Ben Mazué revient, après un exile réunionnais, plus intime que jamais dans ses textes. Trois ans après La Femme Idéale, véritable ode à la mère de ses enfants, c’est au Paradis que l’on retrouve cette fois-ci l’artiste. Dans un de ses albums les plus touchants, il se confie sur sa séparation récente et sur son rôle de père.
On en était resté à cette Femme Idéale, à cette histoire d’amour avec ses hauts et ses bas bien sûr entre Ben et sa compagne. C’est avec surprise que trois ans plus tard on s’immisce au cœur de leur rupture dans Paradis. Comme à son habitude, le compositeur nous parle de lui et ses textes résonnent en nous, chaque mot sonne comme familier et on s’y retrouve avec perplexité. Ben Mazué est tellement intime dans ses titres que l’on se prend au jeu de penser qu’il fait partie de ces amis que l’on a perdu de vue et que l’on recroiserait par hasard au détour d’une rue. Il rattrape le temps perdu et se dévoile avec pudeur et délicatesse en nous racontant les dernières nouvelles. Il nous met à jour de sa vie, de nos vies.
Dans cet album, on comprend initialement l’envie du chanteur de s’échapper du quotidien, de se libérer de toutes les obligations, aussi minimes soient-elles, qui nous submergent et nous privent d’oxygène petit à petit. A travers Quand Je Marche, on ressent l’asphyxie imposée par la vie quotidienne et la sensation d’être partout à la fois en n’étant finalement nulle part. Alors, une solution simple pour quitter toute cette effervescence. Ben Mazué rêve d’un Divin Exil, une vie juste à quatre au paradis qu’est La Réunion. « On garde juste nous quatre et on voit si ça suffit ».
On imagine les premiers temps de la famille idylliques mais seulement voilà, la réalité les rattrape et on comprend avec le titre Nulle Part que tout cela n’a pas suffi et que l’histoire du couple touche à sa fin. Il s’agissait de l’exil du dernier espoir mais « Si on n’y arrive pas au paradis, on y arrivera nulle part ». Comme dans toute relation qui se termine, la culpabilité s’immisce dans l’esprit, on se demande ce qui aurait pu faire la différence, ce qui aurait modifié cette issue. On se dit qu’on a sacrifié certaines choses et certaines personnes pour cette histoire qui finalement se termine. On cherche à faire Gaffe aux autres, à se retrouver et à retrouver ceux qu’on avait laissé de côté.
L’album, à la douceur inouïe, nous offre une fenêtre s’ouvrant sur l’intimité de l’artiste. Il nous livre ainsi sa fragilité et cette nouvelle vie qui débute pour lui mais aussi pour ses fils. On le retrouve dans un quotidien modifié, rythmé par la garde partagée, qui influe sur l’éducation qu’il donne à ses enfants. Le nouveau challenge, c’est d’être heureux pour lui mais aussi pour ses fils. Ben Mazué se met complètement à nu tout au long du disque et nous invite dans son quotidien bouleversé au fil des Semaine A, Semaine B.
Si l’on sent bien toute la résilience du père de famille, on touche aussi à sa part de mélancolie à travers les cuivres de la plupart des morceaux qui nous transposent avec pudeur cette tristesse positive. On retrouve néanmoins majoritairement la douceur chaleureuse caractéristique du chanteur, sorte de clin d’œil qui nous montre qu’à travers cette épreuve, Ben Mazué nous laisse savoir qu’il va bien, malgré tout. Désormais, c’est à travers cette nouvelle routine qu’il se reconstruit.