Format Court #45 : Lydsten, Fyrs, Sofia Kourtesis

Chez La Face B, on adore les EPs. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EPs sortis récemment. Aujourd’hui, on vous parle des dernières sorties de Lydsten, Fyrs et Sofia Kourtesis.

.

.

Lydsten – Calcite

Parfois, un nom permet d’en dire beaucoup sur un artiste. Il est un choix qui l’habille et qui porte avec lui une signification intime et une histoire qui aura une importance plus ou moins importante pour la suite.

Lydsten est un mot venu du danois qui signifie littérallement « pierre sonore ». Il est pour l’artiste un hommage à ses origines nordiques. Par extension, peut être comme un défi, Lydsten a donc décidé de s’inspirer de roches pour créer sa musique et y insuffler une énergie qui puise dans l’imaginaire et le ressenti qu’elle provoque.

Et effectivement, la musique du nordiste puise dans cette métaphore rocheuse certains éléments, tel que le côté dur, un certains sentiment de pureté mais cette façon que peut avoir la roche d’être aussi friable que poreuse et qui rend la musique présentée sur Calcite aussi sensible à des éléments tel que l’air ou le feu. Les quatre morceaux s’articulent ainsi comme des êtres à l’identité propre , mouvant et sinueux. Le grand défi et la grande réussite de la musique que nous propose Lydsten est de laisser ses morceaux s’étirer sur la longueur, leur permettant ainsi de s’étirer au maximum et de vivre pleinement, plongeant par moment dans des nappes sombres pour mieux revenir l’instant d’après vers une vibration plus lumineuse et dansante. De ses synthés, Lydsten tire toute la force des émotions et s’amuse de son point de départ ludique pour nous offrir une musique variée et attractive.

Car c’est un vrai défi qu’il s’impose et qu’il nous impose aussi. Le plus amusant étant d’écouter la musique pour ce qu’elle est et d’ensuite aller faire des recherches sur les roches qui donnent leur noms aux morceaux pour ainsi prendre conscience de leur points communs évidents.

Ainsi Beryl nous offre une plongée dans une musique transparente et légère mais qui s’offre par instant des côtés plus dur et percutant.
Amber a pour elle ce côté plus lumineux, enlevé et dansant tandis que Calcite nous offre une ambiance plus tranchante et accidentée même si elle n’hésite jamais à accélérer le rythme pour nous embarquer dans une cavalcade à la fois onirique et vaporeuse.
Malachite, joue sur plusieurs couches qui se superposent, se séparent et se confrontent pour un final aérien au possible et tout en douceur. Une conclusion lumineuse et plus brève que ses prédécesseurs.

Avec Calcite, Lydsten ouvre son aventure avec un premier EP qui, si il prend place dans une culture électronique bien définie, s’offre un point de vue personnel et affirmé, rempli de charme et qui reste plaisant et varié à l’oreille. Une jolie petite réussite qui en appelle d’autres puisque la suite est déjà prévu. On peut donc s’attendre à découvrir de nouvelles roches sonores avec Lydsten.

FYRS – LOST HEALING

Fyrs, Lost Healing, Pocjette

Il y a des artistes qui arrivent de nulle part, avec une œuvre solide qui nous touche en plein cœur dès les premières secondes d’écoute. Tristan Gouret aka FYRS fait partie de cette branche. Avec Lost Healing sous le bras, l’artiste nous emmène dans un univers singulier abreuvé de poésie. Si cet EP est le fruit d’un petit séjour d’une année à Bristol, et d’un long travail d’introspection et d’écriture, cela se ressent. Au-delà d’être une œuvre marquante, Lost Healing est un opus très intime, une symphonie thérapeutique à l’atmosphère légère.

FYRS nous chante des chansons, et nous raconte des histoires. Des histoires personnelles, à l’image du premier titre éponyme de l’EP, ayant comme principal sujet le décès de sa grand-mère. Tristan nous parle ainsi d’étapes de la vie, de passages à l’âge adulte, avec ses joies et ses peurs, ses craintes et ses doutes. 


