Quelques mois à peine après la sortie de son 2e album Turbulence, Elliott Armen est déjà de retour avec Disturbance. Son nouvel EP nous plonge une fois encore dans la douce mélancolie iodée du folkeux breton. Il nous offre une réinterprétation live de plusieurs titres et des morceaux inédits. Sublime.
On ferme les yeux et on voyage instantanément. Sur les terres celtes où la nature sauvage se dresse en majesté, les paysages défilent entre terre et mer, immenses, indomptables. Le vent nous glace le visage mais nous fait nous sentir si vivant. On voyage aussi dans nos émotions. La mélancolie bien-sûr, mais aussi la peine, le deuil, l’amour, la joie. Voilà l’effet Elliott Armen.
Elliott Armen éprouve les éléments, s’imprègne et se nourrit de l’environnement qui l’entoure pour mieux en capter l’énergie et nous la faire ressentir au travers de ses compositions. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles il réussit si bien à nous embarquer dans son univers. La sensibilité y est exacerbée et la vulnérabilité courageuse.
Avec Disturbance, Elliott Armen propose un « projet à deux faces ». La première est une réinterprétation live de quatre titres de Turbulence. Pour l’occasion, le musicien est retourné lors d’une nouvelle session au Black Bay Studio sur l’île de Lewis en Ecosse.
Expérience et magie du live : la recette de la face A de Disturbance
« Je suis très fan des Tiny Desk par exemple (Mac Miller, Hobo Johnson, Amy Winehouse et tant d’autres … ). Un morceau voit le jour en studio et prend une forme finie parmi des milliards de possibilités. J’aime beaucoup ce côté unique et particulier. Mais lorsque l’on commence à jouer live, le titre en question commence à prendre une autre forme. Et cette adaptation, ainsi que son interprétation émotionnelle, évoluent au cours du temps, des répétitions, des concerts…«
Pour ces Lewis sessions, Elliott Armen a convié les mêmes musiciens qui ont travaillé avec lui sur Turbulence : Woo Ree HU (alias Yurie HU) aux cordes (violon et alto) et Liam Chapman à la batterie. Sans oublier Peter Fletcher, le fondateur/producteur et ingénieur du son du Black Bay Studio.
Les 4 compères ont retravaillé Red deer, Turbulence, Couldn’t catch your hand et Strangers. Et autant dire que la magie a opéré. Le résultat est envoûtant et plus chaleureux grâce notamment à la prépondérance des cordes colorées de trad irlandaise de Woo Ree HU, parfaitement habitées par les émotions des morceaux et du lieu. L’intimité des réinterprétations est renforcée par les quelques secondes de coulisses qu’on peut parfois entendre avant ou après les prises. Ces Lewis sessions viennent donner plus de force, d’intensité et de lumière aux quatre titres choisis.
Mention spéciale à l’élégance aérienne de Red deer, teintée de trad celtique aux accents jazzy. Et aussi à Turbulence. L’atmosphère inquiétante du vieil harmonium vient renforcer la noirceur du morceau, équilibré cependant par les envolées des cordes.
Une face B annonciatrice du prochain album d’Elliott Armen
Changement de décor et d’ambiance pour les quatre inédits dévoilés sur Disturbance. S’ils sont assez différents les uns des autres, notamment dans la manière dont ils ont été écrits / composés, ils conservent l’ADN folk intimiste et poétique qu’on connaît à Elliott Armen. On perçoit cependant une dimension un petit brin plus pop grâce notamment à la réverb et à des textures plus électroniques. Une évolution intéressante, d’autant qu’elle augure semble-t-il les sonorités du prochain album.
« Les inédits de cet EP ont été écrits pendant tout le processus de fin de production de mon dernier album Turbulence, après son enregistrement. J’avais déjà en tête quelques idées pour mon prochain LP, notamment de composer à partir du piano plus que la guitare qui jusqu’ici était mon instrument de prédilection. J’ai dans ces moments écrit Everything Ascend et Permanence. Ces deux titres sont un avant-goût, une sorte de teaser du prochain album qui portera des couleurs sonores communes à ces inédits. »
Permanence ou le piano sublimé
Le piano, parlons-en. Il est sublimé dans Permanence, magnifique et seul morceau instrumental de l’EP. Très subtilement accompagné par des cordes, Elliott Armen nous transporte dans la nuit étoilée, sous une aurore boréale. Ce morceau composé à base de variations autour d’une mélodie, nous fait penser à l’univers de pianistes tels que Philip Glass ou plus récemment Riopy. C’est doux, aérien, poétique et délicat, un peu comme une BO d’un animé de Miyazaki.
Ensuite, Everything ascend a été enregistré tout comme Permanence dans le home studio d’Elliott Armen, dans la campagne bretonne des bords de Rance. C’est un titre plus optimiste. Les turbulences sont passées et Elliott Armen semble prêt à s’ouvrir à la lumière.
Les deux autres morceaux sont un peu différents. What does it say ? a été composé à l’époque de Hélium, le premier album d’Elliott Armen, sans doute le plus folk de l’EP. « Faute d’espace sur le vinyle, on l’avait laissé de côté. Jusqu’ici je ne savais pas quoi en faire et quand est née l’idée de cet EP je me suis dit qu’il aurait parfaitement sa place ici, sur Disturbance, et j’ai alors entamé de le reproduire et de le remanier à partir des stems. »
Puiser l’inspiration partout où elle est
Enfin, Ghosts est né lors d’un road-trip en Ecosse, au bord du Loch Fyne. « Il m’est venu d’un coup j’étais inspiré et enveloppé par de magnifiques paysages. J’ai ensuite décidé de l’enregistrer et de le produire entièrement plus tard sur la route dans les montagnes des Brecon Beacons au Pays de Galles. Après tout ça c’était inévitable de l’intégrer à l’EP. »
En conclusion, Disturbance fait le pont entre les 2 premiers albums d’Elliott Armen et semble être un EP de transition vers un prochain projet qui pourrait faire la part belle aux instruments, notamment le piano, et à un univers moins dark, plus lumineux. On a déjà hâte d’être en 2025-2026 ! D’ici là, n’hésitez pas à aller voir Elliott Armen en concert. Bonne soirée garantie en compagnie d’un artiste humble, sensible et généreux (et en plus très sympa !).
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