parce que c’est quelque chose qui est toujours en mouvement et en même temps complètement imprévisible.
Mike : Yes, absolutely. Be like water (référence à un discours prononcé par David Foster Wallace, ndlr).
Pops: Flow like water.
Mike: L’eau est l’élément central, pis tout le monde a besoin d’eau, comme tout le monde a besoin de la musique populaire de Verdun (rires). Mais… le mantra par rapport à Agua c’est « bois de l’eau, pis appelle ta mams ». Pis oui, en surface « bois de l’eau » OK, tu vois, tu t’es raté, pis « appelle ta mams voire si elle va bien», pour ratisser plus large que ça, c’est juste un rappel de faire les choses essentielles qui te font sentir bien, tu sais.
Que ça soit en période qu’on vit en ce moment ou juste dans la vie de tous les jours, même nous des fois, on vit des gros highs ou des bas très bas, c’est ça, c’est la vie d’artiste. Pis juste de faire ces petites choses-là, un rappel de faire ces petites choses-là, c’est essentiel. Donc c’est autant un message, un rappel à nous-mêmes, qu’aux gens qui écoutent notre musique. Je pense qu’il y a une grande partie de Agua qui est savoir être véritable à soi-même, pis se rappeler des petites choses.
LFB : Et est-ce que Agua c’est un peu un mélange des deux premiers EP ? Il y a une nouvelle langue qui s’ajoute, il y a vraiment des styles qui se mixent… C’est quelque chose de très québécois d’être libre comme ça dans sa façon d’envisager la musique.
Pops: Ca se fait catégoriser rapidement ici. Je pense qu’il y a… ce n’était pas nécessairement une volonté pour nous, je pense que c’était justement…
Poolboy: Le processus naturel.
Pops : Le processus naturel de notre musique, ce qui se définit de plus en plus. Pis je pense que, ouais, justement, c’est la continuité de ce qu’on a fait.
Mike : Surtout notre capacité à cerner ce que nous voulons faire. Je pense qu’avant, on commençait des idées musicales et qu’on se laissait mener, littéralement, par « ouais, ça peut finir par arriver quelque part ! », tandis que maintenant… Je pense qu’on est tous meilleurs, chacun dans les secteurs comme tu sais, autant la guitare que les beats, le rythme, est-ce qu’on veut que ce soit une chanson dans le tempo ou out tempo, est-ce qu’on veut que les personnes dansent ou fassent l’amour sur cette musique-là, juste être capable de vraiment aller cerner les éléments qui vont vraiment aller peser ces boutons-là, pis de…
Emile : On se parle plus avant de composer. Il y a des discussions, à cinq, avant de composer à composer, ce qu’on faisait moins avant.
Mike : Pis je pense que le fait de moins jouer en live, pendant un certain moment, ça nous a permis de prendre du recul. Qui est-ce que nous voulons être, au-delà de notre musique… C’est le travail d’une vie hein, c’est quelque chose qui change tout le temps, alors… Je pense que s’il y a quelque chose, les deux dernières années nous ont permis de travailler là-dessus.
LFB : Et en studio, ça se passe comment ? Est-ce que vous gardez une part de live et de spontanéité ?
Killa B : C’est vraiment chacun son tour, on amène une idée, première personne, deuxième personne amène ça, « ah, ça c’est bon », mais « ah, essaie ça », pis « ah cool, c’est bon », pis chacun une couleur ; même sur des accords de guitare, des beats qu’on va compléter, une ligne de bass… on se complète comme ça.
On le joue, on essaie en live, devant du monde, ça marche ça marche pas, on retourne du coup, enfin…
Mike : Il y a plusieurs balades qui sont devenues des chansons à tempo, et vice versa.
Ce qu’il est important de noter pour le studio, c’est qu’il y a très peu de chansons qui commencent exactement de la même façon. Ce n’est pas tout le temps « ah, on trouve des accords au piano »
ça peut être, « OK, on a entendu un feel de UK garage qu’on aime bien, OK », ça va commencer avec ça, ou « Ah, cette phrase, elle est incroyable, ça devrait être le refrain d’une chanson, OK, quel genre de chanson est-ce qu’on voudrait que ça soit… une chanson qu’une personne écoute pour se motiver à aller s’entraîner par exemple, OK cool... »
Poolboy: OK ! (rires).
