Chez La Face B, on adore les EP. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EP sortis récemment. Aujourd’hui, on s’intéresse aux EP de Appelez-moi François, PAMELA et Biboundé.
Appelez-moi François – Danse !

C’est un souvenir de prof. Pour finir l’heure de cours de formation musicale, on a l’habitude de faire écouter aux élèves de six ans un peu de musique récente. On commence par un titre qui s’appelle On ne choisit pas, issu du premier EP d’Appelez-moi François. Quelle n’est pas notre surprise de voir les élèves se mettre à gigoter, et répéter progressivement avec le chanteur « On ne choisit pas/ce que la vie nous donne« . Quelle n’est pas, de nouveau, notre surprise, lorsque la semaine suivante, les élèves réclament On ne choisit pas pour finir le cours, et lorsqu’ils continuent à le faire pendant les semaines qui suivent. Vous comprendrez alors pourquoi, par nostalgie peut-être, on attendait avec impatience le second EP du duo. Mais n’allez pas croire ici qu’il s’agit de musique pour enfants ; ça serait mésestimer le sous-texte parfois rieur, parfois plus sombre, qui point ici et là.
À l’intérieur des cinq titres de ce second EP, que Romain Lefrançois et Olivier LeGall ont réuni au premier pour former l’album Danse !, on retrouve les marqueurs esthétiques qui nous avaient réjouis il y a trois ans : boîtes à rythmes joyeusement désuètes, vieux coucous synthétiques, sous pulls à col roulé sur fond photo couleur pastel. Mais ce que l’on retrouve également, c’est ce qu’il y a d’ironique dans la démarche du groupe, beaucoup plus profonde qu’elle n’y paraît. Parce que les codes de la musique rétro s’associent à des textes qui interrogent la notion de progrès et de vitesse, comme sur le premier titre Je danse. Parce qu’ici et là apparaît l’ombre de la mélancolie, même sur Ukulélé où le bonheur ?, où l’instrument à quatre cordes n’est recommandé par nul autre que le psy. Le monde fluo et rétro d’Appelez-moi François fait du bien, mais il n’ignore pas la laideur quotidienne. Il est plutôt une manière d’appuyer sur pause : de dire à la vie qui vous emmène aléatoirement de certitudes en interrogations (Train de vie) que, pour la durée d’un EP, on préfère s’oublier dans un film des années 60. Danser comme un yéyé, se dire qu’on prend le temps.
Et puis, comme il y a trois ans, il y a un morceau parmi les cinq dont le ton se distingue. On se souvient d’Aurore, sur le premier EP, qui nous avait arraché quelques frissons. Où la démarche se voulait peut-être moins légère. Ici, une écriture plus hybride sur Après, où le sous-texte critique remonte davantage « tout ça c’est normal/on arrête pas le progrès/croissance animale/le reste on verra après« . Où l’on s’interroge sur ce qu’il y a d’enviable dans notre modernité urbaine et technologique. Comme il y a trois ans, on est séduit. Et on souscrit à la démarche : replonger dans le passé pastel pour interroger le présent anthracite. Pour y échapper, brièvement. Ukulélé où le bonheur ? Ma foi, de cela, on n’est jamais vraiment certain. Ce que l’on sait pour le moment, c’est qu’on veut bien l’appeler François.
PAMELA – Live.Shift.Dream

Live. Shift. Dream. sonne comme une injonction à laquelle il est difficile de dire non. Le duo PAMELA est notre véritable claque musicale de l’année 2024 dont la marque est encore bien présente en 2025. On danse, on bouge, on saute, on fait les montagnes russes du bonheur à l’état brut. S’ils voulaient avant tout se faire du bien en premier lieu, ils parviennent à créer une musique qui fédère. Depuis notre première rencontre au MaMa 2024, on ne les lâche plus !
Ce premier EP Live. Shift. Dream est rempli de hits. L’objet sonore lève le voile sur 6 pépites toutes très symboliques de ce que PAMELA veut faire entendre : un son instinctif, frais qui oscille entre un rock electro et une dance music aux refrains qu’on se surprendrait à scander comme dans une rencontre sportive – on pense ici à l’impeccable G.R.E.A.T -. Le charismatique british boy Sam Sprent nous embarque, quand il est sur scène c’est encore plus dingue. IDNTKWYT clin d’œil à leur grande copine Zaho de Sagazan prend des textures vocales empruntés à David Bowie et aux sonorités des années 1980s que l’on aime beaucoup par ici. Premier single sorti, Focused donnait largement le ton en puisant son inspiration autant du côté du collectif américain LCD Soundystem que des Talking Heads. Beaucoup plus rock, Put out the fire qui clôt l’EP surfe sur une rythmique qui pourrait rappeler la petite dinguerie Elephant des Tame Impala, psychédélisme mis de côté, PAMELA nous parle crise climatique dans un son fiévreux qui gagne en puissance en concert. On n’en oublie pas Full Sentimental sans temps mort et Lovers potion plus tendre, non moins rythmée.
Une Maroquinerie complète plus tard, nous les attendons de pieds fermes pour la suite, à commencer par le Trianon, le 6 novembre prochain !
Biboundé – Vie Vibrée

Laissez tomber les étiquettes, ouvrez grand les oreilles : Biboundé n’est pas un groupe qui se laisse enfermer dans un genre. Avec leur premier EP Vie Vibrée, nous plongeons dans une expérience, un voyage sonore où les rythmes organiques et les mélodies envoûtantes s’entrelacent pour mieux nous happer.
Derrière ce projet, nous retrouvons le producteur Antoine Besuelle et le chanteur-compositeur et guitariste Jérémie Nies. Suite à une séparation, Jérémie a trouvé dans cette alliance l’opportunité d’exprimer ses doutes et réflexions à travers des textes simples et bruts, célébrant la beauté de la vie malgré les épreuves.
Dès les premières notes de l’EP, Biboundé enveloppe l’auditeur dans une atmosphère à la fois hypnotique et mouvante. Chaque titre semble raconter une histoire, tantôt introspective, tantôt festive. Le groupe joue sur les contrastes, alternant moments d’apaisement et crescendos dynamiques.
Les influences sont palpables, mais jamais écrasantes : Biboundé puise dans une diversité d’inspirations, allant de Frank Ocean, Air en passant par Massive Attack ou Radiohead. Mais tout ça est digéré avec une spontanéité et une énergie propres au groupe. Ici, pas de formatage, pas de concessions : juste l’envie d’explorer, de chercher et de laisser parler les sentiments.
Sorti le 28 mars 2025 sous le label Toujours, l’EP est accompagné du magnifique travail graphique du réalisateur Alden Volney, qui a su traduire en images ce tableau vivant d’émotions et de complexités que nous connaissons tous.
Avec Vie Vibrée, Biboundé signe un ep dense, inventif et profondément vivant. C’est une invitation à la transe et à la contemplation, une œuvre qui s’écoute et se réécoute, tant elle regorge de détails et de subtilités.
Une belle réussite, à découvrir absolument.