Un petit plaisir caché. Relativement discret, EggS a pris la lumière en cette fin d’année 2022 avec A Glitter Year. Un premier album plein comme un oeuf d’une musique vivante, réjouissante et mélancolique, qui touchera toutes les personnes qui l’écouteront.
Ne parlons pas de références, ne parlons pas de l’histoire. Concentrons-nous sur ce qui vient s’offrir à nos oreilles : le tout premier album de EggS. Une épopée, une aventure, un petit bonbon pop explosif qui ne doit rien au hasard, rien à l’histoire, mais beaucoup au talent de ces sept héros à l’esprit bien plus punk que leur musique ne le laisse penser. Si on jouait tout de même au petit jeu de la comparaison, elle serait plutôt cinématographique : The Magnificent Seven.
Dès le titre, il y a beaucoup de l’ironie qu’on retrouvera ici et là dans cet album, celle qui gorge le chant à contre-temps de Margaux sur Local Hero, qui lance les hostilités de ce Glitter Year. Une année scintillante ? Vraiment ?! On y voit une blague, celle d’un gamin au sourire en coin qui cache, derrière son humour, sa tendresse et sa fragilité.
Heureusement pour nous, les deux autres qualités de Charles viennent rapidement nous exploser au visage. Dans sa voix tout d’abord, vacillante, jamais loin de la fausseté mais toujours vraie, apportant dans les morceaux une vraie tendresse, une vraie douceur aussi, trouvant ici et là un contrepoids parfait grâce à la grâce subtile de Margaux, que ce soit sur Local Hero justement, ou encore sur Crocodile Tears, ou l’excellente Still Life, dans laquelle leurs voix se mêlent à la perfection.
Dans l’écriture ensuite. Car si l’album libère une énergie joyeuse et un peu déglinguée, il ne cache jamais sa mélancolie dans le verbe. Une écriture proche par moments de la poésie, dans laquelle le leader de EggS glisse ses angoisses, ses doutes et sa colère. Le tout prend corps dans la superbe Turtle Island où, délaissé de tout apparat, c’est bien la tristesse et la noirceur qui prennent le pas. Un morceau qui montre aussi combien, malgré tout, la musique de EggS doit à la folk, dans sa manière simple de décrire l’existence, de s’intéresser à des petits détails pour mieux parler du grand tout.
C’est aussi dans ce morceau central de l’album qu’il fait une confession qui prend tout son sens : il est incapable de faire des choses tout seul. Cela tombe bien, il peut compter sur six excellents musiciens à ses côtés pour donner vie à une musique qui devient, au fil des écoutes, de plus en plus addictive. Parce que oui, la musique de EggS met définitivement des paillettes dans nos vies.
Et si, bien souvent, le tout ressemble à un joyeux bordel, on ne peut s’empêcher de déceler une puissance quasi-militaire dans le duo métronomique de la basse et de la batterie, porté par Rémi et Manolo, notamment sur Silence Kills ou Walking Down The Cemetery Road. C’est cette singularité, cette puissance presque cachée dans le chaos, qui permet aux autres instruments de se libérer et de se permettre tous les excès et digressions, laissant exploser les guitares, les solos de synthés et les voix, avec une mention spéciale au saxophone de Camille, surgissant toujours au bon moment pour nous emporter avec lui.
Vous l’aurez compris, A Glitter Year est un grand album de pop, qui trace sa route au delà de toutes références, par sa sincérité et son amour d’une musique jouée en groupe et qui porte le live dans son cœur. Et si, au-delà du passé, l’année scintillante évoquée était celle qui nous attendait ? Avec un album comme celui de EggS pour nous accompagner, on ne peut que l’espérer.