Mike : Non mais, c’est un défi de taille, pis, je pense qu’on a fait énormément de musique à l’image ces deux dernières années, des pubs, des films, des débuts de séries.
On se fait donner des espèces d’univers avec des limites, et je pense que c’est quelque chose qui nous a permis nous de développer cette capacité de : OK, une commande de chanson qui est comme une commande à nous-mêmes, à la fin de la journée, de : « Ah, on n’a pas encore fait une chanson comme ça ».
Je pense à Grande idée, sur le dernier projet, qui est une chanson très viby, atmosphérique, dark, avec beaucoup de textures, on n’avait jamais vraiment exploré ça. Tu sais, on pourrait refaire un C’est tout, bossa nova, léger, ou un Going up the coast, up-tempo, plaisant, mais… ça nous permet de constamment repousser les limites. Pis on sait nous-mêmes jamais où notre propre volonté veut nous amener, alors je pense que ça nous garde intéressés, pis ça pousse tout le monde à… « OK, je peux pas refaire la même chose, lui ne va pas refaire la même chose, donc je ne peux pas refaire, il faut que j’achète une nouvelle pédale pour avoir un nouveau son, pis... »
Emile : (rires). Et ça coûte cher !
Mike : Tout le monde est, on dirait des vaisseaux spatiaux, tu sais. Après la tournée, tu nous a vus, on avait une valise à trois, on est rentrés avec… on est rentrés avec un spaceship, ça faisait (imite des bruits de vaisseau).
Pops: On avait encore une valise, mais on l’a perdue. (rires).
LFB : C’est une émulsion de groupe finalement, et c’est ce qu’on disait tout-à-l’heure, c’est que c’est très influencé par ce que vous vivez dans la vie, ce n’est pas… Comment dire ? Ce n’est pas quelque chose de fermé en fait, c’est vraiment quelque chose de poreux sur l’extérieur.
Pops: Ouais. Pis là ce qu’on, ce qu’on vit en ce moment, de repartir sur la route les 5 ensemble, ça va probablement donner un boost à certaines façons de composer, pis… Tu sais, on a fait une chanson hier, pour te dire. Pis c’était super cool, tu sais. Juste de passer du temps ensemble, de vivre des choses ensemble… En plus, à notre retour au Canada, on a le vent dans les voiles, on a énormément de trucs de ouf qui vont se passer, donc c’est un bon timing pour nous de partir sur la route pis de vivre des choses ensemble.
Mike: Pour boucler la boucle sur ton point, je pense vraiment que oui, l’eau est l’élément qui nous représente le plus. Mais je pense honnêtement que par rapport au feu, qui se consume et disparaît, on a le potentiel de continuer à se pousser à faire des nouvelles choses de façon indéfinies parce que… je continue à aller vers de nouvelles choses, et Clément cherche de nouveaux artistes, et Adel… c’est infini. Je pense vraiment que si on peut garder cette mentalité, ça va faire durer la Musique Populaire de Verdun.
LFB : C’est la rivière qui devient une mer qui devient un océan…
Clay and Friends: Exact. C’est beau !
LFB : Est-ce que vous pensez que Clay and Friends tel que c’est maintenant, ça aurait pu exister si vous étiez pas indépendants ?
Pops : Je pense que le fait qu’on a été indépendants, ça veut dire qu’on a aussi travaillé plus fort sur notre projet, on a été plus libres dans ce qu’on voulait faire, et donc c’est sûr que tous les côtés à côté de la musique auraient peut-être mis… des bâtons dans les roues, peut-être ?
Poolboy : On l’a essayé, avec un label au début, pis on sait très bien que ça marchait pas. Peut-être qu’aujourd’hui si il y avait un label, on aurait peut-être des meilleures opportunités, mais on l’avait essayé au début de notre carrière, pis avoir des gens qui sont pas nécessairement musiciens nous dire comment faire de la musique… Tu sais, je me rappelle de quelqu’un qui… qu’est-ce qu’elle avait dit la madame ?
Pops : C’est comme un coït interrompu.
Poolboy : « C’est comme un coït interrompu ». Pis… Pis là j’ai dit, OK, c’est fini. (rires).
