On ne va pas se mentir, le monde n’est pas dans le meilleur état actuellement. Un brouillard nous entoure et nous invite souvent à nous plonger dans des pensées sombres, proche par moment des Ténèbres. Mais parfois, il est nécessaire de partager ses Ténèbres, de manière à les transformer en quelque chose de productif d’où la lumière finit par percer. C’est ce que fait aujourd’hui Sinaïve en nous offrant, en exclusivité sur La Face B, Ténèbres prélude à leur Super 45.t prévu pour le 27 mai.
Souvent, si l’on aime le shoegaze, c’est parce que le genre musical nous envoie un mur du son où tout se mélange. La voix se noie dans les guitares, le sens parfois s’envole et l’effet de masse nous entraine dans une danse un peu sombre mais souvent totale. Du moins, c’est l’idée que l’on se fait du genre, quelque chose de parfois facile, qui joue sur l’esthétique avant tout.
Heureusement, ce n’est pas la règle pour tous. Si la musique de Sinaïve a toute les qualités d’un shoegaze de haute volée, le groupe fonde les strates de sa musique comme des éléments jouissant tous de la même importance. Ainsi, le fond et la forme se répondent et l’esthétique n’est jamais mise en avant sur le reste. En résulte un résultat explosif, bruyant dans le bon sens du terme, qui explose les codes et nous entraine dans les pensées pas très joyeuses d’un groupe qui a énormément de chose à dire; sur eux, sur nous et aussi sur l’époque.
La preuve avec Ténèbres, leur nouveau titre, labyrinthe de pensées et d’émotions qui nous happe dans une folie brute de moins de 3 minutes. De la première à la dernière seconde, on se retrouve embarquer par la mélodie, ces guitares saturées et rêveuses qui se claquent sur la batterie minimaliste et obsédante. Et puis les voix arrivent, et le besoin de sens fait peu à peu surface pour nous hanter longuement, comme un monstre sorti de nos propres ténèbres. Avec des mots simples et directs, le quatuor nous parle du temps qui passe, des souvenirs perdus, des rêvés écrasés par le poids du monde.
Des envies de succès, de gloire qui ont raison de notre sensibilité et qui dévorent et tuent notre âme. Si le tout est offert dans une ambiance faussement lumineuse, le morceau devient vite addictif car il nous force à nous confronter à nos propres problèmes et à nous demandé si nous sommes voués à laisser le temps faire de nous des êtres tristes et cruels.
La réponse sera forcément différente pour chacun, mais les membres de Sinaïve semble être eux aussi envahit par ces propres questionnements. La preuve avec la vidéo de Arnaud Delecrin qui représente une fête sans fin à laquelle ils participent comme des fantômes, regarder le monde autour d’eux tourner dans une douce insouciance qu’ils semblent tous avoir perdu.
Un morceau qui semble parfaitement coller à notre époque donc, et qui annonce l’arrivée d’un nouvel EP qu’on imagine jouer avec autant de facilité avec la lumière et les ténèbres. En tout cas, ce premier titre nous donne vraiment hâte de découvrir la suite.