(EXCLU) Contrevents nous dévoile un premier EP saisissant

En exclusivité sur La Face B, le duo Contrevents dévoile son premier EP. 5 titres synthétiques et organiques, entre electronica et ambient. À travers des plages sonores riches et complexes, les musiciens dressent un état des lieux de notre planète. Pour celles et ceux qui aiment Hidden Orchestra, Boards of Canada ou bien Nils Frahm.

Crédit : Alex Le Mouroux

Chez l’écrivain Alain Damasio, les mots déploient des univers imaginaires, pourtant profondément ancrés dans notre réalité. Poésie et politique se mêlent, jusqu’à ne former qu’un. Jusqu’à finalement dévoiler l’essence du projet : la vitalité. Le duo, bien qu’en créant une musique instrumentale, se revendique finalement des écrits de l’auteur engagé, trouvant son nom grâce au célèbre roman La Horde du Contrevent.

Je me rappelle parfaitement la première et unique fois où je les ai vus en concert. C’était dans le cadre du festival Post in Paris à Petit Bain, en juin 2022. Accoudée au bar de La Cantine, j’essayais tant bien que mal d’apercevoir le groupe. La salle était bondée et j’étais loin. Alors je ne voyais rien. Et finalement, tant mieux. Je me suis concentrée sur le tumulte de la Seine que je visualisais depuis les hublots. Totalement embarquée par ce que j’entendais, entre drone et ambient. Je me rappelle leur avoir écrit ensuite : « c’était totalement fou, merci ». J’espérais déjà entendre à nouveau les morceaux. Aujourd’hui, je vous les dévoile.

Contrevents réunit Maxime Ingrand (Lost In Kiev) et Paul Void (Crève cœur, et anciennement Stamp et Al Quasar), tous deux ingénieurs du son à Radio France. Leur rencontre met en lumière une certaine passion pour les musiques synthétiques et analogiques. Cet EP, qui sortira le 16 février sur le label Sleepless Owl Records est le fruit de nombreuses heures de jams, issues d’un monde post-covid. Entre la recherche d’harmonie de Maxime et les inspirations noise de Paul. Entre le magnétophone et Ableton. Ce sont deux visions musicales qui se confrontent et se complètent autour de cinq titres aussi disruptifs qu’imaginatifs.

Magnetic Waves ouvre la boucle. Un morceau semblant venir d’un autre temps, d’un autre espace. Un futur fantasmé, un passé habité. Huit minutes hypnotiques et des vagues de loops. Une montée progressive, une descente planante. C’est la sensation d’être en terre inconnue qui domine, nous rapprochant un instant du dernier album de Fragments, AMASIA. Il y a quelque chose d’organique, lié aux synthétiseurs et au foisonnement de textures. Mais lorsque les couches se défont, délicatement, c’est vers l’abstraction pure que Contrevents nous amène. Vers des ondes nerveuses et denses. Qui nous propulsent directement vers les chœurs solennels de Dreamer’s Sleep. Batterie, synthétiseurs, piano, les idées s’emmêlent jusqu’à faire jaillir la pureté d’une musique déjà reconnue.

Et quand vient Eau-Forte, alors Contrevents nous emporte encore ailleurs. Une minute d’introduction où la guitare résonne. Simplement. Proche de Boards of Canada, c’est un titre très électronique, où les percussions donnent le ton. Je me plais à m’imaginer au fin fond des Steppes, dans un Transsibérien qui ne reviendrait jamais. Contemplatives, immersives et définitivement expérimentales, ce sont des minutes qui s’appréhendent et se vivent, entièrement.

Là où Entrer Dans La Douleur s’apprivoise peut-être plus facilement. C’est un morceau solaire en dépit de la thématique. En effet, le duo dessine ici un état des lieux de notre planète, sujet qui était déjà le cœur de Rupture, l’album de Lost In Kiev (interview ici).
Grâce à des samples de personnalités qui se sont emparées de la question, Contrevents rend le futur tangible, effrayant et paradoxalement rassurant. Sur les voix, jeunes et âgées qui se mélangent, se devinent des bruissements. Ceux de la forêt, de la vie animale et de tout ce que nous n’avons pas encore détruits et qui existent.
Entrer Dans La Douleur, finalement, répond au concert Entrer dans la couleur, porté par Yan Péchin et Alain Damasio. Deux duos qui expérimentent ; les voix, les sons et les couleurs. Pour en sortir plus forts et résolument vivants.

Enfin, Dislocation se prononce. Imaginées à l’origine pour Arche, projet solo de Maxime, les notes se diffusent, jusqu’à irradier. Des nappes brumeuses à un piano enveloppant, de la noirceur du clavier à la profondeur des percussions, Contrevents s’évertue, une dernière fois, à donner du sens aux sons. Un morceau résolument bienfaiteur, qui apaise les corps et régule les idées. Une puissance synthétique pour redonner vie.

Avec ce premier EP, Contrevents élabore ainsi un monde fragile et bruyant, empreint de sonorités audacieuses et affirmées. Nul doute qu’il deviendra le lieu de tous les possibles.

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