Killa B : Mais aussi, on se fait souvent dire : « Votre son est tellement varié », et aux yeux des labels avec qui on a parlé, c’était problématique. Tandis que nous, on a quand même cru dans cet aspect de notre musique, que finalement, après quelques projets, tu te rends compte que, le style de musique, c’est la musique populaire de Verdun, pis c’est rien d’autre. Pis c’est souvent… Faut être patient pour laisser un groupe se trouver, trouver leur identité. Pis un label aurait pas eu cette patience-là.
Mike : Même dans l’art des singles et des playlists, c’est quand même le plus beau cadeau qu’on s’est faits à nous-mêmes. On peut se retrouver autant dans une playlist comme Outliers, qui va chercher des sons électroniques, que…
Poolboy : Indie Chill Vibes…
Mike: Indie Chill Vibes, ou Van Life Melodies, ou whatever it is. Chaque chanson, c’est vraiment une opportunité pour nous d’aller rencontrer, raconter une nouvelle histoire, pis.. yeah, just make people move or feel the way we wanted to.
Poolboy : Pis à la fin de la journée, c’est les gens qui décident. A la fin de la journée, les gens ils écoutent la musique, pis les labels vont ensuite prendre ça en compte et dire : « Ah, ça fonctionne votre truc », mais ils voulaient pas prendre le pas avec nous. A la fin de la journée, on fait de la musique que les gens écoutent. Moi j’ai confiance sur ça. J’écoute la musique qu’on fait et je suis convaincu que les gens pourraient l’apprécier, et l’écouter, et venir aux spectacles et tout, pis à la fin de la journée c’est eux qui décident.
Mike : Et c’est pour ça qu’on est ici en ce moment aussi.
Poolboy : C’est ça.
Mike : On n’est pas… On retourne au Québec, on a une tournée à guichet fermé, on fait deux Mtlus… C’est fou, pour nous c’est les plus grosses salles avant de faire l’Arena au Canada, tu sais, qui est comme… trois fois plus gros que le dernier spectacle qu’on a fait à Montréal. Donc on est, on a cette validation mais le fait de venir ici, pis on ne pas se le cacher, lundi on joue dans une salle de… 100 personnes peut-être, 150 personnes, le PopUp, au maximum, c’est parce qu’on a cette confiance que la musique, si elle se fait entendre par plusieurs personnes, on va trouver de nouveaux adeptes. Jusqu’à maintenant, là dans le car, on a constamment eu la preuve de ça. Donc je pense que si on continue à exploiter ce sentiment-là, it can only grow. Moi, je le dis tout le temps, je veux aller jouer la Musique populaire de Verdun au Japon, en Corée… On a eu des moments fous sur internet avec ces pays-là, ils nous ont découverts en Corée du Sud par exemple. Ils parent pas ni anglais, ni français en Corée du Sud, pis pourtant tous les commentaires en coréen, c’est : « j’adore cette musique »… C’est universel, tu sais.
LFB : C’est pour ça, quand tu dis « musique populaire », c’est exactement ça. C’est une musique qui se transmet aux gens sans prétention. Ce que vous faites, c’est vraiment, c’est de la musique pour de l’échange quoi.
Mike : Exact. C’est comme une discussion. Pis je trouve que ça se mêle bien à ce Adel disait, c’est, les fans décident autant que nous qu’est-ce qui va arriver avec la musique. C’est pas comme si… C’est une discussion pas à sens unique, notre musique, c’est pas un monologue.
Poolboy: Surtout que beaucoup de la musique qu’on fait est composée en live. Donc il y a vraiment cet esprit, cet échange d’énergies qui se passe. C’est sûr que la dernière année, il y a eu un peu moins de spectacles à cause du Covid et tout, donc on s’est un peu plus… confinés. (rires). Mais ouais, c’est ça. On a bien hâte.
LFB : Il y a des questions que j’aime bien poser aux gens, parce que ça vient dans le kit de la musique que vous représentez : en quoi Verdun vous influence dans votre composition musicale ?
Clay and Friends : Oh…Ben, premier point, c’est que Verdun… Le loyer est pas cher. (rires).
Pops : On est super proches de l’eau, pis à Montréal c’est un des quartiers où l’accès à l’eau du fleuve Saint-Laurent et des espaces naturels qui le bordent est le plus facile et le plus plaisant en fait. Donc… on se lève le matin pis on peut aller prendre une marche au bord de l’eau, et on dirait vraiment qu’on est dans un autre pays.
