Encore peu installé dans la scène rap francophone, ElGrande Toto est le porte étendard d’une scène marocaine également en plein développement. Respecté par ses pairs européens, il propose un long projet avec une grosse tracklist et des invités de très haut niveau. Un voyage de l’autre côté de la Méditerranée à la découverte d’un rappeur bien dans son époque.
Caméléon, le nom n’a pas été choisi au hasard, la volonté avec ce projet est de montrer la large palette artistique qui constitue ElGrande Toto. Si sa voix ténébreuse permet de facilement l’identifier, il arrive à la faire naviguer sur différents types d’instrumentales. En plus d’être un caméléon musical, le rappeur marocain joue avec les langues. Même si le projet est essentiellement rappé en marocain, on le retrouve en train de pratiquer le français et même l’anglais. Une ouverture linguistique qui témoigne son envie de s’ouvrir sur le monde et de brisée les frontières qui le contiennent à un public majoritairement marocain. Une volonté qui se retrouve également dans le choix des invités puisque Lefa, Hamza et Damso sont des pointures de la scène rap francophone actuelle. Une connexion avec un de ses artistes ne peut que attirer le public à découvrir sa musique. En parallèle de ces connexions, il collabore également avec des artistes maghrébins montrant ainsi tout l’amour qu’il voue à son pays et à ses talents.
Au niveau musical, ElGrande Toto maitrise sur ce projet les différentes facettes de la trap comme le prouve les sonorités club de #OuDiriHakka. Mais loin d’être festif pour autant, le marocain se complait dans une noirceur prédominante qui vient servir l’ego-trip qui sort de sa plume. Ses écrits n’en apprenne pas beaucoup sur lui, il rappe surtout sa réussite et son statut de numéro un au Maroc. On peut quand même déceler certaines embuches qui ont pu se mettre sur son chemin, comme les trahisons qu’il a pu subir ou encore les gens qui ne croyaient pas en ce qu’il faisait, leur prouvant donc qu’ils avaient torts. Il peut aussi se montrer plus pensif et mélancolique comme sur Mghayer.
Malgré une noirceur ambiante qui balise ce projet, le rappeur a su y apporter quelques petites touches de soleil, notamment avec le morceau Santa Fe, venant confirmant la volonté du projet de montrer le côté Caméléon de l’artiste. Cette facette d’ElGrande Toto se retrouve bien dans ces connexions avec les artistes francophones, les artistes ont à chaque fois su trouver un terrain d’entente combinant leurs deux univers, donnant à chaque fois des connexions remplies d’alchimie. Et cela vaut aussi pour tous les autres featurings qui sont pertinemment bien choisis et exécutés.
Avec Caméléon, ElGrande Toto prouve toute son ouverture musicale sans non plus dénaturer son propos. Son envie de s’exporter se fait ressentir plus que jamais tout en étant contrebalancer par son amour pour son pays. Un équilibre qui balisera l’entièreté des quatorzes titres qui forment un tout cohérent et peuvent servir d’une belle porte d’entrée pour découvrir ce que propose la rapstar marocaine.