Colt : « On essaye juste de faire ce qu’on a envie de faire et de s’amuser, de faire plein de choses différentes »

À l’occasion de la sortie de leur single Oublie pas ok ?, on a eu la chance de rencontrer le groupe Colt et de parler de leur duo et de leur façon de travailler.

©Bryan Denis

La Face B : Bonjour à tous les deux, comment allez-vous ?

Toitoine : Très bien merci !

LFB : Décrivez-moi votre relation. On peut croire que vous êtes meilleurs amis mais vous êtes aussi de la même famille par alliance, est-ce que vous êtes juste un duo au sens professionnel ou est-ce que vous passez votre vie ensemble ?

Coline : On est plein de choses en même temps. Au départ on est arrière-cousins, le mari de ma maman est le cousin de la maman d’Antoine, c’est un peu lointain mais donc on s’est beaucoup croisés durant notre enfance, à des fêtes par exemple, mais on n’était pas vraiment proches. Notre relation s’est vraiment nouée grâce et autour de la musique, c’est pour ça que je dis qu’on est plein de choses, au-delà d’être arrière-cousins on est surtout amis et c’est vraiment la musique qui nous lie. Aujourd’hui on est colocs, amis et cousins !

LFB : Comment décririez-vous votre duo en terme de musicalité ?

Toitoine : On essaye de ne pas trop se mettre d’étiquette pour se présenter parce que souvent ça peut vite être un peu enfermant, donc on essaye juste de faire ce qu’on a envie de faire et de s’amuser, de faire plein de choses différentes. Je pense que les gens reconnaissent eux-mêmes une «  patte Colt » mais c’est pas fait exprès, on ne réfléchit pas au style qu’on va faire. C’est plus ce qu’on est qui fait que ce qu’on va faire dans la musique est reconnaissable.

LFB : Avez-vous des rôles très définis : est-ce que c’est toujours Coline qui écrit et Antoine qui compose ?

Toitoine : En général ça reste comme ça, mais ça arrive que ça bouge. Déjà on se donne nos avis, moi sur les paroles qu’écrit Coline, sur des idées que moi j’aurais d’autres rimes, et inversement Coline parfois vient avec beaucoup d’accords faits à la guitare. Ou bien quand je lui montre une prod elle me propose d’autres idées, ça reste fluide, c’est pas une méthode qui reste la même tout le temps.

Coline : C’est surtout pour les débuts de chanson où ça bouge beaucoup, par exemple Antoine arrive avec un début de prod, ou bien on est ensemble et on commence un morceau, et à chaque fois le fait que les débuts soient différents je pense que ça fait aussi qu’il y a plein d’idées qui sont traitées, et c’est là que ça fait que ça peut partir dans tous les sens.

LFB : Est-ce difficile de travailler en duo ? Êtes-vous confrontés à des difficultés, sur le fait d’être d’accord, est-ce que vous vous entendez toujours bien ?

Toitoine : Je pense que c’est plutôt un avantage justement de pouvoir se reposer sur l’autre, parce que parfois quand tu fais de la musique tu te rends pas forcément compte que quelque chose ne va pas, parce que chacun a sa perception, donc d’avoir deux perceptions différentes ça devient déjà un petit peu plus intéressant. Par exemple si je fais un truc qui sonne hyper mal et que je ne m’en rends pas forcément compte, Coline pourra me le dire.

Coline : On a beaucoup de débats quand on n’est pas d’accord, quand on n’a pas les mêmes avis, mais en soit jusqu’ici ça a hyper bien marché. Moi j’adore le fait d’être en duo parce que ça permet qu’il y en ait toujours un pour recharger les batteries de l’autre. On est tout le temps en mouvement, il y a toujours des choses qui se passent parce que quand l’un a fait quelque chose, l’autre réagit, tu peux jamais vraiment être en pause parce que l’autre va être en train de faire un truc et ça va te motiver pour faire la suite. Cette énergie là est hyper chouette. Il y a beaucoup de débats mais il n’y a jamais de dispute.

LFB : Avant votre groupe s’appelait Coline et Toitoine, vous avez changé pour Colt, pourquoi ce choix ?

Toitoine : Y’a un peu plein de raisons. Déjà le fait qu’on revenait de New York à ce moment-là et on s’est rendu compte que là-bas c’était vraiment un nom imprononçable, donc les gens ne savaient même pas nous retrouver sur les réseaux parce qu’ils ne connaissent pas le son « oi ». 

Coline : C’était long aussi.

Toitoine : Oui et en plus c’était un peu un défi qu’on s’était donné de se dire « ok on a un nom qui fait hyper enfantin, mais on s’en fout on va continuer avec le nom le plus pourri du monde ».