Mike : Ouais, à la campagne !
Poolboy : Pis maintenant, c’est cool, parce qu’on se promène sur la rue Wellington, qui est le boulevard à Verdun, pis on voit Clay and Friends, comme notre logo partout, des gens dessinent ou… il y a des commerces qui utilisent notre musique… C’est cool de voir comment c’est encore un échange : on donne à Verdun et Verdun nous donne à nous.
Pops: En fait, c’est comme… On a adopté Verdun, mais de plus en plus, on se rend compte que Verdun nous a adoptés aussi. Pis…
Poolboy : On va se présenter à la mairie l’année prochaine.
Pops: Ca je pensais que c’était… qu’il y avait un embargo sur cette nouvelle, mais…
Poolboy : Non, non, je l’ai dit. Vous êtes les premiers à le savoir.
Emile : C’est un scoop, c’est un scoop ! (rires).
Pops : Ce qui est cool aussi, c’est que, comme l’eau elle a influencé la création de l’album… on a le fleuve, tu vois, il continue vers la mer, pis y’a une région du Québec qui s’appelle la Gaspésie, où on a commencé. Ensuite on a continué à Verdun, qui suit le même fleuve mais de l’autre bord.
Mike : Dix heures, dix heures d’auto.
Poolboy : Dix heures de nage. (rires)
Pops : Pis ensuite Mike a beaucoup écrit certaines paroles au Salvador, au bord du Pacifique, right ? Donc ouais, Verdun, c’est l’eau aussi, tu sais. Il y en a qui font du surf à Verdun aussi.
Killa D: Il y a Verdun Beach.
Poolboy :Il y a une vague. (rires).
Mike : Au-delà de l’eau à Verdun, je pense que c’est un quartier où il y a vraiment… On fait de la musique mais on est des entrepreneurs. On est indépendants, pis we’re smart about how we run our business à la fin de la journée, pis à Verdun, il y a plein de jeunes entrepreneurs, qui ouvrent des cafés, des bars. C’est nos amis, ou des connaissances, pis je pense qu’on rebondit l’un sur l’autre, ils nous inspirent à suivre ce rêve autant que nous les inspirons à suivre le leur.
LFB : Tu parlais du logo de Clay and Friends tout-à-l’heure. Moi j’aime beaucoup vos pochettes.
Clay And Friends : Yes, merci !
LFB : J’aime beaucoup vos clips aussi, et je me demandais… justement, de quelle manière c’était une extension de ce que vous faisiez en musique.
Mike : C’est une extension. Je sais que plusieurs artistes envoient par exemple un moodboard à un autre artiste, pis « OK, inspire-toi de ça, rebondis sur ce qui a déjà été fait », tandis que nous, on donne vraiment carte blanche à Felipe Arriagada-Nunez , qui est un champion, qui fait tous nos visuels depuis La Musique Populaire de Verdun, autant au niveau des couleurs que le merch qui va en découler.
On a littéralement fait un clip animé, qui a été une première pour nous, pis il a tellement bien saisi l’univers de Clay and Friends de A à Z, de l’espèce de voyage, des couleurs, du groupe, la touche psychédélique… Donc, c’est littéralement la musique en images. Il a pris les sons qu’on crée, les paroles que je write, pis il a réussi à mettre sa plume à lui dessus. Pis je pense que ça a énormément contribué à l’imaginaire de la Musique Populaire de Verdun. Je pense que les personnes nous associent, oui à la musique, mais je pense que tous ces visuels rattachés permettent de boucher les trous qui peuvent se poser.
C’est aussi un univers infini, c’est ça que j’adore avec le dessin. Il n’y a pas de limites de : « Ouais, on peut pas avoir un hélicoptère dans le clip, pis on peut pas le mettre en feu »… Quoi que c’est pas du tout ce qu’on fait dans nos clips, mais, qu’en dessin, ça devient… Tu sais, je nage avec des baleines dans le clip, eux ils font des pirouettes sur un avion en papier dans le ciel, on fait le tour du monde dans cette vidéo-là, et… boum, ce n’est pas que ça a rien coûté, mais ça a pas coûté 500 000 euros de faire ce clip-là.