Mais le chanteur n’est pas là pour juste pour étaler un billet d’humeur et se plaindre naïvement des misères de la vie. C’est au travers d’une écriture fine et profonde, et d’une mise en scène subtile qu’il arrive à pointer du doigt des sentiments enfouis en chacun de nous. C’est une véritable palette d’émotions, illustrée sous quatre titres ayant chacun leur unicité.

Bien sûr, il ne s’agit pas que de mettre des mots sur les angoisses qui peuvent nous troubler. Ici, le musicien agit également comme une pommade sur les maux. Si on évoquait plus haut l’aspect thérapeutique de Lost Healing, le fil rouge de l’album ne peut que le confirmer. Si l’artiste évoque effectivement la violence du premier deuil, la perte d’un être cher, il déconstruit également tout ce qui vient après. La nostalgie, le chagrin, les regrets, mais pas que. The Swirl Of Love arrive telle une lueur d’espoir, rappelant que ce sentiment puissant qu’est l’amour peut briller de nouveau. On en profite pour vous conseiller le clip de ce dernier morceau, tout aussi touchant.

C’est ainsi un premier EP impactant et brillant que nous livre FYRS. Quatre titres très intimes, tout aussi innocents que matures. Et s’il s’agit avant tout du parcours mené par l’artiste, il saura certainement parler à la plupart d’entre vous tant il touche avec douceur à des parcelles de notre for intérieur.

Sofia Kourtesis – Fresia Magdalena

Sofia Kourtesis Fresia Magdalena, pochette

Le monde de la musique électronique avait été séduit par son premier EP Sarita Colonia sorti en 2020, c’est aujourd’hui avec Fresia Magdalena que Sofia Kourtesis, virtuose Péruvienne, nous livre un magnifique collage musical, rythmé par un positivisme débordant.

Ce qui est fascinant avec cet EP c’est la palette immense qu’est capable de déployer l’artiste pour nous offrir des morceaux aux ambiances et influences bien distinctes tout en gardant cette cohérence proche du mystique, avec au coeur du projet ce côté dansant. La danse comme pierre angulaire d’un projet où les machines viennent donner un écho somptueux au Pérou natal de l’artiste.

Juntos est un morceau captivant, presque sérieux qui vient perturber nos sens avec quelques touches de piano aigües et ces quelques cordes nous rappelant les contrées asiatiques, mais pas de doutes nous sommes bien au Pérou.
Le morceau star de cet EP c’est sans aucun doute By Your Side, impossible de rester assis à son écoute, c’est une énergie communicative presque impossible à contenir qui s’empare alors de nos corps.
Plus qu’un morceau dansant, le son a quelque chose de profondément positif, des cuivres qui surgissent comme un cri d’émancipation, ce morceau ruisselle de bonnes ondes et en devient addictif.
Que dire de La Perla d’une douceur palpable et dont la progression chaleureuse, enjouée et délicieusement envoutante ne nous laisse pas indifférents.
Dakota est lui un son bien plus techno, le type de morceau sur lesquels on ferme les yeux et on se laisse porter par une boucle enivrante jusqu’à l’extase.


Si l’EP se savoure aussi facilement c’est aussi parce qu’il contient cette part de vécu et la saveur d’un Pérou qui transporte.
Frésia ce n’est autre que le nom de sa mère, une femme forte et militante, pleinement investie dans l’entraide et le partage pour améliorer le quotidien de chacun dans son quartier et sa ville.
Magdalena justement est le nom du quartier de Lima dans lequel l’artiste a grandi, un hommage à cette terre qui l’a vu éclore et évoluer.
Cette « terre » c’est la matière première de cet EP, au travers d’enregistrements et de samples capturés au détour de sa ville Sofia Kourtesis construit tout un univers musical bardé de références et qui résonne d’autant plus dans nos oreilles sensibles et émotives.
La pochette de l’EP représente Sarita Colonia, celle qu’on appelle la patronne des pauvres et grande icone dans le pays pour ses engagements envers les plus démunis.
En clair cet EP est un hommage au militantisme, à la prise en compte d’autrui, le tout dans un doux mélange groovy qui ne demande qu’à être exprimé sur le dancefloor.