Coline : Le contexte de pourquoi on s’appelait Coline et Toitoine c’était parce que quand on a commencé à faire du son ensemble on faisait déjà chacun un petit peu de musique de notre côté. Moi mon nom c’était Coline qui était simplement mon prénom et Toitoine avait choisi ce nom-là parce qu’il s’appelle Antoine et qu’il a cherché sur un forum « comment choisir son nom d’artiste ? », et il y avait écrit « prenez un nom qu’on vous donnait enfant, un surnom » et il s’est retrouvé avec un nom de merde et il s’est dit « non mais c’est écrit dans le forum je reste comme ça » et donc on est monté sur scène un peu après et on avait pas de nom, et on s’est dit qu’on allait s’appeler Coline et Toitoine parce que c’est nos deux noms, et on a continué comme ça pendant trois ans.

Toitoine : À chaque fois on hésitait à se trouver un vrai nom de groupe, et puis un jour on s’est vraiment dit qu’il fallait qu’on le fasse.

Coline : Et c’était le bon moment parce qu’on passait au français, donc ça allait de pair.

LFB : Vous faites la transition avec la prochaine question, avant vous chantiez quasiment tout le temps en anglais, et maintenant en français, est-ce que ce choix est définitif ? Et est-ce que ce choix d’écrire en anglais venait du fait que c’est plus dur de livrer ses sentiments en français, parce tout le monde va comprendre les paroles donc c’est intimidant alors que l’anglais c’est un peu plus étranger, les gens n’écoutent pas forcément les paroles ?

Coline : C’est exactement ça, t’as totalement capté. Déjà pour répondre au début de la question, je ne pense pas qu’il n’y aura plus jamais d’anglais, en fait on a juste pas envie de se mettre de limite, (d’ailleurs il y a un titre qui commence en italien qu’on joue sur scène) donc si maintenant on a une idée qui nous vient on va jamais se dire « non on avait dit que… ». En tout cas ce qui est sûr c’est que ce que t’as dit là c’est totalement ça, en fait j’écris en français depuis toujours, mais il y avait un truc qui me bloquait dans le fait de sortir des chansons en français parce que c’est hyper intime et je me mettais beaucoup de pression. Écrire en français je trouve que c’est pas facile, il fallait que ça sonne juste, que ça sonne bien, et je sais pas pourquoi mais j’avais l’impression que c’était hyper vite bateau ce que j’écrivais, donc il y a eu tout un processus de maturation qui a fait que le français n’est pas arrivé plus tôt. Et puis il y a eu une chanson déclic qui s’appelle La salle aux lumières qu’on a aussi sorti il y a un an et qui raconte une histoire hyper personnelle qui raconte mon histoire d’amour et qui est aussi un coming-out, et quand on l’a écrite on s’était dit que là il y avait une alchimie qui fait que ça marche, et le public a trop bien reçu le son. J’étais prête, et ça ça a été la porte vers notre langue maternelle, il y a un truc plus naturel de chanter en français.

Toitoine : Aussi l’air de rien, dans nos goûts musicaux à tous les deux il y a beaucoup de musique anglophone et donc je pense que quand la musique que t’écoutes est en anglais, naturellement tu vas te tourner vers l’anglais pour ta musique.

LFB : Votre premier million d’écoute était pour le titre Insomnies, qu’est-ce qui fait selon vous que ça a plus marché, est-ce que vous aviez anticipé ce succès ?

Coline : Pas du tout, même au départ on ne devait pas le sortir à ce moment-là, il ne devait pas être sur l’EP et finalement c’est le premier extrait qu’on a sorti parce que tous les gens qui nous entouraient, nos attachés de presse etc disaient qu’on sortirait Insomnies puis un autre morceau radio, un peu du même mood et finalement on ne l’a pas fait parce qu’Insomnies a super bien marché.

Toitoine : En vrai depuis le teasing d’Insomnies on avait remarqué qu’il allait sans doute quand même se passer quelque chose, parce qu’après le moment où on a mis les premiers extraits, directement chaque vidéo qu’on faisait ensuite où on entendait Insomnies marchait hyper bien. On a commencé par faire une vidéo piano/voix sur Tiktok qui a fait beaucoup plus de vues que ce qu’on fait d’habitude, et on a fait la même sur Instagram et ça a aussi super bien marché. Ensuite on a refait une vidéo sur Instagram avec la prod, où c’était pas moi au piano mais avec la vraie prod, là aussi on a fait 2 millions de vues donc on s’est dit qu’il fallait absolument la sortir maintenant, et puis on a eu la chance de voir que c’est pas qu’une vidéo qui a buzzé, c’est vraiment les gens qui aimaient le titre. Après ils ont tous été l’écouter sur Spotify et ça a fait qu’en un mois on a fait le million d’écoute.