LFB : De toute façon, il y avait déjà un côté un peu surréaliste et un peu onirique dans vos clips.
Mike : On adore tout le temps les trames narratives, les histoires avec Xavier, qui fait tous nos clips, pis… tu sais, tantôt tu mentionnais Didier Lucien dans le clip de Bouge ton thang … Ce clip illustre l’effet… the intended effect of the song. L’idée du clip, c’est que Didier entend la chanson pour la première fois, et son corps prend le dessus et il peut pas s’empêcher de bouger son thang. Pis je trouve que c’est vraiment littéralement l’extension de ce qu’on espère qui arrive quand quelqu’un découvre du Clay and Friends. Pis on l’a vu en spectacle, tu sais ce qui arrive… Tu le vois là avec les gars les bras croisés, pis ils sont… wouuh…
Poolboy: J’aime ça ! (rires).
Mike : C’est comme plus fort qu’eux. Moi je sais en tout cas que quand je l’écoute la musique, ça me fait cet effet-là, pis que… c’est un des plus beaux sentiments que je vis constamment dans cette vie, ça fait que j’espère pouvoir offrir ça à nos fans aussi.
LFB : Qu’est-ce que vous en attendez et qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour la suite , que ce soit en France ou en Europe?
Mike : Ben de revenir très rapidement. Tu sais, on est déjà en train de regarder pour… C’est prévenu de revenir cet été, pour défendre l’extend’eau, qui va être l’extension de l’EP – jeu de mots de haute qualité, grâce à notre gérant Sam. Sinon, tu sais, en toute transparence, on va jouer des chansons pendant cette tournée qu’on a jamais jouées avant. Alors j’espère qu’on va prendre autant de plaisir à les jouer en live qu’on a eu à les créer. C’est la première fois que je peux dire ça, parce que ça a tout le temps été fait dans le sens inverse. On espère de… de vivre, de voir qu’est-ce qui fonctionne, qu’est-ce qui fonctionne pas…
Killa B: Vous allez être nos cobayes…
Mike : Vraiment, mais… Tu sais, le public français est moins facile que le public québécois, honnêtement, vous… Je pense que la culture occupe une plus grande place ici que au Québec, où le côté festif souvent prend le dessus, surtout pour nous, alors je pense que ça va être une bonne façon de briser la glace et de voir… ce qu’on vaut réellement (rires).
Emile: Eh, ça me stresse un peu, ça ! (rires).
LFB : Non mais c’est marrant ce que tu dis, parce que moi… lundi, j’ai vu Laurence-Anne et Bon Enfant. Et autant Bon Enfant, tu vois, un style très carré, c’est bien passé auprès des gens, autant Laurence-Anne, j’ai eu l’impression que les gens, ils ont pas adhéré. Et j’ai trouvé ça finalement très québécois, dans le sens où c’était sa personnalité qui transparaissait dans sa musique, et en France, ils ont du mal avec cette idée-là, de non-unicité en fait, tu vois ?
Pops: Ouais, d’être hétéroclites, un peu ?
LFB : Ouais.
Mike : Hmm-hmm. Ben tu vois, nous c’est un grand travail qu’on a fait juste avant de partir. On a passé du temps à… c’est la première fois qu’on le fait, à vraiment établir une setlist qui fait du sens pour pas se retrouver dans cette situation-là, où le spectateur est comme : « Ben là, j’ai l’impression de me retrouver devant un jukebox, pis de faire Chanson 1B, pis ensuite 3Z, pis, ça fait aucun sens ».
Non, on veut vraiment créer une expérience où, un peu comme quand t’écoutes un disque que t’adores pis que tu peux revisiter, le spectateur va nous suivre dans les émotions qu’on veut qu’il ressente ; comme un auteur qui écrit un livre, pis ce n’est pas dans le chapitre 1 qu’il dévoile tout, tout de suite… ben, à moins que ce soit un livre à l’envers, ou whatever, tu sais. Mais… J’ai hâte de voir si nos intentions vont être ressenties. Si le parcours… the intended trajectory will be respected. S’ils vont suivre le GPS à la fin de la journée, ou pas du tout.
Poolboy : Pis si tu peux nous souhaiter quelque chose, ben c’est de pas perdre le GPS.
Clay and Friends : Ouais, c’est ça (rires).