Coline : Tous les choix qu’on a fait au feeling c’est ceux qui finalement marchent le mieux. Pour La salle aux lumières quand on a décidé de le sortir c’est parce qu’on sentait qu’il y avait une flamme, que c’était maintenant qu’il fallait le faire, et à chaque fois ça paye.

LFB : Est-ce que vous avez d’autres objectifs en terme de chiffres, de salles ?

Toitoine : Je pense qu’on en a plein mais qu’en vrai on les laisse un peu venir à nous dans le sens où on continue de faire ce qu’on aime, à faire tout ce qu’on peut pour petit à petit faire évoluer notre projet musical. Déjà voir tout ce qui est en train de se passer pour l’instant, le fait que tout s’accélère pour nous, ça se fait un peu naturellement donc on n’a pas « besoin » de se mettre un objectif pour que les choses évoluent. C’est une manière plus saine de faire les choses je pense, de se concentrer sur la musique, faire des vidéos qui nous plaisent sur nos réseaux, et puis le reste se fait tout seul.

Coline : Mais par exemple on avait quand même un rêve, c’était de jouer un jour en tête d’affiche à Paris, et là on va le faire, le 6 juin on va jouer au Hasard Ludique et c’est déjà complet !

Toitoine : Oui c’était vraiment une surprise en plus parce qu’on a annoncé la date et quelques jours après c’était direct sold-out, on s’est dit qu’il se passait quelque chose. On a trop hâte de jouer sur cette scène parce que les gens qui ont acheté les places c’est ceux qui étaient le plus d’attaque, qui ont direct acheté la place, je pense que ça va vraiment être cool.

LFB : Vous avez dit plusieurs fois que c’était la musique qui vous reliait, qui vous avait rapprochés, est-ce que vous écoutez la même chose ? Est-ce que vous avez différentes inspirations ou est-ce que vous écoutez que des choses qui ressemblent à ce que vous faites ?

Toitoine : Je pense qu’on a une base commune, mais en plus de ça on a quand même quelques goûts qui divergent. Il y a une partie de ce que j’écoute que Coline aime parce qu’elle a les mêmes goûts musicaux que moi en général, mais moi par exemple j’écoute beaucoup de musique classique. Je viens de là au départ, mon père écoutait que du classique, donc jusqu’à mes treize ans je n’ai écouté que ça, et il y a très peu de potes à moi qui écoutent que ça aussi donc c’est un peu une exception. Et puis je sais qu’en chanson française Coline en écoute plus que moi, donc évidemment on est pas des jumeaux mais il y a quand même un socle commun.

LFB : Vous me parliez tout à l’heure de vos vidéos sur Instagram, vous vous exprimez régulièrement en post ou en story, on voit que ça vous tient à coeur d’échanger avec votre communauté, pourquoi est-ce que c’est autant important pour vous ?

Coline : Je crois que de nouveau comme on le disait au début, ce qu’on adore c’est la spontanéité. C’est pour ça aussi qu’on aimait bien le nom Coline et Toitoine, c’est parce qu’il n’y a pas moyen de se prendre la tête avec un nom comme ça, et c’est vraiment ça notre façon de voir les choses, c’est de faire ce qu’on a envie d’être nous mêmes et d’être entre potes.

Toitoine : Ce qui est cool aussi c’est que c’est un moyen de faire plein d’autres choses créatives que tu ne peux pas faire forcément ailleurs, on fait plein de petits formats vidéos, on s’amuse à faire d’autres extraits de musiques, on peut vraiment tester des choses. Ce qui est sur les plateformes c’est plutôt les projets sérieux qui ont abouti, sur les réseaux on peut s’amuser à faire plein de choses comme les piano/voix ou en fait ça nous prend même pas une matinée à faire et puis on partage ça.

LFB : Vous me disiez que vous aviez hâte de faire le Hasard Ludique, comment se caractérise votre rapport à la scène, est-ce que vous préférez la scène ou le studio ?

Coline : Pour ma part c’est clairement la scène que je préfère, c’est là que tu récoltes les fruits de ce que tu as semé avant, tu rencontres les gens, et c’est la chose la plus gratifiante. On a eu ça alors qu’Insomnies était sorti 3 jours avant, on a joué un concert sur une place à Bruxelles pour un évènement où il y avait 2000 personnes et on a joué le morceau que tout le monde connaissait par coeur, c’était un délire. Il y a quelque chose d’hyper réel qui est hyper important dans un monde où on est beaucoup sur les réseaux, c’est hyper dur d’avoir des retours tangibles, c’est pour ça que les concerts c’est hyper important.

©Llywelyn Nys

Toitoine : Moi je ne pourrais pas choisir entre les deux parce que je trouve aussi que la scène c’est trop cool au niveau de l’énergie qu’on donne et qu’on reçoit, mais en studio y’a quand même une liberté créative qu’il n’y a pas sur scène parce qu’on fait des sets qu’on a préparés pendant longtemps, qu’on a répétés. Dans le studio il y a un côté où tu peux faire n’importe quoi et voir ce que ça donne, t’es souvent surpris aussi par des choses qui apparaissent de ta créativité sans même que tu t’en rendes compte, donc y’a un coté un petit peu savant fou qui fait des expériences que j’aime vraiment bien en studio.

LFB : Pour l’instant, quelle serait la musique la plus importante à vos yeux ?

Coline : J’ai envie de dire une musique mais elle n’est pas encore sortie. Sur l’EP qui arrive, il y a une musique qui pour la première fois parle de nous deux, de notre histoire, nos rêves et où est-ce qu’ils s’arrêtent, qui raconte nos envies et nos ambitions. Mais sinon là maintenant je dirais Oublie pas ok ?, il y a un truc pour ma part qui vient de mes entrailles, quand il est sorti à minuit ça m’a vraiment fait quelque chose parce que c’est une chanson d’amour, c’est une chanson que j’ai écrite avant La salle aux lumières dont on parlait plus tôt. C’est la toute première chanson d’amour que j’ai écrite et elle a beaucoup de valeur à mes yeux parce qu’avant ça je voulais pas écrire de chanson d’amour, je trouvais ça niais, et en fait j’étais hyper pudique de ce que je ressentais.

Je trouvais que les chansons d’amour il y en avait déjà un million, que c’était dur de se renouveler là-dedans, et puis finalement il y a eu ce déclic à un moment où c’est venu tout seul, et c’était juste nécessaire de l’écrire parce qu’avec tout ce que je vivais… et puis j’étais prête, donc ça me fait très plaisir qu’elle soit disponible.

LFB : Tout à l’heure quand je vous parlais de vos ambitions vous me disiez plutôt être dans le présent, mais si on devait se revoir dans trois ans pour une nouvelle interview, vous aimeriez en être où, en terme de sorties etc ?

Coline : Moi j’aimerais bien avoir sorti un album d’ici là, parce que là on est à notre deuxième EP (mais notre premier en temps que Colt donc y’a quand même cette idée de nouveau départ). L’album c’est tellement une carte joker, quelque chose à sortir au bon moment, j’aimerais bien l’avoir fait fait, mais peut-être que dans trois ans y’en aura déjà un deuxième, j’espère.

Toitoine : Et puis en terme de scène à Bruxelles il y en a une super importante qui s’appelle L’Ancienne Belgique (AB) où le fait d’y jouer c’est vraiment une étape, c’est vraiment la charnière entre groupe émergent et groupe confirmé, une fois que t’as fait une AB t’es un vrai artiste connu de tous.

Coline : Dans ces idées d’objectifs c’est marrant parce que ça fait à peine quelques mois qu’Insomnies est sorti et ça a déjà changé notre vie parce que ça nous a ouvert plein de portes. En fait qui sait ce qui peut arriver en trois ans ? Si ça se trouve on sera plus dans la musique et moi je ferai de la pharma-culture dans une forêt, tout est possible (rires).

LFB : Vous êtes tous les deux très jeunes (23 ans), est ce que la musique est votre activité à temps plein où est-ce que vous avez fait des études à côté, vous en faites encore ?

Toitoine : Moi après l’équivalent de mon bac j’ai fait des études musicales dans le supérieur mais j’ai arrêté pendant parce qu’en gros je me rendais compte qu’avec Colt j’apprenais limite plus en autodidacte que ce que je pouvais apprendre au conservatoire. Même pendant le secondaire (collège/lycée) j’ai découvert plein de choses par moi-même, j’avais des cours de musique et donc en fait j’ai remarqué que par moi-même je pouvais aller plus loin que les formations classiques, mais je suis content d’avoir fait en tout treize ans de cours de musique, je pense juste que c’était le moment de voler de mes propres ailes musicalement.

Coline : Moi j’ai entamé des études de communication dans le secteur socio-culturel après mon bac, et contrairement à Antoine je n’ai pas arrêté, mais là mes deux années de master je les ai divisées en quatre années, mes études sont assez liées avec ce que je fais et donc par exemple pour mon stage là je suis chez Colt. Ils ont permis ça parce que je fais aussi la communication du projet donc ils ont bien voulu que ce soit mon stage et puis ils me soutiennent donc c’est trop bien. Donc je fais encore des études mais ma priorité c’est clairement la musique et je fais quasi plus que ça. 

LFB : Qu’est ce qu’on peut vous souhaiter pour la suite ?

Toitoine : Que ça continue sur cette lancée, parce que là pour l’instant ça se passe vraiment bien. Si ça continue comme ça on est très heureux.

Coline : Que le Hasard Ludique ça se passe bien, qu’il y ait beaucoup de monde, et qu’on continue de kiffer c’est le plus important. 

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